Un nouvel Appel à la solidarité internationale ouvrière vient de nous parvenir de l’organisation haïtienne Batay Ouvriye : Etat des besoins et nouveaux contacts.
BATAY OUVRIYE
APPEL À LA SOLIDARITÉ SUITE AU TREMBLEMENT DE TERRE
DU 12 JANVIER 2010 À PORT-AU-PRINCE
Le tremblement de terre du 12 janvier 2010 à Port-au-Prince, Haïti, nous a lourdement frappé au niveau des masses populaires.
En effet, aux côtés des bâtiments publics effondrés en grand nombre, ce sont nos quartiers populaires qui ont été les plus détruits. Ceci n’est pas surprenant, ce sont les plus fragiles, les plus instables : c’est là que l’Etat n’a jamais su répartir les services minima, allez voir chercher à consolider nos maisons, allez voir s’en occuper sérieusement. Au contraire, nous avons toujours été menacé d’expulsion, de « déplacement », de sorte que nous-mêmes n’avons jamais su non plus, encore moins pu nous concentrer sur l’amélioration de notre propre habitat.
Pendant que certains capitalistes cherchent à forcer les ouvriers à retourner travailler dans des usines fissurées ; pendant que les propriétaires des grands magasins se refusent à distribuer gratuitement leurs marchandises et exigent même que leurs prix augmentent ; pendant que tout le monde peut constater l’absence flagrante et honteuse de l’État, son incapacité, son incompétence (lui qui, certainement, ne sait que voler, « magouyer », en ne défendant que les grands propriétaires fonciers, les bourgeois et autres multinationales) ; pendant que la police nationale, soi-disant là pour « protéger et servir », brille également par son absence devant la catastrophe d’une part, et, d’autre part, face aux gangs qui sévissent (certainement, elle ne sait que réprimer le peuple) ; pendant que les forces impérialistes profitent de l’aide qu’ils administrent pour, de manière éhontée, approfondir leur domination et transformer les relations en une véritable tutelle sans partage… les ouvriers, travailleurs de tous genres, masses populaires en général subissent cette situation catastrophique où elles se retrouvent les bras cassés.
Une certaine presse a favorisé le développement d’aspects franchement progressistes, permettant un minimum de coordination à partir du terrain même, des comités populaires conséquents travaillent sans relâche à porter aide et secours. Seulement, partout, les moyens font énormément défaut. En vérité, en plus de nous avoir frappé violemment, le tremblement de terre nous laisse sans recours autonome et nous dépasse complètement.
À Batay Ouvriye, même si la plupart de nos cadres et membres ont pu sauver leur vie, plusieurs d’entre nous ont perdu des membres de leur famille, leur maison, leurs rares biens… plusieurs sont blessés, estropiés et, en plus d’avoir à enterrer nos morts, la survie nous devient de plus en plus difficile.
Dans la mesure du possible, nous essayons d’éviter de passer par les circuits officiels dominants mais il est tout aussi vrai que la situation devient intenable ! C’est ce qui nous amène aujourd’hui à lancer cet APPEL À LA SOLIDARITÉ en direction de tous les ouvriers, travailleurs et progressistes conséquents du monde entier pour tâcher de nous aider à sortir de cette terrible passe.
Selon un inventaire provisoire rapidement réalisé, nos besoins les plus immédiats sont les suivant et s’élèvent à :
Maisons à réparer US $ 50,000.00
Pertes de biens 20,000.00
Soins aux blessés et aux estropiés 10,000.00
Survie immédiate 30,000.00
S’occuper des morts 10,000.00
Total provisoire US $ 120,000.00
A cela, il nous faut ajouter 40% d’inflation, étant donné que les prix ne cessent d’augmenter et que nous ne savons pas où cela nous mènera. Pour un TOTAL plus certain, d’alors : US $ 170,000
Maintenant, divers contacts que nous avons commencé à développer suite à la dernière grande mobilisation autour du salaire minimum sont eux aussi dans des conditions similaires. Nous devons les aider également. Ceci demande une somme additionnelle. D’un autre côté, dans les zones où vivent nos principaux militants, des mouvements de solidarité populaire ont été mis sur pied. Nous devons les intégrer résolument, tout en y apportant l’orientation que nous pensons nécessaire en ce moment. Immédiatement également, dans le cadre de la reconstruction que les classes dominantes commencent déjà à planifier, nous devons prendre l’initiative organisée de mettre sur pied nos propres orientations afin de faire face à la prochaine catastrophe qu’elles nous préparent. Ceci également exigera des dépenses.
En tout et pour tout, nos calculs s’élèvent alors à un GRAND TOTAL de US $ 300,000 C’est ce qui permettra à nos membres de survivre, d’aider nos divers contacts de tout genre et, enfin, de commencer déjà à construire et propager une orientation politique ample, forte et collective, aujourd’hui dedans la lutte de survie même mais déjà apte à prévoir et faire face de manière structurée à l’autre genre de catastrophe qui nous attend : la future domination impérialiste qui, conjointement avec les classes dominantes locales et leur Etat réactionnaire, prend déjà des formes extrêmes.
Nous remercions à l’avance tous ceux qui comptent contribuer. Le moment d’une telle débâcle demande non seulement une SOLIDARITE renforcée mais encore un rapprochement conscient, initial ou en approfondissement, pour une lutte commune internationale.
Pour ceux qui comptent nous faire parvenir de la nourriture, de l’eau ou encore des vêtements, des médicaments, des petits mobiliers… l’adresse de notre local principal à Port-au-Prince est :
Batay Ouvriye, Delmas 16, # 13 bis.
Pour ceux qui comptent envoyer du cash, notre compte bancaire est le :
Bank Name : City National Bank of New Jersey
Bank Address : 900 Broad Street, Newark, NJ 07102
ABA Number : 0212-0163-9 City of NJ Newark
For further credit to :
Account Number : 01 000 9845
Account Name : Batay Ouvriye
Account Address : FONKOZE, Ave. Jean Paul II, # 7, Port-au-Prince, HAITI
Naturellement, nous rendrons public toutes les sommes reçues et nous informerons de nos activités au fur et à mesure de leur déroulement.
BATAY OUVRIYE
Port-au-Prince, ce 20 janvier 2010
Une initiative libertaire lyonnaise
L’Organisation Communiste Libertaire-Lyon appelle à la création d’un collectif « Solidarité avec le Peuple Haïtien » (SPH) ayant pour but de mener des actions concrètes de solidarité. Nous nous adressons en priorité aux groupes et aux individu(e)s parties prenantes des mouvements libertaire et alternatif, mais aussi à toutes celles et ceux qui se reconnaissent dans la démarche décrite ci-dessous.
Nous pensons que le temps presse, aussi pour ne pas trop attendre nous proposons une réunion le
mercredi 27 janvier 2010 à 19 h à la librairie la Gryffe (5 rue Sébastien Gryffe, 7ème)
Haïti : une catastrophe pas naturelle !
Si le séisme est un phénomène naturel, le désastre qui l’a suivi ne l’est pas.
Il y a des causes sociales, économiques et politiques à l’effondrement des maisons et des bâtiments : l’effondrement de l’économie haïtienne consécutive à des décennies de dépendance, de dictatures sanglantes soutenues par les grandes puissances, de mesures du FMI qui ont accéléré la destruction de l’agriculture et la bidonvillisation des principales villes, à commencer par sa capitale Port-au-Prince aujourd’hui pratiquement rasée.
L’aide qui va arriver se fera dans un cadre capitaliste. Des « opportunités » de business, d’enrichissement, de profits vont pulluler, seront saisies par tous les requins disponibles (en matière de BTP, en France, on connaît, mais la rapacité capitaliste est sans frontière) et laisseront le pays et ses habitants dans une situation aussi exsangue que maintenant.
Sans rejeter les ONG globalement, le minimum est d’avoir un regard critique sur la manière dont les fonds et les aides sont et seront distribuées. Avec aussi cette idée que la critique n’est jamais plus efficace que quand elle se transforme en action et fait de ceux qui la portent les protagonistes de la solidarité.
Alors que les médias d’Amérique du Nord et d’Europe (ceux des pays « développés ») mettent en scène les corps souffrants des Haïtiens, les destructions des bâtiments officiels (ONU, ambassades, palais présidentiel, grands hôtels pour occidentaux…) et insistent bien sur l’action humanitaire de ces mêmes pays « développés » et de leurs chefs d’Etat (Sarkozy, Obama…), il semble tout à fait justifié et logique que des gestes et des propositions de solidarité se fassent jour de manière indépendante, pour allier l’efficacité d’une aide directe à ceux qui en ont besoin et la dénonciation de l’hypocrisie des grandes puissances de la planète au sujet d’Haïti.
Il nous semble même décisif que des démarches multiples, organisée par des gens eux-mêmes, par des mouvements de base, par des structures syndicales, associatives, groupes politiques locaux ou par des regroupements créés pour l’occasion, essaient de donner un caractère politique et social à une aide directe. Aide de personnes à personnes, de mouvements à mouvements, dans le cadre de mobilisations collectives de sensibilisation (organiser des évènements – fêtes, concerts, collectes et prises de paroles,… – pour recueillir des fonds, par exemple), d’une solidarité internationaliste, en envoyant des fonds (et toutes autres choses utiles) à des collectifs, à des mouvements, à des organisations haïtiennes se battant depuis des années pour la défense des intérêts de la classe ouvrière et de la paysannerie, pour l’émancipation sociale et politique.
Ces mouvements, déjà en grandes difficultés avant la catastrophe, sont à aider dans leurs tâches de reconstruction en même temps que doit se reconstruire les projets et les possibilités d’un Haïti différent, solidaire, où les Haïtiens pourront, enfin, reprendre leur destin en mains et décider eux-mêmes du type de société qu’ils souhaitent construire.
Dans ce cadre général, beaucoup de forces, organisées ou non, peuvent confluer, s’additionner, acquérir rapidement une visibilité, une utilité et une efficacité.
Le Zigue a écrit:(oops, il faut dire tsunami de nos jours, c'est plus tendance).
Le Zigue a écrit:Et quand je vois les américains débarquer en force, je ne suis plus du tout motivé pour donner quoi que ce soit... pauvres haïtiens
disait Stéphane Sisco membre du Conseil d’administration de Médecins du Monde.La coopération s’opère à tous les niveaux sous la conduite du Pentagone, seul capable d’assurer le rôle de leader (...) le contrôle est laissé au militaire, subordonnant l’acteur civil et humanitaire
bblon a écrit:Et il vaut donc mieux les laisser crever ???
Lyon : Appel du collectif « Solidarité avec le Peuple Haïtien »
Le tremblement de terre du 12 janvier 2010 a plongé le peuple haïtien dans une situation de désastre, à laquelle répondent des élans de solidarité dans le monde. Un séisme est bien un phénomène naturel, mais l'ampleur de la catastrophe qui s’en est suivie n’est pas accidentelle : elle prend son origine dans des rapports d’oppression et d’exploitation capitaliste. Les moyens existent pour limiter les effets des catastrophes naturelles : par exemple, les constructions anti-sismiques au Japon et en Californie. La vulnérabilité aux crises n’est donc pas inéluctable ou prédisposée par une « malédiction », elle relève de l’inégalité entre les classes et les nations prises dans le système de l’impérialisme. Ce sont maintenant les classes populaires qui subissent le plus durement les conséquences du séisme, comme elles ont subit la hausse brutale des prix agricoles au printemps 2008. Elles se sont alors révoltées : ce furent par exemple les émeutes de la faim. Ce sont les classes populaires, pas les soldats ni les humanitaires, qui ont assuré la solidarité immédiate après le séisme.
La Révolution haïtienne de 1804 marque la victoire du premier mouvement anticolonial et antiesclavagiste, la victoire d’une émancipation menée par d’anciens esclaves noirs contre l’Etat colonial français. La France fera payer cher à ces « nègres », qui pour la première fois brisaient les chaînes de l'esclavagisme, en leur imposant 70 ans de « réparations », en réalité une rançon : c'est le début de la dette d'Haïti. La mise sous tutelle directe du pays par les Etats-Unis commence par la longue période d’occupation militaire, de 1915 à 1934. Intervenue en 1994 pour remettre en place Jean-Bertrand Aristide et en 2004 pour le chasser, en accord avec la France, l’armée américaine se saisit aujourd’hui de l’opportunité du séisme pour prendre le contrôle des ports et du trafic aérien et protéger les grandes propriétés. Les grandes puissances ne sont nullement guidées par le désintéressement et la motivation humanitaire, elles se positionnent pour saisir les « opportunités » de profits que fournira la reconstruction du pays. Quant à l’aide octroyée par la France et les Etats-Unis, elle représente le cinquième de ce que coûte quotidiennement l’occupation militaire de l’Irak et de l’Afghanistan.
L’action et l’aide matérielle des ONG se feront aussi dans le cadre du capitalisme, responsable des conditions de vie inhumaines imposées aux masses haïtiennes. Avec les directives du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale, les classes dominantes ont sacrifié l’agriculture paysanne au bénéfice d’importations subventionnées par les pays riches. Le riz américain (80% du riz consommé) a éliminé la moitié des petits propriétaires et a accéléré l'exode rural et l'extension des bidonvilles. Contraints de quitter les campagnes, 80% des haïtiens sont au chômage, et ceux qui trouvent un emploi sont soumis au despotisme d’usine pour un salaire de famine. Nous refusons que les actes de solidarité soient maintenant employés à la reconstruction d’une société où 1% de la population détient 50% des richesses. Les mêmes causes reproduiront les mêmes effets !
L’alternative c’est la solidarité internationale avec les organisations de lutte en Haïti qui se battent pour la défense des intérêts de la classe ouvrière et de la paysannerie, pour l’émancipation sociale et politique. Le syndicat de classe Batay Ouvriye (« Bataille Ouvrière ») a lui-même lancé un appel à la solidarité internationale pour faire face à cette terrible situation, et renforcer les organisations capables d’arracher de meilleures conditions de vie. Bien loin de la mise en scène par les médias occidentaux de corps souffrants et impuissants, Batay Ouvriye sollicite les soutiens concrets et autonomes du monde entier pour que les projets de reconstruction permettent en même temps d’édifier un Haïti libéré et maître de son destin.
Combattant contre l’impérialisme et son hypocrisie, nous nous associons à leur démarche et souhaitons prendre part à la solidarité avec le peuple haïtien. Nous avons créé un collectif « Solidarité avec le Peuple Haïtien » pour mettre en place des actions nécessaires et concrètes. Ce collectif reste, bien entendu, ouvert et nous appelons les organisations et individus qui se reconnaissent dans cette démarche à nous rejoindre.
Nous revendiquons en outre l'annulation définitive de la dette d'Haïti, et la régularisation immédiate et totale de tous les sans sans-papiers touchés par le séisme d'Haïti.
Fédération Syndicale Etudiante, Organisation Communiste Libertaire - Lyon, Union Pour le Communisme, Voie Prolétarienne – Partisan, et des individus.
Un repas de soutien est organisé le vendredi 12 février à partir de 19h au CSA
(18 rue des Tables Claudiennes dans les pentes de la Croix-Rousse)
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Valence (26)
Agréablement surpris de l'élan de générosité qui pousse à Valence. En effet avec des camarades nous sommes en train de construire une solidarité sur de bases claires. En effet une organisation ouvrière répertoriée existe à Haïti, Batay Ouvriye (« Bataille Ouvrière »)
Les camarades de Lyon organisent un repas de solidarité au CSA à la croix rousse. Cette initiative peut se développer à Valence (Drôme).
Dés samedi 13 février à 14h il sera possible de nous contacter au 8 place St jean ou par un mail au laboratoire@no-log.org
WSWS - 26 jan 2010 (traduit de l'anglais)
pour les anglophones: http://www.wsws.org/articles/2010/jan20 ... -j26.shtml
« Reconstruire Haïti » pour ses salaires de misère
Des ministres gouvernementaux, des banquiers internationaux et des organismes humanitaires se sont réunis à Montréal lundi pour discuter des plans de reconstruction d’Haïti, ravagé par un tremblement de terre. Au cœur de leurs propositions se trouve l’exploitation des travailleurs haïtiens à des salaires de misère.
La conférence n’a rien offert de concret sur le plan d’aide nouvelle et a plutôt servi à planifier une rencontre de donateurs aux Nations unies en mars. La majeure partie du discours provenant de la conférence semblait avoir peu de liens avec la situation sur le terrain en Haïti, où 150 000 personnes (*) ont été confirmées mortes, des centaines de milliers de plus ont été blessées et plus de 1,5 million fait sans-abris.
Le premier ministre Jean-Max Bellerive, représentant ce qui reste du gouvernement haïtien et accompagné de ministres des Affaires étrangères de l’Europe et des Amériques a souligné qu’il fallait que la souveraineté d’Haïti soit respectée, que les forces militaires étrangères soient subordonnées aux efforts humanitaires et que les Haïtiens puissent déterminer et mener leurs propres efforts de reconstruction.
Des responsables de premier plan, incluant le directeur du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, sont allés jusqu’à parler d’un « plan Marshall » pour Haïti.
En réalité, Haïti est maintenant en train d’être dirigé par l’armée américaine, qui a déployé 13 000 soldats et pris unilatéralement le contrôle des aéroports et des ports du pays. Le Pentagone a dominé l’approvisionnement en aide et l’a subordonné à la tâche prioritaire de déployer des soldats et des Marines américains équipés pour combattre. Cela s’est fait principalement au détriment des Haïtiens blessés et affamés qui attendent de la nourriture et des équipements médicaux pour sauver leurs vies.
L’hebdomadaire américain Times a reflété la véritable situation. Il a fait référence au plus haut commandant militaire américain dans le pays, le lieutenant-général américain Ken Keen, en le décrivant comme un « roi de facto en Haïti ». Au même moment, le peuple haïtien n’a rien vu ou entendu du président haïtien René Préval.
Derrière les discussions sur les Haïtiens déterminant leur futur et le gouvernement du pays qui dirige, un plan échafaudé dans les mois précédents le tremblement de terre est discuté, un plan dicté par les intérêts de profit des banques et des entreprises américaines, accompagnés de ceux de l’élite riche haïtienne.
S’adressant à des journalistes en déplacement entre Washington et Montréal, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a fait référence à ce plan en louangeant le travail de son mari, l’ancien président Bill Clinton, qui a tenté de l’implanter depuis sa fonction de délégué des Nations unies à Haïti.
« Il vient tout juste d’y avoir une conférence avec 500 individus du monde des affaires », a-t-elle dit. « Ils signaient des contrats, ils faisaient des investissements. »
Elle a poursuivi : « Alors, nous avons un plan. C’était un plan légitime, réalisé conjointement avec les autres donateurs internationaux, avec les Nations unies. Et je ne veux pas recommencer à zéro, mais nous devons reconnaître les nouveaux défis que nous confrontons. »
Le plan, établi l’année dernière à la demande des Nations unies, est destiné à développer l’économie haïtienne par le développement de zones de libre-échange basées sur des ateliers de misère de vêtements dans lesquelles les travailleurs haïtiens recevraient des salaires miséreux.
Cette initiative se base sur un rapport de l’ONU écrit par le professeur en économie de l’Université d’Oxford, Paul Collier. La pauvreté en Haïti, la pire dans les Amériques, y est présentée, de façon perverse, comme son principal atout dans une économie capitaliste mondialisée.
« Parce que c’est un pays pauvre et que le marché du travail y est relativement peu réglementé, les coûts du travail sont en Haïti compétitifs avec ceux de la Chine, le pays avec lequel il faut se comparer mondialement », écrit Collier.
Cet « atout » fait l’objet d’une garde jalouse tant par Washington que par l’élite dirigeante parasitaire d’Haïti. L’ancien président Jean-Bertrand Aristide a été renversé deux fois, la première en 1991 et la deuxième en 2004, par des coups sanglants orchestrés par la CIA en alliance avec les propriétaires d’usines haïtiennes, en large mesure parce qu’il avait suggéré d’augmenter le salaire minimum haïtien.
Après avoir été élu pour une deuxième fois en 2000, Aristide a doublé le salaire minimum et interdit le travail à la pièce dans les fabriques de vêtements, ce qui a rencontré une vive opposition au sein des propriétaires de ces entreprises. Andy Apaid, le propriétaire américano-haïtien des plus grands ateliers de misère en Haïti et un des principaux alliés de Clinton avec son dernier plan de « développement », a été un acteur clé dans le coup d’Etat de 2004. Lors de ce coup, Aristide a été enlevé et expulsé du pays par des soldats américains et des milliers d’Haïtiens ont été massacrés par les escadrons de la mort de la droite.
L’an dernier, après des manifestations de masse des étudiants et des travailleurs au cours desquelles de nombreuses personnes ont été tuées ou blessées, le président Préval a été forcé d’accepter une augmentation du salaire minimum qui avait été votée en chambre. Toutefois, il a imposé un salaire minimum spécial plus bas pour l’industrie du textile de 2,98 $ par jour, soit environ vingt fois moins que le salaire minimum aux Etats-Unis.
Alors qu’un tel système permettra aux industriels du textile d’empocher des surprofits et à l’oligarchie haïtienne de s’enrichir encore plus, il n’améliorera en rien la pauvreté abjecte du pays et ne fera qu’empirer l’inégalité sociale, déjà la pire au pays. La confection de vêtements en Haïti dans des zones de libre échange avec des tissus importés et pour le marché extérieur n’aura qu’un impact minimal sur l’économie locale.
Alors que la secrétaire d’Etat Clinton a indiqué que ce plan de travail d’esclave est toujours celui que Washington veut implanter même après le tremblement de terre du 12 janvier, elle admet que la catastrophe signifie qu’il faudra lui apporter des modifications.
Clinton a accueilli les propos de Bellerive sur la « décentralisation » de l’économie haïtienne. « Dans le cadre des efforts multilatéraux d’aide à Haïti, nous devrions considérer la façon dont allons décentraliser l’opportunité économique et travailler avec le gouvernement et le peuple d’Haïti pour venir en aide au relogement. Déjà, ils le font d’eux-mêmes en quittant Port-au-Prince pour retourner dans la campagne dont ils viennent tous pour la plupart », a-t-elle dit.
Les autorités haïtiennes, appuyées par Washington et l’ONU, ont commencé à mettre en œuvre leur plan pour déplacer des centaines de milliers de personnes, des pauvres surtout, de Port-au-Prince vers des camps de relogement. Des terrains ont été préparés pour un de ces camps à Croix-des-Bouquets, à douze kilomètres de la capitale, pour accueillir dix mille personnes. D’autres sites ont aussi été désignés dans l’idée que les personnes évacuées de la capitale s’y installent de façon permanente.
Dans une société qui connaît des divisions aussi aigües, le soi-disant plan de reconstruction d’Haïti est inévitablement développé selon des intérêts de classe. Peut-être verrons-nous que les nouveaux camps de relogement serviront à offrir une source de travail captive pour les zones de libre-échange qui seront établies juste à côté.
Au même moment, Port-au-Prince sera reconstruite moins grande, dans une taille qui siéra mieux aux intérêts des riches du pays. C’est ce qu’a laissé entendre l’ambassadeur d’Haïti à Washington, Raymond Joseph, dans une récente déclaration. Dans une émission portant sur la tragédie infligée au peuple haïtien diffusée sur C-SPAN, le réseau de télévision américain consacré à la retransmission des travaux du Congrès, il a déclaré : « C’est une opportunité en or. Ce qui n’était pas possible politiquement a été accompli par le tremblement de terre. Nous reconstruirons de façon différente. »
De telles réingénieries sociales réalisées au nom des intérêts de la classe dirigeante du pays et du capital étranger, aux dépens des larges masses des travailleurs et des pauvres Haïtiens, résulteront inévitablement des soulèvements sociaux et de la résistance. Voilà pourquoi Washington a mis l’envoi « de bottes sur le terrain » en tête de liste de ses priorités, avant le sauvetage des vies des victimes du tremblement de terre.
Bill Van Auken
Le Matin (Suisse) - 16 fev 2010
Les riches Haïtiens n'ont pas senti passer le séisme
Ils continuent à boire de l'eau de source française et mangent du camembert de Normandie: pour les Haïtiens les plus fortunés, le séisme du 12 janvier et le chaos qui a suivi sont passés inaperçus.
Sur les hauteurs de Port-au-Prince, à Pétion-Ville, un chapelet de supérettes tenues par des Syriens courtise le chaland.
Les rayons sont garnis de produits introuvables ailleurs dans la capitale du pays le plus pauvre du continent américain. Les mets de luxe y côtoient... des revues qui prodiguent des recettes pour maigrir.
"Quand on vend de la nourriture, on ne va jamais mal. Les gens achètent toujours à manger", lance Moussa Aballa Nahra, 70 ans, propriétaire du Royal Market. La devanture de son magasin fait dans la simplicité. Mais à l'intérieur, on trouve tant des bonbons européens que des olives portugaises ou du vin chilien. Les prix affichent une santé américaine...
Cela fait presque 50 ans que M. Nahra est installé en Haïti. "En 1961, ce pays était un paradis, très agréable avec beaucoup de prospérité, d'espoir dans l'avenir", dit-il. Son épouse se tient à ses côtés. Elle aussi est originaire du port syrien de Tartous. Non sans fierté, elle explique que ses trois enfants son "tous haïtiens".
"Mon fils a épousé une Haïtienne", poursuit-elle. Mais, prévient Mme Nahra, "pas une noire, une mulâtre, très belle. Mes deux filles m'ont donné des petits Américains parce qu'elles sont allées dans ce pays afin que leurs enfants naissent à l'extérieur".
Mme Nahra, son mari et une bonne partie de leur clientèle font partie des 5% d'Haïtiens qui forment l'élite économique du pays.
Le 12 janvier, lorsque la terre a tremblé, dans leurs maisons perchées sur les collines qui surplombent la mer des Caraïbes, ils n'ont presque rien senti.
"Moi je ne suis là que pour le commerce", explique Joseph Hanna, 28 ans, un Vénézuélien arrivé en Haïti il y a trois ans, et qui travaille à l'Olympia Market.
"C'est tranquille ici. Les gens sont très gentils", dit-il. On trouve de tout dans l'Olympia Market, même de la nourriture pour chiens. Avoir un animal domestique en Haïti est peut-être le luxe ultime dans un pays dont l'histoire est jalonnée de crises, et où le séisme a mis à terre le peu d'infrastructures qui subsistait.
L'argent facilitant bien des choses, seuls les plus fortunés des Haïtiens ont pu se sauver, en jet privé ou par voie terrestre, après le tremblement de terre qui a tué au moins 217.000 de leurs compatriotes
"Heureusement que mes deux enfants étudient à Bordeaux", soupire Patricia Steed Attié, propriétaire du Papaye, un restaurant à la mode. Le cocktail qu'elle boit, la musique d'ambiance et la clientèle européenne feraient presque oublier qu'à seulement quelques kilomètres, plus d'un million de personnes vivent dans des abris provisoires.
"J'ai fermé près de trois semaines, mais j'ai décidé de rouvrir. Je pense que c'est un moyen de ne pas perdre espoir. Mes employés ont recommencé à travailler, c'est un moyen d'aider, de ne pas renoncer", dit Mme Steed Attié.
Même note d'optimisme dans la bouche de Moussa Aballa Nahra, le propriétaire syrien de Royal Market.
"Rien ne manque ici. Je n'ai pas de problèmes de sécurité et les affaires sont bonnes. Je n'ai jamais songé à quitter Haïti (...) mais maintenant je suis vieux. Mon rêve est d'aller en Syrie, le meilleur pays du monde. Je veux y mourir", lance-t-il.
Radio Canada - 05 jun 2010
http://www.radio-canada.ca/nouvelles/In ... anto.shtml
Des semences controversées
Le mois dernier, la multinationale Monsanto a annoncé qu'elle allait donner 475 tonnes de semences hybrides à Haïti pour l'aider à relancer son économie dévastée. La valeur des semences fournies atteint 4 millions de dollars américains.
Or, plusieurs agriculteurs haïtiens n'en veulent pas, craignant une perte de souveraineté alimentaire et un contrôle du géant américain spécialisé dans les biotechnologies végétales. Des manifestations ont été organisées vendredi en Haïti pour dénoncer les dons de Monsanto réclamer la destruction des semences.
Des organisations canadiennes appuient ces paysans, qualifiant d'« intéressé » et d'« empoisonné » le cadeau qui leur a été donné.
Des groupes écologistes et des représentants de syndicats agricoles québécois ont d'ailleurs manifesté vendredi devant le consulat général d'Haïti à Montréal. Ils ont pu exprimer leurs préoccupations au consul haïtien Pierre-Richard Casimir et lui ont remis une lettre dénonçant la situation, le film Le Monde selon Monsanto ainsi que, dans un geste symbolique, une éprouvette de semences biologiques.
Le consul a dit aux manifestants que Monsanto avait initialement offert des semences génétiquement modifiées, mais que le ministère de l'Agriculture avait rejeté son offre.
Mais, à l'instar d'agriculteurs haïtiens, Greenpeace craint que le don de Monsato entraîne une dépendance accrue à l'endroit des multinationales étrangères, autant pour les semences que pour les produits chimiques. Les semences données nécessitent habituellement l'épandage de pesticides, que produit également Monsanto.
En outre, plusieurs semences de Monsanto ne peuvent pas être plantées à nouveau les années suivantes, obligeant les agriculteurs à renouveler leurs achats chaque année.
« Bien sûr, ça peut être un don désintéressé, mais Monsanto n'est pas ce genre de compagnie », a déclaré Éric Darier, de Greenpeace. « Je pense qu'on peut remplacer les [dons] de Monsanto par des semences que les agriculteurs locaux veulent et auxquelles ils font confiance. »
« Monsanto veut profiter du tremblement de terre pour prendre pied à Haïti », a de son côté affirmé Chavannes Jean-Baptiste, du Mouvement Peyizan Papay. « C'est inadmissible pour nous. Si les pays donateurs se mettent à envoyer des semences hybrides, c'est la fin de l'agriculture en Haïti. »
« Le problème, c'est que Monsanto va s'approprier certaines semences dans le pays, et que le paysan devra lui payer une redevance s'il souhaite les cultiver sur ses terres », a renchéri Sébastien Rioux, coordinateur de l'organisme Haïti, une semence, un pays. « On les rend donc dépendants du reste du monde, et c'est ça qui me choque. »
Une ONG américaine avait illustré les craintes exprimées par les groupes écologistes en voyant dans les semences offertes de Monsanto « un cheval de Troie de la firme dans le but de contrôler le futur agricole d'Haiti ».
Monsanto répond que le don de semence est un geste humanitaire. Quant au gouvernement haïtien, il remercie Monsanto de sa générosité et se dit convaincu que son don aidera à la relance de production maraîchère dans le pays.
AP, Métro Montréal - 04 oct 2010
http://www.journalmetro.com/monde/artic ... res-ecoles
Haïti: des étudiants exigent de meilleurs écoles
PORT-AU-PRINCE - Des étudiants ont affronté les casques bleus de l'ONU et la police haïtienne lundi à Port-au-Prince, exigeant que leur école endommagée par le séisme du 12 janvier soit réparée ou qu'on leur attribue un autre édifice.
Alors que la rentrée des classes débutait lundi en Haïti, au moins 30 manifestants se sont rassemblés devant le ministère de l'Éducation pour exiger la remise en état de leur école. Certains manifestants ont bloqué des rues et ont lancé des pierres sur les voitures. Les autorités ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser la foule.
L'ambassade des États-Unis a conseillé aux citoyens américains d'éviter le quartier où la manifestation a eu lieu.
Ailleurs dans la capitale, de nombreux parents peinaient à réunir les fonds nécessaires à ce qui est censé être la première année scolaire entière depuis le séisme dévastateur du 12 janvier. Le tremblement de terre a détruit plus de 80 % des infrastrucures scolaires de Port-au-Prince, en majorité détenues par des intérêts privés. Presque toutes les écoles ont été fermées après le séisme et n'ont rouvert que plusieurs mois plus tard.
Mais même avant le tremblement de terre, le système éducatif haïtien était un échec. En moyenne, au fil des années, seulement la moitié des enfants haïtiens sont scolarisés, la plupart dans des écoles privées établies dans des constructions peu sécuritaires. Plus d'un an avant le séisme, un école à flanc de colline s'est écroulée dans un bidonville de Pétionville, faisant 100 morts.
Par ailleurs, avant le séisme, seul un enseignant haïtien sur dix était qualifié, et le tiers n'avait pas complété une neuvième année de scolarité, selon la Banque interaméricaine de développement.
«Mes enfants ne vont pas à l'école parce que je n'ai pas d'argent pour les y envoyer, ni même pour payer un taxi pour y aller», a affirmé Alicia Louis, une mère de cinq enfants vivant dans un camp de sans-abri de Pétionville.
La Banque interaméricaine de développement s'est engagée à amasser 500 millions $ US pour reconstruire et améliorer le système scolaire haïtien.
Investig Action - 05 oct 2010
http://www.michelcollon.info/Haiti-Les- ... t-sur.html
Haïti - Les capitalistes fondent sur le désastre
par Siddhartha Mahanta
Qui en profite lorsque des réfugiés sont expulsés des camps vers des zones de travail vouées à l’industrie du vêtement et de la téléphonie mobile ?
Expulsion de réfugiés, confiscation de terres, capitalisme du désastre – on ne peut raconter l’histoire de Haïti sans évoquer tout cela. Huit mois après le tremblement de terre, beaucoup des 1,7 millions de Haïtiens vivant sous des bâches en guenilles dans des camps sordides autour de Port-au Prince sont contraints de quitter leur ville de tentes qu’ils ont installées sur des terrains privés.( Canadahaïtiaction.) Entre-temps, des entreprises, anxieuses de récupérer les miettes du désastre, se ruent pour profiter de journées de travail en déplaçant les réfugiés vers de nouveaux camps dont certains sont conçus pour fonctionner comme des zones de développement industriel. Et personne n’est là pour les en empêcher.
En mars, les propriétaires terriens et les autorités policières ont commencé à expulser les déplacés de leurs cités de fortune sur ordre des propriétaires de terres où étaient installés ces camps.( Internationalactionties.). Une agence communautaire de développement de proximité oeuvrant à Haïti affirme que les autorités évacuent régulièrement les camps. L’organisation internationale pour les migrations, qui chapeaute l’aide internationale au tremblement de terre, s’est avérée incapable d’empêcher les expulsions et a été réduite à jouer les médiateurs entre les propriétaires terriens et les occupants des camps. Un rapport récent de l’IAT, (crocodoc.com ) donne des images directes d’expulsions par la police Haïtienne dans les communes de Delmas et La Cité du Soleil : les bulldozers démolissant de frêles abris, des policiers jouant du bâton et tirant en l’air ainsi que plusieurs cas d’agressions sexuelles. L’IAT attaque le gouvernement Haïtien et les intervenants de l’ONU ainsi que la communauté des ONG pour ne pas défendre les réfugiés.
Et il y a une énorme embrouille : il n’est même pas certain que ces propriétaires terriens détiennent effectivement les titres de propriété sur les terres dont sont expulsés les réfugiés.
Des lois confuses sur le droit à la propriété empoisonnent Haïti depuis ses origines. Le caractère nébuleux et ambigu des revendications des propriétaires contribue à aggraver l’état actuel de catastrophe. Le premier dirigeant du Haïti post-colonial, Jean-Jacques DESSALINE, imposa une redistribution radicale des terres début des années 1800, répartissant les terres de plantations entre les esclaves libérés. Mais après son assassinat, la réforme fut interrompue et les chefs militaires s’approprièrent les anciennes plantations. La politique foncière devint de plus en plus confuse au fil des dictatures. Dans les années 50 et 60, François « Papa Doc. Duvalier » distribua la terre aux membres de ses esquadrons de la mort ou les abandonna à des accapareurs. Dans les années 80, de nouvelles tentatives de normalisation du droit sur les terres échouèrent.
Le 11 janvier 2010, le jour avant le tremblement de terre, 85 % des habitants de Port-au Prince habitaient sur des terres à la propriété contestable. « Il n’y a aucun cadastre qui permette de dire à qui la terre appartient » dit Julie Schindall d’Oxfam. « pour chaque parcelle, il peut y avoir jusqu’à trois personnes revendiquant la propriété pour l’une ou l’autre bonne raison. » . IAT estime que 70 % environ des prétendus propriétaires terriens ne disposent pas des titres de propriété dont ils de prévalent et demande un moratoire sur les expulsions jusqu’à ce que ce problème des droits de propriété soit résolu. Entre-temps, ce doit être de la responsabilité de la mission de stabilisation des Nations Unies à Haïti, conformément à son mandat, d’y assurer le respect des droits de l’homme. Cela comporte le droit à l’abri et au logement. La législation Haïtienne, ajoute Schindall, interdit clairement les expulsions forcées.
La voie à suivre semble évidente : définir la législation et l’attribution des terres avant d’arracher les abris et d’expulser des camps les blessés, les malades et les mourants. Mais en mars, le président René Préval, sous la pression des propriétaires terriens et des milieux d’affaires, a ordonné aux organisations d’aide d’interrompre la distribution de nourriture ( à l’exception toutefois des femmes enceintes et des enfants ). Ce qui fut perçu comme un moyen de pression pour forcer les camps à se démanteler.
En l’absence d’une autorité gouvernementale, les ONG et les milieux d’affaires remplissent le vide et profitent de la situation. Ainsi, Nabatec, un consortium appartenant aux familles Haïtiennes les plus puissantes et World Vision, une organisation humanitaire Chrétienne, projettent de développer une nouvelle ville à l’intention de 300.000 Haïtiens déplacés avec des usines de production de vêtements, , des maisons, des magasins et des restaurants. Cette nouvelle zone industrielle se situera à Corail Cesselesse, à neuf miles de Port-auPrince, Nabatec est propriétaire de la terre où vivront les réfugiés et prétend obtenir une part des 7 millions $ que le gouvernement Haïtien pourrait verser aux propriétaires qui abandonneraient leurs droits sur ce site.
« Une fois que je transfère les gens à Corail ( Cesselesse ), ils ne dorment plus bien affirme Melinda Miles, directrice du groupe d’aide KONPAY ( konpay.org/blos ). « Cela fait 40.000 personnes parquées au milieu du désert. » . Elle affirme que Corail Cesselesse , comme les autres camps, n’a plus reçu de distribution de nourriture correcte au cours des deux derniers mois ; les enfants y ont les cheveux oranges, signe de malnutrition. Et Nabatec s’est institué en chien de garde commercial pour les compagnies privées qui souhaitent s’établir à Corail, notamment une usine de vêtements Sud Coréenne et une entreprise Vietnamienne de téléphonie cellulaire.
Dans la mesure où la plupart des ONG sur le terrain se désintéressent de la problématique des expulsions, beaucoup de Haïtiens déplacés restent à la merci de propriétaires anxieux de récupérer leur terre. Ils sont pris entre un gouvernement impuissant et un afflux d’investisseurs étrangers désireux de capitaliser à bon compte sur un pays ruiné – juste au moment où commence la saison des ouragans.
RFI - 16 oct 2010
http://www.rfi.fr/ameriques/20101016-ha ... nifestants
En Haïti, la Minustah est taxée de «force d'occupation» par des manifestants
par Amélie Baron
Le conseil de sécurité de l'ONU a prolongé jeudi 14 octobre 2010, à l'unanimité et pour un an, sa Mission de stabilisation en Haïti (Minustah). Une résolution attendue car la force de l'ONU a notamment pour mission d'assister le gouvernement dans l'organisation des élections présidentielle et législatives du 28 novembre. L'insécurité est grandissante à Port-au-Prince mais cette décision des Nations unies n'est pas approuvée par tous les Haïtiens.
Devant la plus grande base de la Minustah du pays, les manifestants taguent toute voiture siglée Nations unies qui passe devant eux et brûlent même un drapeau brésilien, le pays le plus représenté dans le contingent de Casques bleus. A 24 ans, Franz Lambert en a assez de ce qu'il appelle cette «armée d'occupation» : «La Minustah est dans le pays depuis six ans, ils tuent des gens ! Aujourd'hui nous manifestons pour réclamer le départ du pays des forces de la Minustah. La Minustah dépense énormément d'argent pour les grands messieurs mais ne fait rien pour aider les gens. Chaque jour des enfants ne peuvent aller à l'école cependant il y a de l'argent pour la Minustah. Alors aujourd'hui on dit "merde" à la Minustah ! ».
Sur leurs pancartes, les slogans sont écrits en anglais, en portugais. Edmond Mulet, le chef de la mission de l'ONU, y est accusé d'être un trafiquant de drogue et la Minustah est taxée de pédophilie.
César Mélinant interpelle durement les Casques bleus postés devant lui : « A bas l'occupation économique ! à bas l'occupation militaire !!! C'est la masse populaire, la masse pauvre qui revendique le droit à l'éducation. Haïti aux Haïtiens ! Haïti n'est pas pour la Minustah mais pour les Haïtiens !! ».
Les officiers jordaniens restent en retrait à l'extérieur de la base mais, bouclier à la main, ils se préparent à parer tout débordement violent. Un journaliste étranger a été fortement bousculé par ces forces de sécurité mais la manifestation s'est achevée sans heurts.
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