Un petit texte qui date d'une semaine:
Trottoir
Je me lève comme à chaque matin, qui parfois s’étire jusqu’à midi passé, je déguste un petit déjeuner sans goût, je regarde le miroir, mets mes bottes et sors finalement dehors. À l’extérieur, tout est normal. Il fait chaud et humide. Les gens sont tous entassés par milliers dans leurs véhicules, ils klaxonnent, s’impatientent, se fâchent et finalement s’en vont. Je marche sur un trottoir semi-délabré, où les creux et les bosses semblent se chevaucher sans logique. J’aboutis au lieu où je suis attendu, le travail. Endroit morne, sans vie. Enfermement de l’espoir humain, décoiffant du bonheur, nihilisme du bien être et du rêve. Midi, pause méritée, retour à la « liberté ». Fumer une clope, manger un bout, retourner s’enfermer de son plein chef. Masochisme extrême. Subir pour ne plus subir. Ne plus rêver pour espérer rêver. Naître pour mourir et mourir pour naître. Retour à la maison, trottoir semi-délabré, où les bosses et les creux se chevauchent sans logique. Payer les comptes, regarder la télé, désespérer, avoir peur, dormir. Je me lève comme à chaque matin, je déguste un petit déjeuner sans goût, regarde le miroir, sors en pantoufle. À l’extérieur tout semble normal. Il fait froid et humide. Les centaines de personnes entassées dans leurs véhicules tremblent d’excitations, ne pas être en retard. Je marche sur un trottoir semi-réparé, où les creux et les bosses semblent se chevaucher sans logique. J’arrive ensuite là où je suis attendu, le travail. Endroit fade et sans lumière. Enfermement de l’espoir humain, décoiffant du bonheur, anéantissement du bien être et du rêve. Midi, pause méritée, retour à la « liberté ». Fumer une clope, manger un bout, retourner s’enfermer de son plein gré. Masochisme poussé à l’extrême. Ne plus subir pour subir. Rêver pour espérer ne plus rêver. Naître pour mourir et mourir pour naître. Retour à la maison, trottoir semi-réparé, où les bosses et les creux se chevauchent. Payer les factures, lire le journal, désillusion, tasse de café, insomnie, pilules, sommeil, ristourne. Je me lève comme à chaque matin, je déguste un petit déjeuner, regarde le miroir, sors sans souliers. À l’extérieur tout est normal. Il fait très froid. Des milliers de personnes entassés dans leur véhicules polluent l’atmosphère. Tout est normal. Je marche rapidement sur un trottoir semi-délabré, semi-réparé, où les bosses et les creux, et les creux et les bosses se chevauchent. J’arrive ensuite là où je suis attendu, le bureau du chef. Baisse de profit, licenciement, chômage. Pause méritée, retour à la « liberté ». Routine, repos, relâche. Pour mourir, naître et pour naître, mourir. Retour, trottoir sans fin. Promesses, rêves, idéal, désespoir, suicide. Je me lève, je déguste un copieux déjeuner, je me regarde dans le miroir, sors libre. À l’extérieur tout est chamboulé. Il fait beau et ensoleillé. Quelques personnes marchent dans les rues. Je marche sur un nuage blanc et tiède. J’aboutis au lieu où je suis attendu. Endroit clair et lumineux. Abstraction du temps. Subir pour ne plus subir. Ne plus rêver pour espérer rêver. Naître pour mourir et mourir pour naître.