de Lehning le Dim 19 Juil 2020 17:03
"Spinoza, remarque très justement Iodl, a plongé son regard dans l'éthique plus profondément que personne. La morale, au sens où il l'entend, est en même temps divine et humaine ; c'est l'égoïsme et l'abnégation, la raison et le sentiment (c'est-à-dire le vouloir), la liberté et la nécessité." Mais, d'autre part, ajoute Iodl, lorsque Spinoza édifie intentionnellement son éthique sur l'égoïsme, il néglige d'une façon absolue les tendances sociales de l'homme.
Il reconnaît certes, les aspirations nées de la vie sociale, qui doivent dominer les tendances purement égoïstes. Mais l'union sociale est pour lui une chose secondaire, et il place la satisfaction de soi-même, éprouvée par une individualité en elle-même parfaite, au-dessus de la notion d'un travail en commun au sein de la société. (1) Ce défaut trouve peut-être son explication dans le fait qu'au XVII° siècle, au temps des massacres en masse effectués au nom de la "vraie foi", la première tâche envers l'éthique était de la débarrasser de tout mélange de vertus chrétiennes, et, une fois cela accompli, Spinoza n'osa peut-être pas s'attirer d'autres foudres encore en défendant une justice sociale, c'est-à-dire les idées communistes proclamées alors par les mouvements religieux. Il fallait avant tout rétablir les droits de la raison individuelle, indépendante et autonome ; c'est pourquoi, en fondant sa morale sur le bonheur supérieur qu'elle procure en dehors de toute récompense sous forme de "multiplication des troupeaux" ou de "béatitude dans les cieux", il lui fallait, avant tout, rompre définitivement avec l'éthique théologique, sans tomber ni dans l'"utilitarisme", ni dans l'éthique de Hobbes et de ses disciples. En tout cas, cette lacune de l'Ethique de Spinoza, que Iodl a déjà signalée, est essentielle.
(1): IODL, t. I, p. 259.
Photo: Spinoza:
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