Anarchisme : une critique marxiste

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Anarchisme : une critique marxiste

Messagede Nico37 le Mar 7 Déc 2010 22:10

ANARCHISME : UNE CRITIQUE MARXISTE John Molyneux

1 - L'attrait de l'anarchisme

L’anarchisme a toujours exercé un fort attrait sur ceux qui se rebellent contre cette société pourrie. Il exerce un attrait particulier sur la jeunesse, ce qui est à son crédit. Dans tout mouvement radical et révolutionnaire, les jeunes jouent un rôle disproportionné, car c’est la jeunesse, ni soumise, ni brisée, qui a le plus d’énergie et qui fait preuve du plus grand idéalisme. Face à l’exploitation, à l’injustice, à la toute puissance de l’Etat capitaliste et à l’implacable emprise de son idéologie, l’anarchisme s’insurge. Il affirme que n’avons pas à vivre ainsi; qu’il n’est pas inévitable qu’il y ait des riches et des pauvres, des exploiteurs et des exploités, des dominants et des dominés; qu’il n’est pas fatal qu’existent les guerres, le racisme, l’oppression, la domination de la majorité par une minorité, ni même d’une minorité par la majorité. Il s’oppose à l’idée reçue que, par nature, la masse des gens serait stupide ou égoïste et que, par conséquent, une autorité supérieure devrait lui dicter son comportement et la contrôler. L’anarchisme affirme que nous pourrions vivre en coopération et en harmonie. Il rejette avec mépris l’hypocrisie et l’opportunisme cynique des milieux politiques dominants, au sein desquels les politiciens bourgeois se déguisent et s’offrent comme des lessives, où la politique, sans principe, est à la merci des sondages d’opinion. L’anarchisme représente surtout une réaction à l’intégration croissante des principaux partis de gauche dans ce monde politique officiel corrompu. Il donne une expression radicale au sentiment largement partagé dans les milieux populaires que tous les politiciens se valent, ne cherchent qu’à s’emparer du pouvoir et ne se préoccupent que de leur portefeuille. Par conséquent, dans les circonstances actuelles, il n’est pas surprenant que l’anarchisme connaisse un regain sensible en Europe. Rarement, sinon jamais au cours de ses cent ans d’existence, la social-démocratie n’a aussi ouvertement abandonné toute contestation du système, ou ne s’est révélée aussi clairement comme simple complice de l’Etat. La désintégration des régimes dits communistes en Europe de l’Est et dans l’ex-URSS ont eu une importance encore plus grande. Des millions de gens dans le monde considéraient ces pays comme l’alternative “réellement existante” au capitalisme occidental. Mais, depuis la fin de l'année 1989, les événements ont implacablement détruit ces illusions, démontrant non seulement la faillite lamentable des économies de commandement bureaucratique, mais aussi la haine immense que les masses populaires vouaient à ces régimes. Le stalinisme, tradition qui a dominé la majorité de la gauche pendant soixante ans, s’est effondré. La démoralisation qui en a résulté a atteint, bien au-delà des rangs des partis communistes, tous ceux qui considéraient que les sociétés de l’Est étaient d’une façon ou d’une autre supérieures au capitalisme occidental. Il faut donc s’attendre à ce que ceux qui recherchent une alternative radicale considèrent l’anarchisme comme la seule idéologie qui ne soit pas souillée de sang.


L’anarchisme exerce également un fort attrait en tant que support d’un certain style de vie. Pour une fraction de la jeunesse qui vit dans la pauvreté, souvent sans emploi, parfois même sans logement, qui squatte ou habite des logements vétustes, plus ou moins en marge de la société dans les quartiers pauvres de cités délabrées, et qui se trouve souvent obligée de recourir à la petite délinquance, l’anarchisme représente le refus d’un système qui l’a rejetée. La poursuite d’objectifs nobles, un attrait puissant et diversifié, ne garantissent pourtant pas qu’une idéologie puisse atteindre les fins qu’elle se fixe. Par exemple, le stalinisme a exercé un immense attrait sur les opposants du capitalisme et de l’impérialisme, mais il n’a été qu’une impasse. L’anarchisme constitue-t-il une idéologie capable de conduire à la victoire la lutte pour l’émancipation de l’humanité ? Cette brochure défendra l’idée qu’il n’en est pas capable, que les conceptions fondamentales de l’anarchisme sont entâchées de faiblesses importantes et qu’elles ne conduisent en pratique qu’à freiner et entraver la lutte pour cette émancipation. Elle présentera une critique de la théorie et de la pratique anarchistes d’un point de vue marxiste (c’est-à-dire du point de vue de la tradition du marxisme classique, celui de Marx, Lénine et Trotsky, et non celui du stalinisme) et tentera de démontrer que seul le marxisme, et non l’anarchisme, ouvre une voie vers la société sans classes du futur, société dont marxistes et anarchistes font leur but ultime.


2 - Les idées de l'anarchisme


L’anarchisme se présente sous de multiples formes. Il y a celui, purement individualiste, qui rejette toute forme d’organisation. Mais il existe aussi de nombreuses petites organisations anarchistes. Certains anarchistes expriment leur foi en l’Homme, indépendamment du critère de classe. D’autres, comme les anarcho-communistes, s’orientent vers la classe ouvrière. Il y a l’anarchisme de bandes paysannes à la Makhno. Il y a celui qui écarte les syndicats comme instruments de lutte et, à l’opposé, l’anarcho-syndicalisme. Il y a des anarchistes révolutionnaires, ou terroristes, ou pacifistes ou Verts. Il y aussi des anarchistes qui n’entrent dans aucune de ces catégories ou qui les combinent d’une façon qui leur est unique. Il y a des anarchistes influencés par Proudhon, par Bakounine, par Kropotkine, mais il n’y a pas de proudhoniens, de bakouninistes ou de kropotkinistes qui défendent une doctrine ou une ligne politique précise. Par conséquent, pour le critique, l’anarchisme se présente comme une cible sans cesse mouvante. Critiquez une théorie ou une ligne politique précise et il apparaîtra vite que la plupart des anarchistes ne la partagent pas. Analysez les idées d’un penseur classique de l’anarchisme et d’autres anarchistes le désavoueront. Malgré ces difficultés, certaines idées générales et certaines attitudes sont communes à toutes, ou à presque toutes les versions de l’anarchisme. Elles peuvent servir de point de départ pour une critique. Les plus importantes sont :

- l’hostilité à l’Etat sous toutes ses formes, y compris l’Etat révolutionnaire;

- l’hostilité à une direction, quelle qu’elle soit, y compris une direction révolutionnaire;

- l’hostilité à tous les partis politiques, y compris les partis révolutionnaires.

Nous les considérerons une à une.



L'Etat
Le sens littéral du terme “anarchie” est : absence de pouvoir, opposition à l’Etat et au gouvernement - pas seulement à un Etat particulier ou à un gouvernement particulier, mais à tous les Etats et à tous les gouvernements de tous les temps, par principe. C’est la définition caractéristique de l’anarchisme comme credo. L’anarchisme affirme que l’existence même d’un Etat, corps spécial d’hommes (et de femmes) exerçant le pouvoir physique et légal sur la société dans son ensemble, est oppressive et incompatible avec la véritable liberté humaine. Pour en finir avec l’oppression et instaurer le règne de la liberté, le pouvoir d’Etat doit être remplacé par la communauté autogouvernée, débarrassée de toute autorité centrale. Du point de vue des idées reçues, une telle perspective est soit vouée au désastre, soit tout bonnement impossible. Vouée au désastre, parce que sans Etat, la société s’enfoncerait dans une guerre chaotique de “tous contre tous” où la fameuse “loi de la jungle” prévaudrait. La vie serait détestable, “dégoutante, courte et brutale” (selon les termes du philosophe du XVIIe siècle, Thomas Hobbes). Impossible, parce qu’il serait dans l’ordre des choses qu’un individu ou un groupe d’individus s’élève inévitablement au-dessus des autres et les domine. Par conséquent, on ne pourrait espérer plus que la démocratisation de l’Etat par l’élection d'un gouvernement et l’introduction de certains droits démocratiques (droit d’expression, etc.) Sur cette question, c’est le sens commun qui a tort et l’anarchisme qui a raison. L’anthropologie nous fournit des preuves indiscutables que les être humains peuvent vivre en société sans Etat et sans gouvernement et que ces sociétés, loin d’être chaotiques, sont tout autant, sinon plus organisées que la nôtre. Beaucoup de ces sociétés ont été découvertes et étudiées par des anthropologues - un excellent exemple nous est donné par les Kung, ou Kaluhan Brahmen, d’Afrique du Sud. On a de nombreuses raisons de croire que l’absence d’Etat fut la norme pendant les centaines et milliers d’années qui vont de l’origine de l’humanité à sa division en classes sociales avec l’avènement de l’agriculture et de la propriété privée, il y 5 000 à 10 000 ans. L’anarchisme a également raison de considérer que toutes les formes d’Etat impliquent l’oppression d’un groupe de la société par un autre. L’avènement de la démocratie parlementaire ne change rien à cela. Quelle que soit la façon dont ils sont élus, les parlements ne contrôlent pas le véritable pouvoir, qui reste concentré dans les mains de hauts fonctionnaires de l’Etat (généraux, chefs de police, magistrats, etc.), des banquiers et des grands hommes d’affaires, qui utilisent ce pouvoir pour servir leurs intérêts et non ceux du peuple. Mais si une société sans classes est possible et souhaitable, comment peut-on se débarrasser de l’Etat actuel ? C’est en s’attaquant à cette question cruciale que l’anarchisme s’embourbe. Certains anarchistes, il faut le souligner, ne tentent même pas d’y répondre. Ils se contentent d’un rejet purement individuel de l’autorité de l’Etat et ne sentent nullement la nécessité de formuler une stratégie cohérente pour parvenir à son abolition. Mais une telle position est une impasse et laisse les mains libres à l’Etat pour perpétuer l’oppression de la masse de la population. Elle est également vouée à l’échec, car aucun individu, ni aucun petit groupe d’individus, ne peut en dernière analyse résister à la puissance d’Etat. Certains tentent d’échapper à l’autorité de l’Etat par le moyen de petites communautés autogouvernées basées à la campagne, voire dans le confinement des cuisines. Malheureusement, la commune anarchiste connaît les mêmes difficultés que la commune socialiste prônée par Robert Owen et les socialistes utopiques il y a plus de cent cinquante ans :

- c’est une solution qui ne peut concerner qu’une petite minorité;

- cette minorité reste soumise à toutes les pressions de la société dans son ensemble et, tôt ou tard (généralement plus tôt que tard), succombe.

La réponse la plus radicale et la plus sérieuse à cette question est que l’Etat sera détruit par une révolution, autrement dit, par un soulèvement de masse au cours duquel la classe ouvrière, par son action directe, brisera et désintègrera les institutions clefs de l’Etat actuel - les forces armées, la police, les tribunaux, les prisons, etc. D’un point de vue marxiste, cette réponse est absolument correcte - après tout Lénine consacra son travail théorique le plus important, L’Etat et la révolution, à démontrer précisément que l’essence de la révolution est la destruction de la machine étatique (contrairement à la notion social-démocrate et réformiste de conquête de l’Etat actuel). De plus, cette réponse a l’avantage de décrire un processus qui s’est réellement produit dans l’histoire, d’abord lors de la Commune de Paris de 1871, puis pendant la Révolution russe de 1917. Toutes les grandes révolutions populaires, allemande de 1918-1923, espagnole de 1936, iranienne de 1979 et roumaine de 1989, ont révélé des processus allant dans ce sens. La destruction de l’ancienne machine étatique fait immédiatement surgir la question de savoir ce qui doit la remplacer. L’anarchisme a en général été très vague sur ce point, mais la seule réponse cohérente avec les principes anarchistes est que le vieil Etat doit immédiatement être remplacé par une communauté autogouvernée sans Etat, ni gouvernement, ni autorité centrale. Là, le point de vue anarchiste perd toute force. Une chose est d’affirmer, comme le fait le marxisme, que lorsque le socialisme aura été définitivement établi à l’échelle internationale, que les classes et les luttes de classes auront disparu, que la production aura atteint un niveau tel que les produits nécessaires seront disponibles pour tous, que l’habitude de travailler pour le bien commun sera devenue une seconde nature, alors l’Etat perdra toutes ses fonctions et s’éteindra. Toute autre chose est de proposer que, dans le feu d’une révolution, lorsque le sort de celle-ci ne tient qu’à un fil, ce qui inévitablement sera le cas, la classe révolutionnaire pourrait immédiatement se dispenser de toute utilisation du pouvoir. Une telle attitude serait désastreuse pour deux raisons fondamentales. D’abord parce qu’elle ne prend nullement en compte la résistance inévitable de l’ancienne classe dominante. La lutte de classes ne cesse pas avec la victoire de l’insurrection. L’histoire de toutes les révolutions prouve que l’ancienne classe dominante ne recule devant rien, non seulement pour préserver son pouvoir, mais aussi pour le reconquérir lorsqu’elle en a été écartée. Dans la mesure où il est improbable que se déclenche une révolution internationale simultanée, les bourgeois dépossédés pourront compter sur le soutien de gouvernements et de forces réactionnaires à l’étranger. Une révolution victorieuse doit savoir qu’elle s’affrontera au refus de collaborer des bureaucrates, au sabotage économique et à la résistance armée, au terrorisme, à la guerre civile et à des interventions militaires étrangères. Un peuple révolutionnaire peut-il se défendre contre de telles actions contre-révolutionnaires sans l’aide de milices ou d’une armée ouvrières, sans tribunaux populaires et sans justice révolutionnaire, sans un système centralisé de prise de décisions et sans autorité centralisée, autrement dit sans créer une forme révolutionnaire de pouvoir d’Etat ? Il ne le peut pas. De nombreuses expériences historiques le prouvent, mais prenons un exemple hypothétique. Admettons qu’une révolution en France ait à faire face à des soulèvements organisés par le Front national à Marseille, combinés avec des incursions dans le nord-est du territoire par des bandes blanches soutenues par l’Allemagne. Pour se défendre, la révolution aurait à décider quelles forces envoyer contre l’offensive du nord-est et quelles autres opposer au Front national. Elle devrait aussi décider comment armer et approvisionner ses forces. Ces décisions seraient des décisions nationales prises par un gouvernement national. En ce domaine, un défaut de coordination ne serait que le prélude à la défaite. La deuxième justification d’un Etat révolutionnaire est qu'il est essentiel pour établir un nouvel ordre économique. Bien des choses seront accomplies par l’initiative populaire par en bas, par le biais des occupations d’usines, du contrôle ouvrier sur l’industrie, par la création de coopératives de distribution, etc., mais un Etat sera encore indispensable à ce premier stade. Prenons comme exemple la question de savoir à qui appartiendra les industries et les usines dont les capitalistes auront été dépossédés. Si ces usines étaient la propriété, non du nouvel Etat, mais des travailleurs de chaque entreprise, la coopération et la planification seraient entravées. Une concurrence entre les différentes entreprises émergerait et, par conséquent, les petites affaires capitalistes prolifèreraient dans l’économie. Le transfert de la propriété des industries à l’ensemble de la communauté ne pourra constituer une solution immédiatement applicable. Cela ne pourra se faire qu'à un stade ultérieur, lorsqu'une communauté véritablement unifiée aura émergé. Mais au cours d’une révolution, la “communauté” est divisée en classes et fractions opposées, en guerre les unes contre les autres. Il est par conséquent absolument nécessaire pour la communauté révolutionnaire, la classe ouvrière, de disposer d’institutions qui incarnent ses intérêts. Prenons aussi l’exemple des chômeurs, des travailleurs en arrêt-maladie et d’autres qui vivent actuellement d’allocations sociales diverses. Dans une société socialiste pleinement développée (ou anarchiste), le chômage aura définitivement disparu et les biens seront distribués selon les besoins. Mais immédiatement après la révolution, des millions de personnes dépendront encore de ces allocations et de l’Etat. Ils mourront de faim si on ne les paie pas. Les allocations versées ont pour source les prélèvements effectués principalement sur les salariés. Par conséquent, au cours des mois et des années qui suivront la révolution, une autorité disposant du pouvoir de collecter les impôts sera nécessaire. Un Etat sera donc indispensable. La faiblesse de l’anarchisme sur cette question est qu’il a bien trop souvent une conception romantique de la révolution : après le “grand soir”, toutes les difficultés seraient écartées par la seule force de la volonté pure. Au cours d’une révolution, des dizaines de millions de personnes agissent ensemble pour transformer la société. Au cours de ce processus, elles se changent elles-mêmes. Leur éveil politique et social, leur sentiment d’appartenir à une collectivité, sont transformés et considérablement développés. Sans cela, une nouvelle société ne peut être édifiée. Mais le processus de transformation n’est, et ne peut être, total et homogène pour la simple raison que toutes les fractions de la classe ouvrière ne seront pas engagées dans la lutte avec la même intensité. Des fractions de la classe ouvrière peuvent même passer à côté, voire s’opposer à une révolution. Ceci sera encore plus vrai pour les millions de personnes qui constituent les couches inférieures de la petite bourgeoisie. Par conséquent, pendant toute une période consécutive à la révolution, une fraction de la population sera sur certaines questions influencée par les vieilles idées, suivra l’ancienne classe dominante. Parfois, il faudra lui imposer, si nécessaire par la force, l’acceptation des décisions majoritaires. En principe, il en est de même lorsque des travailleurs en grève dressent un piquet de grève pour empêcher une minorité d’entre eux de saboter leur mouvement en allant au travail. En dernière analyse, un Etat ouvrier n’est que la forme la plus élevée du piquet de grève. Certains anarchistes affirment que dès qu’existe un Etat, se forme une élite privilégiée corrompue par le pouvoir, qui évolue rapidement vers une nouvelle tyrannie. Mais cet argument ignore le fait que la classe ouvrière a de nombreuses fois démontré sa capacité à créer des organes de pouvoir révolutionnaires totalement différents, par leur forme comme par leur contenu, de l’ancien Etat capitaliste. Des organes autant démocratiques qu’égalitaires. La Commune de Paris de 1871 a établi les principes que tous les fonctionnaires devaient être élus, révocables à tout moment et payés au salaire d’un ouvrier. Le soviet (ou conseil ouvrier), qui a surgi pour la première fois à St. Petersbourg au cours de la révolution de 1905, puis qui s’est étendu à l’ensemble de la Russie en 1917, franchit une nouvelle étape en faisant élire les délégués sur la base des lieux de travail, principalement des usines. Cette structure améliora considérablement le contrôle par en bas, en rendant les représentants responsables devant des collectifs où discussions et débats démocratiques pouvaient avoir lieu. Depuis, des conseils ouvriers ont surgi au cours de la Révolution allemande de 1918-1919, en Italie en 1920, en Hongrie en 1956 et, sous une forme embryonnaire, au Chili en 1973, en Iran en 1979 et en Pologne en 1980. Les conseils ouvriers ne s’élèvent pas conformément à un plan soigneusement étudié et préétabli. Ils sont la forme évidente d’organisation adoptée par la classe ouvrière lorsque sa lutte commence à remettre en cause le système dans son ensemble. Ils représentent le noyau du futur Etat ouvrier, qui remplacera le vieil appareil d’Etat capitaliste et entamera la transition vers une société sans classes, au sein de laquelle l’Etat s’éteindra. La question la plus fondamentale est la suivante. Certes, l’Etat n’est absolument pas une institution éternelle, mais il n’est pas non plus le fruit d’une simple erreur ou d’idées fausses qu’auraient véhiculées les êtres humains, nous maintenant dans l’ignorance et la misère, jusqu’à ce que les anarchistes viennent nous expliquer que l’humanité n’en avait nullement besoin. L’Etat surgit dans certaines circonstances économiques et sociales - d’abord et avant tout de la division de la société en classes antagonistes sur la base d’un faible niveau des forces productives - et ne peut être aboli avant que ces circonstances n'aient été radicalement changées. Pour effectuer ces transformations, une nouvelle forme révolutionnaire d’Etat est nécessaire. En refusant de l’admettre, l’anarchisme, malgré tous ses bons sentiments, se voue à la faillite. Lorsqu’il est prédominant dans un mouvement révolutionnaire, c’est la révolution qu’il conduit à la faillite.


La direction


Les anarchistes proclament souvent leur rejet de toute direction. C’est tout à fait compréhensible. Dans une société capitaliste, la classe dominante se considère toujours comme née pour diriger. “Diriger” est l’une des “qualités” premières qu’elle tente d’inculquer à sa progéniture dans les différentes écoles au sein desquelles se forment ses élites. Ainsi, la “direction” est associée à l’arrogance, à l’intimidation et aux privilèges. Les anarchistes ont raison de réagir contre cela.
Les directions politiques de “gauche” dans le mouvement syndical ne nous offrent pas une image plus attrayante. Tout au long de ce siècle, devenir dirigeant “socialiste” ou social-démocrate a été synonyme de modération et d’ascension sociale. Le parcours classique de ce type de militant est le suivant : acquérir un soutien de la base en utilisant une rhétorique et une politique apparemment radicales, puis devenir progressivement proéminent dans le mouvement en se débarrassant des principes les uns à la suite des autres, jusqu’à devenir un membre à part entière de l’élite politique, vêtu d’un costard-cravate, disposant d’une voiture avec chauffeur, jouissant d’un salaire élevé et entretenant de multiples liens avec les milieux d’affaires et de fonctionnaires, devenant en d’autres termes un prisonnier de l’élite qu’il prétendait changer. Le parcours des dirigeants syndicaux a été analogue. Dès qu’ils (elles) deviennent permanents, ils abandonnent les conditions difficiles de leur base pour le confort d’un bureau. Leur salaire et la durée de leur travail cessent de dépendre de ceux des travailleurs qu’ils représentent. Ils commencent à accumuler les privilèges. Leur fonction est celle de médiateurs entre les travailleurs et la direction de l’entreprise. Ils passent plus de temps avec cette dernière qu’en compagnie de leur base. La corruption, dans un sens politique sinon financier, est plus ou moins inévitable. Rapidement, ils en viennent à considérer que ce sont les conflits du travail et les grèves qui posent problème. Ils se soucient de moins en moins de la tactique nécessaire pour que les travailleurs l’emportent. Ils considèrent que la meilleure façon de dépasser ces conflits est d’obtenir des concessions mineures que leur base acceptera. Une direction de ce type est politiquement désastreuse. Lors de grandes luttes, quand les travailleurs s’engagent dans la bataille, prennent en main leurs affaires, l’instinct de tels dirigeants est de tenter de calmer les choses et de rétablir une situation “normale”. Si cela doit impliquer la trahison d’une cause qu’ils sont censés représenter, ils la trahiront. Les événements de 1968 nous en fournissent un exemple classique. Ce mouvement exceptionnellement spontané d’étudiants et de travailleurs menaça le régime gaulliste, par les affrontements de masse dans les rues de Paris, les occupations menées par les étudiants et la grève générale de 10 millions de travailleurs combinée avec d’innombrables occupations d’usines. Ses “dirigeants”, en majorité responsables du Parti communiste et de la CGT, firent tout pour contenir ce mouvement potentiellement révolutionnaire et n’avancer qu’une série de revendications plutôt modestes de salaires et de conditions de travail. Ils travaillèrent à faire retourner tout le monde au travail aussitôt que possible. On pourrait trop rapidement conclure de telles expériences, nombreuses dans l’histoire des luttes ouvrières et du mouvement révolutionnaire, que c’est l’existence même d’une direction qui pose problème et qu’on devrait s’en dispenser. Malheureusement, cette conclusion pose une difficulté insurmontable. L’existence de “directions” est un fait. Elle n’est pas le produit d’idées erronées, de la volonté d’individus particuliers ou de certaines structures organisationnelles. Elle découle inévitablement du fait que les gens n’ont pas tous la même expérience. Même dans les émeutes les plus spontanées, les manifestations, les grèves et les soulèvements, événements pour lesquels l’histoire en général ne relève pas l’existence d’une direction ou d’une organisation formelles, il existe une direction ou une structure informelles, qu’on peut découvrir si on étudie minutieusement ces mouvements : la personne qui donne le signal de l’offensive au moment crucial; ceux qui prennent la tête de la foule; l’individu qui le premier lance un pavé, etc. Ce phénomène affecte également l’anarchisme. Quelle que soit l’hostilité des anarchistes à l’idée d’une direction, le fait est que leurs mouvements ont toujours eu des dirigeants. L’histoire de l’anarchisme - comme celle du socialisme et à fortiori celle du conservatisme - est en partie l’histoire de ses figures dirigeantes : Proudhon, Kropotkine, Makhno, Goldmann, Voline, et même Daniel Cohn-Bendit. En refusant formellement de reconnaître l’existence de dirigeants, les mouvements anarchistes ne facilitent pas les choses; au contraire, ils aggravent le problème. Puisqu’ils ne sont pas formellement élus, les dirigeants anarchistes ne peuvent être révoqués ou soumis au contrôle démocratique. Les mouvements anarchistes sont donc particulièrement marqués par la pratique de directions autoproclamées, reconduites informellement par elles-mêmes, voire désignées par les médias (les mouvements étudiants spontanéistes des années 60 souffrirent considérablement de cette pratique de promotion de “stars” par les médias).

Si l’anarchisme est incapable de résoudre la question de sa propre direction, il est encore moins apte à résoudre celle de la classe ouvrière dans son ensemble. Historiquement, c’est la social-démocratie ou le stalinisme qui ont exercé cette direction - d’où une multitude de trahisons et de défaites, des capitulations de la IIe Internationale face au nationalisme en 1914, puis face à Hitler en 1933, jusqu’à la collusion honteuse du Parti socialiste avec le racisme aujourd’hui. Par son existence même, l’anarchisme constitue un défi, une alternative potentielle à l’hégémonie de ces forces. Le fait même de produire des livres, des brochures, des journaux ou des tracts, ou même de faire des discours, constitue pour les anarchistes une bataille pour influencer la gauche et la classe ouvrière. Mais, parce qu’ils rejettent l’idée même de direction et refusent donc de se battre politiquement et organisationnellement pour conquérir la direction de la classe ouvrière, ils contribuent non pas à la libération de celle-ci, mais à la perpétuation de la domination de dirigeants traîtres, sociaux-démocrates ou staliniens. On ne peut se débarrasser de la question en affirmant : “ Ce n’est pas la direction qui compte mais les masses ”. La conception bourgeoise de l’histoire, par son élitisme et son individualisme systématiques, exagère bien entendu le rôle de la direction, à tel point qu’elle réduit l’histoire à une succession de rois, d’empereurs, de généraux et de présidents. Moins que tout autre, un marxiste ne peut l’oublier. Mais l’action des dirigeants joue un rôle. Ceux-ci ne peuvent conjurer les révolutions ou, au contraire, déclencher des mouvements de masse par leur seule volonté. Mieux encore, ils ne peuvent faire les révolutions. Seules les masses en sont capables. Mais, lorsque existe un mouvement de masse et une situation révolutionnaire, le rôle joué par la direction de ce mouvement peut sensiblement affecter le résultat et, parfois, peut constituer le facteur qui conditionne une victoire ou une défaite. En Allemagne, pendant l’ascension de Hitler au pouvoir (1929-1933), le mouvement ouvrier de masse était politiquement partagé entre le Parti social-démocrate (SPD) et les Communistes (KPD). S’il avait uni ses forces, il aurait pu stopper les nazis. L’unité fut entravée d’un côté par la volonté des dirigeants sociaux-démocrates qui, comme à leur habitude, évitaient toute confrontation et, d’un autre, par les dirigeants communistes qui suivaient les ordres de Staline : concentrer leurs tirs sur les sociaux-démocrates et non sur les nazis. Les uns et les autres facilitèrent considérablement l’avènement de Hitler au pouvoir. Ainsi, puisque la question de la direction ne peut être simplement ignorée, la seule alternative pour ceux qui veulent radicalement changer la société, est de travailler à construire une direction authentiquement révolutionnaire qui :

- soit soumise au contrôle démocratique de ses partisans;

- résiste à l’effet corrupteur du système;

- soit capable de reconnaître la voie que la lutte doit emprunter.

La confusion théorique de l’anarchisme sur cette question, son fétichisme anti-direction, le rendent inapte à assumer cette tâche.


Le parti


La question de la direction révolutionnaire soulève immédiatement celle du parti révolutionnaire. L’opposition de l’anarchisme à l’idée d’un parti est encore plus forte que son hostilité à l’Etat et à toute direction. Encore une fois, c’est tout à fait compréhensible. C’est parce que des partis, qui se disent marxistes, léninistes et ouvriers, ont en fait constitué les principaux instruments d’oppression et d’exploitation de centaines de millions de travailleurs dans les pays dits communistes, qu’il y a eu des réactions uniformément anti-parti. Lorsqu’on sait la nature conservatrice, bureaucratique, carriériste des partis sociaux-démocrates et réformistes, que l’on connaît le sectarisme étouffant de certaines organisations de la gauche radicale, alors la suspicion à l’égard de toute idée de parti est probablement inévitable. Cependant, le fait est que la construction d’un parti révolutionnaire est cruciale tant pour conduire la lutte de classes au jour le jour, que pour le succès de la révolution future.

Pour deux raisons incontournables. Premièrement, la classe ouvrière doit s’affronter à un ennemi hautement centralisé et organisé. Pour le battre, elle doit organiser ses propres forces. Ceci est vrai sur chaque lieu de travail et dans chaque industrie. Là, les travailleurs font face au pouvoir centralisé du capital. L’organisation et l’unité dans l’action de la force de travail est la première condition de toute résistance efficace. Les travailleurs qui tentent de s’opposer individuellement à leur patron, sans aucune organisation collective pour les soutenir, sont tout simplement licenciés. Ceci est encore plus vrai à l’échelle de toute la société, la domination patronale y étant protégée par l’organisation la plus centralisée qui soit, l’Etat capitaliste. Cette nécessité d’une organisation est comprise par tout travailleur doté d’un minimum de conscience de classe et politique. Les anarchistes qui rejettent toute idée d’organisation se condamnent à s’isoler de la classe ouvrière.
La seconde justification fondamentale d’un parti révolutionnaire est que la conscience politique de la classe ouvrière se développe toujours de façon inégale. Les médias contrôlés par les capitalistes, le système éducatif, l’Eglise et d’innombrables autres institutions, assurent qu’en temps “ordinaire”, c’est-à-dire en dehors des périodes de luttes révolutionnaires de masse, l’idéologie capitaliste exerce une influence puissante sur la conscience de la majorité des travailleurs. Bien sûr, ceux-ci n’ont pas une tête vide. Leur expérience de l’exploitation, de l’oppression, de la pauvreté et du chômage leur font également contester ce que les dirigeants du système leur affirment.
En général, la conscience de classe des travailleurs est une combinaison contradictoire des conclusions qu’ils tirent de leur expérience et d’idées réactionnaires qu’on leur a inculquées. Par exemple, de nombreux travailleurs haïssent leur patron, comprennent qu’il existe une loi pour les riches et une autre pour les pauvres. Mais ils peuvent en même temps admettre des préjugés racistes, sexistes ou autres. D’autres travailleurs peuvent être antiracistes, antisexistes et admettre pourtant que l’industrie ne puissent fonctionner sans recherche du profit. En temps ordinaire, seule une minorité de travailleurs sont des opposants systématiques et cohérents du capitalisme et rejettent les idées capitalistes. Voilà pourquoi il est essentiel qu’existe une organisation politique qui se base sur cette minorité de travailleurs conscients politiquement, afin de conduire la lutte pour les idées révolutionnaires au sein du mouvement dans son ensemble, au sein des luttes de la classe ouvrière et des opprimés. C’est pour cette raison que la stratégie suivie par beaucoup d’anarchistes, qui acceptent la nécessité d’une organisation de la classe ouvrière - la stratégie de l’anarcho-syndicalisme - est encore inadéquate. L’anarcho-syndicalisme oppose à l’idée de parti politique marxiste celle d’un syndicalisme révolutionnaire. Ce courant constitue un pas en avant par rapport à l’anarchisme individualiste, parce qu’il s’oriente vers la classe ouvrière. Mais c’est une avancée insuffisante. Les syndicats sont des organisations de masse formées par les travailleurs afin de négocier comme de lutter sur les salaires et les conditions de travail dans le cadre des rapports de production capitalistes. Afin de remplir cette fonction efficacement, ils doivent élargir au maximum possible leurs effectifs. L’idéal est que le syndicat comprenne tous les travailleurs de l’entreprise, de la branche ou de l’industrie, exceptés les briseurs de grève patents ou, par exemple, les fascistes. Les syndicats organisent donc inévitablement, et à juste titre, un grand nombre de travailleurs aux idées confuses, voire réactionnaires sur certaines questions. Il doit donc exister un autre type d’organisation ouvrière, le parti politique, qui mène la bataille pour les idées, la stratégie et la direction révolutionnaires au sein des syndicats, comme parmi les autres couches de la société (chômeurs, étudiants, femmes au foyer, etc.) qui ne sont pas organisées dans des syndicats ou sur des lieux de travail. Ceux des anarchistes qui ne voient pas la nécessité d’une lutte coordonnée pour les idées révolutionnaires, et constituent par conséquent leurs propres organisations syndicales distinctes des grandes centrales, construisent en réalité des partis anarchistes qui ne veulent pas dire leur nom. En refusant de le reconnaître ouvertement, ils n’évitent pas pour autant les problèmes que connaissent les autres organisations. C’est plutôt un désavantage face à ces difficultés, car leur confusion sur la question, de même que celles concernant l’Etat et la direction, les empêchent de développer une stratégie cohérente ou de formuler une quelconque idée claire sur les structures et le rôle de leur propre organisation. La nécessité d’une organisation ouvrière de classe et le développement inégal de la conscience des travailleurs sont des faits. Ils ne peuvent être niés que par ceux qui croient révolutionnaire d’idéaliser la classe ouvrière. L’objection anarchiste la plus fréquente consiste à affirmer : “ l’expérience a montré que les partis qui se proclament révolutionnaires dégénèrent inévitablement, se bureaucratisent, nourrissent l’élitisme, l’autoritarisme et d’autres défauts. Quelle garantie existe-il, demande alors l’anarchiste, que le parti que tu proposes ne suive pas la même voie ? ”

Bien entendu, il ne peut y avoir de garantie absolue qu’il ne suive pas ce cours, pas plus qu’il ne peut y avoir de garantie absolue de la victoire de la révolution, du succès d’une manifestation ou d’une grève, et par conséquent aussi de l’anarchisme. La seule voie réaliste est d’abord d’établir les causes de la dégénérescence de tant d’organisations, de partis ouvriers et, ensuite, de déterminer ce qu’il faut faire pour la prévenir. En général, les anarchistes l’expliquent soit par la soif inhérente de pouvoir des dirigeants, soit par l’autoritarisme inhérent à certaines formes d’organisation telles que celle du centralisme démocratique. L'explication ne tient pas, car la dégénérescence bureaucratique a affecté non seulement des partis léninistes mais toutes les formes d’organisations ouvrières, partis réformistes de masse comme syndicats, même anarchistes.

A l’opposé, les marxistes expliquent cette tendance à la dégénérescence par les pressions exercées sur les organisations ouvrières par la société capitaliste même au sein de laquelle elles sont nées. Ces pressions s’exercent à deux niveaux. D’un côté l’exploitation, l’oppression et le travail aliéné que le capitalisme fait subir aux travailleurs freinent le développement de leur confiance en eux-mêmes et celui de la conscience nécessaire pour contrôler leurs dirigeants. De l’autre côté, le capitalisme, par sa nature même, exerce sans cesse une influence corruptrice sur les dirigeants qui, directement ou indirectement, tend à les séparer de leur base. Ces éléments sont cruciaux pour expliquer ce qui constitue sans doute l’exemple le plus dramatique de dégénérescence d’un mouvement révolutionnaire : la transformation du bolchevisme en stalinisme. D’un côté, les pressions du capitalisme mondial sur la Révolution russe, par l’intervention militaire et la guerre civile interne soutenue par l’étranger, démembrèrent en fait la classe ouvrière qui avait réalisé la révolution de 1917. Cette classe qui avait en cette année atteint un haut niveau de conscience et de confiance en elle-même, fut tellement décimée par la guerre, la famine, les épidémies et l’effondrement économique, qu’elle fut incapable de continuer à exercer son pouvoir démocratique sur l’ensemble de la société. La bureaucratisation de la direction en fut le résultat inéluctable.


D’un autre côté, la pression du capitalisme sur cette direction bureaucratisée (symbolisée par Staline) l’amena à abandonner son attachement à la révolution mondiale (qui, seule, aurait pu sauver la Russie ouvrière) pour mener une concurrence avec le capitalisme sur ses propres termes, autrement dit, par l’établissement d’une exploitation capitaliste d’Etat afin de réaliser une accumulation capitaliste1.Dans des circonstances très différentes, les mêmes pressions produisent une domination des syndicats par une couche de permanents syndicaux et des partis réformistes par leurs représentants parlementaires. Alors, comment un parti révolutionnaire peut-il se protéger de ces pressions qu’il subira toujours au sein de la société capitaliste ? Quatre mesures sont essentielles :

1) Le parti doit s’investir dans les luttes quotidiennes des travailleurs. La relation qui en résulte exerce un contrepoids aux pressions du capitalisme. A l’opposé, les partis réformistes s’appuient principalement sur la passivité des travailleurs, alors que les sectes ne tissent aucune relation quelle qu’elle soit avec la classe ouvrière.

2) Le parti doit adhérer à des principes révolutionnaires. Cela écarte de ses rangs les éléments carriéristes ou arriérés plus facilement manipulables.

3) Pour des raisons évidentes, les postes de direction au sein du parti ne doivent impliquer aucun privilège matériel.

4) La structure du parti doit combiner la démocratie (discussions et débats libres sur sa politique, élection et contrôle des dirigeants) avec le centralisme (unité d’action pour appliquer les décisions majoritaires). Le centralisme et la discipline sont en général perçus par les anarchistes comme un mécanisme de contrôle autoritaire par en haut. En fait, au sein d’un parti révolutionnaire, ils constituent également un instrument de la démocratie en ce qu’ils permettent l’application de la politique du parti par les dirigeants. C’est une situation à l’opposé de celle des organisations centralisées au sein desquelles les dirigeants sont “libres” d’ignorer la politique du parti, ou de l’élaborer eux-mêmes, sans son contrôle. En dernière analyse, c’est la relation vivante du parti avec la lutte de classes qui sera décisive, et celle-ci ne peut être garantie à l’avance par des statuts quels qu’ils soient. Un parti n’en est pas moins indispensable pour la victoire révolutionnaire. C’est le centralisme démocratique léniniste qui offre les moyens les plus appropriés de résister aux pressions qu’exerce l’environnement capitaliste sur les partis ouvriers. Par le rejet de tout parti, et du parti léniniste en particulier, l’anarchisme ne fait que contribuer à désarmer politiquement et organisationnellement la classe ouvrière. La voie qu’il propose est celle de la défaite de la révolution.

1 La question de la relation entre léninisme et stalinisme est évidemment très importante dans le débat entre marxisme et anarchisme. Mais nous n’avons pas ici la place d’en traiter en détail.
Pour des études plus poussées sur la question, voir Chris Harman :Pourquoi l’échec de la révolution russe? (Socialisme international, Paris, 1992) ; Marcel Liebmann : Le Léninisme sous Lénine (Le Seuil, Paris, 1973, 2 vol.).

3 - Les racines sociales de l'anarchisme
La vision capitaliste du monde, dominante dans les médias et le système éducatif, perçoit les différentes idéologies comme créations de penseurs exceptionnels, analysant le monde de leur point de vue particulier, au moyen de leurs propres valeurs, perspicacité, préjugés, etc. Ces différentes idéologies - le conservatisme, le libéralisme, le socialisme, l'anarchisme, etc. - seraient en concurrence sur le marché des idées afin de représenter au mieux l'intérêt général et national.

Les marxistes ne conçoivent pas ainsi les idéologies. Celles-ci sont, il est vrai, souvent élaborées ou exprimées pour la première fois par un individu (le marxisme par Marx pour prendre un exemple). Mais la pensée des individus est profondément façonnée par leur position sociale et leur expérience. Les idéologies sont en général développées et reformulées par un grand nombre de gens. Lorsqu'une d’entre elles acquiert une base sociale significative, c'est parce qu'elle correspond aux circonstances, aux intérêts et aux aspirations d'un groupe social définit et les exprime avec cohérence.

Ce processus n'est ni simple ni mécanique. Aucune idéologie n’exprime nettement et exactement les intérêts authentiques d'un groupe social particulier, à laquelle tous ses membres adhéreraient. Au contraire, les rapports entre celles-ci et leurs racines sociales sont souvent complexes et déformées. Les groupes sociaux se chevauchent, interagissent et s'influencent mutuellement. Ces visions du monde ont néanmoins des racines sociales. Les groupes fondamentaux de la société étant les classes sociales (déterminées par leur position au sein du processus de production), les idéologies ont des racines de classe et une base de classe.

Le conservatisme (sous ses différentes versions nationales, le torysme en Grande Bretagne, la démocratie chrétienne dans la majorité des pays européens …) représente bien l'idéologie dominante de la classe capitaliste aujourd'hui. Le libéralisme du XIXe siècle était celle de la bourgeoisie industrielle ascendante. Depuis, il a perdu de sa prééminence pour devenir le reflet d'une mixture des intérêts d'une fraction de la classe capitaliste et d'une fraction de la classe moyenne, ou petite bourgeoisie. Le socialisme était une théorie de la classe ouvrière, mais il a été reformulé par la social-démocratie et le réformisme pour servir les intérêts de la bureaucratie des partis ouvriers et du mouvement syndical. Le stalinisme en URSS fut une perversion du socialisme, élaborée pour servir les intérêts de la bureaucratie capitaliste d'Etat dominante.

Le marxisme classique (ou socialisme révolutionnaire) tente d'exprimer les intérêts de la classe ouvrière. C'est une analyse générale de l'histoire, de la société et de la politique du point de vue de la classe ouvrière, et fondée sur son expérience.

Par conséquent, les idéologies rivales ne se livrent pas à une recherche désintéressée de l'intérêt général, mais font partie intégrante des projets des différentes classes et couches sociales de faire prédominer leur volonté au sein de la société. L'objection fondamentale à opposer au conservatisme, pour prendre un exemple, n'est pas son caractère démodé ou vieillot, ou le caractère erroné de certaine de ses thèses, mais qu'il représente (malheureusement avec succès) les intérêts de la classe exploiteuse.

Quelles sont donc les racines sociales de l'anarchisme ? De quelles couches sociales exprime-t-il l'expérience ? Ces questions sont décisives pour l'appréciation globale de l'anarchisme comme idéologie.

Comme nous l'avons déjà souligné, l'anarchisme prend de multiples formes. On ne peut donc donner une réponse simple à ces questions. Procédons donc par élimination.

Premièrement, l'anarchisme n'est manifestement pas l'idéologie de la classe capitaliste : celle-ci est pleinement fidèle à la protection de son Etat et de son ordre social. Il n'est pas plus celle de cette fraction de la petite bourgeoisie, les patrons d'entreprises et de commerces, etc., qui, placée sous l'autorité de la classe capitaliste proprement dite, accepte son idéologie conservatrice, mais qui, par temps de crise économique et sociale extrême, lorsque son statut et ses économies sont menacés, peut basculer vers le fascisme. L'anarchisme n'est pas plus l'idéologie de cette autre couche distincte de la petite bourgeoisie du capitalisme moderne, les gestionnaires et les administrateurs des institutions locales et des affaires sociales qui, lorsqu'ils se rebellent contre le conservatisme, épousent le libéralisme ou le réformisme social-démocrate, avec ses faveurs pour le " capitalisme à visage humain ".

Mais l'anarchisme peut-il prétendre représenter une théorie de la classe ouvrière ? A l'exception de l'anarcho-syndicalisme, auquel nous reviendrons, la réponse est clairement négative.

D'abord parce que de nombreux penseurs anarchistes rejettent la classe ouvrière ou nient qu'elle puisse devenir l'agent de la transformation sociale. Deuxièmement, parce que les thèmes dominants de la pensée anarchiste - individualisme, hostilité à l'organisation (ou, dans le meilleur des cas, ambiguïté sur cette question), rejet de l'Etat en général - sont étrangers à l'expérience des travailleurs et aux besoins de la lutte ouvrière.

La classe ouvrière est une classe collectiviste de par la position sociale et économique qu'elle occupe au sein de la société capitaliste. L'industrie capitaliste rassemble les travailleurs en collectifs dans les usines et les autres lieux de travail. Producteur, le travailleur est un élément d'une complexe division du travail qui exige coopération et discipline. Sous le capitalisme cette discipline est imposée d'en haut par le patron, le gérant et le contremaître ; après la révolution, l'auto organisation de la collectivité prédominera, mais il demeurera un élément de discipline, parce qu'elle est indispensable à toute production industrielle. Les travailleurs, victimes de l'exploitation, ne peuvent lui résister ni améliorer leurs conditions que par le moyen de l'organisation et de la lutte collectives. Pour la protection de ses membres les plus vulnérables - ceux qui sont atteints de maladies, retraités et vieux, chômeurs et enfants - la classe ouvrière ne peut faire autrement que de se battre pour des solutions collectivistes : allocations, système de santé national, etc. Finalement, la classe ouvrière ne peut prendre possession des moyens de production qu'en tant que collectif, par le moyen de son propre Etat.

L'esprit de l'anarchisme est fondamentalement étranger à ces impératifs pour la classe ouvrière. C'est pourquoi l'anarchisme n'a jamais réussi à gagner le soutien de fractions significatives de la classe ouvrière dans aucun pays capitaliste industrialisé. Par conséquent, il ne représente ni l'idéologie de la classe ouvrière, ni celle d'aucune autre des classes majeures du capitalisme moderne. Pour mettre à nu ses racines sociales, nous devons considérer des strates plus marginales de la société capitaliste.

Le petit commerçant et l'artisan du XIXe siècle, particulièrement nombreux en France, représentèrent une des sources originelles de l’anarchisme. Les artisans, comme les travailleurs de métier qualifiés, étaient pauvres et opprimés, mais ils œuvraient seuls et possédaient leurs modestes moyens de production. En ce sens, ils se rattachaient à la petite bourgeoisie. Ils détestaient l'Etat et les capitalistes qui les opprimaient et les exploitaient, ainsi que le système capitaliste qui les piétinait. Mais ils ne disposaient pas de la puissance collective de la classe ouvrière. Pour cette couche sociale, l'anarchisme exprimait le rêve d'une communauté égalitaire de petits producteurs indépendants.

Une autre source des débuts de l'anarchisme fut la paysannerie. Les paysans ont en général représenté la classe la plus pauvre et la plus opprimée de la société capitaliste. Mais, tout comme les artisans, ils produisent individuellement et possèdent, ou aspirent à posséder, leur propre parcelle de terre. Ils font pleinement partie de la petite bourgeoisie. Révoltée, cette classe haït l'Etat, collecteur d'impôts et défenseur des grands propriétaires fonciers, qu'elle assimile aussi à une force d'occupation dont l'expulsion permettrait de retrouver une vie "normale". La dépendance de l'économie rurale à l'égard de l'industrie et de la ville, par exemple ses besoins en outils et machines agricoles, n'est pas immédiatement ou nécessairement apparente pour le paysan dont l'attitude à l'égard de l'Etat peut se résumer ainsi : " Dehors ! Laisse-moi travailler en paix ma terre ! " Ce rêve d'une république de petits producteurs est très similaire à celui de l'artisan et peut trouver son expression dans l'anarchisme.

Malheureusement pour cette doctrine, l'artisan et le paysan représentent des strates sociales déclinantes au sein de la société capitaliste. L'avancée inexorable de l'industrie moderne a miné la position de l'artisan qui, incapable de concurrencer la production de masse, a dû aller grossir les rangs du travail salarié. Le même développement économique a arraché des millions de paysans à la terre, attirés par les emplois et les meilleures conditions de vie des grandes villes. Il en a résulté une urbanisation et une prolétarisation massives.

Ce fut ce phénomène qui donna naissance à l'anarcho-syndicalisme. Cette tendance est la forme que prend l'anarchisme le plus adapté à la position de classe du prolétariat et représente une mutation, dans un sens socialiste, des principes " purement " anarchistes. C'est une idéologie de compromis, qui abandonne la suspicion de l'anarchisme à l'égard de l'organisation collective, la discipline et la nécessité d'une direction : suffisamment pour accepter le syndicalisme, pas assez pour admettre la nécessité d'un parti révolutionnaire et de la lutte pour le pouvoir politique. Ce compromis correspond à la situation transitionnelle de la paysannerie nouvellement prolétarisée, qui n'a pas encore rompu avec ses traditions préindustrielles et tous les liens qui la lie à elles.

Pour le moment nous n'avons parlé que de l'anarchisme et de l'anarcho-syndicalisme du XIXe siècle et du début du XXe siècle, ceux représentés par Proudhon et Bakounine, Kropotkine et Malatesta, Makhno et Voline, Goldman et Berkman. Ces mouvements ont fleuri à divers moments et sous différentes formes en France, en Italie, en Russie, aux Etats-Unis, au Mexique et en Espagne au cours des premières phases de l'industrialisation et de l'urbanisation de ces pays. Ils ont culminé lors de la tragédie de la Guerre civile espagnole. Nous n'avons pas encore étudié la base sociale de l'anarchisme dans le capitalisme avancé contemporain où les artisans, les paysans et les travailleurs récemment prolétarisés ne représentent plus une force sociale significative.

L'historien anarchiste George Woodcock note dans la première édition de son étude classique sur l'anarchisme (L'anarchisme. Une histoire des idées et des mouvements libertaires, écrit en 1960-1961), qu’il avait considéré ce mouvement comme un phénomène du passé, qui avait connu sa fin avec la chute de Barcelone aux mains de Franco en 1939. Mais, ajoute Woodcock, à peine avait-il annoncé sa mort, qu'il assista à sa renaissance.

Les années soixante redonnent vie à l'anarchisme. Celui-ci profite de la radicalisation générale qui marque cette décennie, et en premier lieu des révoltes étudiantes aux Etats-Unis, en RFA, en Italie, en Grande Bretagne et, particulièrement, en France. Ces années-là, les étudiants rebelles sont attirés par une large palette d'idées - maoïstes, guévaristes, trotskystes, pacifistes, libertaires, etc. Il n’est pas fortuit que le mouvement étudiant dans son ensemble ait eu une sensibilité anarchiste.

Les étudiants des années soixante étaient très différents de leurs prédécesseurs d'avant-guerre. Nés d’une expansion de l'enseignement universitaire qui devait répondre aux besoins du boom économique d'après guerre, leurs effectifs s'étaient multipliés. Bien qu'encore majoritairement issus de la petite bourgeoisie, ils provenaient désormais de bien d'autres couches de la société. Le changement était notable par rapport à la situation antérieure. Le diplôme ne constituait déjà plus un passeport pour un poste stable dans les couches dirigeantes ou moyennes de la société. Les moyens attribués à l'enseignement n'avaient pas suivi l'augmentation des effectifs. Les salles de cours étaient surpeuplées. La colère des étudiants en résulta : ils avaient l'impression d'avoir été placés sur une chaîne de production pour les besoins de l'industrie capitaliste. En même temps, ils demeuraient socialement et culturellement séparés de la classe ouvrière.

Inspirés par la lutte des Noirs au Etats-Unis et par les révolutions anti-impérialistes dans le Tiers Monde (qu'ils idéalisaient), outragés par l’obscène guerre que les USA menaient au Viêt-nam, les étudiants se révoltèrent contre la structure autoritaire au sein des universités, la société de consommation, les valeurs conformistes des années cinquante, la modération et l'intégration de la gauche traditionnelle à cette société. Une mixture étrange de socialisme libertaire et d'anarchisme exprima tant l'extrémisme radical de la révolte étudiante que son instabilité due à son isolement par rapport à la classe ouvrière.

Depuis les années soixante, le capitalisme a créé une nouvelle couche sociale, qui a fournit une nouvelle base à l'anarchisme. L'approfondissement de la crise économique du système, qui s'est exprimé par trois récessions mondiales (1974, 1980, 1990), a fait resurgir un chômage de masse. Les niveaux de chômage n'ont en général pas encore atteint ceux des années trente, mais ils représentent plusieurs fois ceux des années cinquante et soixante. Il y a eu en particulier une croissance très rapide et brutale du chômage de la jeunesse. Parmi les jeunes sans emploi, est née une couche sociale qui n'a aucune ou très peu d'expérience d'un travail stable, de plus en plus détachée de la majorité de la classe ouvrière. Ces jeunes sont immergés dans une sous culture au sein de laquelle drogues, petits vols à l'étalage et mendicité jouent tous leur rôle, sont persécutés par les propriétaires immobiliers, la police et les autorités, entourés par l'imagerie illusoire de l'abondance et par la réalité de la décadence urbaine. Leurs conditions de vie en font des ennemis de toute autorité et de toute discipline en même temps qu'une source naturelle pour un anarchisme vaguement spontanéiste et coléreux.

Jusque-là nous avons identifié quatre groupes sociaux qui constituent les racines sociales de l'anarchisme : les artisans, les paysans, les étudiants et les jeunes sans emploi. Ces groupes ont en commun leur position marginale par rapport au cœur productif du capitalisme. Cette marginalité produit la pauvreté, l'oppression, l'aliénation et une propension à la révolte souvent sous des formes extrêmes et violentes. Mais elle leur ôte également le pouvoir potentiel, économique autant que politique, de briser l'Etat bourgeois, de renverser les rapports de production capitalistes comme celui de créer un nouvel ordre économique et social. Les points forts et faibles de l'anarchisme en tant qu'idéologie reflètent précisément les forces et les faiblesses de sa base sociale.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mar 7 Déc 2010 22:28

Nico37 a écrit:
ANARCHISME : UNE CRITIQUE MARXISTE John Molyneux

1 - L'attrait de l'anarchisme

L’anarchisme a toujours exercé un fort attrait sur ceux qui se rebellent contre cette société pourrie....

...
...
...


et voilà , j'en passe à:
Nico37 a écrit:
....Jusque-là nous avons identifié quatre groupes sociaux qui constituent les racines sociales de l'anarchisme : les artisans, les paysans, les étudiants et les jeunes sans emploi. Ces groupes ont en commun leur position marginale par rapport au cœur productif du capitalisme. Cette marginalité produit la pauvreté, l'oppression, l'aliénation et une propension à la révolte souvent sous des formes extrêmes et violentes. Mais elle leur ôte également le pouvoir potentiel, économique autant que politique, de briser l'Etat bourgeois, de renverser les rapports de production capitalistes comme celui de créer un nouvel ordre économique et social. Les points forts et faibles de l'anarchisme en tant qu'idéologie reflètent précisément les forces et les faiblesses de sa base sociale.


:clap: :clap: :clap:
Mise à part que ces groupes 'identifiées jusque-là' ressemblent fortement à la 'base' marxiste-communiste,
et que cette 'analyse' n'est visiblement fait dans l'unique but de garder ses moutons en rang et sous l'ordre des bourgeoises communistes.
Car c'est eux qui tiennent la recette et le 'know-how' bien caché pour guider le peuple dépassé par ces choses bien trop complique pour les simples ouvriers.
Le clergé communiste nous demande de rester humble et simple, si nous, les moutons voulons trouver la grâce dans les yeux du dieu Marx, pour , peut être un jour, avoir le droit de vivre dans le communisme réelle sur terre. Oh paradis viens....

Qu'il aille brûler en enfer. :fuck:
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede Nico37 le Mar 7 Déc 2010 22:35

Bon entrée en matière critique mais il y a une erreur fondamentale : le marxisme s'appuie sur le rôle central de la classe ouvrière et pas des seuls paysans & artisans qui se situent de surcroît en marge du salariat. Et l'expérience "maoïste" s'appuyant sur les paysans correspond à la situation chinoise de grosses communes agraires et non d'habitat dispersé. Par ailleurs, vous en connaissez beaucoup d'artisans et paysans anars (même individualistes) :?: On est plus au 19ème ; ce que je trouve frappant c'est l'essai d'une critique moderne de l'anarchisme qui reste partiellement prisonnière du passé...
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mar 7 Déc 2010 23:29

Oui, comme pousser une critique d'un texte pareille jusqu'aux virgules. Ce que donnerait raison de s'appuyer au passé; mais tu fais bien de le dire.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede conan le Mer 8 Déc 2010 00:56

Ce texte est un beau résumé des bêtises, des déformations et des manipulations si typiques du léninisme. Avec une méthode argumentaire usée jusqu'à la corde, consistant à appâter le lecteur en allant dans son sens, puis à affirmer un constat inverse, qu'on démontre en déformant le langage, en glissant de fausses évidences. Tout ce texte en est gavé.
Par contre, ce qui est intéressant, c'est qu'au moins il y a une certaine franchise, chez ces révolutionnaires, pour affirmer que la proposition d'une "démocratie" directe au sens d'un pouvoir "par le bas" sur le "haut", appliquant des décisions globales, y compris sur des mandatés révocables, par votes majoritaires notamment, n'est ni plus ni moins qu'un Etat en germe ; l'adjectif "révolutionnaire" n'y changeant rien.
A méditer, lorsque certaines personnes "communistes-libertaires", qui sont influencés par des courants ayant tenté la synthèse entre anarchisme et marxisme, font passer ces discours traditionnellement marxistes, pour de l'anarchisme-communisme !
Toute l'argumentation est fallacieuse, bidon, contestable, et installe de la confusion pour avancer ses opinions : à lire ce texte, toute proposition devient une "direction", toute organisation est centralisée, bref l'autorité est inévitable !
Sans parler de l'analyse des couches sociales, suintante de mépris, qualifiant les gens comme des pions sur un échiquier... désolant ! Ce serait rigolo (quoique à mon sens nauséabond, n'étant pas marxiste), de savoir de quelles couches sociales les auteurs de ce texte proviennent, mais je ne doute pas qu'ils parviendront à se créer une catégorie et des mots qui leur conviendraient.
Le syndicalisme enfin, révolutionnaire s'entend, est ici toléré, ce qui n'a rien d'étonnant puisque le SR, occultant la question effectivement centrale d'un refus radical du pouvoir au sein de l'organisation syndicale, au nom de "l'indépendance ouvrière", a toujours, en effet, connu des dérives autoritaires en se faisant pourrir par des marxistes. Le texte part à l'envers... en tolérant le SR précisément pour son acceptation d'une organisation centralisée et dirigée, mais voit son insuffisance dans son anarcho-syndicalisme qui le pourrit.

Décidément, anarchisme et marxisme-léninisme sont inconciliables !

Ce qui me désole, c'est de voir encore des tentatives de "ponts" idéologiques de l'anarchisme avec le marxisme en matière organisationnelle, et les confusions introduites dans l'anarchisme-communisme.
Y'a du boulot...

Ce fameux "marxisme libertaire", qu'on ose parfois nous imposer comme un "anarchisme communisme historique", et qui ne fait que reprendre, sous couvert d'anarchisme (le plus souvent avec sincérité en plus !), le vieux discours organisationnel léniniste, en évitant seulement soigneusement de prononcer le mot Etat (mais pas le mot "pouvoir", qualifié de "tabou" à faire sauter !)

A mon sens, les confusions marxistes diffuses dans un certain anarchisme-communisme aujourd'hui, sont préjudiciables.

L'anarchisme communisme d'hier et d'aujourd'hui, tout en réfléchissant de façon conséquente à l'organisation collective et à la révolution sociale, portent clairement le refus de toute légitimité donnée à l'Etat, à l'autorité, aux majorités à gouverner qui que ce soit !
Dernière édition par conan le Mer 8 Déc 2010 01:16, édité 2 fois.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 01:12

conan a écrit:Ce qui me désole, c'est de voir encore des tentatives de "ponts" idéologiques de l'anarchisme avec le marxisme en matière organisationnelle, et les confusions introduites dans l'anarchisme-communisme.
Y'a du boulot...


Ya pas matière à se sentir désolé, c'est une tentative tout a fait naturel de la révolution communiste bureaucratique de prendre influence direct sur les gens révoltées et délaissés affin de les utiliser pour servir leur 'cause'.

Je serais désolé s'il à un seul révolté qui se laisse tenter par ce genre de texte.....
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede pit le Mer 8 Déc 2010 01:26

conan, t'en mets encore partout des communistes-libertaires, des anarchistres-communistes et de l'anarchisme-communiste qu'encore une fois tu essaies faire passer pour du marxisme, et c'est visiblement ce qui t'amènes dans ce topic d'avantage que la critique du texte, alors sorts des éléments, et notamment sur ce fameux "marxisme libertaire", cites des sources, amènes des preuves et des éléments, parce que moi j'en vois pas vraiment.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 01:28

pierot a écrit:conan, t'en mets encore partout des communistes-libertaires, des anarchistres-communistes et de l'anarchisme-communiste qu'encore une fois tu essaies faire passer pour du marxisme, alors sorts des éléments, et notamment sur ce fameux "marxisme libertaire", cites des sources, amènes des preuves et des éléments, parce que moi j'en vois pas vraiment.

tiens l'auteur défends son texte :mrgreen:
T'en à pas marre de passer pour un léniniste/trotskiste , pierrot?
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede pit le Mer 8 Déc 2010 01:32

çà sert à quoi çà encore, tu t'emmerdes, t'as rien à foutre ? Il est complètement déconnant ce texte, abruti, et vas te répendre en imbécilités ailleurs.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 01:44

pierot a écrit:çà sert à quoi çà encore, tu t'emmerdes, t'as rien à foutre ?

Justement c'était ça ma question à toi, j'ai formulé simplement un peu plus inoffensif et ton homophobie n'est pas de bienvenue ici.

pierot a écrit:.... Il est complètement déconnant ce texte, abruti.....

Enfin on est d'accord sur ce point au moins.

pierot a écrit:....et vas te répendre en imbécilités ailleurs.


Hein? Sérieux? Tu veux me virer de la place? T'est fort là..... :console:
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede Miaoû le Mer 8 Déc 2010 13:16

panic a écrit:
pierot a écrit:çà sert à quoi çà encore, tu t'emmerdes, t'as rien à foutre ?

Justement c'était ça ma question à toi, j'ai formulé simplement un peu plus inoffensif et ton homophobie n'est pas de bienvenue ici.


Je serai curieux de savoir où tu as vu de l'homophobie là-dedans...

Sinon, j'ai pas encore lu tout le texte mais, comme l'a dit pierrot, je vois pas très bien où tu as vu, conan, des éléments qui te permette de voir qu'il s'agit de "marxisme libertaire". Mais bon, il est vrai qu'il est à la mode de se faire du coco-lib sur ce forum. Mais je ne pensai néanmoins pas que tu tomberai dans ce genre d'égouts. Que ce soit Alayn, banzaï ou makhno, je veux bien, mais que toi aussi conan tu tombes dans ce délire (délire qui, au passage, renie certain.e.s auteurs anars et des éléments de l'histoire).

Sur la première partie du texte, sur l'état, pas grand-chose à dire, à part que c'est de la propagande marxiste grossière, sous couvert de "critique" de l'anarchisme.
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Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 13:22

..."t'as rien à foutre" n'est pas homophobe? :shock:
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Messagede Miaoû le Mer 8 Déc 2010 13:30

panic a écrit:..."t'as rien à foutre" n'est pas homophobe? :shock:


Non. A la limite, tu peux dire sexiste (foutre=sperme). Mais plus quand on dit "va te faire foutre".

Enfin perso je me sens pas offensé du tout quand on me dit "t'as rien à foutre".
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Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 13:39

bon qu'il est sexiste alors, ce n'est pas de bienvenue ici non plus.
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Messagede Miaoû le Mer 8 Déc 2010 13:42

panic a écrit:bon qu'il est sexiste alors, ce n'est pas de bienvenue ici non plus.


Ah ben si : regarde Alayn et banzaï. Par ailleurs, rien n'interdit le sexisme sur ce forum, à part les autoritaires de ton acabit.

Et sinon "t'as rien à foutre" n'a rien de sexiste. Tu as décidément de gros problèmes de lectures : veux-tu mes lunettes ?
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede joe dalton le Mer 8 Déc 2010 13:44

panic a écrit:bon qu'il est sexiste alors, ce n'est pas de bienvenue ici non plus.

bravo pour ton beau combat politique qui consiste a remplacer l'anarchisme par le crétinisme !
tu ne ménage pas tes efforts !
croyez toujours vroum, ce n'est pas un trotskiste !.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 14:13

que veux tu joe, on est sur un fil crétin.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede pit le Mer 8 Déc 2010 14:36

on nage dans la désolation politique là, le désert de la pensée révolutionnaire. Je pense qu'à lire les "anars" à la suite de ce texte (que je n'ai fait que lire rapidement), laisse penser qu'il n'y a même pas besoin de texte pour critiquer un certain "anarchisme", l'image offerte se suffit en elle même, ce n'est même pas la peine d'en rajouter, il ne reste que les yeux pour pleurer.
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Messagede panic le Mer 8 Déc 2010 15:20

pierot a écrit:on nage dans la désolation politique là, le désert de la pensée révolutionnaire. Je pense qu'à lire les "anars" à la suite de ce texte (que je n'ai fait que lire rapidement), laisse penser qu'il n'y a même pas besoin de texte pour critiquer un certain "anarchisme", l'image offerte se suffit en elle même, ce n'est même pas la peine d'en rajouter, il ne reste que les yeux pour pleurer.

Ce qui me désole est que tu voulais des preuves de conan concernant son commentaire sur ce texte, or tu nous dis maintenant de le même pas avoir lu.
T'est vraiment un sacré salaud, et anarchiste de mes couilles.
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Re: Anarchisme : une critique marxiste

Messagede conan le Mer 8 Déc 2010 15:34

Je crois qu'on a mal compris mon message, puisqu'on va jusqu'à qualifier mes propos de ceux d'égouts, ce qui montre à quel point on en est arrivé en termes de références politiques claires.

Je rappelle qu'il ne suffit pas de se réclamer de la "démocratie", même directe, pour être anarchiste... puisque le marxisme s'en réclame aussi, et pose tous les attributs de la démocratie directe (contrôle par la base, révocabilité). Ce texte le dit clairement (voir plus bas, puisqu'on me demande de citer).

L'anarchisme se distingue d'un simple "tout le pouvoir aux soviets", slogan léniniste, par l'adjonction d'un principe anti-autoritaire clair et comme son nom même l'indique, d'abolition du pouvoir dans les rapports organisationnels, en ayant une vision fédéraliste et non globale, de l'organisation politique.

Ce texte, léniniste, est une attaque très claire de l'anarchisme comme fédéralisme, et une défense de la décision globale.

Je n'ai pas dit que ce texte était marxiste-libertaire, mais léniniste.

J'ai en revanche dit qu'un certain courant marxiste libertaire défend actuellement une conception de l'organisation politique anarchiste qui n'est pas celle de la conception anarchiste communiste traditionnelle, mais bien celle du léninisme, en reprenant véritablement le contenu idéologique de l'organisation politique, ceux des arguments léninistes d'une négation du fédéralisme comme association libre, et justification d'un pouvoir global, à appliquer par la démocratie directe, que voici par ailleurs cités dans le texte :

Défense du "pouvoir par le bas" et de l'impérativité des mandats :

Cette structure améliora considérablement le contrôle par en bas, en rendant les représentants responsables devant des collectifs où discussions et débats démocratiques pouvaient avoir lieu.


Défense de la révocabilité des mandats :

Puisqu’ils ne sont pas formellement élus, les dirigeants anarchistes ne peuvent être révoqués ou soumis au contrôle démocratique.


Justification d'un certain pouvoir, mais par "en bas", avec contrôle des mandatés par les assemblées :

Ainsi, puisque la question de la direction ne peut être simplement ignorée, la seule alternative pour ceux qui veulent radicalement changer la société, est de travailler à construire une direction authentiquement révolutionnaire qui :

- soit soumise au contrôle démocratique de ses partisans;


Défense d'une démocratie directe et de décisions globales, par voie majoritaire :

La structure du parti doit combiner la démocratie (discussions et débats libres sur sa politique, élection et contrôle des dirigeants) avec le centralisme (unité d’action pour appliquer les décisions majoritaires).


La suite du texte est une défense de la décision globale et unitaire, appelée "centralisme" en effet, qui engendre une direction et une autorité, contre le fédéralisme comme libre association et l'autonomie, valeurs de l'anarchisme.

Or quand des anars comme moi défendent sur ce forum le fédéralisme, valeur anarchiste incontournable de libre-association chez tous les anarchistes communistes "traditionnels", bref le rejet de décisions globales (c'est précisément ce qui distingue politiquement anarchistes-communistes et marxistes-léninistes en termes d'organisation politique)... ils se font taxer "d'individualistes" et de "vaporeux", engendrant la "confusion"... alors même que l'anarchisme communisme a toujours été clair pour le fédéralisme comme association libre et décision non imposées ! Il suffit de relire Bakounine ou Malatesta (au hasard) comme auteurs condamnant sans détour les décisions globales et défendant la libre-association, ou les textes des organisations politiques anarchistes historiques, pour s'en convaincre. Si vous voulez des extraits, pas de souci. Quant à la plateforme d'Archinov, tentative de développer de l'unité d'action, elle n'a jamais franchi le rubicon de la possibilité de coexistence de tactiques différentes, et d'indépendance par rapport aux décisions prises.

Vouloir imposer aux gens des décisions par le prétexte fumeux de la démocratie, même directe, c'est léniniste, point barre, et c'est ce que je voulais rappeler.

C'est un point important, sur lequel je reviens dans de nombreux topics, mais qui ne semble pas clair et c'est bien normal, puisqu'un véritable travail de sape marxiste (pardon, de "synthèse" entre marxisme et anarchisme) a été entrepris depuis des décennies par des gens se revendiquant d'ailleurs du marxisme libertaire, comme Guérin. Jusqu'à voir désormais défendre des conceptions indubitablement léninistes de l'organisation politique, du point de vue théorique, par certaines tendances (heureusement pas toutes) du mouvement anarchiste-communiste actuel !

Alors non, mes remarques ne sont pas de l'égout, mais argumentées, et citations à l'appui. Et citations d'anarchistes-communistes si vous le souhaitez aussi.

J'attends d'ailleurs, si le débat à ce sujet est souhaité par des personnes qui se sentiraient visées par mes remarques, les différences qu'ils voient entre leur conception organisationnelle, sur le point de la défense d'une décision globale à appliquer globalement, par le droit donné aux majorités d'imposer leurs décision aux minorités, et le léninisme, qui comme je l'ai déjà dit, défend les mêmes choses.

Sauf que le léninisme appelle cela lui, et à juste titre, Etat révolutionnaire, et autorité, alors que le courant marxiste-libertaire évite soigneusement ces termes, ce qui ne retire rien au contenu.

J'aime quand les choses sont claires.
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