Deux guérilleros de la politique sur le Web dévoilent leurs

Débats politiques, confrontation avec d'autres idéologies politiques...

Deux guérilleros de la politique sur le Web dévoilent leurs

Messagede Nico37 le Dim 16 Mai 2010 09:26

Deux guérilleros de la politique sur le Web dévoilent leurs secrets - Alexandre Haederli - le 01 mai 2010, 19h33 Le Matin Dimanche

Fausses identités, infiltration au coeur du réseau des adversaires ou montages vidéo à charge: sur Internet, certains politiciens ont recours à des méthodes discutables pour influencer les électeurs. Leurs conseillers en communication ont mis au point des tactiques dignes des romans d'espionnage. Rencontre avec deux combattants de l'ombre qui travaillent pour un élu français.

Des marionnettistes. Voilà comment se présentent Mélanie* et Anthony*. Ces deux trentenaires gèrent chacun plusieurs dizaines de profils Facebook construits de toutes pièces. Le but? Manipuler l'opinion des internautes en faveur d'un homme politique.

Si Barack Obama a popularisé l'utilisation des réseaux sociaux pour rallier un maximum de sympathisants et organiser le militantisme lors de la dernière présidentielle américaine, ses méthodes semblent déjà dépassées.

Aujourd'hui, la guerre pour influencer les électeurs se déroule à l'abri des regards. Et tous les coups sont permis.

Pour découvrir cette face cachée de la politique en ligne, nous avons rencontré Mélanie et Anthony qui travaillent en France - en Suisse, les partis politiques disent ne pas avoir recours à de telles méthodes. Ces professionnels de la communication gèrent l'identité en ligne d'un important politicien local. Ils postent des messages en son nom sur son site Internet, son profil Facebook ou Twitter. Mais ce n'est que la partie visible de l'iceberg. En sous-main, ils gèrent une cinquantaine d'identités virtuelles.

Photos choisies au hasard
«Ce sont comme des personnages, nous leur inventons une vie de A à Z», raconte Mélanie. Un nom fictif, un emploi bidon, une adresse e-mail créée pour l'occasion et surtout une photo pour illustrer le profil Facebook. «Les gens se méfient des pages qui n'en ont pas.» Pour en dénicher une, rien de plus facile: il suffit de se rendre sur n'importe quel site de partage de photos, comme Flickr.com, et d'en prendre une au hasard. «De préférence une image où la personne est relativement loin ou de dos. Ensuite, si nous créons un profil de militant écologiste, on l'inscrira à des groupes de défense de l'environnement ou à la section des Verts de sa région.» Pour rendre le tout encore plus vivant, ils lui imaginent même des goûts musicaux ou des loisirs.

Enfin, pour qu'un profil soit influent, il faut qu'il soit relié à un maximum d'amis. Au dire de ces experts autodidactes, rien de plus simple: «Il faut faire plusieurs dizaines de demandes et, sur le nombre, il y a toujours des personnes qui acceptent», explique Anthony. Des gens qui acceptent d'être amis avec d'autres qu'ils ne connaissent pas? «Oui, cela peut paraître étonnant, mais c'est très fréquent. Et il y a encore plus fort: nos faux profils reçoivent des dizaines de messages pour leur souhaiter un joyeux anniversaire!» Crédules, mais pas avares en bons voeux, les internautes...

Ces profils imaginaires peuvent remplir deux fonctions. D'une part, propager des informations favorables à l'homme politique: relayer son programme et ses idées. Une prise de position en faveur du droit de vote des étrangers, par exemple, sera diffusée dans des groupes à tendance socialiste. D'autre part, infiltrer les réseaux de ses adversaires. «Particulièrement utile pour faire de la veille, se tenir au courant de ce que les autres partis entreprennent, précise Anthony. Nous sommes même parvenus à faire inscrire l'un de nos profils fictifs à la liste de diffusion interne d'un grand parti.» Une forme moderne d'espionnage. Moins romanesque que celle narrée par John Le Carré, mais redoutablement efficace.

Noyer les commentaires négatifs
«Cela demande juste un peu d'organisation pour s'y retrouver avec tous ces profils, poursuit Mélanie. Il faut absolument éviter de les relier entre eux.» Les deux spécialistes tiennent à jour un tableau récapitulatif de leurs multiples identités virtuelles avec les noms inventés et les mots de passe. «Nous avons ainsi accès en tout temps à tous les profils.» Parce que cette schizophrénie en ligne s'entretient, quasi 24 heures sur 24. «Chaque jour, nous faisons le tour de nos personnages pour répondre aux messages ou ajouter de nouveaux amis. Ça prend plusieurs heures, mais c'est indispensable pour qu'ils soient crédibles.»

Et puis, il y a les commentaires négatifs que suscitent les messages qu'ils postent. «La règle est de ne jamais censurer, déclare Mélanie. Si vous supprimez un commentaire, cela crée immédiatement un tollé.» Les spécialistes préfèrent donc noyer les critiques sous un flot de commentaires positifs. «Facebook n'affiche que les deux derniers messages, poursuit la jeune femme. Si les gens veulent voir l'ensemble de la discussion, ils doivent cliquer. C'est une manière de limiter fortement la visibilité des objections.»

Profils kamikazes
Il arrive que des profils soient sacrifiés. Pour la bonne cause. «On les appelle des kamikazes, image Anthony. Leur but est de discréditer les politiciens adverses, quitte à faire perdre toute crédibilité à nos profils.» La manière douce, d'abord: après s'être fait passer pendant plusieurs semaines pour un partisan de droite, un personnage publiera sur un groupe un message du type: «Je croyais sincèrement aux promesses de cet élu UMP, mais je suis déçu par son attitude. Je ne voterai finalement pas pour lui.» En espérant insuffler le doute à d'autres électeurs, bien réels eux. La méthode plus trash, ensuite: «Il nous est arrivé de faire un montage vidéo peu flatteur d'un autre politicien en juxtaposant des extraits de discours», témoigne Anthony.

Quelles limites se fixent ces activistes d'un nouveau genre? La question semble presque les surprendre. «Nous ne faisons rien d'illégal, rétorque Anthony après une seconde d'hésitation. Nous ne sommes jamais insultants, nous n'usurpons pas les identités de personnes qui existent vraiment. Et après tout, nous n'obligeons personne à être amis avec nos profils fictifs. Il s'agit ni plus, ni moins que d'une technique de communication.»

Est-ce grâce au combat de l'ombre mené par Mélanie et Anthony? L'homme politique pour lequel ils travaillent a été réélu lors de récentes élections locales.

* Noms connus de la rédaction

Lift 2010 démarre mercredi à Genève
i?Les deux Français spécialistes de la guérilla politique sur Internet viendront raconter leur expérience lors de la conférence Lift 2010. Depuis 2006, Lift réunit une fois par an des pionniers et des innovateurs dans le domaine des nouvelles technologies à Genève. Cette année, du 5 au 7 mai, un millier de participants viendront écouter plusieurs dizaines d'intervenants s'exprimer sur le thème «Connected People». Parmi eux, Rahaf Harfoush, qui a participé à la campagne en ligne de Barack Obama en 2008, ou Catherine Lottier, qui imagine ce que seront les programmes de la chaîne de télévision française Canal Plus dans le futur.

Programme complet sur www.liftconference.com
Nico37
 

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