Etatisme et code du Travail

Etatisme et code du Travail

Messagede bajotierra le Ven 18 Mar 2016 12:12

Etatisme et code du Travail

L’annonce officielle de la loi Travail est l’occasion de levées de bouclier jusqu’au sein des milieux à prétention révolutionnaire. Elle y est présentée comme la « rupture sans précédent » avec les articles de loi fondamentaux du code du Travail qui auraient été gravés dans le marbre aux lendemains de la Libération. C’est à l’aune de telles réactions que l’on peut juger dans quelle mesure les mythes fondateurs de l’Etat, en particulier ceux relatif à l’Etat providence à la française, sont partagés par bon nombre d’individus et de cercles qui s’en prétendent pourtant les adversaires.

De telles réactions sont désormais récurrentes et il n’est pas nécessaire de remonter loin dans le passé pour en rappeler l’avant-dernière manifestation. Il y a trois ans à peine, le même pouvoir d’Etat présentait et faisait adopter le dernier en date de la longue liste des Accords nationaux interprofessionnels
(ANI). Le premier d’entre eux avait été signé au cours de la grève générale de Mai 68 : c’étaient les accords de Grenelle destinés à étouffer les flambées révolutionnaires en échange de concessions mineures accordées aux travailleurs salariés, présentées comme desvictoires sans pareilles par les organisateurs de la défaite, les leaders syndicalistes au premier chef. Lesquels en furent les principaux bénéficiaires, du sommet à la base de la pyramide sociale t étatiste.

En 2013, c’est la même conception catastrophiste que celle d’aujourd’hui qui prédomina. L’ANI aurait représentait l’attaque « sans précédent », menée contre les « garanties » sanctionnées dans le code du Travail, à commencer contre celles associées au contrat à durée déterminée (CDI). Ce qui revenait à blanchir les versions successives et antérieures dudit code. Or, la tendanceà démanteler les premières versions du code du Travail, spécifiques à l’époque de la gestion fordiste du travail au cours des Trente Glorieuses, période d’accumulation effrénée du capital, n’était pas nouvelle. Elle datait grosso modo des lois Auroux, en 1982, pour la bonne et unique raison que la page de la gestion en question était en train d’être tournée, par suite des
mutations profondes, y compris technologiques, que connaissait le capitalisme contemporain, mutations qui inauguraient ce que les gestionnaires appellent désormais la flexibilité du travail et l’organisation du capital en réseaux. De plus, contrairement aux idées reçues, les « garanties »
liées au CDI ne datent pas de la Libération, mais des lendemains de Mai 68, lorsqu’il devint nécessaire de bouleverser en profondeur les modes d’exploitation et de domination, mais sans provoquer de réactions générales, peut-être génératrices de poussées subversives, du côté des
premiers concernées : les prolétaires de la grande industrie. C’est pourquoi, en 1975, le gouvernement Chirac instaura l’obligation pour les employeurs, envisageant d’effectuer des « licenciements,individuels ou collectifs, fondés sur des motifs économiques, conjoncturels ou structurels,
d’obtenir l’autorisation de l’autorité administrative compétente. » Mesure étatiste qui fut saluée par tous « les partenaires sociaux », leaders syndicaux en tête, comme « sans précédent » entermes de « sauvegarde de l’emploi » et de « protection des salariés ». Les mêmes leaders firent silence sur les mesures concomitantes favorisant au maximum la multiplication des contrats àdurée déterminée (CDD) et des contrats intérimaires, y compris dans la grande industrie.

En 1986, avec la première cohabitation, dans le but de faciliter les procédures de licenciementsdans l’industrie en cours de restructuration, le même Chirac fit supprimer l’autorisation administrative, sauf pour les salariés protégés, à commencer par les délégués syndicaux. Comme d’habitude,
principaux bénéficiaires de l’histoire, à titre de pompiers sociaux. Les rappels précédents montrent déjà que le catastrophisme, la version « boule de neige » de l’évolution du capitalisme, nous prive de toute compréhension des évolutions réelles, contradictoires,par avancées et par reculs, etc. des relations d’exploitation et de domination. A lire aujourd’hui de façon caricaturale la loi Travail, comme hier le dernier ANI, avec l’idée préconçue que
« c’est de pire en pire », nombre de « révolutionnaires » sont amenés de facto à défendre le statu quo, plus exactement, les statut quo successifs. Et à jouer le rôle de claque turbulente, mais de claque quant même, des milieux et des organisations qui, à gauche de la gauche officielle, racolent
sur le terrain de refus de la loi Travail au nom de la défense du code du Travail. Comme à l’époque de la loi Aubry sur les 35 heures, par exemple, en commençant par la rejeter pour ensuite la défendre lorsque Sarkozy a parlé de la remettre en cause. Dans la tête de nos « révolutionnaires
», l’ANI, aujourd’hui partie intégrante du code du Travail, n’existe plus. Obnubilés parla loi Travail, ils l’ont déjà oublié.

Trois ans après l’ANI, voici donc venue la loi Travail, et le même scénario recommence, la même défense du code du Travail au nom des dernières modifications en cours, présentées à leur tour comme le dynamitage sans pareil de prétendues protections et garanties inscrites au fronton de
l’Etat providence à la française. La chose qui fait particulièrement crier d’indignation pas mal de « révolutionnaires », c’est l’idée que lesdites garanties et protections seraient désormais négociables,non seulement par branches, mais également par entreprises, sans tenir compte nécessairement
des articles de loi fondamentaux inscrits dans l’actuelle version du code du Travail. En d’autres termes, nous devrions être partisans de l’application du corpus général du code, stricto sensu, pour tous les salariés. Le degré d’acceptation du mythe de l’Etat protecteur des citoyens,à titre de salariés, atteint ici est insondable et il est partagé, mine de rien, non seulement par les leaders syndicaux, mais aussi par pas mal d’idéologues du Medef ! Lesquels, à moins de croire aux mythes du libéralisme, sont eux aussi des étatistes, y compris dans le domaine de la législationdu travail. Or, les articles fondamentaux du code ne parlent que du minimum général applicable et encore, à condition de faire abstraction des multiples dérogations qui furent introduitesdepuis au moins les lois Auroux et qui furent multipliées depuis lors, et parfois transformées en articles de loi. Ce qui fait que le fameux minimum a déjà été modifié, les deux dernières décenniesde plus en plus à la baisse. De plus, pas mal de conventions collectives, y compris spéci -
fiques à telle ou telle entreprise, sont aujourd’hui plus favorables que ledit minimum. Ce qui explique que l’un des principaux axes d’attaque des managers consiste depuis des années, surtout depuis le dernier ANI, à dénoncer des conventions de branches ou d’entreprises qui sont plus favorables,
par exemple en matière de temps de travail, que les articles du code du Travail. Ainsi, chez Renault, la renégociation du temps de travail a amené à aligner les 34 heures hebdomadaires sur l’article du code relatif aux 35 heures. Avec l’accord des leaders syndicaux sous le
prétexte de « sauver la compétitivité de l’entreprise sur le marché mondial ».Tel est le code réel, pas celui fantasmé par nos « révolutionnaires », code qui, à la fois, sanctionne et doit permettre d’accélérer les transformations des relations d’exploitation et de domination, plus que jamais placées sous le signe de la flexibilité. Bien entendu, la loi Travail prévoit d’étendre le champ d’application des dérogations de façon conséquente, sous conditions précises
pour quiconque a lu réellement le projet, mais en aucun cas de renverser de prétendues tables de la Loi, pures abstractions qui n’existent que sur le papier, à titre de préambules au code, n’interdisant pas de supprimer de multiples articles de lois et d’en introduire d’autres, en
règle générale des ordonnances gouvernementales transformées en lois, comme l’autorise la Constitution lorsque, dans les trois mois, les députés ne les ont pas mises en discussion. Ensuite, leur interprétation appartient aux gestionnaires du pouvoir d’Etat, parmi lesquels il faut inclure les leaders syndicaux. Car la cogestion initiée à la Libération reste l’un des piliers de la domination dans l’Hexagone.

Le code du Travail n’est pas défendable, vu ce qu’il a toujours sanctionné, le travail, vu ce qu’à toujours rendu possible sa mise en oeuvre, à savoir la cogestion du travail, laquelle inclut la coercition en échange parfois de concessions plus ou moins étendues en fonction des époques, des
circonstances, des résistances, ou même des révoltes, etc. L’un de mes complices des chantiers de construction navale à Nantes, dans les années 1970, appelait le code du Travail la contrainte par corps organisée par l’Etat, qui garantissait que la domination du capital serait acceptée par
les salariés en échange de miettes. A juste titre, il appelait l’Etat providence à la française l’Etat qui organise la sécurité dans la servitude salariée, pour le plus grand bénéfice des capitalistes. Depuis des décennies, les concessions sont moindres. C’est certain. La loi Travail représente,
pour l’essentiel, des tours de vis supplémentaires. Mais il est impossible de les combattre au nom du code du Travail, ce qui revient à faire appel à l’Etat en général contre les dernières mesures préconisées par l’actuel pouvoir d’Etat. Dans de telles conditions, à supposer même que celui-ci fasse des concessions sur tel ou tel article de la loi Travail, il n’y aura pas de victoire,pas même partielle. Car l’essentiel, c’est que les premiers concernés entament la rupture avec ce qui les écrasent, y compris avec leurs propres illusions sur l’Etat et sur le travail, l’autre nom du capital. Jusqu’à preuve du contraire, ils en sont, dans leur grande majorité, bien loin.

Julius, mars 2016


https://ladiscordia.noblogs.org/files/2 ... ravail.pdf
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Ven 18 Mar 2016 21:57

De mon point de vue, les lycéens, les étudiants et les autres qui manifestent dans les rues ont toutes les raisons de le faire. Ils ont toutes les raisons d'être mécontents et de l'exprimer autant qu'ils le peuvent, même s'ils ne connaissent pas tout du code du Travail et de la loi Auroux de 82, c'est pas grave!
Je n'ai pas l'impression qu'ils manifestent pour sauvegarder le code du travail, il s'agit plutôt, je pense, d'une inquiétude, imprécise mais justifiée.
Pour moi, le rôle des révolutionnaires dans cette histoire serait plutôt de les encourager dans cette voie, celle de l'apprentissage de la lutte et, éventuellement, de leur donner un coup de main.
Il ne faut pas être défaitiste avant l'heure, même si la probabilité d'une révolution est faible...
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Sam 19 Mar 2016 09:03

En fait chaque génération de jeunes veaux estampillé éducation nationale de voir fortement incité par les " services speciaux" de l' agitation à participer aux messes politiques, cela fait partie intégrante du programme de décervelage entamé depuis la crèche, c'est la communion solennelle qui marque l' entrée dans le troupeau politique. On y repère à l' occasion les plus virulents et les plus aptes à la manipulation pour renouveler l' encadrement idéologique indispensable a la survie du moloch.
Il serait évidement bien plus profitable a la jeunesse de consacrer son énergie a des choses utiles comme le jardinage,la couture ou la construction, enfin toutes ces activités qui pourraient lui permettre d' accéder à l' indépendance pour la satisfaction des besoins du corps afin de poursuivre librement la recherche du bonheur.
8-)
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Sam 19 Mar 2016 09:50

Alors il faudrait rétablir les cours d'économie domestique pour que les jeunes puissent apprendre à s'émanciper avec toutes ces joyeuses activités et surtout pour qu'ils puissent s'imprégner pleinement de cette joyeuse morale qui prétend que le travail rend libre... Tout un programme!
Heureusement, je pense qu'ils ne se laisseraient pas faire, tout comme il ne se laissent pas faire aujourd'hui contre cette loi travail qu'ils ont raison de dénoncer, non pas parce que le code du travail serait quelque chose de sacré auquel il ne faudrait surtout pas toucher, mais parce que cette loi défend une vision de la société qui ne leur convient pas.
C'était la même chose avec le CPE et le CIP.
Pourquoi cela ne leur convient pas? Qu'est-ce qu'ils veulent à la place?
Ces questions malheureusement créent la division. La réflexion n'est probablement pas encore assez mure mais ça viendra.

Contrairement à ce que raconte le texte de bajotierra, je pense que la constitution d'une force capable d'empêcher le gouvernement et le patronat de réformer le travail est une très bonne nouvelle pour les révolutionnaires.
Cette force s'est déjà manifestée en repoussant le CIP et le CPE, elle se manifestera encore, je l'espère, en repoussant la loi Travail.
Bien sûr, d'un point de vue révolutionnaire, c'est tout à fait insuffisant mais c'est une première étape.
Il suffit maintenant que cette force devienne une véritable force économique et politique capable de proposer une alternative: une société sans exploitation donc sans état et sans patronat...

Il est donc très positif que ce mouvement contre la loi travail, du moins une très large partie, se cantonne à réclamer le retrait du projet de loi sans aucune négociation, tout comme ce fut le cas pour le CPE et le CIP, car il n'y a rien à négocier avec l'état et le patronat: l'état et le patronat sont le problème, la solution est de s'en débarasser.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede bajotierra le Sam 19 Mar 2016 17:54

Pierre- Joseph tu défends un point de vue très classique , celui de la gymnastique révolutionnaire, peu importe le flacon revendicatif pourvu que l'on ait l'ivresse révolutionnaire , le constat depuis des décennies est que nous sommes dans la nausée , et ce y compris avec les luttes CIP CPE Retraites , car au final nous n'avons cesser de reculer et de servir de strapontin a des fumiers , et frigouret dans son constat provocateur est plus proche de la réalité que nous le sommes .


C'est pourquoi je suis d'accord avec la conclusion que fait julius

"Dans de telles conditions, à supposer même que celui-ci fasse des concessions sur tel ou tel article de la loi Travail, il n’y aura pas de victoire, pas même partielle. Car l’essentiel, c’est que les premiers concernés entament la rupture avec ce qui les écrasent, y compris avec leurs propres illusions sur l’Etat et sur le travail, l’autre nom du capital . Jusqu’à preuve du contraire, ils en sont, dans leur grande majorité, bien loin.
"


Cette conclusion indique quel doit être le rôle des révolutionnaires, celui de détruire ces illusions sur l'Etat et le Capital , et de ce que j'en lis eux aussi "ils en sont, dans leur grande majorité, bien loin"
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Sam 19 Mar 2016 21:42

Je suis d'accord sur le constat: on a échoué. Depuis des décennies et même plus longtemps...
Mais une nouvelle génération arrive, avec l'enthousiasme qui est propre à la jeunesse.
Je dis que c'est contre-productif de saboter cet enthousiasme.
Peut-être qu'ils échoueront aussi, comme nous avons échoué, et que des salopards en profiteront mais peut-être pas.
Même si on y croit plus, on devrait quand même garder comme ligne de conduite de ne pas saboter l'enthousiasme de la jeunesse.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede alteractiviste le Sam 19 Mar 2016 23:14

Bonsoir,

Je fais moi-même partie de cette jeunesse en lutte contre le projet de loi travail. Mais ce qui se dit dans beaucoup d'AG auxquelles je particippe, c'est qu'au-delà de ce projet, c'est justement cette société inégalitaire ce recul de nos liberts et cette violence banalisée du système qui est dénoncée, et très sincèrement je suis agréablement surprise de constater que pour une partie en tous cas, il y a une vrai réflexion qui est mise en place alors je me permet d'être optimisme et de croire que ça peut redonner un souffle à une jeunesse révolutionnaire parce que cette révolte qui gronde je l'entends de plus en plus. Alors j'aurais peut-être tort mais j'ai bien envie d'y croire le fait que nous ne nous sommes pas écoutés fait qu'une partie d'entre nous remmettent en cause le principe d'état ça je le constate bien dans certains de mes échanges avec mes camarades. En claire, même si je suis consciente que tout reste à faire c'est sur une bonne voie et tout mouvement de liberté reste bon à prendre enfin ce n'est que mon avis de l'intérieur...
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede leNouveau le Dim 20 Mar 2016 09:13

Je pense que la lutte contre la Loi Travail est positive; elle permet la prise de conscience de la force collective,
favorise les échanges et discussions politiques, la création de réseaux de militants ...

Notre rôle en tant que libertaires est justement de ne pas laisser ces énergies être récupérées par le Spectacle,
prôner nos pratiques de démocratie directe, mandats impératifs, rotation des tâches au sein des collectifs de lutte.

Un mouvement d'une telle ampleur est une opportunité rare pour nous de toucher un grand nombre de personnes.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede bajotierra le Dim 20 Mar 2016 12:14

Salut ,

En partant du point de vue que cette lutte est positive et qu'il ne faut pas saboter l'enthousiasme , la question qui se pose est de quel moyens elle dispose pour qu'elle puisse continuer a se développer dans toute l'ampleur qu'évoque alteractiviste ?

Par exemple la direction générale du mouvement est celle du "retrait de la loi"

-Une fois ce retrait obtenu de quels moyens dispose la nouvelle génération en lutte pour poursuivre son action "victorieuse " ?

-Et si ce retrait n'est pas obtenu , a partir du 31 Mars quel sera rapport de force ? Surtout quel sera le niveau de combativité des salariés ? En quoi pouvons renforcer cette combativité ?

Voilà des questions dont l'absence de réponses ne me rend pas optimiste .

-LeNouveau tu avances des moyens concrets et des perspectives classiques a ces mouvements , mais j'entends ça au mot prés depuis 1995, mais ceux ci ont-ils jamais empêché la fabrique de cocus du gauchisme de tourner a fond ?
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Dim 20 Mar 2016 13:03

Je suis d'accord qu'il n'existe pas actuellement une force capable de poursuivre le mouvement au-delà du retrait de la loi, c'est à dire une force capable de construire une société sans exploitation, ou du moins d'entamer ce processus.
Mais c'est justement parce qu'elle n'existe pas qu'il faut la créer!
Et ce genre de mouvement peut en être l'occasion, comme il peut tout aussi bien ne pas l'être, certes...
Mais, à moins d'avoir une meilleure idée, je ne comprends pas l'intérêt de condamner d'avance une opportunité.
On peut toujours essayer ou, en tout cas, ne pas décourager ceux qui en ont envie: c'est, je le répète, le minimum.
Ensuite, le niveau de combativité des salariés ne me parait pas être une priorité. Le salariat a été dynamité par le développement de la précarité et du chômage. Les nouveaux pauvres aujourd'hui peuvent aussi bien être agriculteurs que professeurs.
Enfin, je ne pense pas que "toucher un grand nombre de personnes" soit une perspective intéressante. Ce qui est intéressant, c'est d'essayer de mesurer ce que les gens veulent et jusqu'où ils sont prêts à aller pour l'obtenir.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Dim 20 Mar 2016 15:02

La méthode anarchiste pour aborder la question du code du travail est bien entendu de ne lui reconnaître aucune légitimité ni pour l' ancien ni pour le nouveau. Et ce n' est pas non plus l'occasion de profiter des troubles pour essayer d' établir un quelconque régime communiste.
Le patron et les salariés devraient gérer leurs relations en toutes indépendance, sans recours aux lois, reglementations, codes étatique. Le patron a pris la responsabilité d' introduire dans son entreprise des collaborateurs salariés il doit donc assumer cette responsabilité j'usqu'au bout c'est a dire sans recours au préfet, aux gendarmes ni aux tribunaux .
Si vous avez la naïveté de croire que c'est l'état nounou qui va régler vos problème je vous laisse a vos illusions.
Les ouvriers ne doivent compter que sur leurs propres forces, forces qui sont réduit a peau de chagrin depuis qu' ils ont consenti à confier leurs affaires aux politiques.
Quand un patron salopard sera sans recours étatique pour protéger sa malveillance et qu'il devra assumer personellement la colère des salariés il réfléchira et apprendra la conséquence de ses actes.
8-)
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Dim 20 Mar 2016 20:05

Si une révolution devait avoir lieu, c'est à dire si une force émergeait et était capable de renverser la force étatique, alors aucun patron ne serait en mesure de défendre sa propriété contre cette force. Il n'y aurait alors plus de patrons.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Dim 20 Mar 2016 21:31

Et bien ça dépend des valeurs portées par la force révolutionnaire .
Et ces valeurs on les trouvent très couramment dans une large partie de la population dégoutée des pratiques du personnel politique et syndical , outrée de se voir taxée à tous les coins de rue, tout à fait consciente de l'immense et ruineux danger de la folie militariste des Etats mais pas du tout prête à assassiner son boulanger . C'est facile l' anarchie devrait être l'idéal politique des gens raisonables .
8-)
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede leNouveau le Lun 21 Mar 2016 11:08

"je suis pour le retrait du projet de Loi, point" dixit un responsable
JC local au cours d'une AG vérouillée par les syndicats officiels,
pendant la lutte contre le CPE - la voix de son maitre, Maurice
"il faut savoir arrêter une grêve" Thorez - en réponse à une question
sur les perspectives du mouvement, et si nous, libertaires, ne venons
pas saboter la "machine à fabriquer des cocus du gauchisme" celle-ci
pourra en effet tourner à plein régime.

Le Code du Travail a été arraché au législateur par la lutte des travailleurs,
à une époque où l'on envoyait des gamins de 13 ans travailler dans les mines,
les ouvriers travaillaient 12 à 18h par jour, 6 jours sur 7, et le gouvernement
envoyait la troupe pour réprimer les mouvements sociaux.

Il n'est pas question ici de faire du Code du Travail un objet sacré,
ni de comploter pour la Révolution Communiste,
mais d'une part d'obtenir des améliorations immédiates de nos conditions de vie,
et d'autre part faire émerger une force collective, indépendante des partis
politiques et syndicats enfermés dans le carcan du Système, qui puisse
imaginer des formes nouvelles de vie en société.

De nombreuses initiatives d'activités alternatives (ZAD, coopératives, ateliers
participatifs ...) montrent que certaines graines n'ont pas été semées sur des terrains
stériles. Ces activités peuvent être perçues comme les prémices ou les laboratoires
d'une société nouvelle, le fait de remporter une victoire par la lutte collective,
alors que le combat semble en faveur de l'adversaire, peut servir de révélateur
de la possibilité d'un monde nouveau.

Il faudra, au moment de cette victoire ponctuelle, être présent pour empécher
les professionnels de la politique de fanfaronner dans les médias et brider
les énergies créatrices engendrées par la lutte.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Lun 21 Mar 2016 12:08

Mais observons le cas de la coopérative intégrale catalane par exemple. Nous voyons des gens des gens qui prétendent définir par eux même ce que doit être leur conditions de travail et nous voyons encore que leur principal obstacle à la réalisation sereine de leur projet est le même organisme politico administratif dont tu prétends qu'il serait le gardien des conquêtes ouvrières.
Tu parles de l'histoire des luttes sociales mais justement avant quˋelles ne soient entraînées sur le terrain politique le projet des organisations ouvrières était bien de créer un vaste réseaux de coopératives de production , de consomation et des autres aspects , culturels par exemple, de la vie, et maintenant que tout le monde est bien démobilisé par la prise en charge étatique de la question sociale, que le flicage , contrôle, réglementation , taxation du travail est poussée si loin qu' il dégoûte de toute initiative je trouve qu'il est de très mauvais ton de brandir le drapeau des conquêtes sociales.
8-)
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Lun 21 Mar 2016 14:03

Le code du travail n'a pas été conçu par les travailleurs mais par le gouvernement. C'est donc une tromperie que de le présenter comme un trophée "arraché" par la lutte des travailleurs, c'est plutôt un os qui leur a été jeté et avec lequel gouvernements et patrons se plaisent énormément à jouer.
La première proposition de loi sur la codification du travail date de 1896, une époque où la misère sociale était plus grande qu'aujourd'hui, c'est vrai, et les travailleurs plus combatifs.
Il faut tout de même rappeler que, si les conditions sociales des travailleurs sont peut-être meilleures aujourd'hui, dans l'ensemble, qu'elles ne l'étaient hier, les inégalités, elles, n'ont jamais été aussi grandes qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Il faut rappeler aussi que le progrès technique a joué un rôle important, peut-être même plus important que tous les combats syndicaux et politiques dans l'amélioration de ces conditions de travail.
Aujourd'hui, les conditions de travail sont très disparates et, pour certains, elles ne se sont pas améliorées.
S'il n'y a plus de gamins de 13 ans dans les mines, c'est parce que les mines ont fermé. D'ailleurs, là où il y a encore des mines, il y a encore des gamins qui y descendent.
S'il n'y a plus de gamins dans les usines, c'est parce que la technologie a évolué et que les patrons n'ont plus besoin de gamins mais d'une main d'œuvre qualifiée. Ils préfèrent donc confier le gardiennage des enfants à une école dont ils écrivent les programmes afin de s'assurer la disponibilité de cette main d'œuvre qualifiée gratuitement et en abondance.
Les améliorations immédiates, c'est bien pour ceux qui ont attrapé l'os et qui le rogne sans le lâcher, mais pour les autres?
En tout cas, elles ne sont pas bonnes pour faire émerger une force collective car elles créent la division entre ceux qui s'en satisfont et ceux qui n'ont rien eu, les cocus. Cette division est d'ailleurs le rôle principal de ces "améliorations".
Je répète qu'il n'y a rien à négocier avec l'état et le patronat. L'état et le patronat sont le problème, la solution est de s'en débarrasser et non de leur quémander des os ou même du caviar.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Mar 22 Mar 2016 08:00

Pierre-Joseph a écrit:Si une révolution devait avoir lieu, c'est à dire si une force émergeait et était capable de renverser la force étatique, alors aucun patron ne serait en mesure de défendre sa propriété contre cette force. Il n'y aurait alors plus de patrons.


Les communards n'ont pas interdit les libertés économiques.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Mar 22 Mar 2016 08:53

Mais qu'est-ce que les libertés économiques? Est-ce la propriété et donc liberté pour quelques uns de voler les plus faibles ou bien le contraire, c'est à dire la liberté pour tous de travailler et d'échanger le produit de son travail sans voler ni se faire voler?
Dans le premier cas, les communards sont ses ennemis, l'état et le capital ses défenseurs. Dans le second cas, c'est l'inverse.

La liberté pour quelques uns est une idée fausse de la liberté, il faudrait dire plutôt: le privilège. La liberté n'est pas le privilège, elle est donc toujours la liberté pour tous. La propriété n'est donc pas compatible avec la liberté.

Donc pour répondre à ta question, les communards ont été les vrais défenseurs des vraies libertés économiques. L'état et le capital les combattent et en défendent une fausse idée : le privilège de propriété.
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede frigouret le Mar 22 Mar 2016 10:13

Hummm je ne suis pas historien mais il me semble que les communards n'avaient pas pour projet l'abolition de la propriété.

Ce n'est pas parce que je suis propriétaire de mon tour de potier que je prive qui que ce soi de quoi que ce soi.

Tu parles des faibles, il faut distinguer.


Soit cette faiblesse est institutionnelle, par exemple au temps de la commune les ouvriers étaient interdits de coalition et la parole du patron était prévalante en justice.

Ou bien tu parles de l'individu prédateur , celui qui ne considère pas son prochain en frère. Mais ce type d'individu se rencontre partout et dans toutes les couches sociales.

Dans le cas de la faiblesse institutionnelle l'effort anarchiste sera celui du négateur d'autorité car l' autorité est la seule source de ce type de faiblesse.

Dans le cas des individus prédateurs l' effort anarchiste sera du type éducationniste. " Fais constamment aux autres ce que tu voudrais que l'on te fasse" c'est bien l'axiome mutuellisme tel que l'a définit Pierre Joseph, non ?
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Re: Etatisme et code du Travail

Messagede Pierre-Joseph le Mar 22 Mar 2016 22:14

Là, je crois que tu confonds avec la bible.
Tu peux faire constamment aux autres ce que tu voudrais qu'on te fasse et te faire constamment dépouiller. On est alors très loin du mutuellisme et prôner ce genre de comportement, c'est faire le culte du sacrifice...
Je rappelle qu'on est dans un système très inégalitaire, dans lequel tout le monde ne dispose pas des mêmes ressources. Les faibles sont simplement ceux à qui on a tout pris.
Pierre-Joseph
 
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