de Lehning le Lun 30 Jan 2023 18:57
Le brigadier, qui parlait français, m'annonça qu'il me ferait conduire à la frontière belge. Je protestai, déclarant que je voulais être conduit à la frontière allemande. Je finis au commissariat de police où je passai la nuit. Je demandai vingt-quatre heures de séjour, pour retirer mes documents personnels laissés à Paris et à Bruxelles. On me répondit que cela n'était pas possible.
Ma femme arriva, elle alla à l'auberge et trouva un billet que j'avais laissé: "J'ai été arrêté, viens me chercher au commissariat." Sa mère était morte, sans qu'elle pût l'embrasser, parce que le fait d'être ma femme l'empêchait de rentrer en Italie sans courir de graves dangers, et, après des mois et des mois de séparation, elle aurait trouvé réconfortant d'être avec moi. Nous nous rencontrâmes dans une chambre de sûreté et après quelques heures je fus obligé de monter dans le train Roosendaal-Anvers. Pour ne pas rentrer en Belgique j'aurais dû sauter du train, et c'était un express. Je ne croyais pas qu'il fût opportun de me suicider. Et ainsi, le soir même, je dormis en prison. Dans la cour, je rencontrai une vieille connaissance: un petit truand espagnol qui, sorti de prison à Bruxelles, y était rentré à Anvers. Il me fit un clin d'œil, l'air de me dire: "Toi non plus, tu n'as pas de chance."
Photos: Giovanna, la femme de Camillo Berneri, et leur fille Marie-Louise en 1936 ; Anvers:
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