de Lehning le Dim 3 Jan 2016 18:53
Au delà de la FA proprement dite, les problèmes organisationnels de la mouvance anarchiste contemporaine furent traversés par le binôme plateforme/synthèse. Ce débat, inscrit dans la bolchevisation de la Russie, fut la marque d'une crise d'identité de l'anarchisme social face à lui-même et au "marxisme-léninisme". Dans ces discussions théoriques, confuses et agitées par l'intransigeance des protagonistes, les plate-formistes, pour qui la véritable tendance anarchiste est le seul communisme-libertaire, s'opposèrent aux partisans de la synthèse. Il y a, cependant, deux types de synthèse.
Celle écrite en réponse dès 1927, par Vsevolod Mikhaïlovitch Eichenbaum dit Voline, est philosophique ; ses "trois idées maîtresses" afin d'"unir le mouvement", sont l'admission des principes "syndicaliste", "communiste" et "individualiste" dans le but "de la révolution sociale". Elle servira de base à Sébastien Faure pour, en 1928, préciser comme projet à sa tendance de "combiner les trois courants: anarcho-syndicalisme, communisme libertaire et individualisme anarchiste" sur la base de thèses générales mûrement réfléchies et sciemment adoptées. Cette polémique eut surtout des répercussions sur l'organisation de l'UA. En 1926, face à la menace accrue de scission que faisait planer l'affrontement entre plate-formistes et synthésistes au congrès d'Orléans, un manifeste affirma que "le communisme est la seule forme de société" et l'UA deviendra l'UAC, l'Union anarchiste communiste. Loin de resserrer les rangs, ce manifeste d'Orléans allait rendre plus sensible aux partisans d'une organisation structurée l'incompatibilité de ces positions. Ainsi, le congrès de Paris, en 1927, vit triompher les plate-formistes. Le courant majoritaire deviendra l'UACR (communiste révolutionnaire) qui durera jusqu'en 1930. Le courant minoritaire scissionniste fonda avec Sébastien Faure l'AFA (Association des fédéralistes anarchistes), qui durera jusqu'au congrès d'unité de Paris en 1934. En 1934, au congrès de Paris, l'UACR reprendra le sigle d'UA, ce qui signifiait l'abandon des méthodes révolutionnaires, le communisme envisagé comme obligatoire au lendemain de la révolution, ainsi que le choix des modalités de versements pour les adhérents. Ces mesures entraînèrent une scission et la création de la FCL (Fédération communiste libertaire), soucieuse de plus d'homogénéité organisationnelle et tactique. L'in des principaux militants fondateurs, en fut Charles Cortvrint sous le pseudonyme de Charles Ridel (plus tard, Louis Mercier-Vega). Cela lui valut d'être poursuivi d'une haine tenace par Louis Lecoin. Elle reprendra sa place au sein de l'UA en 1936 pour continuer à coexister en tant que tendance. Enfin, c'est en août 1936, à Toulouse, que se constitua, la Fédération anarchiste de langue française (FAF) en réaction à l'UA qu'elle ne trouvait pas assez synthésiste - dans le sens que lui donnait Voline.
[Jean Maîtron, Le Mouvement anarchiste en France, tome II, op. cit.]
Photos: Voline ; Charles Ridel:
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