de L'autre facteur le Mar 2 Sep 2008 20:02
Pour commencer, je vais situer d'où je parle pour éclaircir ce que je vais dire. J'ai adhéré à la FA à l'age de 20 ans en tant que liaison Montpellier après plusieurs échecs pour monter un groupe anarchistes non-fédérés. J'y est milité activement pendant 12 ans, contribuant à développer la FA dans une région où elle était peu développée. Avant la crise ouverte qu'à connue la FA entre 2000 et 2002 il y a eu jusqu'à 26 militant-e-s FA sur la ville de Montpellier avec 2 groupes fédérés. J'ai quitté officiellement la FA le 1er septembre 2002. Depuis je milite à la CGA. Compte tenu que depuis 2002, pas mal de conneries ont été dites ou écrites sur les raisons du départ d'une cinquantaine de personnes, et la création de la CGA, je vais en donner la version de quelqu'un qui a été complètement impliqué dans le processus.
Sur la genèse, je partage certains éléments qu'a abordé Qierrot. Si on ne connaît pas l'histoire de la FA, il y a des choses qui échappent à la compréhension. Je conseille d'ailleurs deux bouquins sur le sujets pour éviter de faire trop long : Maurice Joyeux -Sous les plis du drapeaux noir et Roland Biard -Histoire de l'anarchisme en France 1945-1975. Pour résumé, à la sortie de l'occupation, la FA se crée et regroupe toutes les sensibilités de l'anarchisme. La cohabitation est difficile. Entre 1945 à 1953, des militants qui se revendiquent du communisme libertaire, mais teinté de marxisme, montent autour de Fontenis une organisation clandestine « Pensée-Bataille » dont le but est le contrôle de la FA. Il vont exclure les individualistes, puis une partie des anarcho-syndicalistes et des communistes libertaires avec lesquels ils sont en désaccord..En 1953 ils changent le nom de l'orga en FCL. Les exclus fondent la nouvelle FA, mais on perdu leur journal, le libertaire, titre le plus vieux de la presse libertaire fondé par Louise Michel et Sébastien Faure. La nouvelle FA regroupe toutes les sensibilités libertaires avec comme socle commun le traumatisme de l'OPB.
Du coup, l'architecture que prend la FA est une architecture défensive, pour que cela n'arrive plus. Unanimité pour les prises de décisions, totale autonomie des groupes, outils (journal, librairie...) contrôlés par des camarades anciens et sûr (avec renouvellement par cooptation). Cette architecture est fondamentale. Elle est à la source de nombre des scissions de la FA depuis 1953.
En effet une telle architecture n'est pas adapté à un regroupement politique qui doit intervenir dans les réalités politiques et sociales du moment pour atteindre la révolution sociale. L'unanimité à pour conséquence qu'au niveau national, seule les choses qui fond consensus peuvent être mise en route. C'est ce qui explique la création au fil du temps d'une culture militante qui est très centrée sur l'affirmation de l'identité et de la culture anarchiste. En effet, les campagnes adoptable facilement par un congrès national, étant le plus souvent (j'exagère un peu, mais c'est l'idée) sur les fondamentaux (antimilitarisme, anti-religion, prison-enfermement-répression antiétatisme etc...). La question des stratégies d'interventions dans les mouvement sociaux étant bien plus difficile, puisque par définition ont y retrouve des complexités, des contradictions, des décalage avec notre projet de société. Du coup il y a souvent plusieurs options, et il est très difficile sur ces questions de dégager une analyse et une méthode commune avec l'unanimité comme moyen de décider au niveau fédéral. Du coup face à des événements historiques qui ne vont pas complètement dans le sens anarchiste, où qui ne sontt pas porté par le mouvement anarchiste, la FA manque d'outils et passe à coté (1968 par exemple). Ce qui fait qu'il est quand même possible de militer à la FA, malgré cela, et j'y ai milité longtemps, c'est que les groupes sont totalement autonome. Du coup, même s'il n'y a pas de stratégie commune, chaque groupe, voir chaque militant peux quand même développer celle qui lui paraît juste, et peux aussi le faire avec plusieurs groupes. Mais le problème est la dispersion, le localisme et le consumérisme vis à vis de l'orga, le manque de lisibilité et la faiblesse de l'impact du travail militant ; et au final l'impuissance.
Bon, j'ai quand même fait un peu long là dessus. Sur la genèse de la crise, j'ajouterais plusieurs éléments. D'abord un fait de la sociologie de la FA qui me paraît majeur. Dans les années 90 avec la transformation du centre de Paris en zone de bureaux et de commerce, beaucoup de militant-e-s sont partis en province. C'est pas vrai que pour la FA. C'est important, parce qu'avant la moitié des effectifs de la FA était en Région Parisienne. Cela faisait un contre-poids à la force d'inertie fédérale dû à l'unanimité. En effet l'AG de la Région parisienne faisait office de lieu de décision pour gérer l'actualité politique pour l'orga. Dans les années 90, ont passe à 2/3 des militants en province avec des groupes assez bien implantés politiquement dans leurs villes. Du coup les besoins politiques de ces groupes deviennent plus importants, et les attentes vis à vis de l'outil fédéral aussi. D'autant que comme le dis qierrot l'implication des militant-e-s dans les mouvements sociaux se fait plus importante. Le fonctionnement de l'outil FA n'est clairement plus adapté à l'attente d'une partie non négligeable des groupes. Tout au long des années 90 il y a débat sur le fonctionnement. Les unions régionales et leur existence statutaire dans l'orga au début des années 90. Refusé. Demande de congrès extraordinaire pour refonder les fonctionnement de la FA en 1996. Refusé. Toujours l'unanimité. Puis la mise en place d'espaces intermédiaires entre deux congrès. Rencontres fédérales non décisionnelle, non officielles dans un premiers temps pour débattre entre les groupes de sujets d'actualités. Puis débat sur leur officialisation. Et là, c'est un des noeuds. Il était question d'avoir des réunion tout les trois mois qui soit décisionnaire. Ca a été une foire s'empoigne au congrès de Lorient en 1999, au sens propre comme figuré. Et le congrès à accouché d'une souris. C'est réunion trimestrielles ont été adoptés, mais n'avait un pouvoir de décision que sur les campagnes. Et encore. Je dis et encore parce que si le mandaté au RE ne voulait pas d'une campagne soit mené, rien ne l'obligeait vraiment. Donc, pas assez suite à dix ans de débats, d'autant qu'aucun moyens financier à l'époque n'a été validé pour que les militant-e-s de la FA puisse s'y rendre.
Autant dire que les difficultés pour avancer, faute d'outils organisationnels, ont produit à la FA, une culture assez particulière du mandat. En effet, il y est difficile d'y prendre des décisions quand elles ne fond pas l'unanimité. Il existe un comité de relation mensuel qui réunit tout les mandatés et auquel les groupes peuvent assister (à leurs frais). Pour que ça ne soit pas un bureau politique, il n'y a pas de décisions prises dans ces réunions mais des échanges, le mandaté étant seul responsable de son mandat devant l'orga, lors du congrès. Entre temps pas de possibilité de révocation.
Dans les faits, face aux manques d'outils interne pour prendre des décisions, les mandatés font des choses, sinon, rien n'avance. Là est la perversité. Il faut des super mandatés pour prendre des initiatives que l'orga n'a pas les moyens de décider, faute d'espace pour. Du coup, c'est la politique du fait accompli qui est la règle, et cette règle est légitimé par un réflexe militant fort en milieu libertaire, celui de « c'est celui qui fait qui est légitime », plus d'ailleurs que celui qui décide.
Donc, pour en venir au conflit de la période 2000/2002. Le point de départ factuel, c'est un problème vis à vis d'une exclusion d'un militant faite par le secrétaire aux relations intérieures après plusieurs débats en réunion mensuelle de mandatés. En l'occurrence il s'agissait d'un militant Belge qui avait écrit dans le Bulletin intérieur des propos injurieux et sexistes vis à vis d'une autre militante Belge et de son compagnon. Le militant sexiste, qui avait refusé de revenir sur ses propos était soutenu par un autre mandaté. Son groupe juste avant le congrès à produit un texte ordurier vis à vis du secrétaire aux relations intérieures, dont le titre était « Faut-il tuer Djerzinski». Responsable stalinien de la Tchéka, pour celles et ceux qui ne connaissent pas. Autant dire que le congrès à été assez pourri. C'était en 2000 a Perpignan. La dessus, il y avait des débats politiques avec des désaccords aux seins de la FA, ce qui est normal. Mais il y a eu des coup de force, sous la forme de la politique du fait accompli. Je m'en souvient d'un, mais il y en avait d'autre. C'était sur le féminisme et la stratégie à avoir. A cette époque, la FA était membre de la CADAC. Cette adhésion à ce cartel d'orga était contesté par de nombreux groupes, dans la mesure où la cadac avait servit de marche pied au PS (on était sous l'ère Jospin) notamment autour des débats sur la parité. Le renouvellement de l'adhésion de la FA à la Cadac a été rejeté. Il se trouve que ce congrès a mandaté deux des responsable du texte injurieux dont je parle plus haut, avec quelques abstentions moyennement amicale (c'est le terme utilisé à la FA). Trois mois plus tard la personne mandaté renouvelait l'adhésion à la CADAC. Mon groupe est intervenu. On s'est fait moitié insulté en réunion, personne n'a réagit. Et dans la période, ce n'a pas été le seul fait de la politique du fait accompli. Le cas de la brochure sur l'unité a été fait dans des circonstances similaires. Et si je cherche dans mes archives, j'en trouverais d'autres.
Dans cette période, il y a une ligne de fracture qui commence à se faire clairement. Toulouse et Perpignan ont adopté une ligne dure de dénonciation de ces pratiques. A mon sens, il ne s'agit pas de baronie, mais d'une réalité de la FA. Faute d'outils permettant des prises de décisions facilement et un réel contrôle des mandatés, il y a du pouvoir informel non dit. En cas, de conflit, faute d'espace pour les résoudre par des positions politiques non ambiguës, il y une lutte de pouvoir (où d'influence) qui se mène. Mais pour mener une lutte de pouvoir, il faut être au moins deux. Donc, c'est une vision tronqué, largement en cour à la FA, de charger la responsabilité sur les groupes de Perpignan et Toulouse.
D'autant que dans cette période d'autres groupes montait aussi au créneaux sur les mêmes problèmes. Certes de façon moins cru, mais de souvenir, il y avait au moins Montpellier, Nantes, Lille, Bordeaux, et des Belges.
Dans cette période, jusqu'au congrès suivant, pour de nombreux groupe, c'était une bagarre sur les pratiques, et dans mon groupe, je me souviens que c'était la question de l'éthique qui dominait. Ensuite, le congrès de 2001 à Besançon a été une catastrophe. Sans rentrer dans les péripéties, le résultats du congrès à été de partie sans la moitié des mandatés. Ce qui est particulièrement grave à la FA puisque comme je l'ai dit il sont le coeur de la dynamique de l'orga.
Suite à ça, il y a eu une réunion de crise, où Perpignan et Toulouse ne devait pas être invité. On continuait dans la crise. Je fais bref là dessus, mais je pourrait y revenir si nécessaire.
Résultat des courses, la FA tombe à Montpellier de 26 adhérents à 13 entre le congrès 2001 et 2002. Une évolution d'importance s'est faite par contre, c'est une analyse nouvelle de la situation. Déjà favorable à envisager de modifier le système de vote dans la FA, le groupe de Montpellier considère que l'essentiel des problèmes vient des fonctionnements de la FA. Tant ceux des comportements, que de l'éthique, des mandatements. L'analyse se développe aussi sur une incapacité de la FA a se développer et à développer l'anarchisme social tant qu'elle conservera l'unanimité.
Du coup, un débat étant programmé sur les fonctionnements en juin 2002 au congrès, les quelques camarades qui n'ont pas encore fait leur deuil de penser que la FA peut abandonner l'unanimité vont au congrès pour faire avancer notre position et être sûr d'avoir tout tenté. Ce fut un échec évidement. Du coté de l'union régionale sud-ouest la goutte d'eau a été l'appel à voté Chirac du groupe d'Oléron et le refus du congrès 2002 de désavouer publiquement cette position. Déjà marginalisé, il ne restait plus grand chose d'autre à faire que de partir. Pour Montpellier ce n'était pas l'élément fondateur, mais un truc de plus.
Pour Montpellier, c'était acté pour tous en juin 2002 (une partie d'entre nous plus tôt) que nous n'attendions plus rien de la FA. Nous avions la volonté de préserver notre outil militant qui a une implantation politique pour l'anarchisme sur la ville. Il ne nous restait que 4 options.
Devenir un groupe local. Mais, on était conscient des reculs politiques que ça produirait. Rester consommateur de matériels FA (tellement de groupe le font), mais on pensait que ça finirait par vider notre militantisme de son sens..Rejoindre une autre orga. Mais pour plein de raison, l'offre ne nous satisfaisait pas. Restait créer autre chose. Le fait que Perpignan et Toulouse annonce au congrès de 2002 leur départ de la FA, créait cette possibilité. C'est le choix que nous avons fait. Il a été décidé en juillet lors d'une rencontre entre les groupes et nous avons démissionné au 1er septembre.
Enfin, au moins pour Montpellier, il était clair dés ce moment là qu'il n'y aurait pas de retour à la FA. De plus nous analysions que la crise ne se finirait pas avec nos départs, puisqu'il ne réglait pas les problèmes. Nous pensions qu'il y aurait d'autres acteurs de la même crise. Et deux ans plus tard 60 personnes sont parties à leurs tour (Lyon, Lille, Nantes, Bordeaux). Et je pense que si dans la FA émerge des groupes bien implantés avec des besoins organisationnels ça recommencera.
Et je ne sais plus sur quel fil, Berkman développe le fait que la différence FA CGA n'ai pas que sur le vote interne. Il mettra sûrement un lien ce qui me permet d'arrêter là enfin.