Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede bajotierra le Sam 7 Mar 2009 16:35

Trés bon texte en effet

Pensons-nous être si exceptionnels -que nos idées soient tellement farfelues - au point que personne ne pourrait nous comprendre ?

En ces temps de grogne de plus en plus généralisée, rien n’est moins vrai. Les oreilles et les esprits sont probablement plus ouverts aux remises en question. Encore nous faut-il savoir saisir les occasions et mettre en avant nos idées de manière décomplexée.
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede qierrot le Sam 7 Mar 2009 19:47

Moi je ne trouve pas. C'est bien écrit, çà fait vachement radical, mais c'est cultiver la marge et l'identité dans un cadre de répression et de soutien, et c'est donc dans les circonstances, et circonstances qui font que la répression et la criminalisation des mouvement sociaux et de la contestation va en s'accentuant, une forme de suicide. Quand les flics embarquent du monde en fin de manif ils ne font pas le tri entre les sensibilités politiques des gens. Et c'est ensemble qu'il faut et faudra faire front. Et je ne mélange pas çà avec le fait de s'unir ou non politiquement avec d'autres forces politiques. Et c'est aussi dans ce contexte, comme dans les luttes en général, que l'on a à faire passer nos idées, et pas dans la martyrologie. C'est pareil appliqué aux manifs où il ne faudrait pas aller et paraître pour ne pas cotoyer des rouges, des soc-dèms...or c'est là aussi qu'il faut être si l'on ne veut pas rester au musée des groupuscules nombrilistes.
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede sebiseb le Sam 7 Mar 2009 20:42

qierrot a écrit:..si l'on ne veut pas rester au musée des groupuscules nombrilistes.

Pas faux.. :roll:
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Dim 8 Mar 2009 03:37

qierrot a écrit:Moi je ne trouve pas. C'est bien écrit, çà fait vachement radical, mais c'est cultiver la marge et l'identité dans un cadre de répression et de soutien, et c'est donc dans les circonstances, et circonstances qui font que la répression et la criminalisation des mouvement sociaux et de la contestation va en s'accentuant, une forme de suicide. Quand les flics embarquent du monde en fin de manif ils ne font pas le tri entre les sensibilités politiques des gens. Et c'est ensemble qu'il faut et faudra faire front. Et je ne mélange pas çà avec le fait de s'unir ou non politiquement avec d'autres forces politiques. Et c'est aussi dans ce contexte, comme dans les luttes en général, que l'on a à faire passer nos idées, et pas dans la martyrologie. C'est pareil appliqué aux manifs où il ne faudrait pas aller et paraître pour ne pas cotoyer des rouges, des soc-dèms...or c'est là aussi qu'il faut être si l'on ne veut pas rester au musée des groupuscules nombrilistes.


Certes mais la très grande majorité des prolétaires n'est pas organisé ni proche d'une orga politique. Et il faut sortir justement du nombrilisme, c'était à ce titre, pas inintéressant les débordements de ce soir autour de la place Plumereau, ça a permis de discuter avec beaucoup de 16-25 ans... très choqués par la violence des interventions policières... Mais en dehors des situations concrètes dangereuses, il faut faire attention à ne pas se retrouver à cosigner des textes avec n'importe qui :!: Solidarité et non unité :!:
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede sebiseb le Dim 8 Mar 2009 12:28

Tu soulignes un point essentiel, on peut-être solidaire d'une cause (je dirais co-solidaire, même si elle est initiée par une orga en particulier) sans pour autant s'unir (c'est à dire être reconnu tous sur le même plan, et laissé ouvert tout sortes d'amalgames).

Je pense par exemple aux manif's visant à dénoncer les bombardements israëliens, où clairement des barbus cherchent à récupérer la cause aux côtés d'organisations de gauche qui se font traiter de tous les noms ensuite parce qu'elles ont laissé faire l'amalgame..
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede fu hsang le Dim 8 Mar 2009 13:37

tout a fait seb , tu peux etre solidaire avec les palestineins et les israeliens sans etre solidaire du hamas ou de tsahal ,de l etat d israel ou de l autorité palestinnienne
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Alayn le Lun 9 Mar 2009 03:39

Bonsoir ! Bon pour revenir un peu au sujet du topic, voici le petit compte-rendu d'une copine qui était au tribunal le 6 mars:

"Bonjour à toutes et à tous !
J'étais au tribunal: le délibéré sera rendu vendredi prochain à 14h.

Nous étions une centaine dans le couloir près de l'escalier A. Personne n'a pu rentrer pour cause de huis clos. De très nombreux journalistes. Guy Bedos a fait une apparition mais est reparti très vite (il ne semblait pas suffisamment en forme pour rester debout dans un couloir). Quelques slogans ("Libérez Julien", peut-être d'autres, mais rien de bien violent, même en parole).

Vers 16h, nous nous sommes fait expulser manu-militari (2 rangs de flics, non équipés, qui poussent) sous prétexte de ces slogans. Ceux-ci ont alors enflé, tant dans le volume sonore que dans les termes: "police partout, justice nulle part", "police partout, justice de classe", "Pétain reviens, tu as oublié tes chiens".

Nous avons été refoulés jusque de l'autre côté de la rue. Très vite, nous n'étions plus qu'une quinzaine à deviser tranquillement en petits groupes de l'affaire et autres sujets politiques. Au bord du trottoir, une rangée de flics restait là pour nous empêcher de retraverser la rue. Vers 17h l'un d'eux, avec un grand chef qui avait fait son apparition entre temps, s'est approché pour nous annoncer que le délibéré serait rendu vendredi prochain à 14h ; il a ajouté que cette fois-ci, ce serait public..."

Bises
Monique
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mar 10 Mar 2009 00:50

La bataille des rails...


Parce qu’ils sont nécessaires aux flux économiques, parce qu’ils imposent un modèle de société, expulsent, privatisent ou collaborent avec l’industrie nucléaire, les trains sont un terrain de luttes.

Le blocage matériel de voies de chemin de fer que le gouvernement français a tant bien que mal cherché à monter en épingle en tant que projet « terroriste » est en fait répandu comme outil d’action politique en France... et en Europe. Ici des actions de ce type se sont multipliées ces dernières années dans le cadre de grèves de cheminots en 2007 ou de mouvements qui comme celui contre le CPE en 2006 en appelèrent à un blocage de l’économie. Ailleurs en Europe, dans le Val de Suza et au pays basque contre la construction de lignes de Trains à Grande Vitesse, ou encore en Allemagne, ce type de sabotage est relié à des luttes populaires. D’ailleurs le 8 novembre dans la nuit même où des crochets métalliques étaient posés sur les caténaires des lignes SNCF en France, des sabotages sur les boîtiers électriques des trains ont eu lieu en Allemagne et des milliers de personnes se sont employées à bloquer les voies de chemin de fer par tous les moyens.

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En Allemagne, les transport de déchets nucléaires (connus sous le nom de Transports CASTOR) sont tous les ans confrontés à des mobilisations massives, notamment des habitant-e-s de la région rurale où sont entreposés les déchets. L’utilisation de crochets métalliques accrochés sur les caténaires des lignes de train (hakenkrallen) n’est d’ailleurs pas apparue le 11 novembre. Cette méthode, qui laisse selon les médias les experts de la SNCF pantois, avait notamment déjà été utilisée dans le cadre des blocages de ces transports de déchets. En parallèle des manifestations de masses visant à submerger les rails, ont en effet lieu un grand nombre d’actions de sabotage contre les lignes de trains [1]. Il s’agit de stopper, retarder ou perturber le transport lui-même, ou de viser la Deutsche Bahn d’une manière plus générale à cause de sa collaboration avec l’industrie nucléaire.

Image

Les formes que prennent ces actes de sabotage témoignent de la créativité de leurs auteurs face à la mise en place de dispositifs policiers très lourds sur le trajet du ’castor’ : des crochets métalliques accrochés sur les caténaires (hakenkrallen), des attaques incendiaires contre les boîtiers de signalisation des lignes, des dispositifs de blocage sur les rails (hemmschuhe), des inondations provoquées pour creuser les fondements des rails, des barrages sous diverses formes sur les routes et sur les rails. Il peut s’agir aussi bien de personnes s’enchaînant aux rails ou à des blocs de béton construits sous les voies, que de troncs d’arbres renversés ou encore d’impressionnantes barricades de tracteurs imbriqués les un dans les autres. Des destructions du matériel de la police (antennes de haut débit, véhicules, logements) ont aussi lieu pour perturber les transports et la répression. [2] En France des actions de moindre ampleur ont été aussi régulièrement menées par des anti-nucléaires sur le passage des trains. C’est en s’enchaînant à des rails lors d’une de ces actions que Sébastien Briat a été écrasé par un train de déchets en novembre 2004 vers Nancy, malgré les précautions prises pour prévenir du barrage humain. Même si ce type d’enchaînement ne s’est pas arrêté pour autant, ce fait tragique entre autre, a pu participer ici à ce que des personnes privilégient des sabotages matériels à des barrages humains.

Des caténaires et un crochet doré...

D’ailleurs, au moment où une personne reste en détention provisoire en France, arrêtée dans le cadre d’une enquête suite à des actes de sabotage contre des lignes de TGV par des crochets métalliques, et finalement soupçonnée d’avoir formé et dirigé une association terroriste, il est intéressant de rappeler que l’Etat allemand avait déjà tenté il y a dix ans de répondre à des sabotages de ce type par une procédure « anti-terroriste » de grande ampleur... mais sans grand succès, entre autre du fait d’un soutien large et offensif.

Image

Le 7 octobre 1996 des crochets métalliques furent fixés simultanément sur des caténaires dans 12 endroits en Allemagne, puis le 25 février 1997 sur encore 8 autres en Allemagne du nord. Un communiqué détaillé exigeant de la Deutsche Bahn l’abandon des transports nucléaires fut envoyé par ’des groupes autonomes’. La direction centrale de la police judiciaire ouvrit une enquête anti-terroriste (pour association terroriste selon le paragraphe 129 a) et le 6 juillet 1999 plusieurs perquisitions eurent finalement lieu.

Une personne fut inculpée par la suite pour avoir "porté atteinte à la vie et à la santé des voyageurs du fait de la destruction de la ligne électrique alimentant le train". Elle était également accusée de "faire partie d’une association à but terroriste visant, par des sabotages de lignes de train, à empêcher le transport des déchets nucléaires et à troubler la société dans son entier d’une manière révolutionnaire". Après les perquisitions, les enquêteurs avaient déclaré que les documents trouvés donnaient des indications sur la préparation et la réalisation des actions, sur la communication des membres du groupes entre eux, sur la conception de leur organisation « à but terroriste » et sur le fait que la personne accusée soit soi-disant située dans le haut de la hiérarchie des ’groupes autonomes’. [3]

http://www.brassicanigra.org/local/cach ... -779da.jpg

A partir de 1999, le groupe de soutien ’Goldene Hakenkralle’ (’crochet doré en forme de griffe’) a, avec une attitude offensive face aux accusations, mené des actions variées. Dans le cadre d’actions spectaculaires de visibilisation de l’affaire, un ’crochet-griffe doré’ géant de plusieurs mètres a par exemple été construit (en utilisant des tuyaux en plastique et du papier métallisé). Malgré des tentatives d’interdiction qui firent scandale, la ’sculpture’ a finalement connue une cérémonie d’inauguration en bonne et due forme devant la gare centrale de Brême [4]. Une exposition intitulée ’autour du crochet-griffe, de la résistance et de la solidarité’ a été organisée dans plusieurs lieux et la sculpture dorée a fini sur le toit du squat la Rote Flora à Hambourg où elle a été illuminée pendant plusieurs semaines.

L’enquête fut finalement close dans le silence, sans procès et sans condamnation, en 2003, non sans avoir permis, comme souvent dans ce genre de cas, de rassembler un grand nombre d’informations sur des groupes et personnes s’inscrivant dans des politiques antagonistes.

... et la ’piste allemande’ flamboyante des enquêteurs.

Un rapport de police allemand du 8 novembre 2008 relève, à côté de nombreux blocages assez efficaces sur le trajet du ’castor’, des attaques incendiaires contre des boîtiers de signalisation sur la ligne Hamburg-Berlin en Brandeburg dans la nuit du 7 au 8 novembre, au même moment où les trains français ont été bloqués par les fameux crochets métalliques. Des allumes-feu auraient été trouvés lors des interventions des pompiers. Un porte-parole de la police nationale évoquait un lien éventuel avec le transport des déchets nucléaires qui avait lieu au même moment. Il précisait néanmoins qu’aucune lettre de revendication n’aurait été trouvée.

C’est peu après que les sources proches des enquêteurs anti-terroristes français commencent à parler de la piste allemande, en évoquant une lettre revendiquant des attaques simultanées contre des lignes de chemin de fer en Allemagne et en France. Un rapport du 15 novembre de la sous-direction antiterroriste de Paris, publié le 22 novembre sur le site de Mediapart à Paris, cite cette lettre en précisant qu’elle aurait soi-disant été envoyée au Berliner Zeitung, quotidien allemand. Mais les médias, relayant la propagande policière sur une mystérieuse « cellule invisible » agissant pour déstabiliser l’État sont d’abord restés silencieux sur la question. Cette omission vient-elle du fait que ces sabotages auraient semblé bien moins insolites, dramatiques et isolés s’ils avaient pu apparaître comme reliés à des luttes en cours et à des pratiques largement partagées, en l’occurrence au même moment outre-Rhin. La collusion possible avec les anti-nucléaires allemands cadrait d’abord mal avec le portrait du monstre que l’État cherchait à créer. Ce lien à double tranchant pour l’État n’est apparu timidement dans les voix officielles que plus tard, mais dans le but étroit cette fois d’étayer la thèse des contacts « terroristes » internationaux de la « cellule invisible ».

C’est seulement le 13 décembre 2008, que la TAZ, journal berlinois de gauche écologiste, se décide à publier un article mentionnant cette lettre en la mettant en lien avec les arrestations du 11 novembre en France : "Dans la nuit du 8 novembre, des lignes de chemin de fer allemandes et françaises ont été simultanément cibles d’actes de sabotage - au moment du transport de déchets nucléaires - mais sur des endroits éloignés du trajet. Des opposants au nucléaire revendiquaient cette action dans une lettre intitulée ’Parce que nous avons ras le bol’ arrivée en novembre à la TAZ : ’Avec des attaques incendiaires et des crochets métalliques, [...] nous avons dirigé aujourd’hui aux aurores notre colère contre les lignes de transport de (déchêts) nucléaires’. La lettre est signée ’en souvenir de Sébastian’." [5]

Le 15 décembre 2008, l’AFP publie une note sur son site disant avoir obtenu une copie de la lettre. La note cite aussi Bascha Mika, la rédactrice en chef de la TAZ : "Le Tageszeitung a décidé de ne pas publier le document car nous ne l’avons pas trouvé assez intéressant d’un point de vue journalistique. [...] Nous ne l’avons transmis à personne et aucune autorité ne nous a jusqu’à présent interrogés à ce sujet."

Dans un article du 16 décembre la correspondante à Paris de la TAZ se voit obligée de revenir sur les confusions autour de cette lettre : "Les enquêteurs anti-terroristes français cherchent dans la scène autonome allemande des explications quant aux faits survenus la nuit du 7 au 8 novembre 2008 sur des lignes TGV. Une lettre de revendication en allemand envoyée à la TAZ semble nourrir actuellement les enquêtes. Le texte, non daté revendique les attaques simultanées sur quatre lignes de chemin de fer en France et quatre lignes en Allemagne et sur ’plusieurs lignes dans les environs de Berlin’, dans cette même nuit quand le train de déchêts nucléaires était sur le chemin de La Hague vers Gorleben. Dans sept paragraphes, l’écrit explique les actions entre autres en les liant à la résistance contre l’énergie nucléaire et les lieux de stockage de déchets nucléaire à Gorleben et Asse, ainsi qu’en réaction au ’sauvetage étatique du capitalisme’. Paradoxalement, les enquêteurs anti-terroristes connaissaient le contenu de cette lettre depuis plusieurs semaines déjà puisque le rapport d’enquête publié sur le site de Mediapart à Paris citait cette même lettre de revendication. [...] Il est relativement mystérieux que les enquêteurs français prétendent savoir quand et où la lettre aurait été envoyée et arrivée. Le document parisien soulève que la lettre aurait été envoyée d’Hanovre le 9 novembre et serait arrivée le 10 novembre. De plus, les enquêteurs déclarent que le destinataire de la lettre aurait été la Berliner Zeitung. Le Berliner Zeitung a pourtant nié publiquement avoir reçu cette lettre. [...] Et la TAZ ignore l’existence d’une enveloppe tamponnée indiquant un éventuel lieu d’expédition." [6]

Face à cette situation embrouillée, des choix stratégiques se posent pour les personnes impliquées dans le soutien aux personnes incarcérées actuellement et luttant plus largement contre l’antiterrorisme comme outil policier de plus en plus puissant face aux résistances politiques. Quelle résonance politique donner à une lettre de revendication dont le contenu ne se fait connaitre qu’à travers des traductions fragmentaires dans les rapports de police et dans les médias ? Que les auteurs des sabotages en France aient choisis de ne pas poser de revendications officielles, ou que leur revendications aient été passées sous silence, n’est-il pas important de montrer que leurs actions entrent néanmoins fortement en résonance avec de nombreuses autres menées au même moment outre-Rhin sans qu’on leur ait cette fois accolé le même type de propagande anti-terroriste qu’en France ?

Toujours est-il que la répression s’organise au niveau européen : selon le ’Journal du Dimanche’ du 14 décembre, les enquêteurs français coopèrent avec la police judiciaire fédérale allemande et la police italienne sur cette affaire. Le fait d’avoir clos sans poursuite l’enquête anti-terroriste concernant les crochets métalliques sur des lignes de train en 2003, n’a évidemment pas empêché la police judiciaire allemande de communiquer maintenant les noms des suspects de l’époque aux enquêteurs français sur leur ’piste allemande’. Une tendance est donc mise en évidence par cette coopération policière : L’échange d’information entre les polices nationales concernant les personnes impliquées dans des milieux anti-autoritaires se fait de plus en plus sur la base de similitudes prétendues d’idées, de façons d’agir et de s’organiser entre différents groupes et dépasse ainsi largement les enquêtes sur des actes précis.

Il est d’autant plus urgent de faire connaître aussi plus largement la grande variété des stratégies offensives inventées dans des contextes locaux précis à l’encontre de cette répression afin d’être mieux préparés à les adapter à d’autres contextes.

Plus généralement, cette histoire rappelle que l’Histoire officielle n’est jamais qu’une grille de lecture déterminée. Elle est mise en avant ou omission soigneusement organisées de certains faits par les pouvoirs en place et généralement docilement relayée par les médias. A nous de leur opposer nos récits et parti-pris antagonistes.

Image

Extrait du tract "Sur les sabotages de voies de chemin de fer", publié sur divers indymedias.

En période de crise économique du système capitaliste qui organise lui réellement l’appauvrissement et la terreur sur à peu près la totalité de la population mondiale, il peut paraître dérisoire et symbolique d’un cruel aveuglement idéologique de crier au loup pour quelques dizaines de trains retardés. Dans un monde qui fonce droit dans le mur, il y a pourtant peut-être quelque chose de salutaire à suspendre l’agencement du quotidien, les flux à grande vitesse de travailleurs, cadres, businessmen, traders, marchandises, déchêts nucléaires sur lesquels se basent la machine à exploiter.

S’attaquer au TGV, c’est aussi viser une certaine forme de l’organisation sociale, comme en témoigne les résistances populaires à la construction des lignes à grande vitesse au pays basque et dans le Val de Suza italien, aussi bien pour ce qu’elles impliquent en terme de restructuration locale que par refus du modèle économique qu’elles composent. Car même si dans certains articles on nous dit que les saboteurs s’en sont pris au "sevrice public", il est assez clair que lorsqu’on parle de TGV aujourd’hui, on parle d’une structure en voie de privatisation, qui vend de plus en plus cher le droit de se déplacer, précarise ses travailleur-e-s, et a pour fonction principale d’assurer le transport constant de main d’oeuvre, nécessaire à l’économie hors-sol.

On peut le voir comme une manière parmi tant d’autres d’interroger concrètement le dogme sacré de la croissance économique, décrié aujourd’hui par une bonne partie de la population (qui en subit les effets quotidiens). Le fait d’entretenir cette capacité de blocage et de perturbation matérielle sera donc décisif pour ceux et celles qui entendent encore réorienter la société sur d’autres rails, pour construire les rapports de force des luttes présentes et à venir.


Le point sur les différentes affaires (pour l’historique, cf. les précédents numéros de Blabla) :

fumigènes de Vincennes : Ivan est toujours sous contrôle judiciaire, Bruno, qui lui s’y était soustrait, est toujours en fuite.
Dépanneuse de police : Isa, Juan et Damien sont poursuivis pour avoir tenté d’incendier un véhicule de police durant la période agitée des présidentielles. Isa a été relâchée sous contrôle judiciaire après un an de détention, Juan et Damien sont toujours sous les verrous.
Farid, qui avait été arrêté en même temps qu’isa, et lui aussi poursuivi et sous CJ pour son appartenance à la mouvance anarcho-autonome
Sabotage SNCF : Sur les dix personnes placées en garde-à-vue en novembre, neuf sont mises en examen. 4 ne sont pas poursuivies pour les sabotages, mais seulement pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste" (en bref, on les accuse seulement d’être proche des autres, mais ça suffit pour être traité de terroriste). Sur les 5 autres, seul Julien est maintenu en détention, accusé d’être le chef de la "cellule terroriste".

Plus d’infos sur https://infokiosques.net/mauvaises_intentions et sur http://soutien11novembre.org


luther blisset

P.-S.
Tremblez Bourguignons, l’ultra-gauche est à vos portes !
Le Bien Public ne pouvait évidemment pas passer à côté de l’agitation médiatique autour de l’affaire des sabotages SNCF. C’est Gilles Dupont, dont la principal vertu journalistique tient dans sa fréquentation assidue de la place Suquet, qui s’y colle. Malheureusement, il semble que ni le journaliste, ni les flics qui lui font la dictée ne soient très fort en géographie, puisqu’alors que l’un des sabotages a eu lieu dans l’Yonne, l’article, intitulé "L’ultragauche menace-t-elle les caténaires en Bourgogne ?", commence par annoncer que la région a été épargnée par les saboteurs d’ultragauche...
Pour le reste, on apprend qu’une ligne près de Cluny avait été visée par un acte de sabotage lors du mouvement des cheminots en novembre 2007, et que "l’ultragauche, forme de mouvance anarcho-autonome, composée de nihilistes « potentiellement violents » [...] serait peu représentée en Côte-d’Or", avec une trentaine de membres, qui s’illustreraient par des "violences lors des manifestations" ( !). C’est vrai que la Bourgogne talonne la Grèce dans le classement mondial du lancé de cocktails molotov...
De toute façon, on ne demande pas au BP d’écrire autres choses que des âneries dès l’instant où il s’agit de traiter d’autres sujets que le loto du comité de jumelage de Brochon - Weinolsheim.
Pour les sujets plus sérieux (avec tout le respect qu’on doit par ailleurs au travail d’ouverture culturelle initié par ce comité), il y a Blabla.
Notes

[1] http://tarnac9.noblogs.org/post/2008/12 ... akenkralle

[2] Une liste assez bien fournie recensant les actions de ces dernières années est trouvable dans la zeck 147, en allemand.

[3] Ce résumé s’appuie sur la documentation sur http://www.nadir.org/nadir/initiativ/gold

[4] http://de.indymedia.org/2003/10/64215.shtml

[5] traduit de ’Die Tageszeitung’, 13/14 décembre 2008

[6] traduit de ’Die Tageszeitung’, 16 décembre 2008
Nico37
 

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Denis le Mar 10 Mar 2009 19:34

Excellent et remarquable reportage, Nico37

et dans la foulée :

http://orailec.free.fr/CSA/revendic_Tarnac.pdf

Denis (arf!)
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede georges le Mer 11 Mar 2009 03:27

CARNUS a écrit:Excellent et remarquable reportage

extrait du BLABLA n°9 à télécharger pour lire ou imprimer chez soi
lien direct http://www.brassicanigra.org/IMG/pdf/blabla9.pdf (fichier un peu lourd : 17,8 mo, mais pour 56 pages !)
georges
 
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede georges le Mer 11 Mar 2009 03:30


As-tu la date de la dépêche AFP ?
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Denis le Mer 11 Mar 2009 19:28

A priori le 14 décembre 2008;

je l'avais récupéré sur :
_________________________________________________________________
http://fr.news.yahoo.com/2/20081215/tfr ... 6f567.html
[dépêche afp : les sabotages sont revendiqués]
_________________________________________________________________

Déduction par le fait que dans le lien du fichier, il y a 20081215 (news de yahoo), et que le fichier word commence par
"hier 17h18 / AFP"

Denis (ourf!)

Ah oui !!, sachant qu'à l'origine c'était après un article de Nazairien, auquel j'avais répondu, d'ailleurs:

http://bellaciao.org/fr/spip.php?article76191
Denis
 

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede georges le Ven 13 Mar 2009 18:56

Troisième refus de mise en liberté pour Julien Coupat
13.03.09 | 16h40


PARIS (Reuters) - La cour d'appel de Paris a rejeté une nouvelle demande de mise en liberté de Julien Coupat, principal suspect dans l'affaire du sabotage de lignes de TGV à l'automne dernier.

Il s'agissait de la troisième demande du militant d'extrême gauche, qui est incarcéré depuis le 15 novembre dernier à la prison de la Santé, à Paris.

Dénonçant un "fiasco politico-judidiaire", son avocate et ses proches ont annoncé qu'ils demanderaient que la justice antiterroriste soit déclarée incompétente et ont appelé les Français à les rejoindre dans leur combat.

"Julien Coupat reste en détention, il s'agit d'un déni de justice, d'un déni des principes du droit", a dit à la presse Me Irène Terrel. "C'est une histoire scandaleuse, il faut que ça s'arrête", a renchéri Michel Lévy, le père de la compagne du suspect, Yildune.

Dernier membre du "groupe de Tarnac" encore en détention provisoire, Julien Coupat, 35 ans, avait été remis en liberté par un juge des libertés en décembre mais le parquet a obtenu de la cour d'appel l'infirmation de cette décision.

L'affaire porte sur le sabotage de lignes TGV dans la nuit du 7 au 8 novembre et le 26 octobre 2008.

Pour la défense, le dossier est vide et a été construit par le pouvoir avec un but politique. Les services de l'antiterrorisme estiment pour leur part avoir démantelé un groupuscule violent de "l'ultra gauche".

"DÉRIVES"

Julien Coupat est présenté comme le chef des saboteurs.

Au total, cinq femmes et quatre hommes, âgés de 22 à 34 ans sont mis en examen, notamment pour "association de malfaiteurs, destructions en relation avec une entreprise terroriste".

Michel Lévy dénonce une "scénarisation" de l'affaire à partir d'un voyage de Julien Coupat au Canada, d'où il serait entré illégalement aux Etats-Unis en janvier 2008 avec son amie Yildune faute, selon lui, de disposer d'un passeport biométrique.

La gendarmerie royale canadienne avait découvert un sac à dos dans une voiture abandonnée et, à l'intérieur, la copie du permis de conduire de Julien Coupat et des notes sur une réunion anarchiste organisée du 10 au 15 janvier à New-York.

"A la suite de quoi on a construit une figure terroriste. L'antiterrorisme est quelque chose qui attaque les libertés publiques et on entre dans des dérives", a-t-il dit à Reuters.

"Les auteurs de ces lois (antiterroristes) ne se doutaient pas qu'on s'en servirait pour criminaliser le mouvement social", a-t-il ajouté.

Julien Coupat a beaucoup voyagé, en Grèce ou en Italie, pour participer à des forums sur l'écologie et s'est impliqué dans la défense des sans-papiers et contre le fichage génétique.

La police, qui l'avait placé sous surveillance, affirme l'avoir vu au volant d'une Mercedes avec sa compagne le soir du 7 novembre non loin du lieu du sabotage d'une voie ferroviaire.

Gérard Bon, édité par Yves Clarisse

http://www.lemonde.fr/web/depeches/0,14 ... -37,0.html
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Denis le Ven 13 Mar 2009 20:21

Et celle-là aussi :

http://www.lemonde.fr/societe/son/2009/ ... id=1164748

"Nous ne répondrons plus aux questions du juge" ont déclarés les 8 mis en examen sous contrôle judiciare

et :

http://www.lemonde.fr/societe/article/2 ... id=1164748

Résistance !!!

Salutations d'un Anarchiste énervé grave, et solidaire, OUARGGGLHHHHH (cris de défoulement et de violences contenues)
Denis
 

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Alayn le Sam 14 Mar 2009 03:20

Bonsoir ! Ne désespérons pas ! Les comités de soutien vont certainement se "réveiller" face à ce nouveau camouflet de "l'in-Justice"...

Il n'est pas question d'oublier Julien et toutes et tous les encabanné(e)s politiques. JAMAIS !
Salutations Anarchistes !
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Denis le Lun 16 Mar 2009 19:20

(Lettre de 8 des 9 inculpés de l’affaire de Tarnac, à leurs juges.)

Voilà quatre mois que le feuilleton médiatico-judiciaire intitulé l’"affaire de Tarnac" ne cesse de ne plus vouloir finir. Julien (Coupat) va-t-il sortir à Noël ? Pour le Nouvel An ? Aura-t-il plus de chance vendredi 13 ? Non, finalement on le gardera encore un peu en prison, enfermé dans son nouveau rôle de chef d’une cellule invisible. Puisqu’il semble que quelques personnes aient encore intérêt à faire perdurer cette mascarade, même au-delà du grotesque, il va nous falloir endosser, encore une fois, le rôle que l’on nous a taillé ("les 9 de Tarnac"), pour un nécessaire éclaircissement collectif. Alors voilà. ...

Primo. Pendant que des journalistes fouillaient jusque dans nos poubelles, les flics reluquaient jusqu’à l’intérieur de nos rectums. C’est assez désagréable. Depuis des mois vous ouvrez notre courrier, vous écoutez nos téléphones, vous traquez nos amis, vous filmez nos maisons. Vous jouissez de ces moyens.

Nous, les neuf, nous les subissons, comme tant d’autres. Atomisés par vos procédures, neuf fois un, alors que vous, vous êtes toute une administration, toute une police et toute la logique d’un monde. Au point où nous en sommes, les dés sont un peu pipés, le bûcher déjà dressé. Aussi, qu’on ne nous demande pas d’être beaux joueurs.

Deuzio. Bien sûr vous avez besoin d’"individus", constitués en "cellule", appartenant à une "mouvance" d’une fraction de l’échiquier politique. Vous en avez besoin, car c’est votre seule et dernière prise sur toute une part grandissante du monde, irréductible à la société que vous prétendez défendre. Vous avez raison, il se passe quelque chose en France, mais ce n’est certainement pas la renaissance d’une "ultragauche". Nous ne sommes ici que des figures, qu’une cristallisation somme toute plutôt vulgaire d’un conflit qui traverse notre époque. La pointe médiatico-policière d’un affrontement sans merci que mène un ordre qui s’effondre contre tout ce qui prétend pouvoir lui survivre.

Il va sans dire qu’à la vue de ce qui se passe en Guadeloupe, en Martinique, dans les banlieues et les universités, chez les vignerons, les pêcheurs, les cheminots et les sans-papiers, il vous faudra bientôt plus de juges que de profs pour contenir tout ça. Vous n’y comprenez rien. Et ne comptez pas sur les fins limiers de la DCRI pour vous expliquer.

Tertio. Nous constatons qu’il y a plus de joie dans nos amitiés et nos "associations de malfaiteurs" que dans vos bureaux et vos tribunaux.

Quarto. S’il semble aller de soi pour vous que le sérieux de votre emploi vous amène jusqu’à nous questionner sur nos pensées politiques et sur nos amitiés, nous ne nous sentons pas, quant à nous, le devoir de vous en parler. Aucune vie ne sera jamais absolument transparente aux yeux de l’Etat et de sa justice. Là où vous avez voulu y voir plus clair, il semble plutôt que vous ayez propagé l’opacité. Et l’on nous dit que, désormais, pour ne pas subir votre regard, ils sont toujours plus nombreux ceux qui se rendent à des manifestations sans téléphone portable, qui cryptent les textes qu’ils écrivent, qui font d’habiles détours en rentrant chez eux. Comme on dit : c’est ballot.

Quinto. Depuis le début de cette "affaire", vous avez semblé vouloir accorder beaucoup d’importance au témoignage d’un mythomane, aussi appelé "sous X". Vous vous obstinez, c’est courageux, à accorder un peu de foi à ce ramassis de mensonges, et à cette pratique qui a fait l’honneur de la France il y a quelques décennies - la délation. C’en serait presque touchant, si ça ne conditionnait pas l’accusation de chef à l’encontre de Julien, et donc son maintien en détention. Si ce genre de « témoignage » ne justifiait pas des arrestations arbitraires – à l’occasion, par exemple, de quelques balles envoyées par la Poste, ou sur la police, dans l’Hérault, ou à Villiers-le-bel.

Enfin, étant entendu que la marge de liberté qu’il nous reste est désormais fort réduite, que le seul point à partir duquel nous pouvons nous soustraire à votre emprise réside dans les interrogatoires auxquels vous nous soumettez à intervalles réguliers. Que Julien s’est déjà vu refuser quatre demandes de remise en liberté. Qu’il est notre ami. Qu’il n’est rien de plus que ce que nous sommes. Nous décidons qu’à partir de ce jour, dans l’héroïque tradition d’un Bartleby, "nous préférerons ne pas". En gros, nous ne vous dirons plus rien et cela jusqu’à ce que vous le libériez, jusqu’à ce que vous abandonniez la qualification de chef pour lui et de terrorisme pour nous tous. En résumé, jusqu’à ce que vous abandonniez les poursuites.

Pour tous ceux qui, là où ils sont, se battent et ne se résignent pas. Pour tous ceux que le ressentiment n’étouffe pas et qui font de la joie une question d’offensive. Pour nos amis, nos enfants, nos frères et nos soeurs, les comités de soutien. Pas de peur, pas d’apitoiement. Pas de héros, pas de martyrs. C’est précisément parce que cette affaire n’a jamais été juridique qu’il faut transporter le conflit sur le terrain du politique. Ce que la multiplication des attaques d’un pouvoir toujours plus absurde appelle de notre part, ce n’est rien d’autre que la généralisation de pratiques collectives d’autodéfense partout où cela devient nécessaire.

Il n’y a pas neuf personnes à sauver mais un ordre à faire tomber.

Aria, Benjamin, Bertrand, Elsa, Gabrielle, Manon, Matthieu, Yldune sont, avec Julien Coupat, mis en examen dans l’"affaire de Tarnac".

(Publié aussi dans le journal Le Monde, du 17 mars).

Salutations Anarchistes,
Denis, texte repris sur le site des comités de soutien de Tarnac, (arf! und ourf!)
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede georges le Lun 16 Mar 2009 22:59

De Villiers-le-Bel à Tarnac nouvelles d'un front...

le 15 Mars 2009 Par Benjamin

Souvenez-vous Villiers-le-Bel, la mort des deux adolescents fauchés par une voiture de police, deux jours d'émeutes d'une rare intensité et le déploiement d'une véritable force militaire et de toutes les dernières technologies de la contre insurrection (hélicoptères, drones...). C'était fin novembre 2007.

Février 2008, tout le monde s'en souvient, nous sommes bombardés d'images d'une opération massive d'encerclement du quartier et de perquisitions en série menées par un dispositif policier complètement surdimensionné avec journalistes "embarqués". Arrestations en série, interrogatoires, garde à vues, relaxe pour la plupart, rien, aucun éléments trouvés. Alors on monte encore d'un cran, appels à la délation contre rémunération, et protection spéciale du statut de "témoin sous x". Nouvelles arrestations, cinq personnes sont mises en examen, sur cette seule base, la délation rémunérée.

Qu'en est il aujourd'hui, qui se préoccupe de leur sort sinon leurs amis et les habitants du quartier?

Ils ont tous fait un an de ''prison préventive'', ponctué d'auditions d'un juge d'instruction, mais rien, de l'avis de tous et principalement de la défense, le dossier est entièrement vide. Mais quand il faut des coupables, surtout quand en partie civile on a une soixantaine d'agents des forces de l'ordre, mises à mal, ces forces là, sur le terrain autant que dans le procès pour la mort des jeunes qui piétinne toujours, on ne s'attarde pas sur ce genre de détails.

Fin février de cette année, comme c'est prévu par la loi qui régit la détention préventive, ces cinq personnes ont été représentées devant un juge des libertés pour juger de l'éventualité de leur mise en liberté ou de la prolongation de la détention. Par ce qui semble être un pur hasard ou un dérapage conscient du juge, la première des personnes présentées est libérée... puis par un étrange phénomène qu'on pourra supposer "de couloir", les quatre autres qui ne présentaient rien de plus "à charge" dans leur dossier, voient leur mandat de dépôt prolongé pour six nouveaux mois. Sans perspective de procès. En silence. Personne n'en parle, jamais.

Alors on pourra comprendre que certains s'étonnent de la pourtant déjà minime agitation autour du maintien en détention de Julien Coupat.Qui est finalement loin d'être une exception, un cas isolé...

Il faudrait pouvoir ne pas toujours prendre les choses par le petit bout de la lorgnette, ne pas "réagir" à chaque fois comme si c'était la première fois, ne pas faire mine de découvrir toujours, les rouages de la raison d'état, les comportements politiques dictés par la rente électorale, le journalisme toujours plus ramené à un simple rôle d'échos des dépêches du parti de l'ordre, pas tant du fait d'une quelconque tutelle officieuse sinon du fait d'une incompétence chronique, d'un défaut de sens historique, d'une amnésie crasse, d'un manque d'exigence patent. Les exceptions à cette règle sont beaucoup trop rares pour prétendre sauver la profession, désolé pour eux.

A leur décharge toutefois, c'est vrai qu'on imagine mal comment il pourraient porter à eux seuls la tâche qui devrait revenir à chacun. Nous sommes jusqu'au cou dans une époque ou dire et "parler de" ne suffit plus depuis longtemps, et contribue même peut-être à renforcer le sentiment d'impuissance généralisé. Alors comment faire?

Comment ne plus juste "parler de", mais répondre, pied à pied, chacun à sa manière, à la guerre qui nous est faite.


http://www.mediapart.fr/club/blog/benja ... d-un-front
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Denis le Lun 16 Mar 2009 23:36

Bravo, Georges (arf!), les infos circulent, rogntudjuuh !
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Alayn le Mar 17 Mar 2009 00:51

Bonsoir ! Oui, salutations à Georges et bien évidemment à toi Denis et voici d'ailleurs (rendons à Denis... ! arf !) un communiqué que tu m'as envoyé, TRES IMPORTANT pour la suite de la mobilisation autour de la libération de Julien Coupat mais aussi des autres encabanné(e)s politiques:

REUNION DES COMITES DE SOUTIEN DU VENDREDI 27 MARS AU DIMANCHE 29 MARS à LIMOGES

Quand et où ?
-le vendredi 27 mars: rendez-vous à la Maison du Temps Libre, derrière la mairie, espace Blanqui de 20h à minuit.
-le samedi 28 mars: à la salle Blanqui 2, derrière la mairie, de 10h à 15h.
-le samedi 28 à partir de 15h30, à la salle Blanqui 3 jusqu'à dimanche 29 mars 18h.

La Maison du Temps Libre, la salle Blanqui 2 et 3 se trouvent derrière la mairie. Accès par la rue L.Longequeue, qui est entre la mairie et la médiathèque. Il y a un grand portail noir sur la gauche, collé à la mairie, c'est là au fond du parking. On peut s'y garer.
Pour celles et ceux qui ne trouveraient pas, le RDV est fixé devant la mairie à 19h30.

Manger:
-Pour le vendredi soir, chaque comité amène de quoi manger, de quoi faire un buffet avec soit des choses déjà faites à réchauffer -sachant que nous n'avons pas de four (arf ! NDLR !) ou de quoi grignoter.

-Pour le samedi: les gens de Toulouse s'occupe d'amener de quoi faire un petit déj.
-Pour le midi: une ville doit s'occuper d'amener de quoi faire des sandwichs et des salades froides. qui s'en occupe ? Mettre la réponse sur la boîte indiquée en dessous.
-Pour le soir: Limoges s'occupe des courses pour un repas chaud.

Pour dimanche:
-Matin: Toulouse pour le petit déj toujours !
-midi: comme pour le samedi, une ville doit se "désigner" ! (arf !)
-Pour le pain: Limoges s'occupe de le faire.

Logement:
-Penser à amener des matelas de camping et des sacs de couchage.
On peut loger 55 personnes le vendredi soir et jusqu'à 70 personnes le samedi soir. (logement en dortoir).
Pour celles et ceux qui veulent être plus tranquilles (arf !) vous pouvez réservez des chambres dans des auberges de jeunesse.... Une voiture au moins sera à votre disposition sur place.
-Auberge de jeunesse à St Junien, Abbaye de St-Amand: 05/55/02/22/79 (http://www.fuag.org)
-Auberge "Le Souffle Vert" à Cussac, 14 rue St Matthieu: 05/55/30/09/70.

PROPOSITIONS POUR LE CONTENU POLITIQUE:
-Le vendredi soir: on parle des situations locales de chaque comité et on présente le programme des discussions du samedi.

-Le samedi:
1) Discussion sur comment continuer sur l'affaire de Tarnac. Ecriture d'un communiqué commun pour Julien.
2) L'opacité comme pratique collective assumée.
3) Discussion au sujet des limites du seul soutien, avec l'idée de s'appuyer sur le texte "préliminaires à toute lutte anti-carcérales" (qui circulera sur les mails d'ici la rencontre).
4) Discussion autour du contre sommet de l'OTAN à Strasbourg début Avril avec l'idée de l'écriture d'un communiqué commun.

La Boîte prévue pour cette rencontre: reunion.comite@gmail.com

A envoyer sur la boîte le + rapidement possible:
-Nous prévenir de la bonne réception de ce mail.
- Nous prévenir de combien de personnes viennent (1 à 3 personnes maximum par comité pour une question d'organisation).
-Nous prévenir de qui s'occupe du repas du samedi et du dimanche midi.
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Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mer 25 Mar 2009 18:15

Ce que contient le dossier d’instruction de l’affaire Tarnac
LE MONDE | 25.03.09 | 15h07


L'ensemble atteint déjà la hauteur de sept à huit Bottin. Le dossier de l'affaire Tarnac, que Le Monde a pu consulter, près de mille pièces et procès-verbaux numérotés, peut être scindé en deux. D'un côté, sept mois de filatures, d'écoutes, dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte le 16 avril 2008; de l'autre, quatre mois d'instruction, toujours en cours depuis la mise en examen, le 15 novembre 2008, de neuf personnes accusées de terrorisme et pour certaines, de sabotage contre des lignes SNCF en octobre et en novembre 2008.

Bertrand Deveaux, 22 ans, Elsa Hauck, 24 ans, Aria Thomas, 27 ans, Mathieu Burnel, 27 ans, puis Gabrielle Hallez, 30 ans, Manon Glibert, 25 ans, Benjamin Rosoux, 30 ans, et Yildune Lévy, 25 ans, ont tous, depuis, recouvré la liberté sous contrôle judiciaire. Seul, Julien Coupat, 34 ans, considéré comme le chef, reste incarcéré.

Le dossier a beau être dense, il ne contient ni preuves matérielles ni aveux, et un seul témoignage à charge, sous X, recueilli le 14 novembre. Les rares confidences lâchées lors des gardes à vue ont été corrigées depuis. "Ils [les policiers] ont tout fait pour me faire dire que Julien Coupat était un être abject, manipulateur", affirme le 22janvier Aria Thomas à Yves Jannier, l'un des trois juges instructeurs du pôle antiterroriste. "Pour que les choses soient claires, poursuit-elle, je n'ai jamais pensé, ni cru ou eu le sentiment que Benjamin Rosoux ou Julien Coupat soient prêts à commettre des actes de violence." Suit cet échange, le 13février, entre le juge Thierry Fragnoli et Julien Coupat, dépeint par le témoin sous X comme un «gourou quasi sectaire», enclin à la violence politique.

"UNE ESPÈCE DE CHARLES MANSON DE LA POLITIQUE"

– Le juge: "Pensez-vous que le combat politique puisse parfois avoir une valeur supérieure à la vie humaine et justifier l'atteinte de celle-ci?
– Julien Coupat: "Ça fait partie (…) du caractère délirant de la déposition du témoin 42 [sous X] tendant à me faire passer pour une espèce de Charles Manson de la politique (…) Je pense que c'est une erreur métaphysique de croire qu'une justification puisse avoir le même poids qu'une vie d'homme."
Il arrive parfois que le juge tâte le terrain à ses dépens. – "J'imagine que votre ami Coupat et vous-même, de par vos formations et vos goûts, vous vous intéressez à l'histoire (…) des grands mouvements révolutionnaires. Est-ce le cas?", demande-t-il le 8 janvier à Yildune Lévy, la compagne de Julien Coupat.
– "Pour ce qui me concerne, je m'intéresse plus à la préhistoire", rétorque l'étudiante en archéologie.

Séparément, le couple Lévy-Coupat livre une même version pour justifier, au terme de multiples détours, leur présence, dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008, à proximité d'une des lignes SNCF endommagées. Elle: "On a fait l'amour dans la voiture comme plein de jeunes." Lui: "On s'est enfoncés dans la campagne pour voir si nous étions suivis et nous n'avons eu aucun répit, puisque, où que nous allions, 30 secondes après s'être arrêtés, même dans les endroits les plus reculés, il y avait des voitures qui surgissaient."

Tous deux s'accordent sur leur voyage de "tourisme", en janvier 2008, et le franchissement clandestin de la frontière des Etats-Unis depuis le Canada. Cette information, transmise par les Américains, motivera l'ouverture de l'enquête préliminaire. "Pour moi, refuser de se soumettre volontairement au fichage biométrique est un principe éthique", justifie Julien Coupat.

Les neuf reconnaissent leur engagement militant et leur présence lors de manifestations qui ont pu donner lieu à des affrontements, tel le contre sommet de l'immigration à Vichy en novembre2008. Mais ils récusent l'étiquette de "structure clandestine anarcho-autonome entretenant des relations conspiratives avec des militants de la même idéologie implantés à l'étranger" que leur attribue la sous-direction à la lutte antiterroriste (SDAT), sur la "base des informations communiquées par la direction centrale du renseignement intérieur", non jointes. Les sabotages ont été revendiqués le 9 novembre 2008 à Berlin. – "Si ce sont des Allemands qui revendiquent, ça semble être une explication", relève Yildune Lévy.

La police a déployé d'importants moyens comme en témoignent les très nombreuses écoutes téléphoniques et interceptions de courriers électroniques des mis en examen et parfois de leurs parents, bien avant les interpellations. Une enveloppe à bulle contenant une clé, envoyée par Julien Coupat depuis la Grèce en septembre 2008, au domicile de son père à Rueil-Malmaison, est ainsi ouverte avant d'être distribuée. Des caméras de surveillance ont été posées autour de la ferme du Goutailloux à Tarnac (Corrèze) – considérée comme la base du groupe – et au domicile parisien de Yildune Levy et Julien Coupat.

LA SURVEILLANCE DU GROUPE NE DATE PAS D'HIER

Les filatures s'enchaînent, minutieuses mais peu démonstratives. Au fil des pages, on découvre les «albums photos» de tous ceux qui ont fréquenté les lieux. Les manifestations de soutien recensées à l'étranger sont maigres: un engin incendiaire devant la porte de l'AFP à Athènes, des boules de Noël contre le consulat français à Hambourg.

L'interpellation des neuf, le 11 novembre 2008, trois jours après le sabotage constaté sur plusieurs lignes TGV, donne lieu à de nouvelles investigations: brosses à dents, rasoirs, sacs de couchage, manteaux, bouteilles, mégots sont examinés au plus près pour récupérer les ADN. Un sac poubelle noir contenant deux gilets pare-balles coincés dans une cheminée au Goutailloux est trouvé. "Je n'ai jamais vu ce sac auparavant", dira Benjamin Rosoux au juge. Les expertises des gendarmes sur les crochets métalliques fixés aux caténaires n'ont rien donné, pas plus que l'étude des lieux. Un responsable de la maintenance SNCF précise que le dispositif malveillant "ne peut en aucun cas provoquer un accident entraînant des dommages corporels".

La surveillance du groupe ne date pourtant pas d'hier comme l'atteste, en 2005, l'enquête pour blanchiment versée à l'instruction. Elle fait suite au signalement opéré par Tracfin dès l'achat du Goutailloux. "Julien Coupat et Benjamin Rosoux seraient membres de mouvances anarcho-libertaires et auraient participé, à ce titre, à de nombreuses actions contestataires", justifie la cellule antiblanchiment de Bercy. La police financière note que Julien Coupat fait l'objet d'une fiche RG créée le 26 décembre 2002 [date qui correspond à l'occupation de Nanterre par des étudiants], modifiée le 28 octobre 2005 pour "mise sous surveillance". Même chose pour Gabrielle Hallez et Benjamin Rosoux. Jusqu'ici, aucun n'a fait l'objet d'une condamnation.

Les enquêteurs ont saisi et décortiqué les lectures du groupe. Le livre l'Insurrection qui vient, attribué à Julien Coupat, – ce qu'il nie –, figure dans le dossier. Il voisine avec un document Internet, traduit de l'allemand sur des produits AEG "sans sueur, sans sciage, le crochet en forme de griffe pour les bricoleurs".

Conscients que les résultats des commissions rogatoires internationales lancées par les juges vont prendre du temps, les avocats, Irène Terrel, défenseure de quatre des mis en examen et William Bourdon, conseil de Yildune Lévy, s'apprêtaient, mercredi 25 mars, à adresser un courrier au juge Thierry Fragnoli lui demandant de se déclarer incompétent et de se dessaisir du dossier. Un dossier qu'ils ont l'intention, avec leurs confrères Dominique Vallés et Philippe Lescène, de commenter, le 2 avril, devant la presse dans les locaux de la Ligue des droits de l'homme.

Isabelle Mandraud
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