Antifascisme

Espace de débats sur l'anarchisme

Re: Antifascisme

Messagede vroum le Sam 25 Mai 2013 21:03

Fascisme… Extrême droite, comment s'en débarrasser !
http://www.c-g-a.org/content/fascisme-extr-me-droite-comment-sen-d-barrasser

Retour sur une terminologie et son histoire

Quand nous parlons de « fascisme », nous nous devons, a minima, d'expliciter ce que cela sous-tend, dès lors que cela recouvre des réalités éparses : en tant qu'idéologie, en tant que porteur d'une « symbolique » particulière, en tant que marqueur lourd d'un moment de l'Histoire et, de la même manière, en tant que « vocabulaire » facilitateuri servant à définir le plus aisément possible une réalité pourtant complexe.

Historiquement né en Italie, le fascisme a représenté un mouvement politique fondé en 1919 par Benito Mussolini. C'est alors un mouvement national à vocation populiste et totalitaire, adversaire de la démocratie et du socialisme.

Le modèle italien s'est ensuite étendu à tous les mouvements politiques qui s'appuyaient (et qui s'appuient encore) sur un pouvoir fort, qui prônent un Etat ultra sécuritaire, des métiers organisés en corporations ainsi que l'exaltation du sentiment nationaliste et le recours à un corpus idéologique réactionnaire.

Comme nous pouvons le constater, le terme « fascisme » a recouvert un sens très large ainsi que des réalités à la fois différentes et comparables : l'idée de "race", l'idée de communauté nationale, l'idée de guide, le recours au sentiment religieux, national socialisme allemandii; national syndicalisme phalangisteiii; national corporatisme salazaristeiv.

Encore plus largement, il est employé dans le but de qualifier les Etats, les groupements politiques et les mouvements dont le but avéré est l’instauration d’un pouvoir fort, la répression de masse, l’enfermement, l’assassinat des opposants etc…


En France

L'extrême droite française - ou droite populaire - mobilise l'ensemble des courants qui, de près ou de loin, se réclament des composantes du fascisme.

Catholiques intégristes, ligues fascistes, droite antisémite, droite nationaliste, droite européenne, défenseurs de la race blanche, droite anticommuniste, droite anti-parlementaire, droite xénophobe représentent pêle-mêle les partis et groupuscules qui se situent à la droite des partis réactionnaires et gouvernementaux.

Sous des discours en défense d'une certaine idée de la France (ou de l'identité française) ou bien de l'Europe « blanche », ces différentes officines s'emploient à défendre l'ordre social établi et les valeurs qui s'y réfèrent : respect des hiérarchies; respect des traditions chrétiennes; acceptation de l'existence de classes sociales; défense d'un capitalisme national en opposition à un capitalisme apatride…


La stratégie extrémiste entre radicalisme et politique politicienne

L’ « idéologie » du Front national considérée à juste titre comme « anti-démocratique » et xénophobe a réussi à s’implanter au sein des institutions étatiques, au point de s'accommoder du parlementarisme, des valeurs républicaines, et notamment du pluralisme politique.

Malgré l'arrivée aux commandes du bateau lepéniste de Marine, cette parenthèse semble pourtant devoir se refermer.

La droite gouvernementale a repris à son compte l'essentiel des propositions du F.N. et les a même mises en œuvre.

L'extrême droite s'est dont retrouvée orpheline et le « second rôle » qui lui est proposé aujourd'hui n'est pas de nature à satisfaire les plus radicaux d'entre ses militants. Pressés d'en découdre avec « l'idéologie mondialiste », avec ce qu'ils considèrent comme la « pègre gauchiste », les groupes de l’extrême droite radicale ont repris du service. Un temps isolés et marginalisés par les excellents scores électoraux du Parti de JMLP, ces groupes ont réinvesti les rues, les stades, les quartiers populaires, divers lieux qu’ils ont déjà occupés dès le début des années « 20 » et tout au long du vingtième siècle …

Une nouvelle donne qui se caractérise par une recrudescence des actes de violence, d’agressions pouvant aller allant jusqu’au meurtre.

Aujourd’hui, c’est cette violence qui prévaut plutôt que le recours à la « médiation politicienne ».

L’espace politique "laissé en route" par le FN n’est pas l’unique facteur qui a permis l’essor de cette mouvance radicale, violente, belliqueuse. L’institutionnalisation d’un racisme d’Etat (lois anti-immigrés, création du ministère de « l’Identité nationale ») alliée à une paupérisation accrue des classes défavorisées ont créé un terrain propice à l’expression de ces activistes et des groupuscules identitaires.

Il n'est pas question pour nous de traiter dans le détail la complexité de l'extrême droite et du phénomène « fasciste » français, voire des divergences qui peuvent le traverser - pro-Israël / pro- Palestine ; catholiques intégristes / païens; nationalistes / régionalistes etc.

Nous traitons la question des fascistes et des identitaires en tant que phénomène global reposant quelles que soient leurs divergences sur des valeurs communes intangibles telles l’anti-gauchisme, la défense de l’identité blanche qu’elle soit régionale, nationale ou européenne, la défense de la famille via des positions anti-IVG et des affirmations homophobes et, ajoutée à cela, la volonté d’un ancrage « social » pour s’attirer les masses populairesv.

Les extrémistes ne se contentent pas de cette occupation physique à caractère social de territoires "populaires" où, très souvent, ils font régner une certaine terreur. Dans certaines grandes villes ciblées - Toulouse, Lille, Lyon etc. - ils sortent au grand jour pour s’en prendre aux militants antifascistes, aux immigrés ou aux militantes féministes. Ainsi, des agressions ont été perpétrées à plusieurs reprises par les fascistes contre ces militant-e-s et/ ou ces personnes à la manière de leurs sinistres devanciers les « SA ».

A côté de ces violences, les soupes populaires au "cochon ", outre le fait qu'elles stigmatisent les musulmans et qu'elles privilégient en quelque sorte les "Français d'abord", elles offrent aux extrémistes des perspectives sérieuses en termes d'ancrage social et d'implantation de leur « idéologie ».

Un autre aspect de la stratégie d'implantation et de développement de l'extrême droite tourne autour de la réappropriation de l'idéologie régionaliste relookée par les identitaires.

Dans les régions où les particularismes culturels sont réels - Bretagne, Alsace, Flandres, Pays niçois ou encore Catalogne - les identitaires surfent sur la vague des revendications culturalistes et autonomistes en privilégiant l’éternel esprit de clocher, en valorisant la défense de la langue et, au-delà, la défense du territoire et des traditions. Cet angle revendicatif permet notamment aux identitaires de créer des liens privilégiés avec les mouvements fascistes des pays frontaliers, Belgique, Allemagne, Italie ou encore Espagne.

Dans le cas des identitaires, le référent unifiant des régionalismes est évidemment le militantisme en faveur d’une Europe « blanche », berceau de la Chrétienté. Un rempart géographique et humain dressé face à l'invasion des populations des autres continents, des étrangers et des « barbares »…


En Europe

Les partis « extrémistes », particulièrement forts dans certains pays européens, n’ont, que très rarement, réussi à conjuguer leurs forces. C'est un fait que l'extrême droite politique et/ ou fascist rencontre très souvent des problèmes liés en premier lieu au phénomène de leadership. Chacun des chefs des partis les plus importants s'est rêvé en leader incontesté à l'échelle de l'Europe et a contribué à l'échec du principe d’organisation supranationale.

Il faut cependant retenir qu'un véritable regroupement se fait autour de mouvements radicaux, populistes, à connotation raciste et anti-musulmans.

A Milan, à Madrid à Sarajevo, à Belgrade à Budapest, à Moscou, à Bruxelles, à Varsovie, de violentes agressions ont été récemment commises ou le sont encore de nos jours. Des agressions racistes, xénophobes et fascistes à coups de battes de base-ball, à l'arme blanche ou à l’aide d’armes à feu. Les cibles : des étrangers, des homosexuel-le-s et des militant-e-s antifascistes…


Alternative anarchiste et riposte

Il est utile de rappeler que le fascisme n’a jamais été éradiqué par le biais des consultations électorales, ces dernières lui conférant même une certaine dose de "légitimité".

Si la lutte contre le fascisme constitue un axe important du combat des prolétaires en même temps qu'une absolue nécessité, il est utile de préciser que l’antifascisme ne constitue pas pour autant, l'Alfa et l'Omega de la défense des intérêts de classe du prolétariat face à la bourgeoisie.

Il s'agit donc pour nous de combattre le fascisme et la bourgeoisie qui le sous-tend, quel que soit son ancrage : une bourgeoisie qui se pare des vertus démocratiques ou non, qui se réfère au libéralisme ou à la social-démocratie…

Certains mal intentionnés considèrent, par ailleurs, que l’antifascisme "prépare idéologiquement le terrain au mondialisme en contribuant au saccage des "souverainetés nationales."

Cette assertion n'a pour nous aucun sens, dès lors que notre antifascisme ne se conçoit qu’avec l'avènement d’une Humanité sans frontières et d’une solidarité internationale sans concession!

A aucun moment nous n'accepterons que quiconque fasse le jeu de l’ultra libéralisme économique, idéologie qui fait de l'abolition des « souverainetés nationales » la passerelle qui mène à la satisfaction de ses propres intérêts, intérêts opposés à ceux de la grande majorité des individus…

L'enjeu de l'antifascisme que nous nous employons à mettre en œuvre, c'est de faire tomber les barrières humaines tout en contrecarrant les plans économiques globaux du capitalisme à l'échelon national et/ou à l'échelon mondial.

Combattre le fascisme et l'extrémisme nécessite alors de le faire :

- au plan idéologique,

- au plan social,

- et quand cela est inévitable (voir souhaitable), au quotidien, dans les quartiers, les usines etc.



Sur le plan idéologique, l'organisation anarchiste qui préconise des valeurs d’entraide, de solidarité, d’égalité, d’autonomie individuelle et collective est armée pour regrouper les individus et les structures qui ne fondent pas leur horizon de société autour de la défense des hiérarchies, de la lutte pour le Pouvoir, de la force brute et de la croyance en des êtres supérieurs qui seraient appelés à diriger les masses déboussolées.

C’est en cela que les anarchistes sont légitimes à œuvrer pour la constitution d'un « regroupement antifasciste » autour des valeurs égalitaires et libertaires qui sont les leurs. Les anarchistes, s'ils ne sont pas les seuls susceptibles de regrouper individus et groupes afin de lutter efficacement contre le fascisme, garantissent à ce regroupement et la lutte qu’il sous-tend une entière autonomie. En effet, les anarchistes n'ont aucun velléité d'en prendre le contrôle. A contrario, au travers de cette lutte, ils œuvreront pour bâtir, toutes et tous ensemble, une société débarrassée du fascisme et de ses fondements : le capitalisme, le libéralisme et l'étatisme.



Au plan des agencements sociétaires, l'égalité économique et sociale pour laquelle milite l'Organisation anarchiste se traduit par la mise en œuvre de l'autogestion généralisée. La participation des individus et des collectifs en tant qu'acteurs et non plus simples spectateurs supposent :

- une conscience aiguë des problèmes qui traversent la société,

- une responsabilisation face à ces problèmes,

- le rejet de toutes les idéologies qui aspirent à diriger les individus et à décider en leur nom et l'idéologie fasciste n'est pas la dernière à vouloir mettre en œuvre de telles méthodes…



Au plan de la gestion de l'espace publique, les réponses se doivent d'être aussi argumentées que précédemment. En premier lieu, il n'est pas question pour l'Organisation anarchiste d’être désignée comme l'avant-garde d'une armée antifasciste prête à faire le coup de poing avec la vermine extrémiste.

Les méthodes employées pour barrer la route aux fascistes doivent rencontrer l'assentiment de tous les individus et collectifs épris de justice sociale et de liberté. Il n'est pas question de s'abriter derrière les Institutions – Justice, Police, décideurs et élus - pour éradiquer les idéologies rétrogrades.

Seule la mobilisation consciente autour de valeurs libertaires, solidaires, d'entraide et d'égalité peut réaliser, sans possibilité d'un retour en arrière, cette éradication tant souhaitée.

Bien évidemment il n’est pas possible d’éviter tout recours à l'affrontement si ce dernier nous est « imposé par les groupuscules fascistes ». Il est alors souhaitable, nécessaire même d’éviter les poursuites diligentées par la police et la « justice » car ces dernières tendent le plus souvent à mettre tout le monde dans le même sac et les militants libertaires se voient pénalisés le plus lourdement.

Nous savons que les actions radicales du fascisme, en forme de « repoussoir », favorisent et légitiment les mauvais coups, plus « softs » ceux-là, portés à la classe ouvrière et aux exclus de toutes sortes par les étatistes et les capitalistes réunis.

Et quand ces derniers s'emploient, de manière « démocratique » disent-ils, à rétablir « la paix bourgeoise » ils ne se privent pas de taper sur les anarchistes, et même plus que sur les fascistes, histoire de rappeler à toutes celles et tous ceux qui ne voudraient l'entendre que pour les tenants d'un monde inégalitaire et injuste, la barbarie fasciste est préférable à la proposition anarchiste d'égalité sociale et de rejet de toutes les formes de Pouvoir.



Pour l’essentiel, le message que nous tenons à faire passer est celui-ci :

- nous devons tout mettre en œuvre pour barrer la route à la vermine fasciste et à toutes les dérives autoritaires.

Pour cela

-nous devons nous mobiliser le plus largement possible afin de créer les conditions fondamentales du rejet de ces résurgences fascistes.

La lutte sociale est le seul et unique terrain d’affrontement aux « fascismes », dès lors que s’engagent en même temps, le combat contre la barbarie et le combat pour notre émancipation.

Groupe Puig antich – Perpignan



A NOTER :

On trouvera facilement sur internet un organigramme des organisations d'extrême-droite en France intitulé « Le petit monde merveilleux de l’extrême-droite française »




i Il en va de même quand on parle de "stalinisme"

ii Idéologie du NSDAP d'Adolphe Hitler

iii Phalange espagnole de Primo de Rivera alliée de Franco

iv Idéologie prônée par le dictateur portugais Salazar,

v Par exemple, les identitaires (Jeunesses Identitaires, Bloc Identitaire) marquent cette recrudescence par une installation dans le paysage en ayant pignon sur rue dans le Nord à Lambersart où ils partagent un local avec l’association faîte du même bois « Terre celtique ». Leur autre implantation se situe dans leur fief niçois où ils ont récupéré l’ancien local des « brigades Sud Nissardes », les ultras du club de Nice, connus pour leur penchant à l’extrême droite.
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Re: Antifascisme

Messagede vroum le Sam 25 Mai 2013 21:05

Quel antifascisme aujourd'hui ?
http://www.c-g-a.org/content/quel-antifascisme-aujourdhui

Le nécessaire bilan de deux décennies « d'antifascisme »


La lutte contre le fascisme a, jusqu'à son effondrement temporaire, été souvent amalgamée en France avec la lutte contre le Front National et les idées racistes et réactionnaires qu'il véhicule. Or le Front national n'est pas à proprement parler un parti fasciste, même s'il comporte une composante fasciste. C'est un parti d'extrême-droite nationaliste, qui a pendant longtemps fait coexister des tendances idéologiques différentes, depuis les nostalgiques de l'Algérie française, jusqu'aux catholiques intégristes, et pour un certain temps, les nationalistes révolutionnaires. Il a représenté pendant longtemps la face visible la plus nette d'un nationalisme qui irrigue la classe politique en France de la droite à la gauche, voire une partie de l'extrême-gauche. Il a représenté la formulation explicite des conséquences idéologiques de ce nationalisme : un discours raciste et xénophobe, mais aussi sexiste et homophobe. Il correspond au choix de la bourgeoisie française, dans le contexte de crise liée au second choc pétrolier, de promouvoir une grille de lecture raciste et xénophobe pour masquer les antagonistes de classe, et ainsi combattre le développement de luttes populaires. Il a également bénéficié des facilités accordées par la social-démocratie, dans une perspective politicienne, afin de briser sur le plan électoral l'influence de la droite.


La principale stratégie de riposte antifasciste pendant ces 20 dernières années a été la création de fronts antifascistes spécifiques, larges et unitaires, dont la dominante idéologique a été un discours moral fondé sur les valeurs humanistes dans lesquelles les références de classe et la nature du nationalisme comme outils des classes dominantes ont été diluées, voire complètement masquées.


Même si les libertaires, ou des groupes d'extrême-gauche, ont tenté de rendre visible cette dimension au sein de ces fronts, ils n'ont pu se faire entendre de manière audible, ce qui a conduit à une prédominance du discours républicain en matière « d'antifascisme ». Cela a souvent amené les libertaires à faire les « petites mains » de fronts antifascistes qui promouvaient une approche «aclassiste» du fascisme.


«L'antifascisme radical» n'échappe pas à ce constat. Malgré la volonté et les tentatives de relier la lutte contre le fascisme à la lutte contre le capitalisme, la dimension spécifique de ce courant a souvent évolué vers une tendance à réduire la lutte contre le fascisme à la lutte contre les fascistes, à se contenter d'une « riposte » qui plaçait nécessairement la lutte sur le terrain même du fascisme, lui laissant l'initiative politique, voire dans certaines de ses expressions, relevant davantage du folklore plus que de l'action politique. Une chose est sûre, c'est que le développement des idées nationalistes, racistes et xénophobes n'a pas été stoppé, il a même été donné crédit à la rhétorique du fascisme qui a ainsi pu se présenter comme «antisystème», comme «révolutionnaire».


Un autre aspect de ce bilan est qu'une telle approche focalisée sur une organisation - le FN - est passée à côté de la réalité idéologique du fascisme, à savoir sa stratégie d'implantation «métapolitique», c'est à dire en conquérant une influence idéologique par la culture. Elle a également eu pour effet d'empêcher de saisir les « nouvelles » formes et tendances du fascisme, celles de la réorganisation d'un courant fasciste authentique, alliant racisme, antisémitisme et rhétorique « anticapitaliste », alliant discours social et national, et se développant hors de la sphère classique et identifiée du fascisme français, puisqu'il s'enracine et se développe également au sein des minorités nationales.



Analyser le fascisme comme tendance, définir le fascisme


Qu'est-ce que le fascisme, historiquement ? C'est l'alliance entre discours social et national, c’est la formation d'une « droite révolutionnaire » qui remet en cause l'idéologie démocratique bourgeoise, qui se vit comme « révolutionnaire », mais sert les intérêts de la bourgeoisie en brisant les luttes populaires et toute perspective révolutionnaire. C'est aussi un discours voyant la société (amalgamée à une mythique «nation») comme un «organisme» qu'il faut purifier (des «ennemis intérieurs» que sont les minorités nationales et les étrangers, mais aussi les subversifs), diriger et défendre contre elle-même, en la guidant d'une main de fer. C'est un discours idéologique qui se fonde sur une vision raciste ou ethno-différencialiste identitaire (racisme biologique ou culturel) qui divise l'espèce humaine en groupes auxquels il assigne une « race », une identité essentialisée, c'est à dire un ensemble de caractéristiques qui ne dépendent pas de leur construction sociale, mais de ce qu'ils sont, de leur prétendue «nature». C'est enfin un discours assignant ces identités à un territoire, autour d'une mystique de la terre et des morts (cf Maurras, l'un des théoriciens français du fascisme) C'est une idéologie qui oppose le capitalisme industriel, corporatiste, considéré comme «authentique», au capitalisme financier, arbitrairement séparé et amalgamé aux juifs par le discours antisémite, ce qui permet de protéger la classe capitaliste par une stratégie de bouc émissaire.



Le fascisme et la crise


Dans une période de crise d'adaptation capitaliste, le fascisme est l'ultime recours du capitalisme et de la bourgeoisie : pour briser toute résistance des classes populaires à ses offensives, mais aussi pour « mettre de l'ordre » en son sein. Tant que son pouvoir n'est pas remis en cause, la bourgeoisie a intérêt à préserver le cadre de la démocratie représentative, car le pouvoir d'influence est la forme de pouvoir la plus efficace et la plus économique. Même pour les très riches, il est aussi certainement plus confortable de vivre dans un cadre de relative liberté d'expression. Mais dès lors que ce pouvoir est fragilisé, la tentation fasciste suscite rapidement l'adhésion de larges secteurs de la bourgeoisie.


Dans la période actuelle, la crise économique et sociale capitaliste a suscité un certain nombre de résistances populaires qui inquiètent la bourgeoisie. Cependant, elle bénéficie depuis plus de dix ans d'un avantage certain dans la lutte des classes, lié à la désorganisation du mouvement ouvrier à l'échelle internationale, et à l'absence de perspectives révolutionnaires émancipatrices. Dans le même temps, le fatalisme qui en découle conduit une partie des classes populaires à se tourner vers les mouvements populistes d'extrême droite en renforçant d'autant leur influence.



La situation sur le plan international


Cette situation est visible clairement sur le plan international. On assiste à un triple mouvement : le renforcement des outils de coercition des états et des régimes autoritaires, qui visent à réprimer les mouvements liés à la révolte des classes populaires contre leurs conditions de vie, le développement de ces mouvements populaires poussés par la nécessité, qui se heurtent aux privilèges de la bourgeoisie et des États en défendant leurs intérêts, enfin le développement de courants idéologiques qui s'inscrivent dans la défense des intérêts de la bourgeoisie confrontée à ces soulèvements et qui se présentent comme «révolutionnaires» et «anticapitalistes».


Ces tendances correspondent aux différentes formes que prend le fascisme.


• En Europe, on constate le développement de mouvements nationalistes, et notamment «nationalistes révolutionnaires», qui se traduit à la fois par des violences contre les minorités nationales (arabes, noirs, juifs, Rroms...), et contre les militant-e-s antifascistes et progressistes (agressions de camarades en Russie, en Serbie, etc.)
• Aux États-Unis, on constate le développement de groupes nationalistes et racialistes, depuis les suprémacistes blancs jusqu'aux «minute men» servant d’auxiliaires à la politique de répression de l'immigration américaine. En Amérique du sud, le développement de groupes paramilitaires de type nationaliste et de groupes néo-nazis répond aux mêmes dynamiques.
• En Turquie, les groupes fascistes tels que les loups gris mènent une politique de violence et de terreur fasciste contre les minorités nationales kurdes, arméniennes, les minorités religieuses (halevis), et les militant-e-s révolutionnaires.
• Dans un certains nombre de pays où la religion musulmane est majoritaire, les groupes qui assument ce type de politique se cachent derrière le masque de la religion : nervis fascistes iraniens se réclamant de l'islam qui répriment et attaquent les militant-e-s ouvriers et féministes iranien-ne-s, fascistes ou réactionnaires religieux tels que les frères musulmans, les salafistes, les militant-e-s du FIS en Algérie, qui servent de supplétifs à la répression anti-ouvrière et antiféministe, ainsi que d'une «fausse opposition» et d'une «fausse alternative» à des pouvoirs nationalistes discrédités, qui mènent eux aussi une répression directe des luttes populaires. Ce type de mouvement existe également dans bon nombre de pays catholiques ou orthodoxes, à travers notamment des mouvements réactionnaires religieux qui assument ce type de politique.



La situation en France


La période récente se traduit par une montée en puissance du nationalisme, entretenue notamment par le pouvoir politique, mais aussi les relais médiatiques et idéologiques de la bourgeoisie. Si ce nationalisme irrigue la quasi totalité des courants politiques, depuis la gauche coloniale jusqu'à l'extrême-droite, les courants fascistes sont le fer de lance de sa diffusion en milieu populaire, au moyen d'une rhétorique «sociale» pseudo-anticapitaliste.
Au sein des catégories de population désignées par l'idéologie nationale comme constituant le «corps national», le fascisme joue un rôle mobilisateur pour les intérêts de la bourgeoisie, en présentant la violence sociale non pour ce qu'elle est, le résultat du capitalisme, mais pour l'effet de l'action «d'ennemis intérieurs» ou «d'ennemis extérieurs». Ces «ennemis intérieurs» et «extérieurs» sont désignés comme étant les membres de minorités nationales, religieuses, sexuelles du pays, ou les étrangers. En contexte de crise, c'est la tendance «socialiste-nationale» qui se développe le plus rapidement, autour notamment d'un antisémitisme virulent (qui se masque derrière un discours prétendument antisioniste) réactivant la figure de bouc émissaire du juif, d'une islamophobie virulente (substituant ou le plus souvent ajoutant à la figure bouc-émissaire du juif celle du musulman), et plus largement d'un racisme «décomplexé».


Cette tendance «socialiste-nationale» est représentée par plusieurs organisations se réclamant plus ou moins ouvertement du nationalisme révolutionnaire :
• Egalité et réconciliation et ses alliés (Dieudonné et les relais de l’État d'Iran en France que sont les militants du centre Zahra), qui privilégient un front antisémite visant à mobiliser au côté des nationalistes français une partie des personnes appartenant à la minorité nationale arabe.
• Les identitaires qui privilégient un front «antimusulman» qui vise à mobiliser aux côtés des nationalistes révolutionnaires européens les courants racistes qui se cachent derrière une « laïcité » à deux vitesses, et une partie des personnes appartenant à la minorité nationale juive (notamment la frange fasciste du sionisme, comme en témoigne l'organisation d'une manifestation commune identitaires-LDJ devant l'ambassade d’Israël).
• Enfin, s'ajoute à cela la fraction mariniste du FN qui tente de développer un discours «national et social» proche de celui des identitaires, mais qui diffère en privilégiant un cadre nationaliste français au cadre nationaliste européen (suprémaciste blanc) des identitaires.


Toutes ces tendances tentent de dévier la révolte sociale vers une approche nationaliste, xénophobe et raciste, en se présentant comme «révolutionnaires». Leur radicalité formelle leur permet d'amener aux thèses nationalistes une partie des travailleuses et des travailleurs en révolte contre le système capitaliste, à travers un «anticapitalisme» qui se réduit à la défense du corporatisme contre le «capital financier», de présenter la nation comme un recours contre la «finance internationale», à une critique des valeurs consuméristes, sans contenu de classe, sans lien avec la réalité des luttes populaires. C'est en ce sens que ces courants diffèrent des courants nationalistes de la droite classique : en période de crise ceux-ci apparaissent trop ouvertement comme les représentants de la classe bourgeoise (en témoignent les affaires Bettencourt, etc.), et suscitent donc la méfiance au sein des classes populaires. Alors que la radicalité de postures des nationalistes révolutionnaires et leur conviction d'être «révolutionnaires», leur permettent d'attirer aux thèses nationalistes des individus appartenant aux classes populaires, en mobilisant les valeurs réactionnaires largement présentes dans la société (sexisme, homophobie, chauvinisme...).


Soral a ainsi d'abord construit son image de « rebelle» sur un discours antiféministe et homophobe, présenté comme un «refus du politiquement correct», puis sur un antisionisme antisémite qui a visé à instrumentaliser la question palestinienne pour re-légitimer l'antisémitisme historique des fascistes français.
Premièrement, l'outil internet a permis aux sympathisants et aux militants d'extrême-droite de pouvoir s'exprimer et diffuser leurs idées beaucoup plus librement qu'auparavant. En effet, la lutte sur le plan moral de l'extrême-droite a au moins permis de faire en sorte que le racisme n'était pas une opinion comme une autre. De plus, l'outil internet a donné une caisse de résonance importante à des courants au départ confidentiels, qui ont su utiliser les nouvelles technologies (vidéos sur dailymotion, youtube), pour diffuser leur pensée. Ils ont également su utiliser des passerelles, sous la forme de sites internet relayant en lien leur discours ou des personnes cautionnant leur discours au nom d'un «anti-impérialisme» hérité du stalinisme ou du tiers-mondisme, les pseudos laïcs relayant un discours raciste (par exemple l'officine raciste «riposte laïque») derrière une prétendue critique de l'islam.


Sur internet par exemple, de nombreux sites diffusent l'idée d'un « nouvel ordre mondial » (expression qui provient à l'origine de la droite radicale américaine) dirigé par les « sionistes » et les «illuminatis». Il ne s'agit de rien d'autre que du bon vieux discours national-socialiste et fasciste sur le «complot juif et franc maçon mondial», qui a adopté une nouvelle forme pour contourner le discours antifasciste et la législation de l’État sur le racisme. Cette nouvelle forme du discours sur le «complot judéo-maçonnique» a des succès inattendus, au sens où de telles approches sont reprises par des musiciens de rap, y compris ceux qui affichent des sympathies libertaires, qui en ignorent peut-être l'origine, mais qui les banalisent et contribuent à leur diffusion dans la jeunesse populaire.


On retrouve ces influences dans les courants fascistes ou nationalistes spécifiques aux minorités nationales : ainsi, les sionistes de tendance fasciste de la Ligue de défense juive reprennent le discours raciste anti-arabe des identitaires ou la théorie du «choc des civilisations» et du danger islamique. A Belleville, des nationalistes chinois ont organisé une manifestation «contre l'insécurité» au cours de laquelle des passants noirs ou arabes ont été pris pour cibles, désignés comme des «voleurs» sur critères racistes, ce qui a provoqué les applaudissements des réseaux identitaires français (par exemple sur le site internet «français de souche»)


De même, une partie des courants fascistes panarabes et des courants fascistes se réclamant de l'islam politique reprennent la rhétorique antisémite issue du nationalisme français. Ces convergences expliquent le développement de fronts communs entre nationalistes français et nationalistes se revendiquant des minorités nationales, qui peut apparaître surprenante au premier abord, puisque c'est le nationalisme français qui, en excluant juifs et arabes du corps national, a créé de toute pièce les minorités nationales et, dans le même temps, les conditions de l'oppression raciste des individus qui y sont alors assignés par leur origine et/ou leur couleur de peau. Mais cela traduit au contraire la profonde parenté idéologique entre ces différents courants, et le fait qu'ils se nourrissent les uns des autres, au détriment des classes populaires, et particulièrement des individus victimes de l'oppression raciste parce qu'assignés à une «minorité nationale».


Cela montre qu'il n'existe pas d'alternative au racisme dans le développement d'un nationalisme au sein des minorités nationales, puisque celui-ci reproduit le discours raciste dominant et converge parfois avec le nationalisme dominant. Au contraire, l'alternative se trouve dans le développement d'un antiracisme populaire qui combat toutes les formes de racismes, sur le plan idéologique comme sur le plan pratique. Les différents courants fascistes ont progressé sur le plan organisationnel comme sur le plan de leur influence idéologique et culturelle : ils ont ainsi réussi à imposer leurs «sujets», leurs «approches» dans le débat politique : une approche ethno-différentialiste des questions politiques et économiques au détriment d'une approche de classe, une rhétorique fondée sur la menace « intérieure» ou «extérieure» que représenteraient les minorités nationales ou religieuses, au détriment de l'affirmation de la question sociale, etc.


L'influence de l'idéologie nationaliste a progressé, et celle de l'idée de la « guerre du tous contre tous » également. Dans le même temps, les discours ouvertement sexistes ou homophobes, qui constituent également une partie du corpus fasciste, ont gagné du terrain. L'influence de l'idéologie fasciste dépasse de loin celle des groupes constitués, mais ceux-ci progressent quantitativement et organisationnellement, notamment dans les campagnes, mais aussi en ouvrant des locaux pignon sur rue dans plusieurs grandes villes. Il est également significatif que des discours reprenant les canons de l'idéologie fasciste ne soient pas considérés comme tels y compris au sein de la gauche et de l'extrême-gauche, voir d'une partie du courant anarchiste. Ce qui explique par exemple la tolérance dont a longtemps bénéficié Dieudonné au sein de l'extrême gauche au nom d'une posture «rebelle», certains groupes le trouvant fréquentable jusqu'à ce que celui-ci invite Faurisson sur scène.


On peut trouver des éléments d'explication dans la faiblesse de réflexion sur le fascisme de «l'antifascisme des années 90», qui s'est focalisé sur les groupes fascistes plutôt que sur leurs idéologies (quand dans sa version gauchiste ou social démocrate il ne s'est pas contenté d'une dénonciation du FN), qui a négligé la lutte idéologique antifasciste pour se consacrer exclusivement à la nécessaire (mais pas suffisante) lutte contre les groupes fascistes constitués et à l’autodéfense. On peut aussi trouver une explication à cela dans l'amalgame fréquent entre nationalisme, fascisme et racisme. Or si le fascisme se nourrit et fait la promotion du racisme et du nationalisme, il ne s'y résume pas, et réciproquement : on retrouve l'idéologie nationaliste dans une grande partie du spectre politique, comme le discours raciste. La spécificité du fascisme réside dans le développement d'un discours social «antisystème» qui permet, en période de crise, de recruter au sein des milieux populaires des personnes qui auraient pu être attirées par un réel discours révolutionnaire.



Alternative anarchiste et riposte


La nécessité d’une contre-offensive idéologique ne fait pas question. Une réponse politique anarchiste est une évidence qui doit privilégier l’autoformation des militant-e-s au sein du Mouvement libertaire et, plus largement au sein du « Mouvement social », sur les formes prises par les discours racistes et fascistes.


Aussi, faut-il insister sur le fait que le fascisme n’a jamais été éradiqué par le biais des consultations électorales, ces dernières lui ayant même conféré une certaine dose de «légitimité».


La lutte contre le fascisme constitue un axe important du combat des prolétaires en même temps qu'une absolue nécessité, pour autant l’antifascisme ne doit pas constituer l’unique combat pour la défense des intérêts de classe du prolétariat face à la bourgeoisie.


Le développement de luttes populaires, qui reste l’unique moyen d'imposer la lutte de classe, la solidarité, le refus de la domination masculine et de l'homophobie dans les débats politiques, doit nous permettre de briser les tentatives d’hégémonie culturelle des nationalistes et des fascistes.
Il s'agit donc pour nous de combattre le fascisme et la bourgeoisie qui le sous-tend, quel que soit son ancrage : une bourgeoisie qui se pare des vertus démocratiques ou pas, qui se réfère au libéralisme ou à la social-démocratie…


L’antifascisme, en s’attelant à dénoncer les discours autour des «souverainetés nationales», ne peut se concevoir que par le biais d’une Humanité sans frontières et d’une solidarité internationale sans concession!
La lutte contre les «souverainetés nationales» ne doit en aucun cas se faire le relais de l’ultra libéralisme économique et/ou idéologie, lequel ne se préoccupe que de la satisfaction de ses propres intérêts, intérêts opposés à ceux de la grande majorité des individus…
Nous devons développer un antifascisme qui puisse faire tomber les barrières humaines tout en contrecarrant les plans économiques globaux du capitalisme à l'échelon national et/ou à l'échelon mondial.
Combattre le fascisme et l'extrémisme nécessite alors de le faire :
- au plan idéologique,
- au plan social,
- et quand cela est inévitable (voire souhaitable), au quotidien, dans les quartiers, les usines etc.
Sur le plan idéologique, l'organisation anarchiste qui préconise des valeurs d’entraide, de solidarité, d’égalité, d’autonomie individuelle et collective est armée pour regrouper les individus et les structures qui ne fondent pas leur horizon de société autour de la défense des hiérarchies, de la lutte pour le Pouvoir, de la force brute et de la croyance en des êtres supérieurs qui seraient appelés à diriger les masses.
L’anarchisme peut offrir les références et les outils nécessaires à la constitution d'un «regroupement antifasciste» autour des valeurs égalitaires et libertaires qui sont les siennes.
Si les anarchistes ne sont pas les seuls susceptibles de regrouper individus et groupes afin de lutter efficacement contre le fascisme, elles et ils garantiront à ce regroupement et la lutte qu’il sous-tend son entière autonomie. Il ne s’agira à aucun moment d'en prendre le contrôle. A contrario, au travers de cette lutte, ils oeuvreront pour bâtir, toutes et tous ensemble, une société débarrassée du fascisme et de ses fondements : le capitalisme, le libéralisme et l'étatisme.
Au plan des agencements sociétaires, l'égalité économique et sociale pour laquelle milite l'organisation anarchiste se traduit par la mise en oeuvre de l'autogestion généralisée. La participation des individus et des collectifs en tant qu'acteurs et non plus simples spectateurs supposent :
- une conscience aiguë des problèmes qui traversent la société,
- une responsabilisation face à ces problèmes,
- le rejet de toutes les idéologies qui aspirent à diriger les individus et à décider en leur nom, le fascisme étant de ce point de vue exemplaire au travers de ses pratiques autoritaires…

Concernant la lutte contre l’idéologie fasciste et sa traduction en actes, il ne peut être question pour l'organisation anarchiste d’être désignée comme l'avant-garde d'une armée antifasciste prête à faire le coup de poing avec la vermine extrémiste.

Ainsi, en vue du développement d'une autodéfense antifasciste, nous devons éviter le piège d'un tête à tête anarchistes contre fascistes, qui placerait l’État, et les courants politiques institutionnels dans le rôle d'arbitres, usant tour à tour de la répression pour les uns et pour les autres, ce qui n'empêche pas l’État par ailleurs de soutenir ponctuellement les fascistes (en leur garantissant l'immunité ou en les protégeant).


Les méthodes employées pour barrer la route aux fascistes doivent rencontrer l'assentiment de tous les individus et collectifs épris de justice sociale et de liberté. Il ne pourra être question de s'abriter derrière les Institutions - Justice, Police, décideurs et élus - pour éradiquer les idéologies rétrogrades.
L’autodéfense antifasciste que nous préconisons relève d’une culture d'autodéfense à développer dans les quartiers, sur les lieux de travail, les associations, les syndicats. Elle ne pourra se résumer à la seule dimension physique, dimension nécessaire et inévitable à certains moments, mais cette autodéfense devra faire sens et s’employer à aborder dans le champ idéologique la critique et la dénonciation des offensives fascistes masquées derrière des «passerelles».


Pour l’essentiel, le message que nous tenons à faire passer est celui-ci :
Nous devons tout mettre en oeuvre pour barrer la route à la vermine fasciste et à toutes les dérives autoritaires.
Pour cela, nous devons nous mobiliser, le plus largement possible, afin de créer les conditions favorables à l’éradication des idées et des actes fascistes et à leur installation au sein de nos sociétés.
La lutte sociale nous fournit le terrain privilégié du nécessaire affrontement aux «fascismes», dès lors que s’engagent en même temps, le combat contre la barbarie capitaliste, l’autorité étatique et la lutte pour l’émancipation des individu-e-s.


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Messagede Protesta le Dim 26 Mai 2013 01:33

Un peu de baston entre orgas:

- 2. Ne pas tomber dans la politique de l’amalgame - théorique et idéologique - qui tend à ranger sur un même plan par exemple, le FN et le PS. Le FN n’est ni le jouet, ni la " création " du Parti socialiste (de l’ère mitterrandienne) pas plus que l’épouvantail agité par une droite revancharde... Aussi devons-nous dénoncer simultanément et de matière différenciée :
- le programme xénophobe et antisocial du parti de l’extrême- droite,
- la politique économique et sociale du gouvernement actuel,
- les perspectives - ou plutôt l’absence de perspectives - du changement sociétaire réel, dans les divers programmes et propositions de la social-démocratie, humaniste ou dite " révolutionnaire ".


Donc quand l'UMP et le PS appliquent les projets politique du FN en sous main, on fait quoi?? Et on dénonce quoi?
N'est il pas important de dénoncer le rôle du PS dans cette histoire?? C'est quand même Mitterrand qui a donné la parole à la télé à le pen, c lui et sa clique qui pendant des années durant se sont servi du FN comme épouvantail.

c'est quand même à l'époque de Jospin qu'il y a eu des tas de reconduite à la frontière et des chasses aux sans papiers, etc...
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Messagede Cheïtanov le Dim 26 Mai 2013 12:58

Les CRA c'est Mitterand, les charters Chevénement, les CRS Mollet en pleine grève des mineurs. Je le répète, les partis type SFIO ont la responsabilité historique du fascisme.

Quant au texte de la CGA, bien, mais leur pratique est tout autre (cf Lyon, ou Clermont lors de la mort de Wissam)
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Messagede frigouret le Dim 26 Mai 2013 13:48

Je pense que c'est une erreur de qualifier un régime de fasciste avec pour repère sa politique migratoire.
Un fascisme pourrait être aussi bien pro ou anti immigration. Je pense à ce bouquin de Steinbeck que nous évoquons de temps en temps, nous voyons bien que les quasi esclavagiste proprietaires californiens incitaient l'immigration sans pour autant être d'illustres humanistes.
Par contre la thèse que le fascisme prenne sa source, pour partie, dans les milieux socialistes français avec des personnages comme Sorel ou des associations comme le cercle Proudhon, le syndicalisme révolutionnaire aussi, ça se défend.
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Messagede Cheïtanov le Dim 26 Mai 2013 19:36

Le fascisme a toujours été contre la différence. L'URSS aimait pas les non-russes

Sur que si on défend le libéralisme ça fait con.
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Messagede frigouret le Lun 27 Mai 2013 14:49

C'est une erreur, le fascisme n'est pas caractérisé par le racisme, il ne l'était pas à l'origine, et les lois racistes de Mussolini n'interviennent qu'après son rapprochement avec Hitler. J'insiste parce qu'il me semble important de bien définir le fascisme afin d'être mieux armé pour s'en défendre.
Apparemment tu ne t'es pas encore bien décrotté de ton passé gauchiste, et tu figures assez bien le terrorisme intellectuel du PCF de la fin du XX ème siècle qui voulait disqualifier tous ces adversaires en les traitant de fascistes.
Et puis alors " le fascisme est contre toutes les différences" venant de part est assez cocasse, alors que le fond de ta pensée ici est justement un perpétuel combat contre la différence , entre les sexes, les espèces, les orgas et même les idées .
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Messagede bajotierra le Lun 27 Mai 2013 15:42

les CRS Mollet en pleine grève des mineurs


c'était jules moch .. mollet c'est les oeufs , non ?


Création CRS
C'est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que le gouvernement provisoire du général De Gaulle, par décret en date du 8 décembre 1944, crée les Compagnies républicaines de sécurité. Il importait alors pour le pays de disposer de forces mobiles d'essence civile chargées de maintenir et de rétablir l'ordre républicain.



Anecdote sur wiki
Alors que les sympathisants communistes étaient à l'origine très présents dans ses rangs (ce qui s'explique par leur engagement dans la Résistance, et selon certains par une volonté d'entrisme), une épuration a limité leur nombre après que le Parti communiste se fut placé dans l'opposition aux gouvernements d'après-guerre : à la suite d'une manifestation à Marseille (du 12 novembre 1947) à l'appel de la CGT et du PCF, non réprimée[réf. nécessaire] par certains gardiens de CRS proches des idées communistes dont le comportement avait été jugé "douteux", plusieurs compagnies sont dissoutes et les CRS réorganisées de sorte de faire disparaître l'influence communiste en leurs rangs.
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Re: Antifascisme

Messagede Cheïtanov le Lun 27 Mai 2013 16:41

Oui Moch pardon.

Frigouret donne moi une exemple de fasicme ouvert sur les autre, ça m'interroge.

frigouret a écrit:il ne l'était pas à l'origine, et les lois racistes de Mussolini n'interviennent qu'après son rapprochement avec Hitler. J'insiste parce qu'il me semble important de bien définir le fascisme afin d'être mieux armé pour s'en défendre.

C'est exactement l'argument des mussoliniens aujourd'hui ce que tu dis là. Que Mussolini serait devenu raciste forcé par Hitler...

frigouret a écrit:Apparemment tu ne t'es pas encore bien décrotté de ton passé gauchiste, et tu figures assez bien le terrorisme intellectuel du PCF de la fin du XX ème siècle qui voulait disqualifier tous ces adversaires en les traitant de fascistes.

Râté, je le fais pas ça. Je considère comme fasicme l'extrême droite avec plein de nuances, et le marxisme-léninisme, ainsi que le trotskisme orthodoxe.

frigouret a écrit:Et puis alors " le fascisme est contre toutes les différences" venant de part est assez cocasse, alors que le fond de ta pensée ici est justement un perpétuel combat contre la différence , entre les sexes, les espèces, les orgas et même les idées .

Non, toi qui est pour un néo-libéralisme libertoïde c'est pas pareil. T'as des exemples de ce que tu dis ??
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Messagede frigouret le Mar 28 Mai 2013 10:17

Néo libéralisme libertoide ? Après tout , pourquoi pas ! S'il faut absolument vivre avec code barre tatoué sur le front ( ce qui me désespère ) , mais cela vaut mieux tout compte fait qu'un néo gauchisme autoritaroide. Enfin nos petites personnes n'ayant en fait que peu d'importance j'aimerai vous présenter un texte que Jacques Ellul (oui je sais un chrétien ) écrivit juste après la défaire d'Hitler avec comme analyse étonnante qu'il avait en fin de compte gagné la guerre.

http://maurice-darmon.blogspot.fr/2009/ ... n.html?m=1
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Messagede Cheïtanov le Mar 28 Mai 2013 13:02

C'est bien tu admets donc être pour le capitalisme, bravo.

Et mes sorties fascistes elles sont où ?

Pour revenir au sujet, quel antifascisme ? Je pense qu'il doit se baser sur la lutte des classes, et être contre les partis et les syndicats du système qui ont des militant-es fascistes à postes, qui après un moment se font parfois exclure (CFTC bien sûr, mais aussi FO, CGT et Solidaires)
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Messagede frigouret le Mar 28 Mai 2013 13:08

A mettre en relief avec "frigouret, donne moi un exemple de fascisme ouvert sur les autres , ça m'interroge ".
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Messagede Cheïtanov le Mar 28 Mai 2013 19:39

Cool. Mais tu disais que j'aime personne, ni les autresz sexes, gens etc
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Messagede Protesta le Ven 31 Mai 2013 17:49

bon lu des choses et d'autres, donc je vais poser une autre question à vous tous: que pensez vous des fronts antifasciste???
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Messagede toma le Ven 31 Mai 2013 23:19

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Messagede vroum le Sam 1 Juin 2013 08:53

La préface de ce bouquin (édition 1999) a été rédigée par Alain (Bonnet de) Soral...
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Re: Antifascisme

Messagede frigouret le Sam 1 Juin 2013 09:28

Voilà ce qui se passe quand on ne comprend pas le fascisme comme fondamentalement une idéologie de l'etatisme, nous voyons des courants de pensée fortement étatistes, communisme, jacobinisme, republicanisme se réclamer champions de l'antifascisme.
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Re: Antifascisme

Messagede Protesta le Sam 1 Juin 2013 23:51

Mais encore...
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Re: Antifascisme

Messagede Cheïtanov le Dim 2 Juin 2013 13:36

Je pense qu'en 30 ans de front antifasciste, le FN est à plus de 20%. Et que dans l'Histoire, le front unique antifasciste s'est toujours fait écraser.

Mais que les "anarchistes", les maos, les trotskos ça leur permet de se croire exister, et les socedsms (FdG, PS) ça leur permet de redorer leur image.

Comme le disait La Sulf' "Et que d'abord pourquoi que Lénine il serait meilleur que Le Pen ?"
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Re: Antifascisme

Messagede vroum le Jeu 4 Juil 2013 14:58

Faire barrage à l’extrême droite

http://www.monde-libertaire.fr/antifascisme/16544-faire-barrage-a-lextreme-droite


Aujourd’hui Ayoub n’est pas différent de Price et Rainey. Son assurance il la tient de ce qu’une grande partie de la France lui ressemble. Il ne la tient pas seulement de gens ordinaires, mais aussi du pouvoir. Il n’y a jamais eu de seuil de tolérance à l’imposture, toute objection en est une autre. C’est pourquoi, bien que répugnant à l’ampliation à propos d’un homme, qui de toute évidence, exerce son mépris sur chacun, la régularité maniaque de son entreprise « à nier ce qui est et à expliquer ce qui n’est pas » réclamait des réponses fermes et proportionnelles à la répugnance qu’inspire, aux uns, le personnage, ou à la rhétorique de falsification des raisonnements à laquelle les autres sont poreux.

Les règles de la communication l’autorisent à tous les sophismes et figures récurrentes du règne médiatique et publicitaire, le visage de la duplicité est diffusé sur les écrans avec une égale complaisance. Les médias c’est précisément le règne du sophisme et de toutes les tromperies de l’image. Ces médias qui n’ont cessé d’alimenter la guerre sociale entre les opprimés.

L’extrême droite prétend être victime des médias alors qu’elle y est largement diffusée. Cette ambiguïté que cultive l’extrême droite, elle le fait avec le concours des médiatiques. Si l’extrême droite prétend se situer hors du système, elle en est, en fait, à une autre latitude.

Image

Par exemple, pour le seul mois de janvier de l’année 200, voir sur le site du FN, l’agenda des seuls Marine et Jean-Marie Le Pen. En 2007 les chaînes d’informations qui diffusent en continu des débats politiques auxquels elles invitent régulièrement des personnalités, n’étaient pas si nombreuses qu’aujourd’hui.

Le 8 janvier : Marine Le Pen sera l’invitée sur France 2 de l’émission « Mots Croisés ». Le 9 janvier : Jean-Marie Le Pen sera l’invité de France Info. Le 10 janvier : Jean-Marie Le Pen est l’invité de France Bleu. Le 12 janvier : Marine Le Pen sera l’invitée de l’émission « Sur un air de campagne ». Le 13 janvier : l’émission « Chez F.O.G. » prévue sur France 5 et TV5 Monde avec pour invité Jean-Marie Le Pen est reportée à une date ultérieure. Le 15 janvier : Jean-Marie Le Pen est l’invité de Radio Courtoisie. Le 18 janvier : Jean-Marie Le Pen est l’invité de France Culture. Le 20 janvier : Jean-Marie Le Pen est l’invité de l’émission « La voix est libre » sur France 3 Paris-Île-de-France-Centre. Le 24 janvier : sur France 24, Jean-Marie Le Pen est l’invité de Roselyne Febvre.

La responsabilité des acteurs politiques

Si le FN se trouve bien au cœur du système, il obtient également l’assentiment de toute la classe politique puisque depuis une vingtaine d’années, les politiques d’extrême droite ont été largement relayées par l’UMP et le PS. L’omnipotence des politiques sécuritaires et les expulsions figurent au centre de l’idéologie de tous les partis au détriment des avancées sociales. L’extrême droite a gagné en même temps qu’une légitimité, le combat sur le terrain politique.

Cette assurance et cette arrogance viennent de là. La responsabilité des crimes, y compris celui de Clément Méric, est partagée entre tous les acteurs du pouvoir politique : « Chacun des partenaires connaissant bien l’autre, ils trichent et s’en accusent à grandes triches actionnelles. Mais ils espèrent encore tricher en commun […] pour maintenir l’essentiel du capitalisme s’ils n’arrivent pas à en sauver les détails » (Guy Debord).

Preuves de l’implication du FN : le Club de l’Horloge comprend une centaine de membres. La majorité issus de Polytechnique et de l’ENA, cadres et hauts fonctionnaires. Ce club est un pont influent entre l’extrême droite et la droite libérale. La plupart des membres sont encartés au FN. Dans une longue lettre adressée, le 4 avril 2002, à son président Henry de Lesquen, lettre signée par Jacques Chirac, on peut lire en introduction : « Vous avez bien voulu me faire part de votre inquiétude face au fléau de l’insécurité qui menace notre pacte social ainsi que de votre souhait de voir réformer la loi présomption d’innocence par une droite unie aux prochaines élections présidentielles et législatives. » S’en suivent des explications précises sur les orientations sécuritaires du pays pour les années à venir. Le Club de l’Horloge est influent, le FN a toujours été porteur d’inflexions sécuritaires, les gouvernements et les médias ont abondé dans ce sens. Les victimes de la police sont aussi celles du FN. Ce système sécuritaire de surveillance pourtant décrié par Alain Soral, au moment où il soutenait la candidature FN, est un bloc qui comprend toutes les tendances de la démocratie parlementaire.

L’extrême droite et le FN impliqués

Avec maîtrise on aura ignoré l’influence du FN et du Club de l’Horloge dans le gouvernement du pays, et tout de suite après on en aura oublié ses conséquences. À savoir que l’insécurité sociale, matérielle et morale qui précède l’insécurité physique a été propagée par toutes les tendances politiques qui réclamaient une politique sécuritaire. Mais il est vrai, ils ont obtenu une politique sécuritaire raciste.

Le FN a été le grand promoteur du spectacle de « La France aux français ». Les gouvernements lui ont emboîté le pas. Pour la seule année 2006, 23 000 expulsions et reconduites à la frontière ont été exécutées. Les années suivantes ça n’a fait que croître.

Comment un parti (le FN) qui fait son fonds de commerce d’une insécurité directement corrélée à la misère pourrait-il prétendre être hors du système ? Il en vit. C’est la source principale de ses profits. Le FN n’envisage pas de supprimer la misère, mais peut-être bien les miséreux. Pour preuve Alain Soral, évoquant « la France sérieuse », parle des ouvriers et des salariés. Il n’avait aucun mot pour les obligés du système. Cette omission n’en est pas une. C’est sciemment, au cœur de la stratégie du FN, que perdure la chaîne des profits qu’on tire directement d’une misère à laquelle attribuer tous les maux. Mais aussi du PS et de l’UMP car de tout bord qu’on se situe on engrange des bénéfices sur la misère et la sécurité. Quand on n’en tire pas le plus directement avantage par le chantage à l’ordre, la gestion de plusieurs services carcéraux échue entre les mains d’entreprises privées, il est de premier intérêt pour ces puissantes sociétés et ceux qu’elles financent, de manière si peu occulte, de ménager leur profit.

À la remorque du pouvoir, les incidences quotidiennes

Aucun procès n’établira jamais l’incidence de quelques événements, de toute apparence mineurs, antérieurement survenus. Incidents à l’examen desquels la responsabilité d’un crime est partagée entre celui qui porte le coup fatal et ceux qui, par leurs propos et leurs actes, ont concouru à décupler ou à révéler la rage meurtrière de leur auteur. Il y a l’implication directe des acteurs du pouvoir, c’est-à-dire de ceux qui peuvent agir favorablement en faveur de la justice sociale et qui contribuent pourtant à la guerre sociale : en propageant terreur, obscénité et confusion médiatiques, crétinisation, culte de l’argent et disparités sociales sans cesse accrues.

Il y a la soumission des sujets à l’idéologie régnante qui en fait de mauvais hommes dans une société mauvaise. Quelle incidence aurait pu avoir, sur la détermination folle du meurtrier, dans les jours qui ont précédé le crime, des obstacles de la bureaucratie, une entourloupe commerciale, la trahison d’un ami motivée par la cupidité ? Le matin du drame, un homme aux abois, peut-être tiraillé par des problèmes d’argent, qui se heurte à une administration sourde, à une note d’électricité dont le montant exorbitant ne semble pas se justifier, un commerçant mal intentionné qui vole, un copain qui triche pour une poignée d’euros.

Dans L’Automne allemand, Stig Dagerman évoque la personnalité d’un inculpé dans un des procès de dénazification qui ont cours après-guerre. Un inculpé dont les exactions dans les camps n’étaient initialement pas motivées par la haine raciale mais par l’ambition ordinaire d’un homme ordinaire. Avant-guerre, cet homme était un socialiste pur jus, un homme de gauche qui nourrissait le rêve de devenir instituteur. C’est pour accéder à son rêve qu’il rejoint le Parti national-socialiste. Le meurtrier de Clément Méric était lui probablement mû par la haine raciale et politique. Mais les professionnels de cette société qui ont pu, les jours précédents, décupler et révéler sa rage meurtrière et qui étaient fonctionnaires, employés d’une entreprise commerciale ou cadres qui l’ont précipité dans les arcanes des obstacles bureaucratiques et du vol permanent, qui étaient-ils ? Des employés assez ambitieux pour renvoyer de service en services, comme une balle, un homme que des radars, des factures, des découverts, une pension inquiétaient ?

Si j’ai pu, pour ma part, dans les jours qui précédaient le crime, tenir des propos méprisants, sur des réseaux sociaux, à l’égard d’internautes anonymes qui exprimaient ouvertement leur haine raciale, alors je pourrais avoir entraîné un de ces fascistes à commettre un acte violent.

Les compromissions et les omissions des intellectuels

Dans les périodes anté-spectaculaires, le rôle de l’intellectuel était de prendre assez de hauteur pour jeter sur un événement obscur la lumière d’une vérité indiscutable au regard de la logique, des évidences et du bon sens.

Aujourd’hui, on peine à comprendre le sens de l’intervention d’Erwan Lecœur, spécialiste médiatique du FN : « Le lepénisme est une façon de parler commune à l’UMP. » Cette approche philologique ne résiste pourtant pas à l’examen des faits. À moins que les médias, où Erwan Lecœur se produit quelquefois, mentent de façon éhontée, j’ai le vague souvenir d’avoir entendu que les expulsions se poursuivent sous la gauche et que la chasse aux Roms n'avait pas faibli. Ce que confirment les mails de RESF que je reçois régulièrement. Lorsque le philologue Victor Klemperer a conçu son LTI 1, il n’a pourtant pas séparé l’étude de la langue du IIIe Reich des faits. Tout au contraire. Je ne suis pas équilibriste, je comprends mal. S’il y a une recette d’acrobaties intellectuelles qu’en son temps Debord appelait « sophisme », nous sommes tout disposés à la connaître, si elle ne porte pas pour nom arrivisme, lâcheté, compromissions.

« Cette paresse du spectateur est aussi celle de n’importe quel cadre intellectuel, du spécialiste vite formé, qui essaiera dans tous les cas de cacher les étroites limites de ses connaissances par la répétition dogmatique de quelque argument d’autorité illogique. » Il n’y a eu aucun mot sur cette entreprise de crétinisation nationale et planétaire qui favorisent l’émergence du « petit homme » et la constitution de la « carapace caractérielle » autrefois pointés par Wilhelm Reich, à la veille des années ensanglantées du nazisme, avant que Reich, réfugié aux États-Unis, soit incarcéré sur ordre de la Food and Drug Administration, cette institution qui travaille pour les intérêts de Monsanto et Coca-Cola. Il meurt en prison en 1957. Les spécialistes ont dû admettre, non sans dépits, que sa mort n’était pas naturelle.

Le fascisme et l’extrême droite sont une des options du capitalisme. Option à la survenance de laquelle il travaille au moment jugé opportun.

Dans Planète malade, Guy Debord rappelle qu’en mai 1968 le taux des suicides était pratiquement tombé à zéro. En Grèce aujourd’hui il progresse de façon alarmante.

Pour le meurtre de Clément Méric rien ne vient instruire un procès national sur l’implication de l’ensemble du personnel politique, médiatique et affairiste. Aucune colonne, aucun éditorial, aucun commentaire télévisé. Le dévoiement des intellectuels arrive fort opportunément confirmer le verrouillage presque total de l’édition. « La force c’est l’ignorance » c’est un slogan de 1984 qui préfigure les sophismes et les faux-semblants qui constituent, maintenant presque totalement, le fonds de commerce des intellectuels stipendiés médiatisés. On peut affirmer, sans crainte de se fourvoyer, qu’ils vivent bien ces gens, qui n’embarrassent leur conscience d’aucune vérité… Car pour le reste, Stig Dagerman avait une formule très juste pour désigner les indignations et les hypocrisies du pouvoir et des médias après de telles tragédies, ce simulacre relève, aurait-il dit, de « la dictature du chagrin ».

Lorsque le ministre des affaires prétendument sociales, Marisol Touraine, comme avec le précédent gouvernement UMP, avance que l’espérance de vie ayant augmentée, il est normal que l’âge de la retraite intervienne plus tard, la terreur tient tout entière dans l’existence paisible de telles explications. Ce qui est omis est ce qui compte véritablement et en l’occurrence ce que la ministre a volontairement occulté : que l’espérance de vie s’est généralement accrue parce que la mortalité infantile a baissé, qu’un ouvrier a une espérance de vie de dix ans inférieure à un cadre. Si la conséquence logique de ces données incontestables, que le pouvoir sort ou occulte selon son intérêt du moment, est imparable, c’est qu’il y a dans la bouche de la ministre autant de cadavres que peut en contenir une guerre sociale et un mépris souverain de la classe dominante. Car l’imparable conséquence d’une telle mesure sera de précipiter la mort prématurée d’un nombre incalculable d’ouvriers et de pauvres avant qu’ils aient atteint l’âge de la retraite. Ce déni, ces omissions, ce mépris appartiennent à des personnalités parfaitement conscientes de leurs mensonges et ce qui peut généralement motiver un homme à mentir sciemment, dans de telles circonstances, c’est qu’il accorde plus de prix à ses privilèges déjà grands qu’à la vie de plusieurs millions de sujets qu’il opprime. Pour en arriver là, à un point terrifiant de mépris de la vie, il faut être construit sur la base d’une haine de classe profonde. C’est cette haine qui constitue les soubassements psychologiques de l’homme de pouvoir, mais elle est si bien disciplinée par une effarante batterie de faux-fuyants spectaculaires, institutionnels, financiers, économiques qui constituent autant de justifications illogiques en regard d’une morale simple, cohérente et bienveillante, qu’on dira d’un tel homme qu’il est raisonnable, qu’il agit dans l’intérêt général quand il est un criminel. La langue du pouvoir est comprise dans l’arsenal de cette haine disciplinée. Elle est parlée par l’ensemble des médiatiques, des affairistes, des acteurs du pouvoir.

Mais pour nous rien ne différencie, dans le cas présent, un ministre du meurtrier de Clément Méric. Et encore nous trouverions, éventuellement, à ce dernier, les circonstances atténuantes, qu’en pareil cas, on trouve à un demeuré qui appartient à une classe opprimée et qui, à ce titre, souffre d’une haine qui se trompe de cible. Nous n’en trouverions aucune pour un ministre qui n’agit sous l’emprise d’aucune folle impulsion mais qui au contraire fait valoir les efforts de toute une vie à l’anéantissement de millions d’autres vies.

Dans la volumineuse biographie qu’il consacre à Orwell, l’hagiographe Bernard Crick note que Richard Blair (le père d’Orwell) a pris sa retraite à 55 ans, en 1930. Il ajoute qu’alors, en Angleterre, les salaires étaient de 100 livres pour les ouvriers et les employés, 280 pour les patrons, 300 livres pour les professions libérales les mieux payées.

Alors quels progrès ?

Une retraite à 65 ans, à 67 ans et quel rapport entre les revenus d’un allocataire RSA, le titulaire d’un de ces nombreux contrats précaires, un salarié payé au SMIC avec l’incroyable manne qui tombe mensuellement dans les mains du footballeur Franck Ribéry (850 000 euros ! Un footballeur !). Sans parler des traders, des grands patrons.

Si la société du père d’Orwell s’appelait démocratie, à quel détail superflu tiendrait le maintien du mot démocratie pour la société d’aujourd’hui ? Au fait que les sujets payent pour être mesquinement et constamment surveillés sur internet et sur un téléphone portable ? Si vous considérez que mener des combats minimalistes, dans le sillage de syndicats liés à l’État, nous vaut une retraite à 67 ans et des disparités extraordinaires, que c’est une victoire, soit. Si vous considérez maintenant qu’un refus tranché et révolutionnaire a mené à une parenthèse enchantée, qu’elle a débordé sur plus de bienfaits tout au long des années soixante-dix, et qu’alors on vivait certainement mieux, vous serez obligé d’admettre que la posture révolutionnaire est plus efficace que le suivisme bêta d’aujourd’hui.

Pour ceux qui objecteraient avec fatalisme qu’il n’y a rien à faire, Toulouse-la-rose rappelle : « Après la libération du pays, les FTP ont accepté de déposer les armes "pour mieux" soutenir les négociations avec un patronat qui avait été collaborationniste à 90 % et qui, trop heureux sans doute d’échapper à l’épuration qu’il méritait, se fit une joie de nous offrir la sécurité sociale et la retraite. (Revenant sur ces cocasses événements, un de ces négociateurs, Kriegel-Valrimont en l’occurrence, expliquera en 2007 à l’animateur culturel Frédéric Bonnaud, dans son émission d’alors Charivari, qu’à la Libération, la situation économique de la France était vingt fois pire que celle d’aujourd’hui, et que cela n’avait pas empêché le patronat de "tout" lâcher, ce qui amusait encore passablement le vieil homme). »

Régis Duffour



1. Viktor Klemperer, Lingua Tertii Imperii : Notizbuch eines Philologen (Langue du Troisième Reich : carnet d’un philologue), 1947. (Ndlr.)
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