Jeunes socialistes,
Ceux qui suivent avec intérêt et sympathie votre action politique, en ce qui concerne l'union des forces prolétariennes et révolutionnaires, voient dans votre mouvement des symptômes nombreux et significatifs d'un réveil sain: ils voient le déroulement d'une nouvelle et féconde crise de conscience.
Moi qui ai fait partie de votre mouvement et qui ai pu en même temps en connaître le milieu et en pénétrer l'âme, je sais que nous nous trouvons confrontés à une vaste crise qui n'aboutit pas aux stériles désagrégations du schisme, mais qui représente une espérance lumineuse, une promesse sûre, une nouvelle, vivante et réelle force révolutionnaire.
Aujourd'hui, presque tous, Jeunes socialistes qui parlez de fusion des forces prolétariennes, de collaboration entre partis subversifs, de blocs rouges, vous vous trouvez tous, et presque inconsciemment, dans cette crise spirituelle, qui bouleverse, qui opprime, qui peine, dans leur état d'incertitude, de doute, tous ceux qui s'aperçoivent que la route suivie jusqu'à maintenant et les méthodes qui ont été pratiquées sont erronées !
Beaucoup d'entre vous, qui embrassez votre foi politique non pas comme un "sport" de l'esprit, non pas comme un dérivatif quelconque à la vie, mais pour vivre une vie pleine de réflexion et de lutte, se trouvent aujourd'hui dans un état d'âme dont il ne sera pas donné à tous de sortir trempés, purifiés, victorieux !
Aujourd'hui, du reste, ceux d'entre vous qui sont sincèrement révolutionnaires ne cachent pas qu'ils se retrouvent effarés devant l'abîme qui sépare la pensée de l'action et ne cachent même pas que, si les masses laborieuses ne sont pas assez audacieuses et n'ont pas assez confiance, la faute en incombe à tous ces pseudo-révolutionnaires tenants de la tactique effroyable et égoïste du possibilisme subversif. Vous tous voudriez voir se concrétiser l'esprit de rébellion qui souffle autour de vous, le voir devenir une réalité vivante, dynamique, destructive, libératrice.
Au lieu de cela, vous entendrez parler les aînés du parti de révolte, sans fermes résolutions, sans qu'il y ait de suite dans l'action, plus par habitude que par autre chose.
(...) Les meilleurs d'entre vous, Jeunes socialistes, se sentent aujourd'hui le devoir de donner au peuple l'espoir d'une reprise vigoureuse ; ils se sentent la grande utilité de lancer des appels pleins de fermes résolutions et d'espérances confiantes et audacieuses envers le peuple, ce peuple qui a besoin de voir quelque chose de nouveau, de grand, qui puisse le réveiller de sa torpeur faite de scepticisme, de souvenirs douloureux, de mille désillusions.
Ils comprennent que le peuple a besoin de voir combattre sans peur et sans hésitations ceux qui déclarent être ses défenseurs, et ils le comprennent parce qu'eux-mêmes ont assisté, effarés, à la déroute morale de ceux en qui ils avaient placé une confiance totale, de ceux qu'ils aimaient jusqu'à l'idolâtrie.
Ils comprennent que le peuple a entendu trop de discours adulateurs de politiciens louches, de girouettes de la tribune et du Parlement, pour y croire encore.
Ils comprennent que le peuple a besoin de voir des martyrs après avoir tellement entendu parler de martyre ; qu'il a besoin de voir des héros après en avoir vu désigner tant par les orateurs des commémorations officielles étalant leurs panégyriques sur l'héroïsme.