quand je vous disais qu'ils se trouveraient bien un juif pour tomber d'accord ...
En plus on y arrive , en ce moment a République .. Un drapeau a l'AG devinez lequel ?
Bon il y aussi des commissions non mixtes .. On amuse le populo .
quand je vous disais qu'ils se trouveraient bien un juif pour tomber d'accord ...
Samedi 16 avril, l'ancien ministre grec des Finances de Syriza Yanis Varoufakis est intervenu au micro de la Nuit Debout, place de la République à Paris. Dès le vendredi 8 avril, c'est le député européen de Podemos, Miguel Urban Crespo, qui l'avait précédé. Entre les politiciens comme Besancenot (NPA), les ministres PS en exercice (comme Axelle Lemaire le 12 avril), les universitaires, les camions télé ou même un Juan Martin Guevara (frère de l'autre) entouré de ses attachés de presse (il est venu promouvoir son livre publié chez le marchand d'armes Lagardère), cette "occupation" de place négociée en bonne et due forme avec horaires et service d'ordre à la clé, est toujours plus le dépotoir d'une gôche en recomposition. Et ce, malgré toutes les joyeuses manifestations sauvages qui en partent à la nuit tombée pour affronter la police ou détruire ce qui nous détruit.
Deux visions du monde et perspectives parviennent pour l'instant à cohabiter parce que (relativement) séparées dans le temps et (parfois) dans l'espace : l'une diurne -marche-pied d'un citoyennisme de tribuns, parfois heureusement débordé- et l'autre nocturne -marche-pied des politiciens autoritaires du mouvement, parfois heureusement débordés. Il ne manquerait d'ailleurs plus que naisse de ces croisements un monstrueux hybride placé sous les auspices de la politique, grâce aux vertus magiques de la composition et de la diffusion toujours plus prégnante du concept d'allié-e-s ! A toute heure, les politiciens en mal de masse à manoeuvrer ou à flatter sont à l'affût, car c'est bien connu, l'union fait la force. Certes, il suffit pour s'en convaincre d'évoquer la force de masses unies derrière leurs chefs ou leurs drapeaux, de l'union de meutes derrière leurs bergers, de l'union d'émeutiers que le fait d'être filmés ne rebute même plus, tant ils rêvent de convaincre d'autres masses de les rejoindre à travers le spectacle de la contestation. L'union peut alors faire la force chez des masses unies derrière le premier slogan populiste venu, qui identifie l'ennemi chez le Premier ministre, à la mairie ou à l'Elysée, plutôt que dans les mille et uns rouages quotidiens du pouvoir à portée de main. Pour réformer les institutions comme pour les destituer. Au nom d'une entité nommée Constitution, Communauté ou Commune, de toute façon supérieure à l'hétérogénéité et à l'unicité des individus, qui constitue leur seule richesse.
Et pourtant... Pourtant il y a également nombre d'enragés, ou tout simplement d'individus trop jeunes ou trop vieux pour être résignés, qui ont rejoint les manifestations et les dawa ponctuels de ces derniers temps, et ce hors de toutes catégories socio-professionnelles dans lesquelles on prétend les cloisonner. Zonards de la place de la République, errants noctambules croisés au hasard de déambulations saccageuses, chômeurs heureux, manifestants non encadrés que l'odeur des lacrymos ne rebute pas, lycéens qui préfèrent un bahut en feu au dressage sur tablettes, chamards de la débrouille, insoumis de la pacification sociale en tout genre, beaucoup ont saisi le prétexte de la énième réforme du code du travail pour sortir dans la rue. Et c'est là que commence le problème actuel de l' "occupation" de la place de la République à Paris.
Dans une métropole régie par un double mouvement d'atomisation et de massification, on a comme l'impression que cette mise en commun autorisée ne peut structurellement pas constituer un premier pas vers autre chose. Qu'en tant que dispositif récupérateur et intégrateur qui a surgi dans un moment de contestation, elle ne peut que présenter et re-présenter le même sous un visage un peu plus avenant. Comme si la concentration sur une place symbolique permettait à l'opposé que tout autour, l'ordre de la démocratie totalitaire, de la guerre, du contrôle, de l'exploitation, de l'écrasement, de la résignation et de toutes les dominations continue imperturbablement de tourner. Au coeur de la riche capitale d'un pays riche, il nous semble du coup que le seul espace possible vers quelque chose de radicalement différent ne pourrait exister qu'à travers une rupture : une rupture avec le temps et l'espace de la domination (ce qu'assurément "Nuit Debout" n'est pas, sauf en ses marges), une rupture avec l'existant, une rupture avec la normalité, celle du travail, de la consommation, de la marchandise et des flux qui les rendent possibles. Ce n'est pas un hasard si l'Etat a empêché à tout prix qu'un espace hors partis et hors syndicats soit occupé (comme à Tolbiac) afin de pouvoir servir de point de départ à des dérives urbaines, tout en acceptant d'un autre côté ce fade ersatz d' "occupation" de la place de la République. La forme influe sur le fond, et un espace organisé et règlementé par le pouvoir ne peut que perdre rapidement toute capacité subversive, si jamais il en avait une au départ. Conjuguer le penser et l'agir à travers des espaces arrachés à la domination (à partir d'un lieu occupé de force ou directement dans la rue) ne peut être et ne sera jamais la même chose que de profiter des interstices provisoirement vacants au sein des dispositifs légaux de la pacification sociale.
Beaucoup se sont par exemple demandés pourquoi l'Etat avait pu autoriser un événement permanent comme "Nuit Debout", bien que l'état d'urgence soit toujours en vigueur et que le pays soit toujours placé sous alerte anti-"terroriste" maximale ? D'autant plus quand on pense à comment il avait rudement géré toute occupation de l'espace public pendant la COP21 en novembre dernier. Et en effet, comment ne pas voir de lien entre les studieuses assemblées adoubées par l'Etat qui réfléchissent à une nouvelle constitution et une démocratie replâtrée, et le fait que ce dernier perquisitionne au même moment administrativement des appartements toutes les nuits, assigne à résidence, ouvre des instructions judiciaire contre les "méchants casseurs", ou recrute une quantité industrielle d'uniformes de tous poils en leur offrant de nouveaux pouvoirs pour écraser tout individu rebelle ? Ou avec le fait qu'à une poignée de stations de métro de la place de la République, l'Etat est en train de construire une nouvelle prison (la Santé, 14e), un nouveau palais de Justice (Clichy/Batignolles, 17e), un nouveau ministère de la Justice (porte d'Aubervilliers, 19e), et vient d'inaugurer un nouveau site du ministère de l'intérieur (Nation, 20e) ? C'est dans un seul et même mouvement que le pouvoir autorise cette "occupation" et réprime autour d'elle (à quelques mètres parfois) tout ce qui passe d'une parole non conforme à des actes non encadrés.
Sortir de l'odieuse place de la République, multiplier les propositions et les occasions d'actions directes autonomes, partir à la recherche de complices plutôt que de main d'oeuvre ou d'alliés, est plus que jamais nécessaire. Pour ouvrir des espaces de subversion des rapports sociaux hors des sentiers balisés de l'Etat et des politiciens, afin de détruire le pouvoir plutôt que de le réformer, le reproduire ou le destituer, tout est une question de perspective.
Divers GentEs
Paris, 16 avril 2016
qu'il estime partager «la même vision des profonds défauts de la zone euro, de la différence entre productivité et compétitivité» avec le ministre de l'Économie français. «C'est quelqu'un d'honnête et, en ami, il a essayé de jouer les intermédiaires entre nous et la troïka de nos créanciers même si on ne lui a pas permis de jouer ce rôle.» Alors que le mouvement En marche! d'Emmanuel Macron se veut au-delà des partis, Yanis Varoufakis apporte une véritable caution de gauche au jeune ministre: «Cette course à la compétitivité est nuisible pour l'avenir de l'Europe. Emmanuel Macron l'a bien compris, avance-t-il. Nous étions en désaccord en matière de réformes microéconomiques ou sur la libéralisation du marché du travail, mais c'est quelqu'un que je respecte.»
Les deux hommes se sont rencontrés ce mardi, comme l'a annoncé Emmanuel Macron sur Twitter:
Lundi soir vers minuit un homme entièrement déguisé en personnage de Tigrou est venu place du Capitole importuner les participants au mouvement "Nuit Debout". Eméché, il a été éconduit, mais Tigrou ne voulait pas en rester là. Il est revenu quelques minutes plus tard, armé... d'un parapluie avec lequel il s'est mis à frapper des participants.
Interpellé par un équipage de la police municipale, l'homme, ivre, a d'abord refusé de décliner son identité, déclarant uniquement "je m'appelle Tigrou". Il a été placé en cellule de dégrisement et mardi matin en garde à vue.
Cet homme de 35 ans, domicilié habituellement à Bordeaux, a expliqué aux policiers qu'il avait voulu s'amuser en faisant semblant de griffer des particpants à Nuit Debout. Il aurait déclaré, selon une source policière, que ces militants ne sont "pas très rigolos". Il semble, qu'habillé en Tigrou, il avait déjà eu une altercation avec un membre du mouvement Nuit Debout, une semaine auparavant à Toulouse.
Il a été libéré à l'issue de sa garde à vue et sera jugé le 14 septembre prochain devant le tribunal correctionnel de Toulouse dans le cadre de la procédure du "plaidé-coupable" pour violences aggravées.
Aux dernières nouvelles, Winnie l'ourson court toujours dans les montagnes des Pyrénées et n'a pas l'intention de participer à la convergence des luttes !
GNAGNAGNA,PAUVRE CONNE,PAUVRE CONNE...
« Hier soir, la place de la République a été le théâtre d’affrontements avec les forces de l’ordre. » Pour une fois, cette phrase-letimotiv des médias, je la fais mienne. Pour une fois, je suis d’accord avec elle : hier soir, Répu était la scène d’une mauvaise pièce de théâtre. Que les acteurs répétaient inlassablement, en boucle comme un CD rayé.
Une semaine qu’on végéte sur la place, coincés entre une AG monolithique et un son électro lancinant et assourdissant, sans départ en manif’ sauvage. Une semaine que tous les soirs on reste pour quelque chose se passe et qu’on part sans que rien ne se soit passé. Une semaine qu’on observe attentivement autour de nous non pas pour repérer les baqueux mais pour entr’apercevoir le commencement du début d’une sortie de la place, cadre au début libérateur et maintenant carcéral.
Enfin, ce soir, les choses ont semblé se lancer ; un message circule de groupe en groupe, se propage plus vite qu’un nuage de lacrymo et nous fait tou-t-e-s nous rassembler vers la bouche de métro. La foule grossit, la marche commence, les gens se changent à la hâte ; mon cœur gonfle et je souris malgré moi : enfin ! Enfin on y va, on se libère, on reprend la rue, on sort de nos piétinements de convalescent-e-s pour prendre la démarche d’un nouvel être sauvage à mille têtes. Mais très vite ça coince : les CRS bloquent le boulevard Saint Martin. Les bouteilles de bière fusent ; les CRS encaissent prudemment. Moi je ne comprends pas. Pourquoi on reste là à vider nos poubelles sur eux ? Le boulevard Magenta et la rue Toudic sont toutes proches et sont libres ! Mais qu’est-ce qu’on attend ? Les CRS sont pesants de leur attirails, lourds de leur obéissance : la mobilité est notre meilleure arme contre eux. Si on part de la place, on gagne ; si on reste, on perd. Nous sommes libres en manif’ sauvage. Libre. Alors qu’est-ce qu’on fout à vomir des Heineken sur eux ? Pourquoi chercher ainsi un affrontement qui nous bloque au lieu d’aller respirer loin d’eux ?
Les sacs se vident ; la banderole part vers le boulevard Magenta : une lueur d’espoir se ranime. Un fumigène éclaire une nouvelle fois la foule ; je vais parler au copain qui le tient pour qu’on sorte de cette glue ambiante. Le temps qu’on échange deux phrases, la banderole a bifurqué et s’est engagée de nouveau dans la place, tournant le dos au boulevard Magenta, qui est toujours libre -pas comme nous.
Commence alors le début de la fin. Les affrontements n’arrêteront pas, et même entre les gens restés sur la place. Un copain a eu la joue tailladée parce qu’il a pris la défense d’une fille qui se faisait emmerder. Je me suis moi-même faite emmerder une dizaine de fois dans la soirée. Des types nous demandaient trois fois du sérum phy en vingt minutes pendant que leurs potes fouillaient dans nos sacs. D’autres complètement bourrés zigzaguaient furieusement entre les gens, bouteilles à la main, le visage trempé de larmes et de sérum phy. Ce sont eux, les romantiques révolutionnaires nocturnes de Nuit Debout.
Voilà ce qui se passe à Répu une fois les commissions rentrées chez elles, la sono de l’AG remballée et les curieu-ses-x partis finir la soirée en boîte. Je sais que ce qui se passe déjà à Répu en journée en désespère plus d’un-e, je sais que beaucoup n’y croient déjà plus depuis longtemps et s’énervent de la teneur des débats et de l’organisation de Nuit Debout -et j’en passe, les critiques mériteraient un autre article. Mais vous êtes où, pour faire avancer les choses ? Vous êtes où, totos, squatteurs, anticapitalistes, anarchistes, antifa, rebelles et révolutionnaires de tous les pays, vous êtes où quand on a besoin de nos idées, de nos valeurs et de nos modes de fonctionnement pour cesser de faire de Nuit Debout au pire un pathétique "théâtre d’affrontements" -et au mieux un "mouvement social"- pour devenir une vraie possibilité insurrectionnelle ? Vous regardez Nuit Debout du même dédain dont les patrons usent envers les ouvriers. Le purisme révolutionnaire n’amène qu’au prêche dans le désert. Des milliers de personnes sont là, chaque jour, parlent entre elles, s’initient à de nouvelles choses, tentent de prendre en main ce qui a jusqu’à maintenant toujours filé entre leurs doigts. Et vous voulez laisser passer ça sous prétexte que les choses stagnent, s’enlisent, sont trop institutionnelles à votre goût et pas assez contestataires ? Mais comment pourrait-il en être autrement si vous n’êtes pas là ? Les idées et les savoirs ont donc une vie propre et se répandent seules sans que personne ne les évoque ? Elle apparaissent comme par magie et nous voilà à préparer une révolution à cinq mille grâce à Marraine la bonne fée ?
Les Lordon et compagnie nous font de grands discours qui font le buzz sur le net ; ils partent une fois les poignées de mains serrées et n’ont jamais fait un seul pas de coté de leur vie. Ne soyons pas comme eux. Notre force, c’est aussi l’anonymat, la joie de connaître quelqu’un en même temps qu’il/elle nous connaît. Et c’est quand on se mettra à parler à sa/son voisin-e qu’on se rendra compte que c’est en fait un-e camarade.
Nous ne sommes pas une élite éclairée. Nous sommes tou-tes-s égaux. Nous avons autant à apprendre des personnes sur Répu qu’elles ont à apprendre de nous. Nous avons la chance inespérée de pouvoir rencontrer des gens que nous n’aurions sans ça jamais croisé de notre vie. Je ne parle pas de prendre la parole en AG, de créer une commission. Je parle simplement de participer de quelques manière que ce soit. D’être (là). De semer des graines, ouvrir des brèches, construire des ponts et d’allumer des mèches.
Plusieurs personnes mobilisées depuis le début de Nuit debout dénoncent l’appropriation des réseaux sociaux par un groupe “d’entrepreneurs de la démocratie 2.0”, et les velléités de certains d’utiliser le mouvement à des fins politiciennes. Enquête.
Est-ce un effet de la fatigue, après quelques 50 nuits passées debout depuis le 31 mars ? A l’enthousiasme de participer à un mouvement inédit de contestation de “la loi travail et de son monde” place de la République à Paris, a succédé le ressentiment entre certains activistes de la première heure. La polémique a éclaté au grand jour le 14 mai, lors de la lecture d’un texte collectif de plusieurs membres des commissions structurelles de Nuit debout devant l’Assemblée populaire. En cause : la gestion des outils de communication en ligne du mouvement – site internet, Twitter et Facebook.
“Messages apolitiques, inoffensifs, et pour tout dire démobilisateurs”
“Le relatif dépeuplement de la place depuis quelques jours peut être imputé en partie à la diffusion de messages apolitiques, inoffensifs, et pour tout dire démobilisateurs. La révolution des likes n’aura jamais lieu”, clament-ils. Et de jeter à la vindicte sans les nommer des “professionnels du marketing et du community management” qui se sont “accaparés” ces outils. Ce 19 mai, dans un nouveau texte collectif qui a circulé sur différentes listes des Nuits debout, les noms sont lâchés. Noémie Tolédano et Baki Youssouphou, co-fondateurs de l’agence de com’ Raiz, sont accusés d’avoir acheté le nom de domaine “nuitdebout.fr”, tandis que Benjamin Ball, hyper-militant et “community organizer” influencé par Saul Alinsky, et Joseph Boussion, ancien porte-parole de Nouvelle Donne, dont il a démissionné en juin 2015, sont accusés de “monopoliser” et de dépolitiser la communication en ligne du mouvement.
Pire encore, ils auraient l’intention de faire de Nuit debout “leur tremplin pour les élections” de 2017. En effet, le 3 mai dernier, une réunion à laquelle ont participé Benjamin Ball et Joseph Boussion portait sur l’”articulation” entre le processus Vogüé et Nuit debout. Le processus Vogüé, du nom d’une petite commune de l’Ardèche, consiste en des rencontres d’une quarantaine de mouvements “citoyens” dont une partie travaillent à construire un “label citoyen” en vue des législatives de 2017. Joseph Boussion est par ailleurs l’un des candidats “déclarés” sur le site LaPrimaire.org.
Les législatives en ligne de mire ?
Dans un compte-rendu de cette réunion qui a fuité, il apparaît que les participants réfléchissaient au moyen d’amener Nuit debout à s’intéresser aux élections. On y lit par exemple cette série de questions : “Comment faire pour que les élections législatives deviennent un objectif commun ? Comment aller aux législatives ? Quelle stratégie dans cette phase de politisation ?” Et l’une des solutions évoquée : “En créant une commission sur le thème des législatives à Nuit debout”.
Contacté par Les Inrocks, Benjamin Ball, membre du Media Center – qui s’est fendu d’une lettre ouverte en réponse à certaines de ces accusations -, précise que ce compte-rendu ne reflète pas l’ensemble de ce qui a été dit, et défend que leur intention n’était pas de manipuler le mouvement :
“Avant le mouvement, une partie des gens qui participent au Média Center avaient un passé militant. Joseph et moi sommes engagés dans le processus de Vogüe-Saillant. On travaille plus spécifiquement à la création d’un label citoyen, pour qu’un mouvement fort, qui parte de la base, se constitue sans se transformer en un Podemos, trop vertical. Cette réunion a beaucoup porté sur Nuit debout, car il est au cœur des débats à l’heure actuelle : Pourquoi les gens viennent ? Y a-t-il eu des tentatives de récupération ? Est-ce que la question électorale est posée au sein des Nuits debout ? Comment aider à ce que cette question se pose ? C’est tout. Ma réponse a été de dire qu’il y a peu d’endroits où la question se pose, en tout cas pas à République”.
“Manœuvres politiciennes”
Qu’à cela ne tienne, la publication de cette information fait bouillonner le terreau militant de Nuit debout. Du côté du groupe des initiateurs proches ou membres de Convergence des luttes, la découverte de ce compte-rendu a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase :
“Ce sont les premiers à reprocher aux membres de Convergence des luttes d’être trop politisés, à nous suspecter de rouler pour Mélenchon par exemple [des soupçons de noyautage par le Parti de gauche ont circulé en avril, ndlr], mais on s’aperçoit que sous les apparences, ce sont eux qui font des manœuvres politiciennes, plaide Leïla Chaibi, membre de Convergence des luttes et par ailleurs encartée au Parti de gauche, qui n’a toutefois pas participé à la rédaction du texte collectif. Le problème c’est qu’ils n’en débattent pas publiquement, c’est fait de manière cachée”.
Concernant le nom de domaine “Nuit debout”, Benjamin Ball confirme qu’il a été déposé par Noémie Tolédano et Baki Youssouphou au nom de la société Raiz, “pour éviter que cela soit fait par des personnes mal intentionnées”. Les réseaux sociaux ont eux été créés collectivement : “L’un des principes à Nuit debout, c’est que celui qui propose fait, et qu’il est ensuite responsable. On a donc créé le Media Center. Au départ on était entre huit et dix. Maintenant nous sommes 27, dont certains ne sont pas forcément de Paris, il y a donc une forme de représentativité”.
Celle-ci ne satisfait pas certains de ses détracteurs, qui reprochent à certains animateurs du Media Center de prononcer des “arbitrages apolitiques, ou en tout cas peu représentatifs de la combativité de Nuit debout”. Camille, qui compte parmi les initiateurs de Nuit debout, et qui préfère garder l’anonymat, rapporte ainsi que “dès qu’on suggère des communiqués trop engagés, ils ne le diffusent pas, sous prétexte que cela nuit à une ‘narration positive’ du mouvement. Le Média Center définit sa stratégie de communication de manière autonome. Quand on voit que ces gens disposent du seul outil qui permet à Nuit debout d’exister en dehors de la place, c’est problématique”.
Où va l’argent des t-shirt “Nuit debout”
Enfin, le texte collectif dénonce la commercialisation sur la place de la République de T-shirt à l’effigie de Nuit debout, pour le compte de la Boîte militante, émanation de l’association des Désobéissants. Les profits, qui devaient être reversés au mouvement, sont soupçonnés d’être “entièrement privatisés”. Qu’en est-il vraiment ? Xavier Renou, meneur des Désobéissants, explique avoir vendu jusqu’à présent, grâce aux stands de l’association sur la place de la République et à la boutique en ligne, 33 T-shirt, qui ont rapporté environ 150 euros à l’association. Les Désobéissants auraient ainsi gagné davantage en vendant des crêpes sur la place, dont les bénéfices ont été reversés à la commission logistique. Il est vrai que le prix du T-shirt est dissuasif : 19,50 euros. “C’est du tissu écolo du label GOTS, le plus exigeant au monde, et nous les faisons confectionner dans un chantier d’insertion sociale en banlieue parisienne, la fabrication est donc locale”, précise Xavier Renou.
Au départ, les bénéfices de la vente des T-shirt, ainsi que les ressources tirées de l’Alter-JT – journal alternatif lancé il y a un an par les Désobéissants -, devaient servir à financer TV Debout. Mais la méfiance du mouvement vis-à-vis des étiquettes et autres drapeaux a eu raison de ce projet : “Les gens ont finalement souhaité garder une totale indépendance, y compris vis-à-vis de l’Alter JT. Ils ont lancé un pot commun sur internet qui a bien fonctionné”, relate Xavier Renou. L’argent de l’Alter JT et des T-shirt a donc servi à financer des stages de formation à la non-violence et à la désobéissance civile dans les villes qui ont répondu à l’appel “Nuits debout 100% non-violentes et désobéissantes”.
Si ces querelles internes témoignent de la vigilance de certains activistes qui ont à cœur que le mouvement ne soit pas récupéré, elles montrent aussi qu’il a en partie échoué à sortir du ghetto militant. Elles témoignent enfin d’un clivage politique profond entre deux camps, l’un dit “citoyenniste” – défendant une ligne “ni droite ni gauche”, et souhaitant concilier convergence des luttes et convergence de ceux qui ne luttent pas encore –, et l’autre qui souhaite surtout faire converger les collectifs en lutte, et qui n’a pas peur de se revendiquer de l’anticapitalisme. Nuit debout n’a-t-elle pas d’ailleurs failli s’appeler Nuit rouge ?
Par Mathieu Dejean
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