SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Débats politiques, confrontation avec d'autres idéologies politiques...

SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede Antigone le Mer 25 Nov 2009 13:06

Elections, alliances politiciennes, magouilles, sièges de représentants, compromissions, désir de reconnaissance, financements, double langage, nouveaux droits et prérogatives syndicales...

Le Monde - 24 nov. 2009

A Marseille, les syndicats s'affrontent durement pour être représentatifs

A Marseille, les militants syndicaux ont le tournis. La loi sur la représentativité de 2008 a bouleversé les règles et amplifié une compétition syndicale déjà rude sur le terrain, donnant lieu parfois à des scénarios inédits.

Deux exemples : SUD s'est allié à la CFTC et a soutenu la CFDT pour prendre le comité d'entreprise de la Régie des transports marseillais (RTM) à l'axe CGT, FO, CFE-CGC. A la SNCF, FO a perdu la représentativité au niveau national mais l'a conservée sur la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, alors que la CFDT, représentative au niveau national, ne l'est plus au niveau régional. En Italie, on dit "grande casino". A Marseille, on parle de "pétaudière".

Avec la nouvelle loi, tout syndicat qui n'atteint pas 10 % aux élections professionnelles ne peut plus prétendre à la représentativité dans une entreprise, 8 % dans les branches et l'interprofessionnel à l'horizon 2013. Cela signifie qu'un syndicat ne peut plus négocier, signer des accords, qu'il n'a plus de délégué et qu'il perd des moyens matériels : heures de représentation, finances, local. Jusqu'alors, nul ne pouvait remettre en question la représentativité des "cinq", CGT, CFDT, FO, CFTC et CFE-CGC.

"La loi va redistribuer les cartes mais cela prendra du temps", explique le secrétaire régional de la CFDT, Charles Pellotieri. A la RTM, raconte Patrick Parra, le responsable départemental et ancien secrétaire du syndicat de la régie des transports urbains, "la CFDT a gagné le CE en s'alliant avec SUD, la CFTC et le Syndicat libre contre un axe CGT, FO, CFE-CGC et UNSA". Au sortir des élections de juin, l'UNSA a perdu sa représentativité. "Je suis élu depuis trente ans et je continuerai", fait valoir Roger Anunziata (UNSA), qui regrette que "les syndicats se contestent entre eux plutôt que s'opposer au patron".

L'alliance de SUD avec l'organisation chrétienne, la CFTC, et le Syndicat libre, issu de la CSL connue pour ses proximités avec l'extrême droite, peut surprendre. Pour Christian Bosc, délégué SUD à la RTM, "avec cet accord, nous avons fait plus de 10 % des voix". SUD bénéficie de la représentativité, et la CFTC et le SL ont des délégués syndicaux... sous étiquette SUD. Dur à suivre !

Directeur de la RTM, Pierre Reboud est inquiet. "Les syndicats ont peu de culture de négociation, dit-il, et la nouvelle loi pousse les organisations à la compétition : avec des mandats syndicaux de deux ans, on a une année pour travailler avec eux et une année de campagne et de surenchère."

Faire le boulot

Tous les syndicats s'accordent sur une chose : cela va pousser les militants à faire le boulot. "Ceux qui faisaient du syndicalisme pour aller à la pêche dégageront, c'est bien", assène le président de la CFTC 13, Alain Beveraggi, bien que son syndicat ait déjà perdu sa représentativité dans un certain nombre d'entreprises. Secrétaire départemental du puissant syndicat FO, Alain Comba n'est pas inquiet. "Dans certaines boîtes, c'est le couteau entre les dents : ceux qui font vraiment du travail se battront jusqu'au bout et ceux qui ne foutaient rien vont devoir se bouger ou disparaître", explique-t-il. Jean-Marc Lafon, responsable CGT à la RTM, enfonce le clou : "Les élus qui perdent leur mandat et ne veulent pas retourner à la production ont oublié que leur seul lien à la boîte, c'est le contrat de travail."

Pour autant, même à la CGT, qui a soutenu avec la CFDT la réforme, le débat est vif. Délégué chez Carrefour à Aix-en-Provence, Patrick Ait Aïssa ne décolère pas. "Je suis effondré de la position de la CGT : c'était déjà dur de s'implanter dans le commerce, là ça va être impossible", explique-t-il. Son collègue CGT au Carrefour Port-de-Bouc, Franck Gaulin, pense, lui, que les effets sont "positifs" et que les "accords pourris avec des syndicats minoritaires ne seront plus possibles".

La réforme est complexe à mettre en place. Le travail de compilation des résultats est énorme, explique la directrice départementale du travail, Isabelle Olive-Liger. "Les erreurs risquent d'être nombreuses : il faut tout vérifier pour éviter les contestations, dit-elle, et certaines entreprises changent d'activité et même disparaissent après avoir envoyé des résultats électoraux."

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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede charlelem le Mer 25 Nov 2009 13:31

Les bruits (ou plutot les ragots) qui courraient au moment de la création de sud c'est que tous les gamellards de la cfdt qui avaient peur pour leur cul investissaient ce syndicat pour rester bien au chaud encore quelques années.
Donc une alliance avec le cftc, c'est presque un retour aux sources.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede kuhing le Mer 25 Nov 2009 14:40

charlelem a écrit:Les bruits (ou plutot les ragots) qui courraient au moment de la création de sud c'est que tous les gamellards de la cfdt qui avaient peur pour leur cul investissaient ce syndicat pour rester bien au chaud encore quelques années.
Donc une alliance avec le cftc, c'est presque un retour aux sources.


En tous cas dans notre coin on a de bons rapports avec SUD
notamment SUD PTT.
Ils nous prêtent leur locaux pour des réunions quand on veut et il y a quelques affiches de la FA sur les murs .
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede leo le Mer 25 Nov 2009 19:34

En tous cas dans notre coin on a de bons rapports avec SUD
notamment SUD PTT.
Ils nous prêtent leur locaux pour des réunions quand on veut et il y a quelques affiches de la FA sur les murs .


Eh oui, dans les années 70, c'était déjà comme ça avec la CFDT.
Les anars étaient appréciés, dans certains endroits c'est même eux qui ont créé et développé la CFDT avec cette idée qu'ils pouvaient ou pourraient en faire un instrument d'émancipation sociale. Ils pouvaient utiliser les locaux, les ronéos, les machines à écrire, etc... et des types de la CFDT pouvaient être solidaires sur certains combats, notamment l'anti-militarisme.

Et puis, il y a eu la reprise en main, le recentrage, et on a vu où tout cela a mené...
Entre naïveté, manque d'analyse politique sur les logiques organisationnelles et structurelles à l'oeuvre et incapacité d'imaginer et de faire vivre des choses un peu nouvelles, il y a eu pas mal de gâchis.

J'ai l'impression qu'entre SUD et certains libertaires, l'histoire se répète.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede qierrot le Jeu 26 Nov 2009 22:47

ouais, bravo les raccourcis et les grandes analyses à l'emporte pièce leo. :siffle:
Il y a bien des choses que l'on peut partager, mais je ne prendrais pas une structure syndicale pour amalgamer tout les SUDs et l'ensemble de l'union syndicale Solidaires.
En tout cas c'est pas glorieux tout ces tripatouillages pour la représentativité, je ne sais pas comment les travailleurs-euses vont s'y retrouver, alors que dans la période où les gros syndicats freinent des quatres fers il serait bon d'y voir un peu clair justement, et celà n'arrange pas cette recherche de clarté...et d'éthique.

Sinon il y a des communiqués sur le Forum Anarchiste Revolutionnaire, je ne fais pas de copier/coller, et ne refais pas mes commentaires qui vont avec, et renvoie au lien : http://forum.anarchiste-revolutionnaire ... 349#p51339
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede conan le Jeu 26 Nov 2009 22:55

Et la question va bientôt se poser dans le public, à la CNT (où je suis syndiqué).
En fait, elle s'y pose déjà, parce qu'avec l'alignement du droit public sur le droit privé qui nous pend au pif, on ne peut pas l'ignorer. Les militant-e-s de la cénète risquent de perdre tous les droits syndicaux de base qui jusqu'à aujourd'hui font vivre leurs sections, qui ont le mérite de proposer de l'anarcho-syndicalisme au sein du système (panneaux, heures d'info syndicales...).
Face au dilemme auquel nous contraint cette échéance fixée par l'Etat (associé pour cela aux jaunes des centrales SGT et CFDT qui ont signé ces accords pourris), on a:
-d'un côté les partisans de la "non-interdiction" de participer aux élections, si le contexte y contraint des camarades pour survivre ; à condition de se mettre déjà d'accord pour qu'il n'y ait pas de débordements (ex : ne pas siéger aux instances cogestionnaires etc...)
-d'autres qui pensent que c'est mettre le doigt dans un engrenage qui nous fera intrinsèquement dériver vers les SUD et autres CFDT avant, que l'Etat trouvera toujours un moyen d'étouffer notre combativité, et que quitte à faire, mieux vaut perdre les droits syndicaux que de perdre ce qui nous différencie de tous les autres. Je suis plutôt de cet avis, et j'ajoute qu'il faut d'ores et déjà mener campagne pour ce syndicalisme-là, celui des origines. Autant je pense que l'AIT a été dogmatique en interdisant au privé cette possibilité de représentativité (dans certains secteurs comme restauration, nettoyage ou bâtiment, ça signifie se faire bousiller !), autant je pense qu'il est inacceptable d'accepter d'ores et déjà de renoncer à un tel syndicalisme dans le public.
La réponse à cette question de fond dépendra peut-être de l'importance respective des courants de la CNT, le SR ou... l'AS.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede qierrot le Jeu 26 Nov 2009 23:11

et bien il me semble que ta réponse elle n'est pas là justement, et que la combativité syndicale, si l'on parle bien de syndicalisme, ne se mesure pas qu'aux bonnes intentions et déclarations de principes. Je suis dans une section syndicale représentative, et réellement représentative sur le terrain en plus et en nombre de syndiqué-es, et je peux te dire que celà ne nuis pas à la combativité, bien au contraire, parce que le rapport de force y a gagné. La question est dans le dosage, dans l'appréciation des avantages et des inconvénients, qui sont différents selon les réalités et les situations.
Dans le cas présent, et parce qu'il y a des alliances plus que merdiques, je vois plutôt quelque chose qui me choque et que je condamne, mais je n'en fais pas une généralité sur la question des élections concernant cette question importante de la représentativité, voir vitale pour certains syndicats et le rapport de force. Après la CNT je ne sais pas comment elle s'en sortira. Quant à ceux et celles qui voudront avoir une pratique syndicale, il-elles continueront à rejoindre des syndicats, et il en existe à la CNT aussi, et pas des espaces qui ressemblent à des organisations politiques, car il me semble nécessaire de faire la différence, d'autant qu'il en existe des organisations spécifiques dans le mouvement libertaire.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede leo le Ven 27 Nov 2009 13:49

ouais, bravo les raccourcis et les grandes analyses à l'emporte pièce leo. :siffle:
Il y a bien des choses que l'on peut partager, mais je ne prendrais pas une structure syndicale pour amalgamer tout les SUDs et l'ensemble de l'union syndicale Solidaires.


Je ne fais pas de "grandes analyses" ici. Je ne faisait que commenter rapidement une remarque en m'appuyant sur quelques souvenirs.
Je fais un parallèle entre CFDT de la grande époque et SUD. Des camarades révolutionnaires, anarchistes et tout et tout, avaient créés (avec d'autres of course) des syndicats départementaux, des l'UL, des sections de boîtes... Ils faisaient ce qu'ils voulaient avec la structure, s'en servaient à outrance et avaient l'impression de construire quelque chose d'anti-capitaliste, de subversif, avec en plus une audience de "masse"... Et puis le "réalisme" s'est emparé de beaucoup de monde, y compris à la base (je ne crois pas au schéma trotskisant de la base combative et des dirigeants traitres, mais par contre je crois en des dynamiques structurelles, organisationnelles, historiques, sociales, etc. qui déterminent des comportements, qu'ils soient de radicalisation ou d'intégration/collaboration).

Pour être clair. Je préfèrerais que les SUD se radicalisent et deviennent révolutionnaires, remettent en question le capitalisme, le productivisme et adoptent pour cela des attitudes de ruptures et de confrontation avec la bourgeoisie et l'Etat, etc.
Mais je pense qu'ils prennent et surtout prendront un autre chemin : sauf si peut-être la situation sociale change radicalement. Mais ça, personne ne peut le décider.
Ce qui se passe à Marseille n'est pas très important en soi. Ce n'est qu'un épiphénomène mais qui n'est pas sans signification en ce qu'il révèle.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede charlelem le Ven 27 Nov 2009 16:45

Je suis d'accord avec Leo, si on fait abstraction du passé on refait les mêmes erreurs.
Donc comme dirait un copain "pas rancuneux mais pas oublieux".
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede qierrot le Ven 27 Nov 2009 21:30

On le connait le passé, et c'est important de connaître et de s'appuyer sur les expériences passées. Et si l'on continue à retrouver des anarchistes dans ce type d'espace c'est bien qu'il y a une raison. D'ailleurs le boulot mené à la CFDT n'à pas été perdu, par exemple dans mon coin la CFDT au CHU s'est retrouvée à poil quand les sections syndicales sont passées à SUD...(et d'ailleurs ce ne sont pas les libertaires qui ont pesé là dedans, dans cet exemple, et ils ne pèsent pas ou plus beaucoup les libertaires en général on va dire en ce moment, çà rame...).
Quant à moi je ne ferai pas de grande leçon sur le syndicalisme, l'anarcho-syndicalisme, le syndicalisme révolutionnaire, parce que je ne me sent pas forcément dans un courant qui penserait que le syndicalisme se suffirait en lui même. Et je pense que c'est une leçon du passé çà par exemple.
Par contre il me semble nécessaire de participer à construire des espaces larges, des espaces de luttes et des espaces politiques aussi, car il s'agit bien de contribuer à travers ces luttes, ces dynamiques collectives et ces formes d'organisations plus larges qu'une organisation politique, à construire un mouvement social révolutionnaire de masse, qui soit aussi en capacité de s'approprier le politique (la question du choix de société, la question révolutionnaire, etc...) et de produire des pratiques, du contenu et du sens. Quant à l'organisation politique spécifique, elle est complètement nécéssaire, mais c'est un autre espace.
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede conan le Lun 30 Nov 2009 10:23

Nouvelle attaque sans précédent sur le syndicalisme, via les tribunaux !
Comme vous le savez, depuis la nouvelle loi de représentativité, la représentativité n'est plus de principe, il faut désormais la gagner.
Comme vous le savez aussi, une nouvelle condition existe sur le "respect des valeurs républicaines", remplaçant la fameuse attitude "patriotique" d'après la 2ème guerre mondiale.
SFR en profite pour attaquer Sud, qui atteint le seuil de représentativité, sur un point fondamental : au motif que ses statuts, prônant l'autogestion socialiste, vont à l'encontre des fondements de la République française, à savoir la propriété privée sacrée...
Ce nouveau conflit met paradoxalement sur le devant de la scène qu'en effet, nos valeurs ne sont pas celles de la République. Il montre très clairement que le patronat tombe le masque. C'est une attaque de front contre la plupart des syndicats d'ailleurs, puisque les plus gros d'entre eux, malgré leur amnésie, se réfèrent encore à la destruction du patronat et du salariat avec la charte d'Amiens.
Ca montre que la fracture existe toujours, et même plus que jamais, entre deux modes de production économiques, attachés à deux modes d'exercice de la démocratie très différents.
Cette attaque va paradoxalement pour voir faire émerger un débat de fond... à condition qu'on s'en empare !
Et que les syndicats, comme cela semble prendre la voie, ne défendent pas piteusement un citoyennisme soumis pour obtenir l'autorisation patronale du droit à l'existence.
Il faut être attentif aux suites de cette affaire, pour défendre le syndicalisme d'une part, mais aussi et surtout pour montrer que derrière le vernis "démocratique" de notre société "républicaine", il y a surtout le postulat de l'exploitation capitaliste, et que nous n'avons pas peur de le dire !
Plus de deux siècles après le début de la révolution en France, il y a toujours des culottes et des sans-culottes, et sous les ors et le toc des institutions républicaines, n'existant que pour défendre les intérêts d'une bourgeoisie ayant supplanté la noblesse, gronde toujours la révolte des gens qui pensent que la révolution n'est pas achevée !

Article de mediapart : http://www.cguittard.com/article-sud-un ... 05573.html
On se doutait que la loi sur la représentativité syndicale d'août 2008 allait donner lieu à de multiples batailles juridiques entre organisations et patrons. Mais à ce point... Lundi 30 novembre à 11 heures, au tribunal de grand instance de Longjumeau (Essonne), se tiendra une audience inédite. L'opérateur téléphonique SFR viendra contester devant le juge la représentativité syndicale de Sud au motif que le syndicat «ne respecte pas les valeurs républicaines». Une première.

Avant la loi d'août 2008, seuls cinq syndicats étaient considérés représentatifs par la loi. Une représentativité dite «irréfragable»(incontestable), accordée depuis 1966 en raison de l'attitude«patriotique» de ces syndicats durant la Seconde Guerre mondiale. Mais depuis la nouvelle loi, tout a changé.

Il faut désormais gagner sa représentativité lors des élections professionnelles. La règle est simple : un syndicat est représentatif s'il dépasse le seuil des 10 % aux élections professionnelles – c'est 8% dans les branches. Chez SFR, Sud ne dépassait pas ce seuil. Jusqu'aux élections de juin 2009, où il s'est hissé au-delà de 10% dans un établissement, le centre d'appel de Massy (Essonne). Résultat : Sud s'estime désormais en droit de désigner des délégués syndicaux dans cet établissement. La direction lui conteste ce droit. Jusque-là, un conflit banal, comme les tribunaux en traitent tous les jours.

Sauf que l'audience n'est pas le seul critère désormais inscrit dans le code du travail. Pour être représentatif, un syndicat doit aussi faire preuve d'«indépendance», de «transparence financière», d'une«ancienneté minimale de deux ans», avoir des «effectifs d'adhérents et de cotisations». Et «respect[er] les valeurs républicaines».

C'est sur ce critère-là que l'avocat de SFR, Antoine Vivant, ducabinet Cotty Vivant Marchisio et Lauzéral, a choisi d'attaquer. Du jamais vu : jamais ce coup n'avait été tenté par un avocat patronal depuis la loi d'août 2008. En cause selon lui, les statuts de Sud-PTT, la fédération à laquelle Sud-SFR se rattache, qui mentionnent la référence au «socialisme autogestionnaire».


Plus exactement, ces statuts évoquent un «syndicalisme de tranformation sociale dans la perspective du socialisme autogestionnaire».

Mathieu Magnaudeix


La réponse de Solidaires 37 : http://www.solidaires37.org/spip.php?article367

Sud, un syndicat antirépublicain ! SFR l’attaque au tribunal
samedi 28 novembre 2009 par Solidaires37

On se doutait que la loi sur la représentativité syndicale d’août 2008 allait donner lieu à de multiples batailles juridiques entre organisations et patrons. Mais à ce point... Lundi 30 novembre à 11 heures, au tribunal de grand instance de Longjumeau (Essonne), se tiendra une audience inédite. L’opérateur téléphonique SFR viendra contester devant le juge la représentativité syndicale de Sud au motif que le syndicat « ne respecte pas les valeurs républicaines ». Une première.

Avant la loi d’août 2008, seuls cinq syndicats étaient considérés représentatifs par la loi. Une représentativité dite « irréfragable » (incontestable), accordée depuis 1966 en raison de l’attitude « patriotique » de ces syndicats durant la Seconde Guerre mondiale. Mais depuis la nouvelle loi, tout a changé.

Il faut désormais gagner sa représentativité lors des élections professionnelles. La règle est simple : un syndicat est représentatif s’il dépasse le seuil des 10 % aux élections professionnelles – c’est 8% dans les branches. Chez SFR, Sud ne dépassait pas ce seuil. Jusqu’aux élections de juin 2009, où il s’est hissé au-delà de 10% dans un établissement, le centre d’appel de Massy (Essonne). Résultat : Sud s’estime désormais en droit de désigner des délégués syndicaux dans cet établissement. La direction lui conteste ce droit. Jusque-là, un conflit banal, comme les tribunaux en traitent tous les jours.

Sauf que l’audience n’est pas le seul critère désormais inscrit dans le code du travail. Pour être représentatif, un syndicat doit aussi faire preuve d’« indépendance », de « transparence financière », d’une « ancienneté minimale de deux ans », avoir des « effectifs d’adhérents et de cotisations ». Et « respect[er] les valeurs républicaines ».

C’est sur ce critère-là que l’avocat de SFR, Antoine Vivant, du cabinet Cotty Vivant Marchisio et Lauzéral, a choisi d’attaquer. Du jamais vu : jamais ce coup n’avait été tenté par un avocat patronal depuis la loi d’août 2008. En cause selon lui, les statuts de Sud-PTT, la fédération à laquelle Sud-SFR se rattache, qui mentionnent la référence au « socialisme autogestionnaire ».

Plus exactement, ces statuts évoquent un « syndicalisme de tranformation sociale dans la perspective du socialisme autogestionnaire ».

A la fin de ses conclusions, sur près d’une dizaine de pages, l’avocat de SFR, Antoine Vivant, développe longuement l’argumentation. « Sud ne respecte pas les valeurs républicaines », écrit-il, le socialisme autogestionnaire étant, selon l’accusation, « un courant politique dont les principes sont en tout point contraire » à ces mêmes valeurs. Le texte accuse le socialisme autogestionnaire de poursuivre « l’anéantissement du droit de propriété » et « l’anéantissement de la liberté d’entreprendre ». La démonstration est bourrée de références hétéroclites : la loi Waldeck-Rousseau sur les syndicats de 1884, des textes de l’Assemblée nationale sur les valeurs républicaines, des écrits de l’historien Bernard Ravenel (un des fondateurs du PSU en 1960), la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ou... la définition du « socialisme autogestionnaire » dans l’Encyclopaedia Universalis ! « La France est une république sociale, pas socialiste », écrit l’avocat de SFR. Sollicité, Antoine Vivant n’a pas répondu à nos questions. Pas plus que SFR, qui n’a pas donné suite.

Thierry Domas, avocat de Sud, évoque un argumentaire « hallucinant ». « Il s’agit d’une attaque politique sans précédent contre la liberté d’opinion. C’est la première fois qu’une entreprise décide de contester la capacité d’un syndicat à participer au dialogue social à cause de ses statuts. » Avant l’audience, l’avocat se montre plutôt confiant : la position commune des partenaires sociaux qui a établi les nouvelles règles de représentativité définit le respect des valeurs républicaines comme « le respect de la liberté d’opinion, politique, philosophique ou religieuse ainsi que le refus de toute discrimination, de tout intégrisme et de toute intolérance ». Une allusion implicite à la jurisprudence "Front National-Police", syndicat ouvertement raciste lié au parti de Jean-Marie Le Pen, dissous en avril 1998 à la suite d’un arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation. Mais au cas où le tribunal suivrait les conclusions de l’avocat de SFR, la porte serait alors grande ouverte pour interdire quasiment toutes les organisations. Car (et ce n’est pas très étonnant), les statuts des autres confédérations syndicales comportent elles aussi de sacrées charges contre le capitalisme, l’existence même du patronat ou le droit de propriété. Ainsi, les statuts de la CGT évoquent la lutte des classes et la nécessité de libérer l’humanité de « l’exploitation capitaliste et des autres formes d’exploitation et de domination ». Pire, ceux de Force ouvrière prônent même la « disparition du salariat et du patronat » ! Pour Annick Coupé, porte-parole de l’union syndicale Solidaires, « SFR a décidé de tout faire pour s’opposer à l’implantation de notre syndicalisme dans l’entreprise ». « Même s’il s’agit heureusement d’un cas unique pour l’instant, que SFR se permette ce genre de dérapage entre en résonance avec cette idée que notre syndicalisme n’a pas sa place dans la démocratie française, poursuit-elle. En la matière, le chef de l’Etat a donné l’exemple. » En janvier 2009, lors d’une grève à la gare Saint-Lazare, Nicolas Sarkozy avait dénoncé la petite sœur de Sud-PTT, Sud-Rail (SNCF), comme une « organisation syndicale irresponsable » qui « casse le service public [...] en fermant la deuxième gare de France sans prévenir personne ».
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Re: SUD: Jusqu'où mène la représentativité

Messagede charlelem le Lun 30 Nov 2009 11:14

conan a écrit:Nouvelle attaque sans précédent sur le syndicalisme, via les tribunaux !
Comme vous le savez, depuis la nouvelle loi de représentativité, la représentativité n'est plus de principe, il faut désormais la gagner.

Je crois me souvenir qu'il y a presque 20 ans, lorsque l'on créait des section cnt les autres syndicats ou/et la direction pouvai(en)t contester notre représentativité.
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