D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Débats politiques, confrontation avec d'autres idéologies politiques...

D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede bajotierra le Ven 17 Oct 2014 17:00

Une question d'actualité , article de memorial98 et commentaires de Yves Coleman


D’où viennent les jeunes djihadistes ?
mercredi 8 octobre 2014, par Yves


Article extrait du site
http://www.memorial98.org/article-d-ou- ... 39668.html


"Au moment où se multiplient les récits de jeunes hommes et femmes se radicalisant de manière très rapide et extrême, nous publions un réflexion sur ce phénomène, à partir des témoignages issus du livre « Les Français djihadistes » (éditions Les Arènes) par David Thomson. Thomson est un ancien correspondant de France 24 et RFI en Tunisie.

Un monde de silhouettes de papier auxquels rien ne les a jamais rattachés, et la mort, la leur et celle du monde comme seule manière de donner un sens à l’existence.

C’est le message que délivrent Clémence, Yassine, Alexandre, Sirine, jeunes français, djihadistes en partance ou partis vers la Syrie, lorsqu’ils choisissent de parler à ce journaliste.

Ils ont des vies et des itinéraires différents. Néanmoins, qu’ils soient chômeurs ou salariés confortablement rémunérés, qu’ils aient ou non des enfants, des parents, unE conjointE, des ami(e)s, à leurs propres yeux tout ceci ne semble revêtir aucune espèce de réalité, d’échanges, de rapports sociaux porteurs de sens.

Étrangers absolus à la société qui les entoure, ils le sont d’abord et aussi à ce qu’est l’islam en tant que réalité concrète. Qu’ils soient ou non issus de l’immigration, tous ou presque se sont convertis seuls face à un écran d’ordinateur. Tous ou presque justifient leur choix par cette possibilité qu’ils n’ont pas trouvée dans les autres religions : pouvoir entrer dans un autre monde par la magie d’une phrase prononcée en tête à tête avec soi-même.

L’irruption d’êtres humains de chair et de sang dans ce processus magique et solitaire les dérange et les déçoit. Ainsi ils n’aiment pas les mosquées où ils ne se sentent pas mieux qu’ailleurs dans la société. Ils ont aussi été déçus par le salafisme quiétiste , qui ne leur proposait encore une fois que de vivre , d’une autre manière, mais vivre quand même. Ils voulaient « partir », mais la « hijra » l’émigration vers un pays musulman ne les a finalement pas attirés non plus, dès lors qu’il s’agissait d’aller construire une autre vie.

La Syrie, c’est partir pour la mort. Dans leur esprit d’ailleurs, il n’y a pas la Syrie. Il y a le Shâm, cet endroit mythique où commencera la fin du monde, où un Califat sera instauré puis défait par les forces du Mal, ce qui annoncera le début du Jugement dernier. Partir pour le djihad, c’est donc partir vers la Fin. En effet, là-bas, les combattantEs partis instaurer le Califat ne triompheront pas, ils seront vaincus ici-bas, mais leur perte ne sera que temporaire, parce que leur mort ouvre les portes de l’Autre Monde.

Discours de propagande délivré à un journaliste en toute connaissance de cause ? Sans doute, mais il est sans doute aussi profondément intériorisé et correspond à une expérience intime du réel et de ce qui ne l’est pas.

Car, pour ces jeunes gens, bien avant le Paradis, un autre monde est plus réel que celui dans lequel ils vivent. Les réseaux sociaux ont été pour eux la seule source de rapports perçus comme « vrais », parce que créant de l’émotion. Lorsqu’ils parlent de leurs liens avec leur femme, avec leurs parents, avec leurs amis, avec les collègues, tous évoquent en clair ou en creux un mur immense, infranchissable entre leur moi profond et leur moi social. Le « moi social » blague au travail, téléphone aux parents, fait des enfants, des fêtes, vend de la drogue ou écoute du rap, mais le moi profond, le « vrai » est seul, isolé, totalement absent et muet au monde.

Il ne se connecte que par le biais de la médiation virtuelle. On pleure devant la vidéo d’un imam ; en lisant un hadith sur l’écran, on éprouve le sentiment d’une révélation qui n’est jamais venue dans le réel, même à la mosquée. Les rapports avec les autres êtres humains constituent toujours un poids et une souffrance, le virtuel est le seul moyen de les dépasser. Ce qui frappe est que cette attitude ne disparaît pas lorsqu’ils partent, lorsqu’ils sont enfin sur la terre du djihad. Leur premier geste est de poster une photo sur Facebook et se géolocaliser. Tous passeront le temps hors combats branchés sur You Tube, seuls devant leur caméra, tous montrent avec fierté au journaliste le nombre de like sur leurs vidéos, beaucoup ont ouvert des blogs une fois là-bas. Mais presque aucun ne parle de la Syrie réelle, si ce n’est pour expliquer que les Syriens pour la plupart ont des habitudes de mécréants, ne sont pas du tout conscients d’être sur la terre du Shâm et de la proximité du Jugement dernier.

Les seuls instants décrits comme un moment de communion collective, sont ceux où la mort est présente. Un jeune homme se remémore sa joie, lorsqu’il a appris la mort de deux de ses amis en Afghanistan. Il décrit l’annonce de cette mort comme le moment où il a compris que son rêve pouvait devenir réalité. Des jeunes femmes imaginent entre elles, sur un mur Facebook, le moment merveilleux que sera la mort de leur compagnon, si et seulement si elles ont la chance d’être là lors de ses derniers instants. Un jeune homme souhaite que ce soit son frère, un « incroyant », qui lise sa lettre d’adieux lors de la cérémonie qui suivra l’annonce de sa mort en France. Dans cette lettre, il parle avec moult détails de la réunion de famille heureuse et apaisée qui aura lieu au paradis, grâce à lui qui sera mort en martyr.

Alors qui sont ces jeunes, à quoi les rattacher ?

C’est toute la difficulté ouverte par leur témoignage car leur rejet de la société environnante est intégral. Tous tiennent à expliquer longuement qu’ils n’ont rien à voir avec la quasi-totalité des musulmans réels, leurs parents, leurs familles, les « traîtres » dont la liste est détaillée et jamais finie. Cette liste va des chiites aux Frères Musulmans en passant même par les salafistes proches de l’Arabie Saoudite, ou ceux qui en Tunisie, ne « vont pas assez loin » dans le djihad, ou ceux qui en Syrie n’appartiennent pas à la même brigade qu’eux. La formalisation de ce point de vue est nommée par leurs prédicateurs « l’Alliance et le Désaveu ». Selon ce principe, un vrai musulman est celui qui manifeste son inimitié totale avec le monde des mécréants. La haine passive du monde tel qu’il est ne suffit pas, et le djihad, dans ce contexte est la mort de tous et la sienne propre. Il constitue le seul comportement qui vaille pour être membre de la communauté des « vrais » croyants... qui ne sont plus que des croyants en la Mort.

Bien évidemment, les prédicateurs, les chefs des organisations combattantes comme ISIS en Syrie ont eux bien d’autres préoccupations que ces jeunes gens qui les rejoignent. Politiciens ou généraux, ils portent des stratégies de pouvoir, des objectifs militaires et économiques, des projets bien ancrés dans le réel de leurs pays d’origine.

Mais si leur propagande a touché ces jeunes, elle ne les a pas créés. Dans leur propre témoignage, la découverte de la possibilité concrète du djihad est toujours l’aboutissement d’un parcours en solitaire dans la société française et nulle part ailleurs. Personne n’est venu les chercher, ni dans leur entourage familial, ni à l’école, ni à la mosquée. Ils sont en cela très différents des générations précédentes. Les djihadistes français plus âgés en parlent d’ailleurs abondamment eux ont tous suivi un long parcours au sein de l’islam avant de rencontrer physiquement une branche dissidente. Ils perçoivent bien la différence fondamentale avec ces jeunes gens dont certains se sont convertis en trois mois et n’ont qu’une impatience : tuer et surtout mourir en martyrs.

Étrangement ou pas, le vécu raconté par ces « dhijadistes » en rappelle un autre, celui de ces jeunes gens, qui dans les années 1980, dans toute l’Europe, ont basculé dans la consommation d’héroïne. Presque tout y est : d’abord le détachement vis-à-vis de la société, un détachement qui n’est pas du tout une révolte. Pour se révolter, encore faut-il percevoir l’utilité de la révolte, une faille possible dans le monde tel qu’il est, qui pourrait survenir grâce à une action de l’intéressé. Or la France telle que la décrivent ces jeunes gens est un tout compact et totalement étranger, où rien, pas même les rapports sociaux immédiats avec la famille ou les proches, ne peut être changé.

Ainsi Yacine interprète-t-il le racisme et l’impossibilité de l’intégration comme la volonté d’Allah , qui a ainsi empêché une perversion des jeunes par la société française, et a permis que d’aucuns , comme lui s’en séparent totalement. Ainsi Souleymane et Clémence, jeune couple ouvrier précisent-t-ils qu’il ont attendu longtemps avant de partir, car ils auraient souhaité auparavant profiter d’un certain nombre de biens de consommation, comme une « très grande télé ». Mais ils se sont aperçus qu’il n’arriveraient jamais à se la payer, ils ont alors décidé de ne plus attendre.

Dans les deux cas (héroïne et djihad), aucune trace même partielle d’une tentative de révolte inaboutie ou ratée contre le racisme structurel ou l’exploitation économique capitaliste, mais la perception de la société comme un donnée tellement intangible que rien ne peut troubler de l’intérieur son fonctionnement.

Ainsi, avant d’être destruction de cette société de l’extérieur, la perspective du djihad est d’abord destruction du soi, volonté d’effacement par le vide de tout ce qu’on a pu être auparavant. La plupart de ces jeunes décrivent avec minutie la vente de leurs maigres bien matériels, l’abandon de leur emploi, du domicile familial, la rupture du lien avec l’épouse, avec la fratrie, le vidage du compte en banque. Cette description est accompagnée d’une insistance marquée sur la réaction d’incompréhension et de refus de l’entourage, réaction interprétée comme un élément de plus validant la justesse du choix effectué. Or ce processus de désaffiliation volontaire ressemble trait pour trait à celui des jeunes usagers d’héroïne. Dans ce dernier cas les parents et les proches perçoivent un comportement addictif absolument négatif et destructeur, alors l’auto-destruction est revendiquée par celui qui la vit comme un choix volontaire.

« Choisir son futur . Choisir la vie ? Mais pourquoi ferais-je quelque chose comme ça ? Je choisis de ne pas choisir la vie. Je choisis quelque chose d’autre. Les raisons ? Il n’y a pas de raison. Qui a besoin de raisons quand on peut avoir l’héroïne » lance le héros du film Trainspotting en guise de manifeste.

Quelques dizaines d’années plus tard, remplacer « héroïne » par « djihad » n’a rien d’incongru, même au regard de la réaction sociale suscitée par les deux phénomènes.

Dans les deux cas, Etat et commentateurs officiels répètent les mêmes condamnations incantatoires, la drogue, c’est mal et dangereux, le djihad aussi, les drogués tueraient père et mère pour une dose, les djihadistes sont des assassins. C’est la réalité, et malheureusement, le potentiel de dangerosité des jeunes djihadistes est bien plus grand que celui des jeunes usagers de drogue. Et si les premiers n’ont jamais intéressé personne, les seconds sont effectivement une arme redoutable pour certains courants politiques, des machines à tuer peu coûteuses et déterminées, recrutables par le premier chef intégriste ou fasciste venu. Capables de tuer de sang-froid, y compris des enfants.

Comme dans les années 80, la répression est le corollaire de la condamnation : en arrêtant des jeunes prêts à partir, ou quelques recruteurs, le pouvoir estime avoir remplit son office, comme il estimait le faire en chassant les usagers et en arrêtant régulièrement quelques dealers de moyenne importance.

Cette politique a montré son inefficacité concernant la « fameuse guerre à la drogue ».

Il en va de même pour la guerre aux « djihad » et de manière bien plus grave. En effet la comparaison entre la génération tombée massivement dans l’héroïne et celle qui aujourd’hui est attirée par ce qui est appelé « djihad » rencontre ses limites.

Le cheminement vers l’auto-destruction comme réponse individuelle à une société mortifère faisait écho à l’état de la société dans les années 80. Le mouvement social, ouvrier, révolutionnaire était alors affaibli en Europe, mais son influence culturelle demeurait présente, même sous des formes neutralisées et impuissantes, dans le conscient et l’inconscient collectif de toute une jeune génération. Le pessimisme et l’anomie dominants s’accompagnaient néanmoins de la persistance d’une conscience progressiste, en rupture humaniste avec le fonctionnement capitaliste, notamment dans les métropoles.

Aujourd’hui, ce qui domine objectivement, même de manière temporaire, c’est une autre forme de rejet issu de l’influence de la réaction et du fascisme. Ce qu’une partie de la jeune génération perçoit comme « contre-culture », ce dans quoi elle baigne, même sans s’y reconnaître formellement, est , en tout cas en France, le discours émanant de toutes les extrême-droites, avec une très forte prégnance de l’antisémitisme, du conspirationnisme et de l’irrationnel.

Bien sûr, les théories de la domination juive du monde ne sont pas énoncées seulement par les mouvements fascistes occidentaux. Parmi les prédicateurs islamistes intégristes, elles tiennent souvent une place de choix. Mais en pensant que ce sont ces prédicateurs qui les imposent aux jeunes djihadistes, on oublie de se poser la question suivante : pourquoi des jeunes d’ici , dont la plupart adhèrent très vite aux thèses de ces prédicateurs y sont-ils aussi sensibles, pourquoi surtout en font-ils une dimension essentielle de leurs cibles lorsqu’ils passent à l’acte en France ?

Sans nul doute, parce que l’antisémitisme est devenu banal, notamment en France : il est commun aux jeunes de toutes origines qui admirent Dieudonné, qu’ils soient issus des quartiers populaires ou membres bourgeois des organisations catholiques du « Printemps Français ». Réalité massive et réalité française, cet antisémitisme revêt désormais tous les attributs d’une culture de masse, se diffusant aussi bien sous la forme du divertissement que dans les prises de position de sportifs célèbres adeptes de la "quenelle".

C’est dans ce bouillon de culture-là que grandissent les jeunes tueurs et c’est évidemment une des raisons pour lesquelles leur intégration dans les sectes meurtrières est si facile. C’est aussi la raison pour laquelle, parmi toutes les cibles possibles, ils choisissent des victimes juives. Ce faisant, ce n’est pas seulement la reconnaissance d’organisations implantées en Syrie ou en Afghanistan qu’ils recherchent, mais bien celle d’une partie de la société française gangrenée par le racisme et l’antisémitisme.

Ils représentent de manière troublante une prophétie, qui à force d’être répétée, s’est auto réalisée : désignés depuis le 11 septembre 2001 comme des terroristes en puissance, devenir ce qu’on les a accusés d’être représente finalement la seule forme d’intégration possible dans un modèle social qui leur semble indépassable.

Ils sont aussi le produit d’une société qui peut glisser vers le fascisme. À ce titre ils ne sont pas les enfants d’un Orient fantasmé, mais bien ceux de nos pays capitalistes.

Ceux-ci sont ravagés par l’injustice sociale, par l’absence d’avenir érigée comme une normalité absolue pour une partie de la population, par les idéologies de la haine, au rang desquels le vieil antisémitisme tient une place de choix, notamment en tant qu’outil de déshumanisation absolue de l’Autre.

Dans les pays en guerre, il est des djihadistes qui choisissent de se faire sauter dans des bases militaires, d’attaquer des cibles du pouvoir en place, de réaliser des prises d’otages barbares et spectaculaires, comme la prise d’un centre commercial ou celle d’une université entière. Les nôtres pensent que tuer quelques civils Juifs et même des enfants, au hasard, à bout portant est un acte héroïque, qui leur apportera la reconnaissance sociale.

A ce titre ce que disent les otages qui ont croisé Mehdi Nemmouche pendant leur captivité en Syrie, l’assassin présumé du Musée Juif de Bruxelles, est significatif : le jeune homme comptait bien s’adonner à la tuerie antisémite, mais la rétribution symbolique qui l’obsédait était d’obtenir que lui soit consacrée une séance de l’émission « Faites entrer l’accusé » .

Les jeunes djihadistes sont les monstres idéaux pour faire oublier ce qui les produit. L’horreur de leurs actes ne peut qu’évidemment déclencher la stupéfaction, la colère et la peur. Et favoriser évidemment une réaction de déni protectrice : il est plus simple pour chacun d’entre nous de se dire qu’ils sont d’ « ailleurs », et que ce sont de lointains pays, où se tiennent de très lointaines barbaries, qui les engendrent.

En réalité, les organisations intégristes qui sévissent en Irak ou en Syrie se contentent de venir récolter que ce nos sociétés ont semé. Il faudra bien s’attaquer à la racine du mal pour qu’il n’y ait plus de fruits pourris à récupérer."

*********************************

"Bref commentaire sur l’article qui précède :

Cet article est excellent et ouvre des pistes d’interprétation fructueuses. Peut-être faudrait-il attendre un peu avant d’analyser en détail ces questions. En effet, le phénomène n’est pas seulement français, il est présent dans pas mal de pays occidentaux qui ne sont pas affectés par la plaie antisémite de la même façon. Il faudrait donc comparer avec d’autres pays. Par exemple, en Angleterre, la presse "libérale" (genre Le Monde ou Libération) a présente les djihadistes britanniques comme étant majoritairement des éléments de la classes moyenne, diplômés, plutôt oisifs ayant besoin d’émotions fortes. En France lors d’un débat entre un flic et un consultant qui fréquente les flics et les services de renseignements, mais aussi lors d’un débat entre des historiens spécialistes du Proche et du Moyen-Orient j’ai entendu d’autres explications. Notamment le fait qu’il fallait établir une différence entre :

- les mercenaires (ceux qui font toutes les guerres du Kossovo à la Syrie) pour du fric, et qui n’ont pas vraiment de motivations idéologiques ou religieuses,

- les idéalistes (ceux qui seraient partis en Espagne pour combattre le franquisme en 1936) qui considèrent Saddam Hussein comme un dictateur aussi sanguinaire que Franco ou Hitler, comme d’ailleurs le disent tous les médias dominants en Occident. Généralement ils reviennent totalement déçus et n’ont aucune envie de parler de leurs expériences et de leurs désillusions.

- les ex-délinquants politisés et/ou convertis en prison qui voient dans le djihad à la fois une forme de rédemption personnelle et une façon de s’affirmer dans leur entourage comme des êtres exemplaires.

Si derrière ces hypothèses il y a un grain de vérité cela signifierait qu’il n’y a donc pas que des victimes (du racisme, de l’exploitation, de l’isolement magnifié par la technologie d’Internet) mais aussi des êtres qui font des choix conscients, politiques, religieux ou simplement existentiels. Et dans nos analyses il faudrait tenir compte aussi de cette diversité de motivations qui ne sont pas toutes réductibles à une réaction contre le racisme (dont les futurs djihadistes seraient victimes en raison de leur origine non occidentale) ou à une quête d’approbation (pour leur antisémitisme et l’antisémitisme dominant dans les sociétés où ils vivent)."

Y.C. Ni patrie ni frontières
http://www.mondialisme.org/spip.php?article2138
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede Boehme le Ven 7 Nov 2014 23:25

Un bon article qui développe une analyse de ce phénomène ainsi que des idées très intéressantes, là où la plupart des journalistes passent leur temps à inventer un islamisme intégriste et international qui n'existe pas de facto. On préfère faire dans une fiction englobante qui recouvre les multiplicités de rapports de forces locaux. Tout ça pour éviter de voir que ce sont les valeurs des sociétés occidentales qui ne parviennent plus à intégrer qui que ce soit. C'est l'ultime intégrisme de notre temps, infiniment plus puissant et plus profond que n'importe quel intégrisme religieux : celui qui intègre les individus au travers de fictions, de valeurs coupées de toute réalité. Leur "survie" tient à ce fil, le plus puissant dont puisse disposer par impuissance une civilisation.

En revanche, je ne suis pas d'accord avec l'hypothèse de la présence chez les djihadistes d'une volonté d' "auto-destruction". Ou plutôt, elle n'est pas négative, eut égard à une société française qui ne cesse de moisir sans pouvoir mourir d'une belle mort. Elle apparaît au contraire positive, pour peu qu'on en endure toute la réalité, comme tous les hommes qui ressentaient et ressentent dans leur chair la valeur du sacrifice.
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede bajotierra le Ven 9 Jan 2015 17:20

LES CELLULES DU FANATISME

http://www.cntaittoulouse.lautre.net/sp ... article679




L’actualité vient encore d’illustrer comment la religion s’attaque aux hommes en souffrance pour leur faire avaler des croyances insensées. Le tueur de Toulouse, ou celui de Bruxelles, et d’autres encore, en Syrie ou ailleurs, ont tous fait ce voyage intérieur qui démarre par l’adhésion à des absurdités pour aboutir aux atrocités du fanatisme.

Faut-il encore le redire  ? S’il existe un lieu de désespérance dans lequel on peut se faire embarquer pour un tel voyage, c’est bien la prison. Dans ce qui est une machine à broyer, l’être humain réduit à un numéro d’écrou, est privé de sa liberté, coupé de ses proches. Cet éloignement affectif est toujours cruel, souvent insupportable. Tout devient alors bon pour le combler, y compris les pires théories. Dans l’histoire humaine on rencontre deux fois les cellules –au sens physique du terme  : dans les prisons et dans les monastères [1]. Ces petites pièces fermées au monde extérieur sont faites pour livrer l’individu isolé aux frayeurs des espaces infinis et des silences éternels.

Depuis plus de 20 ans, depuis au moins l’affaire Khaled Kelkal, on constate combien le prisonnier, mis en condition par ce système carcéral, est une proie facile pour les religions. Celles-ci lui offrent à la fois l’espoir, la communion et même la rédemption, avec une facilité hallucinante. Il lui suffit de cesser de penser, il lui suffit de croire ce qu’on lui dit de croire et d’affirmer sa foi. Quand un homme cesse de penser, quand il abandonne son esprit critique, tout devient possible, même et surtout le pire.

Tout ceci relève de la manipulation mentale. Eh bien, il se trouve que pour de nombreux zélotes de la répression et autres orienteurs patentés de l’opinion publique, il existerait une manipulation extrémiste (insupportable) et une manipulation modérée (recommandée). En conséquence, pour lutter contre les manipulateurs extrémistes, ils faudrait faire entrer dans les prisons encore plus des manipulateurs supposés modérés. Plus il y aura de curés et autres imans dans les prisons, moins il y aura de fanatisme, osent-ils insinuer [2]. Or, en prison on est privé de tout, sauf de religion. Il s’ensuit que la religion y progresse et avec elle le fanatisme. Car la religion porte en elle le fanatisme comme l’orage porte en lui la foudre. La prison quant à elle, est l’école du crime. On le sait depuis longtemps. Elle est maintenant, en plus, celle du fanatisme religieux. C’est la réalité objective, une réalité certainement dérangeante pour le lobby du «  tout répressif  ».

Pour lutter contre la manipulation, il serait bien plus sensé de ne pas commencer par en semer le germe, si modéré soit-il dans ce «  bouillon de culture » [3] qu’est la prison. Et si le pouvoir ne se décide toujours pas à supprimer le système carcéral, qu’il ouvre au moins les cellules qui sont la cause structurelle du fanatisme, que le prisonnier ait accès dans des conditions humaines à son conjoint, à ses enfants, à sa famille et à ses amis. Que l’enseignement du savoir y soit favorisé, plutôt que la diffusion des inepties religieuses. Ou que le pouvoir assume une fois pour toute la responsabilité d’y entretenir une pépinière de fanatiques.

[1] Monastère, moines, sont des termes provenant du grec μοναχός (monachos), «  célibataire, solitaire, unique, dérivé de μόνος (monos) seul.  » (Wiktionnaire).

[2] Voir, par exemple, dans «  Le Figaro  », du 03 juin 2014, l’article dans lequel le curé Viot, sous le titre « Islamisme en prison : à qui la faute ? », attaque en règle la laïcité et demande la multiplication des imans « modérés » en prison (et sous-entendu aussi, des curés). Cet article s’inscrit dans la logique d’une campagne sournoise menée par des personnalités politiques pour renforcer l’emprise des religions en prison.

[3] Au sens biologique du terme : milieu nutritif dans lequel on fait croître les germes (en particulier, les bactéries infectieuses).

http://www.cntaittoulouse.lautre.net/sp ... article679
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede bajotierra le Jeu 29 Jan 2015 19:24

Raphaël, converti de Lunel mort pour la cause jihadiste
http://www.liberation.fr/societe/2014/1 ... te_1145738
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede bajotierra le Jeu 10 Déc 2015 16:49

Attentats à Paris: Le troisième kamikaze du Bataclan aurait tenté d'entrer dans la police et dans l'armée ..

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Avant d'être un jihadiste capable d'assassiner de sang froid d'innocents spectateurs d'un concert, au soir du 13 novembre, Foued Mohamed-Aggad, le troisième kamikaze identifié du Bataclan, fut «un jeune homme posé, poli et sans histoires», selon les mots de Youcef*, longtemps son voisin de palier. «Un modèle pour tous les jeunes issus de l'immigration», renchérit Toufik*, qui le croisait alors régulièrement dans cette petite ville de Wissembourg, proche de la frontière allemande, où celui qui n'était pas encore un bras armé l'Etat islamique a fait ses études à l'unique lycée Stanislas.

C'est là que Leila*, une voisine, le côtoyait, elle-même vantant «son humour et son ouverture aux autres. Il était tout sauf un délinquant.» A tel point que la police n'avait jamais entendu parler de lui. A une exception près : lorsque Foued a voulu rejoindre ses rangs et tenté, sans succès, d'en passer le concours d'entrée. «Il l'a manqué, comme il a échoué à intégrer l'armée, raconte Youcef. Sur le coup, ça l'avait vraiment déçu, et maintenant, avec ce qu'il s'est passé, je me dis que ça a dû jouer.» Leila abonde : «L'armée, il m'en parlait tout le temps, c'était vraiment ce qu'il voulait faire. Après, je n'ai pas su pourquoi cela n'avait pas fonctionné, et il était parti du côté de Strasbourg. Nous nous étions perdus de vue, puis j'ai appris son départ en Syrie...»


http://www.leparisien.fr/faits-divers/m ... 355753.php
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede rastanar le Jeu 10 Déc 2015 17:49

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Le soulèvement aura lieu...tu aura beau prier ton dieu---La Canaille

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D'ailleurs j'en ai un et je vis très bien avec"---Karin Viard
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Re: D’où viennent les jeunes djihadistes ?

Messagede bajotierra le Jeu 10 Déc 2015 18:40

bien vu ...
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