Bon avant de développer un peu deux aspects du sujet, je voudrais revenir sur le fait que le vote majoritaire dans le mouvement anarchiste n'est ni une nouveauté, ni une exception. Donc, évidemment pas une nouvelle mode. Il est même très courant dans les organisations anarchistes aux 4 coins du monde. Le fait d'être fréquent ne lui donne certes pas une légitimité en soi, mais il ne faudrait pas donner à l'inverse l'idée que c'est une nouveauté un peu bizarre, qui par conséquent serait illégitime.
Alors maintenant deux trois éléments pour démarrer le sujet, sans faire un texte de trois pages.
Unanimité Garante du débat :
Parmi les vertus annoncées de l'unanimité, ce mode de décision est censé favorisé le débat. L’argument étant que tant qu’il persiste des désaccords, le débat doit continuer. Cette idée peut paraître séduisante, notament pour respecter l’individu. Mais elle est un « principe philosophique » qui ne supporte que peu l’épreuve du réel. De plus elle tend à fixer comme idéal aux regroupements humains le débat plutôt que la décision. Pour une organisation politique anarchiste, la participation à tel ou tel événement limité dans le temps, où la détermination d'une stratégie liée à une situation limitée dans la durée, ne permet pas le temps requis par l’unanimité. Pour une société il en va de même. Si pour discuter d’une idée cela pourrait paraître viable, dés qu’il s’agit de prendre une décision pour réagir à une situation (quels moyens mettre dans la santé par exemple) cela peut même représenter un danger. La réponse de l’autonomie individuelle (comme équilibre avec l’unanimité) pour les décisions n’est pas plus satisfaisante, dans la mesure ou un grand nombre de décisions engagent plus largement que l’individu ou un petit groupe : par exemple la diminution de la consommation d’hydrocarbures pour limiter l’effet de serre. Enfin, s'il faut 10 ans pour trancher une décision, ça a comme résultat pervers, de favoriser les stratégies de contournement des règles communes. Le débat ne va donc pas nécessairement à son terme, puisque le faire d'une partie des acteurs tranche de facto le débat. Enfin, le mode majoritaire de la prise de décision n'empêche pas de se doter d'espace de débats et d'échanges préalables avant de déterminer un choix.
Dictature de la majorité ou dictature de la minorité
L’unanimité est présenté comme une garantie pour éviter la dictature de la majorité. Avec en argument bonus, que la majorité n’est pas une garantie d’un bon choix. Il ne s’agit pas de considérer que la majorité à toujours raison. Cependant, l’unanimité pas plus que la majorité n’est infaillible. C’est donc à un autre débat ; celui autour de la vérité auquel cet argument bonus répond. Il faut séparer les choses. La question n’est donc pas tant de regarder si la décision est juste, que si elle est légitime. En effet l’unanimité ne garanti pas une décision plus vrai, plus juste qu'avec un vote majoritaire. La vérité n’est pas la dynamique qui permet de faire un choix quand au mode de prise de décision dont se dote une société humaine. Le travers de l'unanimité est par contre d'offrir la possibilité, pour contrer les risques d'une dictature de la majorité; d'instituer la dictature de la minorité, voir la dictature du moi, de l'unique. En effet elle institut le vote véto. Si la question du rapport majorité/minorité est à ne pas négliger, l'outil unanimité comme réponse ne résoud absolument pas cette question.
Pour avoir pratiqué les deux modes de prises de décision dans ma militance anarchiste, je dirais qu'ils impliquent une façon différente de voir les choses. Le vote majoritaire, c’est plus le moyen de se mettre d’accord pour agir ensemble. L’unanimité c’est plus le moyen de définir ce qui ensemble nous est commun, par l'élimination de ce qui ne nous gène pas ou ne nous lèse pas. La dynamique est négative puisque le moteur est une négation : ça ne me gène pas. Sinon, j'ai pouvoir de l'empecher et ça ne se fait pas. En caricaturant, c’est donner un principe de la non action commune.
Je ne fais pas plus long pour le moment. Alayn, ça va peut-être pas toujours être possible de ne pas donner des exemples vécus pour illustrer avec la pratique