de Alayn le Dim 5 Oct 2008 02:37
Voici quelques extraits de ce qu'écrivait Alexandre Skirda (qu'on peut difficilement qualifier d'anti communisme-libertaire !) dans son ouvrage "Autonomie Individuelle et Force Collective":
"Cependant, pour restituer l'époque, le stalinisme est alors "dominateur et sûr de lui" dans le mouvement ouvrier. Il règne également chez les intellectuels et donne le ton à la meute de ses "compagnons de route", dont le plus fameux est l'existentialiste Jean-"Baptiste" (comme l'a surnommé Céline dans une célèbre diatribe) Sartre, lequel estime naturel de dissimuler la vérité sur le régime totalitaire existant en URSS, afin de ne pas "désespérer Boulogne-Billancourt" (siège de l'usine Renault) !)". Il est vrai que l'auteur des "Mouches" veut également faire oublier ses simagrées sous l'occupation, lorsqu'il faisait jouer ses pièces de théâtre devant des parterres d' officiers allemands.
L'atmosphère est donc à l'affrontement. La FA crée un "groupe d'autodéfense", sous la responsabilité de son secrétaire général, Georges Fontenis. Au début, c'est un noyau de militants expérimentés et sûrs, chargés de veiller à ce que des provocateurs ne s'infiltrent pas au sein de l'organisation. Son existence est connue de tous, bien que son fonctionnement et sa composition soient tenus secrets. Une totale confiance à ce sujet est accordée au secrétaire général, élu et réélu en 1946, 1947, 1948 et 1950. A partir de cette dernière année, une partie de ce groupe d'autodéfense se réunit à part, se retourne vers des problèmes internes et décide de réagir contre certains adhérents de la FA. Son but devient d'éliminer les individualistes, les francs-maçons et autres adversaires de la lutte des classes et de l'anarchisme social. Elle se structure, adopte une déclaration de principes, recueille des cotisations internes et prend le nom d'OPB (Organisation Pensée Bataille) [...]
L'OPB compte à ses débuts 15 membres parisiens et deux correspondants en province. Détail important, son existence est tenue absolument secrète au sein de la FA. Certains de ses membres l'ont quittée par la suite et publié, en 1954, un document révélant ses tenants et aboutissants, connu sous le nom de "Memorandum" du groupe Kronstadt. [...]
La tâche impartie au départ de propager l'anarchisme social et de se délimiter des "individualistes" et des "libéraux" de l'organisation, s'étend peu à peu à ceux qui sont qualifiés de "vaseux", "nullistes" et même "anarchistes traditionnels". Grâce à sa tactique de noyautage des groupes et des responsabilités, l'OPB conquiert, en 1952, la majorité de la région parisienne, la plus importante du pays, et provoque au congrès de Bordeaux de la même année à une première série de départs: des personnalités -Maurice Joyeux, les Lapeyre, Maurice Fayolle, Arru, Vincey, etc.-, et des groupes hostiles. A cette occasion, innovation en la matière, le principe du vote par mandats est adopté...[...]
Une deuxième fournée d'exclus -dont Proudhommeaux, Louvet, Fernand Robert, Beaulaton- ; se regroupe en une Entente anarchiste sur une base individualiste. A la suite d'un référendum, la FA change son nom en Fédération communiste libertaire. Elle se dote de nouvelles commissions: d'Etudes, ouvrière, de contrôle et de conflits. C'est devant celle-ci qu'est réglé le différend entre Fontenis, le Comité national et le groupe Kronstadt, le 1er janvier 1954. C'est précisément ce jour que Serge Ninn choisit pour révéler l'existence de l'OPB...[...]
...la Commission de conflits "réprouve l'attitude du camarade Fontenis, consistant en un travail fractionnel à la veille du congrès. Emet le voeu formel que ces agissements ne se renouvellent pas".
Que penser d'un tel phénomène, surprenant dans un mouvement anarchiste ? A-t-il des précédents dans les annales ? Peut-on le ramifier aux sociétés secrètes de Bakounine, en particulier à l'Alliance ? Le contexte historique était bien différent, elles étaient tenues à la clandestinité et étaient orientées vers l'extérieur ou alors contre des adversaires politiques et non contre leurs compagnons d'idées et de luttes. [...]
...nous ne pouvons trouver des ressemblances entre l'existence d'une fraction organisationnelle interne et secrète, telle qu'à été l'OPB, qu'avec des organismes de même type en usage dans les milieux bolcheviks, tout particulièrement chez les trotskistes, grands "spécialistes" du noyautage".
"La liberté des autres étend la mienne à l'infini"
Michel BAKOUNINE