L’obscénité religieuse

L’obscénité religieuse

Messagede vroum le Mar 24 Fév 2015 10:18

L’obscénité religieuse

première partie : http://www.monde-libertaire.fr/atheisme/17520-lobscenite-religieuse-partie-1/2
deuxième partie : http://www.monde-libertaire.fr/atheisme/17545-lobscenite-religieuse-2/2

L’obscénité est ce qui blesse ouvertement la pudeur, le bon goût, d’après Wikipédia, dans une définition qui en vaut une autre.

Quand nous évoquons l’obscénité, nous aurions aussi pu prendre les termes « totalitaire », ou encore « omniprésence oppressive ». Car, s’il est un fait inquiétant, c’est celui de la re-banalisation du fait religieux dans nos sociétés, et encore plus inquiétant la marginalisation de plus en plus forte de la contestation de ce fait religieux. L’athéisme n’est toléré que comme une option de pensée et non plus comme un universel à développer. La propagande athéiste ou, mieux, antithéiste est devenue un phénomène dérangeant y compris dans les milieux libertaires. Encore est-il toléré une critique des cléricalismes… mais du fait religieux lui-même… on peut même entendre ou lire des propos confusionnistes chez les anarchistes dénonçant l’islamophobie !

La première partie de notre propos est celle du visuel et de la symbolique. Dénoncer la présence religieuse et d’un soi-disant domaine du sacré, de l’intouchable ou encore du « respectable ». Ce visuel, qu’il s’agisse de bâtis, de décorations diverses, de vêtements, affirme une supériorité et une vérité.

La seconde partie est celle de la croyance exprimée sur la place publique, dans le monde du travail, dans les sphères humaines diverses. Ces affirmations expriment, non pas seulement une opinion, mais une opinion qui se prétend supérieure, une vérité où l’intolérant est celui qui refuse l’affirmation de cette liberté.

Sans vouloir défendre le bouddhisme, qui en termes de soutien du patriarcat, d’homophobie n’a rien à envier aux autres, ni l’hindouisme, au nom duquel la pire réaction se (re)développe en Inde, notre propos va se restreindre à ce qui nous est le plus familier, le monothéisme…

Petit rappel des origines de « notre » religion
Le monothéisme est par définition exclusif. Il ne tolère les autres pensées que sous la contrainte. Ainsi, le monothéisme, divisé en apparence, est avant tout unique même si sa genèse est multiple. Le monothéisme le plus important (car nous pourrions discuter de diverses formes religieuses iraniennes) est comme un arbre, des racines diverses, un tronc commun, des branches principales et de multiples branches secondaires. Nous connaissons une triple origine au monothéisme. Et l’histoire a son importance : un prémonothéisme diffus égyptien, perse, le monothéisme juif, et l’intolérance platonicienne qui va produire le mouvement néo-platonicien. Ces trois sources s’entremêlent, construisent un monothéisme prémédiéval et produisent par cascade les trois monothéismes actuels : christianisme, judaïsme talmudique et islam, eux-mêmes se subdivisant comme on le sait en de multiples sectes plus ou moins nombreuses. Les catholiques et les sunnites étaient les plus grosses branches en valeur absolue. Chacune de ses branches renfermant aujourd’hui des dizaines de variétés… Mais si on perçoit la multiplicité de ce monothéisme, on connaît moins le foisonnement de sa construction.

La construction du christianisme, le plus exclusif des trois, s’est effectuée sur deux siècles, et n’est que l’affirmation d’une des nombreuses sectes judéo-chrétiennes qui pullulaient dans l’empire romain, elles-mêmes filles et sœurs des nombreuses sectes juives.

Une partie de ces sectes, et surtout celles qui vont donner le christianisme dominant, se font connaître, car elles sont violentes et intolérantes.

Les Romains, quelle que soit leur classe sociale, sont essentiellement dans une religion du paraître. À part la superstition certes très forte, nous ne sommes pas certain d’une croyance très profonde au sens mystique du terme.

Le système est le suivant : plus de dieux il y a, du moment que l’empereur est respecté (à travers des sacrifices), mieux cela est pour l’empire. Même si, régulièrement, à cause de leurs intolérances, certaines religions orientales sont interdites ponctuellement.

Rappelons par ailleurs que le niveau d’alphabétisation est assez important, et pas seulement au sein de l’élite. Le scepticisme est assez poussé, du moins dans la classe dominante, au Ier et IIe siècle, mais également au sein du peuple.

Ce qui va changer, c’est la montée de l’intolérance au IIIe siècle avec la dispersion, et la diffusion des cultes orientaux dans l’empire : dont les judaïsmes, qui sont très divers, très nombreux, et dont certains, vont petit à petit devenir des christianismes. Les chrétiens vont être des juifs qui se banalisent et renoncent à la circoncision. Mais n’imaginez pas qu’il y a le judaïsme tel que vous le connaissez puis le christianisme. Il y un judaïsme prétalmudique, car le judaïsme que nous connaissons ne se construit qu’en réaction à l’installation du christianisme que nous connaissons. Entre-emps, disons de la fin du Ier siècle au milieu du IVe. Les judaïsmes attirent de nombreuses personnes, à tel point que Rome cherche à interdire à plusieurs reprises la circoncision, jugée comme une mutilation insupportable et surtout qui leur paraît totalement irrationnelle, proche de la maladie mentale. Il y a toutes les sectes possibles et imaginables judéo-chrétiennes, ceux qui sont non circoncis, ceux qui font de la sexualité de groupe en mangeant des fœtus pilés, ceux qui par horreur des femmes (Satan) et du sexe se le sectionnent comme Origène, ceux qui croient que le Messie va venir, ceux qui pensent qu’il est venu mais comme esprit, et enfin toutes les variantes qui apparaissent au IIIe siècle comme quoi le Messie serait venu, sous forme humaine. Se crée alors une véritable rupture, entre ce qui va devenir le judaïsme (Messie à venir) et ce qui va devenir le christianisme (Messie venu sous forme humaine).

L’approche humaine du Christ (Messie) consiste à adopter une religion qui puisse être acceptée par le peuple, qui ne soit pas trop intellectuelle. Car le christianisme c’est aussi le croisement de la pensée immanente de Platon avec le judaïsme dénationalisé. Le christianisme qui se développe surtout dans l’actuelle Turquie, Syrie, Tunisie et sud de l’Espagne est, on l’oublie trop souvent, une religion orientale (grecque et palestinienne).

La version philosophique, que l’on trouvera à l’extrême dans le néoplatonisme (Plotin, Jamblique, associé à la Gnose), convient à l’élite et non à la base. Le christianisme pour s’imposer dans les classes populaires a besoin de recouvrer les oripeaux du paganisme, légendes, mystères, superstition, saints. La nouvelle religion se contorsionne en adoptant tout ce qu’elle combat officiellement…

Finalement, c’est le politique, avec la personne de Constantin, qui en fait introduit la dictature chrétienne que l’on connaît avec l’édit de Tolérance de 312. Celui-ci, d’entrée, reconnaît l’ensemble des religions, mais met le christianisme légèrement en surplomb des autres…

De ce moment et jusqu’en 529 s’enchaînent les mesures mettant en place un système totalitaire.

Le premier concile de Nicée (325), sous la conduite de Constantin, détermine la construction d’un christianisme officiel, l’invention à posteriori du personnage de Jésus, sa vie (c’est comme si, vers 2300, on écrivait que le Père Noël était né en 1925 et était mort en 1975).

342 : interdiction de l’homosexualité. Réitérées en 392 sous Théodose…

Tout au long du IVe siècle il y a des lois interdisant la liberté religieuse, les sacrifices, avec finalement l’interdiction du paganisme en 392. On interdit aux femmes de manger avec les hommes. Le sexe avec d’autres que leur époux vaut condamnation à mort. Les dates se succèdent au Ve siècle pour renforcer la pratique et les manifestations païennes, et finalement la date de 529 marque la fin de la liberté de conscience où il est interdit de penser en dehors du catholicisme. Cette date c’est aussi la fermeture de la dernière école de philosophie à Athènes.

En moins de deux siècles, l’interdiction des cultes publics laisse place à toute pratique privée et finalement à toute pensée dissidente.

La pensée antichrétienne est souvent porteuse d’intolérance, contaminée par celle-ci. Ainsi, le héraut du paganisme, Julien dit l’apostat, voudra construire un contre-clergé sur le même modèle celui qu’il combat. Néoplatonicien, il est porteur d’une vision monothéiste également. Il est trop tard. L’intolérance a gagné comme forme de pensée ! Une des formes les plus déjudaïsées et épurées du christianisme, à l’instar du marcionisme, va se perdre au VIe siècle dans les sables de la Syrie… pour voir apparaître quelques décennies plus tard, comme par hasard, l’islam. Cet islam qui bien sûr se cristallise avec sa figure emblématique de Mahomet, qui en est et l’équivalent d’un hypothétique Jésus et l’égal de Constantin. Mahomet cumule les mystères, l’irrationnel (entendre des voix dans une grotte et par miracle faire écrire un analphabète) et l’homme politique.

La fulgurance du développement de l’islam ne tient pas seulement dans les méthodes de guerre des cavaliers arabes, mais aussi et surtout dans sa (très) relative tolérance à côté de celle du christianisme. Les convertis et abrutis de force notamment dans ce qui était l’Empire romain d’Orient se jettent dans les bras de ce qui permet (en toute relativité) de respirer, de penser.

Néanmoins en Orient, l’islam, lui aussi, continuera à persécuter les païens jusqu’au Xe siècle, tout comme les chrétiens au nord (Saxon, Estoniens…).

Ce qui est certain, c’est que la société sous l’empire romain païen était très violente. Il ne s’agit pas de le nier, mais le christianisme ne s’inscrit pas en positif par rapport à l’ancienne société. Il a inventé sa propre histoire depuis. Il impose un ordre moral, mais surtout ne change rien, voir aggrave les différents rapports de domination. Et surtout l’effacement (au sens littérale, palimpseste) et la destruction de tout ce qui n’allait pas dans le sens de la nouvelle religion nous privent de l’histoire et savamment les historiens chrétiens se sont construit le beau rôle. Notons que leur acharnement à détruire le paganisme, en miroir, nous permet d’avoir des traces de ce qu’ils ont détruit. À titre d’exemple, nous n’avons aucun ouvrage de Celse (défenseur de la culture gréco-romaine contre le christianisme au IIe siècle), mais nous avons le Contre Celse d’Origène, ouvrage qui reprend ce qu’il veut combattre.

Le christianisme a fait reculer le savoir, l’alphabétisation, éclater les cadres de la connaissance, rendu la terre plate et fait brûler tous les livres dits de magie lors des autodafés. En fait c’étaient des livres scientifiques que les gens mettaient eux-mêmes au feu (autodafé) pour montrer, de peur, qu’ils n’étaient plus dans l’erreur. Les clichés sur le christianisme protecteur des faibles sont à combattre, celui-ci n’a jamais fait disparaître l’esclavage, n’a pas protégé les femmes. Quant à son prétendu antiétatisme défendu par Jacques Ellul, dans Anarchisme et christianisme, est une absurdité, puisque l’Église construit un cadre qui va devenir l’état. Le christianisme, ce sont de l’Égypte à la Bretagne (Angleterre) des bandes de moines imposant la nouvelle religion à coups de bâton et le résultat est, une montée de l’irrationnel si forte, un tel refus de la raison, que plus personne ne sait lire et écrire, en Occident au VIIe siècle et qu’en Orient (Byzance) à la même époque on nage en plein délire dogmatique. L’absurdité des musulmans sur le refus des représentations a eu son pendant au début du VIIIe et au IXe siècle à Byzance, avec les différents iconoclasmes.

Le christianisme mais aussi l’islam se veulent des religions nouvelles, intellectuelles, qui font table rase du passé, épuré, mais pour s’affirmer elles vont devenir le pouvoir politique et surtout elles vont devenir des religions du paraître et s’accaparer les innombrables lieux du paganisme. Une religion va remplacer toutes les autres. Chaque pierre sacrée, chaque source magique, chaque temple va être dans quelques cas emblématiques rasés, mais le plus souvent christianisé… (puis islamisé). Le peuple allait honorer un dieu gaulois sur une colline à Puyblein (mont Bélénos) ? Il ira se recueillir au même endroit sur quelques ossements d’un saint… Impossible de les détruire, les menaces de mort ne suffisent pas à détourner les gens des habitudes de leurs (anciennes) croyances, on repeint la façade au couleur du monothéisme. L’Occident et l’Orient se recouvrent entièrement d’une symbolique chrétienne (et/ou/puis musulmane) pour des siècles et des siècles… J’ai mis « anciennes » entre parenthèses, car dans de nombreux endroits on fait semblant d’être chrétiens, et ce pendant des siècles et des siècles (au début du XXe siècle, il restait encore cette duplicité salutaire de célébrer en secret les anciens dieux et d’avoir une apparence de chrétiens. À tel point qu’en cas de crise politique dans telle ou telle région celui-ci peut être amené à disparaître, et qu’il faille des campagnes militaires pour le réinstaller (plaine de la Bekaa au Liban, Bretagne française…). La chute de la pratique religieuse, une fois qu’elle n’est plus obligatoire au moment de la Révolution française, dans certaines régions, montre par contraste la contrainte religieuse.

Cet écrasement de la diversité culturelle et cultuelle des millénaires précédents est aujourd’hui défendu comme héritage « naturel » par l’église et nombre de politiques européens. Nous n’avons aucune envie de revoir les dieux païens célébrés, mais il est bon de casser le mensonge d’un christianisme persécuté et qui s’est construit tout seul, par adhésion des masses heureuses… Les persécutions sont largement une invention, sont exagérément grandies, et surtout il est nié qu’elles font suite aux violences de judéo-chrétiens, qui détruisent des temples, tuent des gens pour les convertir de force, et ce dès leur apparition au début du IIe siècle. Les chrétiens entre eux vont se massacrer énormément plus au cours du IVe siècle, qu’ils ne l’ont été au IIIe dans les prétendues persécutions.

Pour mettre en place le christianisme, il a fallu la loi, la coercition sociale, une minorité imposait dans des quartiers de villes leur religion, harcelait celles et ceux qui ne se convertissaient pas, la diffusion des idées, des livres, la lutte contre les livres différents, la violence, par bandes de fanatiques et enfin la prise du contrôle politique, par le haut et le bas (l’empire, mais les villes, les régions) et bien sûr si c’était nécessaire l’armée.

Un paysage à reprendre aujourd’hui…
On dénombre par exemple en France quelque 100 000 édifices religieux, nous devrions écrire édifices catholiques car les temples, mosquées et autres églises sont très très minoritaires… Pour beaucoup cela passe inaperçu et pourtant c’est le symbole à chaque fois d’un universel totalitaire. Catholique signifie universel ! Le problème n’est pas la forme, la couleur des édifices, des calvaires, mais ce qu’ils disent : notre monothéisme est la vérité ! Les autres sont dans l’erreur. Les Vandales de l’an II ont détruit ce qui est également des œuvres d’art, mais ils ont posé de manière forte la nécessaire déchristianisation du paysage commun. Il y a le message du monothéisme ne laissant pas de place à d’autres modes de pensée, mais il y a aussi la vision de cette sempiternelle souffrance d’un homme sur la croix. Il eût été plus original que les Romains pratiquent plus le pal, la roue, l’écartèlement, plutôt que les fauves ou la croix (le paysage eut été plus varié)… Le poisson, symbole des premiers chrétiens, aurait pu perdurer, les enfants d’une centaine de générations auraient été moins effrayés. Au regard de l’histoire de l’humanité l’absurdité monothéiste est source des pires maux. Quant à celles et ceux qui soulignent, qu’il y a eu des choses majeures et belles sous la domination chrétienne ou musulmane. Nous rétorquons que, comme un poisson dans l’eau, un mammifère dans l’oxygène, le christianisme (ou l’islam) médiéval et moderne était l’alpha et l’oméga de toutes choses et que tout ce qui s’y faisait ne pouvait s’y faire qu’en son nom. Bien ou mal. Le problème de la déchristianisation du paysage est à poser par nous libertaires. En effet, c’est toute l’infrastructure du christianisme qui reste présente, prête à le supporter de nouveau. Pourtant les citoyens sont les propriétaires des églises, et nous pourrions décider collectivement d’une décoration plus gaie et de diverses utilisations… Quant aux calvaires, ils sont problématiques. Notre farouche attachement à la liberté d’expression nous fait dire qu’il ne faut pas combattre les calvaires en les supprimant, mais en se donnant le droit de conquérir une contre-expression dans l’espace public. Les Femen se sont fait mal voir, car dénudées dans des lieux dits de cultes, mais la France est recouverte de morceaux de bois de plusieurs mètres de haut, avec un homme habillé d’une simple petite serviette autour de la taille et qui semble souffrir de froid !

Les monothéistes ont un problème récurrent avec le sexe, et surtout le corps des femmes. Soyons imaginatifs et développons de la symbolique qui nous soit propre, sur le mode « ils y ont droit, nous aussi » !

Ils reviennent, et accompagnés !
La religiosité s’affirme de nouveau et la déferlante de haine des anti-mariage pour tous a montré, s’il en était encore besoin, qu’il reste un socle catholique très organisé, très réactionnaire et qui sait s’acoquiner avec des païens nazillons, des juifs orthodoxes et des musulmans conservateurs… Et leur problème est bien celui, intrinsèque à la pensée religieuse monothéiste, non pas de défendre leur propre droit de s’agenouiller mais de lutter contre les droits des autres. Et tous ces islamo-catholiques osent brandir la protection des enfants comme prétexte de leur croisade ! Eux qui endoctrinent leurs enfants, les emmènent dans leurs temples de la haine et de l’irraison ! Paraphrasons Bakounine : les enfants n’appartiennent ni à leurs parents ni à l’État, mais à leur propre futur ! Il n’est pas possible de nos jours d’accepter que des enfants soient encore baptisés, circoncis, endoctrinés.

Si nous avons écrit « islamo-catholiques », ce n’est pas un hasard ! Si « catholique » signifie « universel », « islam » veut dire « soumission » : il s’agit bien avec ces gens-là d’un projet de soumission universelle !

Si une droite et l’extrême droite se focalisent sur l’islam avec excès, comme si les musulmans étaient les seuls tenants du danger religieux, a contrario, une gauche et l’extrême gauche n’osent pas critiquer l’islam en tant que tel… Il y aurait des bons musulmans à protéger contre les méchants terroristes.

La percée des différentes facettes de l’islam politique fait que les extrémistes cachent des encore plus extrémistes qui, en définitive, font passer des salafistes non violents (la plupart des salafistes sont non violents) pour des gens à aider et des musulmans conservateurs pour des alliés des anarchistes ! Bien évidemment, et heureusement, la majorité des croyants, quelle qu’elle soit, n’a pas une approche intolérante de la foi, mais, comme toutes les majorités, elle est travaillée par ses propres minorités agissantes qui l’influencent, par des activistes qui font progresser telle ou telle valeur. Mais le recul réactionnaire actuel fait que les majorités religieuses, y compris en France, vont mettre en avant le refus de l’insulte à leur religion, ce qu’elles n’auraient pas fait il y a vingt ans. Or cette notion d’insulte est comme un thermomètre, et les extrémistes font baisser le seuil d’intolérance à la critique. Est-il encore permis de critiquer la religion elle-même, de la moquer, sans avoir peur de passer pour un raciste ? Comme si musulman, c’était une race ou une ethnie ! Est-il possible de dire que l’islam comme le judaïsme et le christianisme sont des idéologies à combattre, que ces monceaux de déraison nous font peur ? Que nous sommes et resterons religiophobes !
Sous couvert du mot « tolérance », il nous faudrait accepter de voir l’espace public de nouveau soumis au fait religieux, sans le critiquer. Nous ne demandons surtout pas à l’État l’interdiction de quoi que ce soit, mais nous réaffirmons notre droit à critiquer la pensée religieuse ! Donc si, bien sûr, dans l’espace collectif, nous défendons le droit de chacun à s’habiller et à se déshabiller comme il le souhaite, nous devons aussi affirmer notre droit à se moquer et à critiquer la symbolique qu’expriment les crucifix autour du cou, les voiles, les perruques, les barbes, les chapeaux et autres kippas. Car, après tout, nous sommes choqués que des gens expriment des opinions racistes ou homophobes à travers des tracts. La symbolique vestimentaire relève de la même chose. Peut-on encore dire à voix haute qu’un crucifix signifie que la personne pense que les homosexuels doivent brûler en enfer, qu’une femme a enfanté tout en restant vierge ? Qu’un voile ou une perruque signifie que la femme est inférieure, impure ?

Cette symbolique vestimentaire s’appuie sur des écrits, des preuves, nommés Coran, Bible, livres remplis d’horreurs. Si c’était nous qui écrivions le dixième de ce qui est contenu dans ces livres, sans s’appuyer sur la religion comme excuse, nous serions interdits de publication en France ! Antisémitisme, appel à la haine, au meurtre, homophobie, haine des femmes, incitation à la surprocréation, pédophilie… tout y est ! On change la couverture de la Bible ou du Coran, on met Oui-Oui va à la plage : roman pour enfants, et on est condamné au tribunal en raison du contenu.

L’atout des anarchistes, qui attaquent de front les trois religions monothéistes, est important : nous désarmons ainsi les critiques victimaires des uns et des autres. Il y a une quinzaine d’années, nous collions régulièrement des affiches contre les religions… Aujourd’hui, nous n’osons plus le faire, ou beaucoup moins. Et, de ce fait, les islamistes, les catholiques intégristes sont les fers de lance d’un renouveau du délit de blasphème. Et si la loi ne reconnaît pas encore le blasphème, ces fanatiques font chauffer les tribunaux sans cesse jusqu’à ce que chacun, en mettant en avant l’attaque spécifique contre sa religion, l’associe avec une discrimination. De facto, c’est l’ensemble des religions qu’ils protègent par ces luttes judiciaires. Eux sont solidaires face aux tribunaux, mariage pour tous, caricatures de Mahomet…

L’excuse des anarchistes contre la frilosité de certains d’entre nous à s’en prendre à la religion est qu’il y a des fronts qui seraient plus importants. Que la lutte des classes peut bien s’accommoder de compromis ! Si nous sommes une organisation spécifique, c’est justement pour lutter sur plusieurs fronts ! Il n’y a aucune contradiction à lutter contre l’islam et à ne pas laisser ce champ à une droite anti-islam car prochrétienne, et en même temps défendre des gens discriminés dans leur emploi parce que supposés musulmans ! Aucune contradiction à se battre nous-mêmes contre l’intrusion de la religion dans l’espace public, mais refuser de quémander à l’État de réguler cet espace public. Se battre pour la liberté d’expression, écrite, vestimentaire, cela implique de défendre notre droit de railler ces attitudes obscurantistes et médiévales : de critiquer ces expressions, sans retenues !

Il n’y a pas une religion des pauvres qui serait l’islam et une religion des riches qui serait le christianisme. La culpabilité d’une certaine gauche relativiste fondée sur le fait que l’islam serait la religion des immigrés est incompréhensible. Nombre de ces immigrés qui ont fui la hache des islamistes radicaux, notamment en Algérie, regardent ahuris les contorsions d’une certaine extrême gauche ! Les nouveaux adeptes, dits « convertis », n’ont rien d’immigrés, et les princes du Qatar ou d’ailleurs n’ont rien de pauvres ! D’un autre côté, les évangélistes chrétiens font des ravages dans les milieux populaires et nous pouvons penser aussi aux gens du voyage très touchés par ces nouvelles sectes. Les évangélistes ouvrent en France une église tous les dix jours.

Pour terminer sur ce point, s’il est une chose que nous devons marteler, c’est le refus de l’enfermement de la figure de l’Arabe dans l’islam ! Tout le monde joue ce jeu trouble, à commencer par les islamistes, mais également les médias, les éducateurs, les enseignants, les chefs d’entreprise, les collègues, les camarades de classe : tout Arabe en France est présupposé musulman ! La vraie discrimination est là ! Tu te nommes Rachida ou Rachid, on te demande si tu veux du jus d’orange plutôt que du vin, si tu manges du porc ou pas. À Jean-Claude ou à Marcelline, on ne demande pas cela. Nom à consonance arabe signifie « enfermement dans l’islamité », même si, athée et communiste, tu as failli te faire égorger au nom de ce même islam à Alger. Nos milieux ne sont pas exempts de cette attitude bienveillante (mais discriminatoire). Bienveillance qui est une forme de maltraitance.

La laïcité, isolée en Europe, est à défendre
La laïcité est quelque chose de propre à la France, même si nous en trouvons des variantes ailleurs. Cette laïcité est à défendre, et même à développer pour qu’elle ne soit pas une catho-laïcité qui laisse beau jeu aux musulmans et autres pour réclamer un équilibre des choses. Si les croyants sont aussi nombreux qu’ils le disent, qu’ils se cotisent pour construire leurs lieux d’abrutissement. À la limite pouvons-nous plaider qu’au regard des nombreuses églises vides nous pouvons en réquisitionner la grande majorité pour nous et ensuite répartir le reste à égalité entre les différentes clowneries monothéistes ! Les religieux ont toujours su convertir une église en mosquée et inversement !

Et l’entreprise, est-ce un lieu où devrait s’appliquer la laïcité ? Il nous est difficile de concevoir que la loi, l’État, mette des normes sur le lieu même de la lutte des classes qui divise les travailleurs. Nous, travailleurs et syndiqués, avons le droit de dire qu’en plus de l’exploitation salariale nous n’avons pas à subir l’affirmation de l’irrationnel au quotidien et qu’alors, si certains revendiquent des moments pour se mettre à genoux devant un dieu quelconque, eh bien revendiquons de monter sur les tables et de danser pour prier la disparition du capitalisme ou autre loufoquerie ! L’expression de l’absurdité religieuse, même avec douceur, est un droit qui doit accepter notre droit à l’expression de la dénonciation de la faiblesse intellectuelle… tant qu’on en a le droit !

Par contre, là où nous serons plus fermes, c’est dès qu’il s’agit d’enfants. N’en déplaise à la CGT qui, par exemple, sur l’affaire Baby-Lou, ose hurler à, je cite, « l’effacement des identités culturelles » et dénoncer « l’extension de la laïcité à l’entreprise ». Toute la manipulation est là : mettre le prosélytisme religieux (port du voile ou celui de crucifix géant) sur le plan d’une expression culturelle et non religieuse ! Eh oui, pour nous, il n’est pas choquant de vouloir interdire l’expression religieuse vestimentaire dans l’entreprise dès que des enfants vont être en contact avec des salariés. Notre rôle, militants anarchistes, c’est que les débilités chrétiennes soient traitées à égalité avec les âneries musulmanes et refuser l’instrumentalisation de l’islam pour faire du racisme anti-Arabe.

Mais allons plus loin. Lorsque nous faisons des formations pour les assistantes maternelles, et abordons ce sujet, en général le groupe pense que les parents doivent accepter des nounous musulmanes ou chrétiennes affirmées (qui portent le voile ou ont des icônes orthodoxes dans la maison). Si nous demandons : « Et si la nounou est témoin de Jéhovah ? », le groupe, en général, s’exprime en chœur pour hurler : « Ah non, c’est une secte ! il faut protéger l’enfant. »

Pour nous, anarchistes, la laïcité peut être utile, mais elle n’est jamais qu’un instrument pour aller plus loin et faire reculer le fait religieux dans la sphère privée des adultes.

Cet instrument est aussi celui sur lequel s’appuient les religions minoritaires pour se développer, car, à la différence d’autres pays, tous les cultes sont censés être à égalité en France. En Russie, les catholiques ou les musulmans ne sont pas appuyés par l’État à la différence de l’orthodoxie. En Algérie, il est devenu quasiment impossible de se convertir au christianisme. En Palestine-Cisjordanie, l’expression athéiste vaut prison et mauvais traitements (exemple : Waleed al-Huseini, réfugié en France)… Je ne vais pas lister le nombre de pays de l’Union européenne où la prière et l’instruction religieuse sont obligatoires à l’école, mais juste citer la Grèce ou, d’une manière plus alambiquée, la Finlande.

Avec le recul de la laïcité en Turquie (laïcité autoritaire et qui était une islamo-laïcité comme en France on a une catho-laïcité), la France se trouve sur la défensive avec son modèle face aux conceptions sécularistes anglo-saxonnes, face au recul du panarabisme laïc (et autoritaire) contre une islamisation plus ou moins de façade de toutes les composantes des sociétés arabes. Et au sein d’une Union européenne philo-religieuse, sécularisée en grande partie, mais où très souvent les religions et leurs ministres sont financés par l’argent des citoyens.
Cependant, il nous faut être sur un mode offensif. Pourquoi nous, anarchistes, libres-penseurs, n’avons-nous pas la force d’obtenir sur le service public de la télévision une émission sur l’athéisme ? Pourquoi n’avons-nous pas des libres-penseurs qui puissent intervenir dans les prisons, plutôt que de laisser les personnes enfermées subir, en plus de l’enfer de l’enfermement, celui des déblatérations des aumôniers et autres imams ! Pourquoi laissons-nous quasiment les seuls réseaux religieux visiter les malades dans les hôpitaux, les vieillards en fin de vie dans les Ehpad ? La République française ne subventionne ni ne reconnaît aucun culte, mais dans de nombreux lieux, c’est faux : les religieux font office de conseillers… et les athées ou pourquoi pas d’autres options philosophique ne sont pas présents !

Mais rappelons que la laïcité n’est qu’une étape, et que nous, anarchistes, nous combattons le fait religieux, y compris lorsqu’il est déiste, consumériste ou autre. Mais laisser tranquille une sphère sacrée, accepter qu’il y ait des choses qui ne se questionnent pas, qu’il y ait autre chose que la matière et l’énergie, c’est laisser le pouvoir s’incruster et se développer.

Cependant, nous savons bien, par goût de la liberté, qu’il nous est contraire, à part pour les enfants, de quémander à l’État d’interdire quoi que ce soit par la loi. Non seulement les modèles staliniens qui réprimaient par la loi les religions sont aux antipodes de nos valeurs et principes, mais en plus ils ont montré leur contre-performance. La chute du mur s’est faite au nom de la liberté portée par les pires réactionnaires. Au même moment où Jean-Paul II défendait la liberté en Pologne, il faisait assassiner les tenants de la théologie de la libération en Amérique du Sud !

Quelles concessions avec les croyants dans la lutte des classes ?
Tous les anarchistes n’ont pas la même approche. Il est certain que pour nous l’organisation spécifique est aussi un lieu de propagande athéiste et, redisons-le, antithéiste. Par contre, dans le cadre de luttes qui dépassent le cadre de l’organisation spécifique, la question peut se poser différemment. Les anarcho-syndicalistes, dont je suis, ne peuvent pas, par définition, organiser que des anarchistes. Mais dire cela ne répond pas entièrement à la question. Quel peut être notre degré d’acceptation du religieux au sein des mouvements sociaux, environnementaux, auxquels nous prenons part ? Il semble évident à nous tous que l’expression d’idées développées (racisme, xénophobie, étatisme) par le Front national est une limite que nous ne pouvons accepter. Il va en être de même avec des pratiques et idées staliniennes (même s’il en reste peu), autoritarisme, obéissance au parti.

Mais, au quotidien, dans ces mouvements, nous acceptons de travailler avec des gens qui se posent des questions sur, par exemple, la notion de frontière, qui défendent un État, d’autres qui vont prioriser la lutte environnementale avant toute autre lutte… Bref, nous faisons des compromis. La question du religieux n’est pas la plus simple à aborder sur cette notion de compromis. Que des croyants, semi-croyants, agnostiques, athées bipolaires soient présents dans les luttes sans que nous nous sentions obligés d’en partir, c’est évident ! Il s’agit de bon sens et aussi de relations humaines, je ne sais pas si nous aimerions vivre dans un monde rempli d’anarchistes !

Le problème n’est pas dans la liberté de penser, heureusement, mais dans l’expression d’idées problématiques pour ce qui nous semble émancipateur. Il apparaît à première vue que l’extension des règles de la laïcité au sein des mouvements pourrait être une solution. Mais nous connaissons les conséquences de la charte d’Amiens, où certains anarchistes, en voulant interdire la propagande des sectes philosophiques, se sont en fait interdits eux-mêmes toute propagande au sein de la CGT ! Nous devons nous battre pour que l’expression d’idées anti-émancipatrices – comme l’affichage de convictions religieuses monothéistes – ne soit pas possible au sein de ces mouvements. De même, si nous acceptons des étatistes, ils doivent se conformer à la démocratie directe de ces mouvements ! Nous refusons systématiquement l’établissement de règles autoritaires dans le fonctionnement, ou bien nous quittons ces mouvements. Avec l’expression religieuse, nous devons agir de la même façon.

Qu’une personne dise au détour d’une conversation qu’elle est chrétienne, c’est son droit, qu’on doive adapter notre calendrier de réunions aux horaires de la messe, c’est impensable. La présence de crucifix avec toute la symbolique que cela représente est également impensable. Après avoir dit cela, il y a la manière d’établir des règles, de le dire, et la très grande majorité des croyants que nous pouvons rencontrer sont des partisans de la laïcité, et, pour eux, la religion est une affaire privée.

Cornélius
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede l'étrangère le Mar 24 Fév 2015 18:51

vroum a écrit: La propagande athéiste ou, mieux, antithéiste est devenue un phénomène dérangeant y compris dans les milieux libertaires. e]

C'est peut être tout simplement par le fait que l'athéisme s'essouffle car il est un peu "court". C'est à dire qu'aujourd'hui, nous voyons bien qu'il y a quelque chose qui se passe autour de nous. La physique quantique moderne nous le montre assez bien. Il y a aujourd'hui de plus en plus de gens qui se questionnent sur la réalité de la vie avec discernement et recul.
La religion s'essouffle également, mais un souffle nouveau se fait sentir. La spiritualité prend tout son sens aujourd'hui devant toutes les absurdités de la vie.. De plus en plus de gens ont besoin de se responsabiliser de nouveau, de retrouver leur individualité , du mouvement.. (citoyens...), et de solidarité..
Les pensées rigides quelles qu'elles soient ne tiennent plus...
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede bajotierra le Mer 25 Fév 2015 11:32

salut ,


La religion s'essouffle également, mais un souffle nouveau se fait sentir. La spiritualité prend tout son sens aujourd'hui devant toutes les absurdités de la vie..


Le texte de cornelius dénonce parfaitement l'autoritarisme sanguinaire du fait religieux , et par conséquent son intolérance vis avis de toute quête spirituelle d'ordre individuel
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede l'étrangère le Mer 25 Fév 2015 11:55

bajotierra a écrit:salut ,


La religion s'essouffle également, mais un souffle nouveau se fait sentir. La spiritualité prend tout son sens aujourd'hui devant toutes les absurdités de la vie..


Le texte de cornelius dénonce parfaitement l'autoritarisme sanguinaire du fait religieux , et par conséquent son intolérance vis avis de toute quête spirituelle d'ordre individuel

Ca n'a aucun sens puisque les deux sont à l'opposé. Quel rapport entre spiritualité et une autorité sanguinaire.... je ne comprends pas.
Il faut savoir s'affranchir d'une pensée extérieure, d'autant plus quand elle est erronée..
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede bajotierra le Mer 25 Fév 2015 12:00

Ca n'a aucun sens puisque les deux sont à l'opposé


Je me suis mal fait comprendre , le fait religieux par son intolérance s'oppose a toute recherche spirituelle d'ordre individuel
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede bajotierra le Mer 25 Fév 2015 13:23

Un texte récent du collectif lieux communs évoque également la notion de vide spirituel comme explication mais l'oppose aussi a l'imposture de la religion
https://collectiflieuxcommuns.fr/783-de ... me-etablir


Renaissance d’un projet d’émancipation

Car une civilisation intègre d’autant plus les cultures étrangères qu’elle est elle-même forte, vivante et créative. De­puis un demi-siècle, l’Occident a perdu ce qui faisait sa force : non pas le déchaînement de la violence militaire ou économique mais l’activité permanente de peuples entiers luttant contre toutes les dominations. C’est ce vide patent qui rend possible le déferlement de l’islamisme sur son sol.

Ce vide spirituel n’a à proposer aux nouveaux-venus que l’hystérie consumériste, l’arrivisme décomplexé et la came­lote identitaire. Opposer à ce cynisme une religiosité agressive, c’est redoubler d’insignifiance : l’islam contemporain est à la spiritualité ce que la pornogra­phie est à l’amour ; une singerie mécanique et obscène, infiniment frustrante, qui exige des doses croissantes pour maintenir une satisfaction. Comme les totalitarismes de la IIIe Internationale stali­nienne et du IIIe Reich hitlérien, le totalitarisme né du troisième monothéisme met à l’épreuve le sens que nous don­nons à l’existence. Que celui-ci soit moribond ne fait aucun doute : il nous semble, à nous, que renouer avec ce que notre histoire a pu engendrer de plus précieux pour l’humanité entière est le premier réflexe à adopter.




Citons également ceci dans un commentaire
Enfin, vous semblez lier, dans la grande tradition réactionnaire, déchristianisation et perte de sens, comme si le fait de cesser de croire au Père Noël (pardon, à l’« esprit universel », pouf pouf) vidait l’existence humaine de toute signification
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede vroum le Jeu 12 Mar 2015 10:52

De la nécessité de combattre l’islam politique (1ère partie)

http://www.monde-libertaire.fr/atheisme/17601-de-la-necessite-de-combattre-lislam-politique-1ere-partie#

Les attentats de Paris dans les locaux de Charlie Hebdo, de Montrouge et de Vincennes ont entraîné une vague d’indignation non seulement en France, mais aussi dans beaucoup de pays du monde.

Des rassemblements spontanés se sont formés ici ou là pour se terminer par de grandes manifestations du 11 janvier 2015 partout en France, regroupant environ 4 millions de participants. Autant les rassemblements du 7 janvier, voyant jusqu’à 100 000 personnes en France dont 35 000 à Paris devaient être soutenus par leur caractère spontané, autant les manifestations du 11 janvier étaient récupérées par divers partis politiques et surtout l’État avec un cortège de chefs de gouvernements qui n’ont que faire de la liberté d’expression ou tout simplement des droits humains les plus élémentaires dans leurs propres pays.

Image

Les événements de Paris ont déjà fait couler beaucoup d’encre, plusieurs centaines d’heures de débats y ont été consacrées aussi bien dans les médias dominants qu’alternatifs. Il y en aura certainement beaucoup d’autres prochainement. Souvent, on veut savoir si les musulmans en général et celles et ceux de France en particulier peuvent vivre avec les autres en respectant certains principes comme la laïcité, le droit au blasphème, etc., qui ont d’ailleurs été conquis par de longues luttes séculaires ou pas. énormément de questions sont posées sur la nature de l’islam pour savoir s’il peut être réformé ou actualisé, peut-on avoir un islam des Lumières demandent les uns, qu’est-ce qui est « islamophobe » ou ne l’est pas, interpellent les autres.

Force est de constater que la question essentielle et primordiale n’est pas posée dans ces débats et échanges, bien que celles exprimées aient bien sûr leur place.

Les attentats de Paris, de Montrouge et de Vincennes ne sont pas seulement l’œuvre de trois délinquants musulmans qui se seraient radicalisés dans les prisons françaises ou qui aurait fait des voyages pour se former militairement dans des zones de conflits comme le Yémen. L’origine de ces actes doit être recherchée plus loin dans le temps (janvier 2015) et dans l’espace (prisons françaises et pays en conflits).

L’islam politique remonte à des périodes historiques très lointaines, jusqu’à la prophétie de Mahomet. Mais, dans cet article, nous nous limiterons à une époque beaucoup plus proche, qui a vu se former des États ouvertement islamiques, lesquels n’existaient pas auparavant.

L’islam politique et la formation des États islamiques contemporains sont surtout la résultante de contradictions importantes de deux superpuissances qui se battaient pendant de longues années pour contrôler le monde et mettre la main sur les richesses des pays que chacune avait sous son joug. Il s’agissait de l’Union soviétique et des États-Unis, sans oublier le rôle de leurs « alliés ». Les réalités historiques d’une quarantaine de dernières années montrent que l’islam politique s’est mis sur le devant de la scène internationale par deux coups d’État au Pakistan et en Afghanistan et une révolution essuyant un échec en Iran.

Nous sommes au Pakistan dans les années 1970. Ali Bhutto prend le pouvoir en 1972 suite à des élections démocratiques. Un an plus tard, une nouvelle Constitution est adoptée. Bhutto lance des nationalisations et une réforme agraire. Il interdit aux militaires d’avoir des postes décisionnaires politiques. Ce ne sont pas seulement les patrons des banques et des grandes entreprises nationalisées et des militaires qui s’opposent à Bhutto, c’est aussi les religieux qui n’acceptent pas le « socialisme » de celui-ci qui donnerai surtout, selon eux, trop de libertés aux femmes dans un pays musulman. Plusieurs partis se liguent contre Bhutto, mais il regagne en 1977 les deuxièmes élections du Pakistan. L’opposition conteste les résultats en déclenchant des émeutes. Finalement, le 5 juillet 1977, le général Zia Al Hagh impose la loi martiale au Pakistan. Deux ans plus tard, il interdit tous les partis et fait pendre, le 4 avril 1979, Ali Bhutto.

Le général Zia Al Hagh ne se contente pas de simples interdictions de partis politiques et de la pendaison de son prédécesseur laïc ; en s’appuyant sur les mollahs pakistanais, il impose les lois islamiques à la société en instaurant entre autres, la zakât (impôt islamique) et la charriah qui permet les châtiments publics comme les coups de fouet. Il interdit aux femmes d’apparaître tête nue à la télévision. Il instaure la peine de mort pour les blasphèmes contre Mahomet alors que jadis cela n’existait pas dans le droit pakistanais. Bref, il fonde la première république islamique de l’histoire, qui s’appelle encore de nos jours République islamique du Pakistan. Il ne s’arrêtera pas là. Quand, le 27 avril 1978, deux partis proches de l’Union soviétique instaurent une « république démocratique populaire » en Afghanistan par un autre coup d’État que les partis communistes prosoviétiques qualifiaient de « révolution », le général Zia Al Hagh prend le soin de transformer le Pakistan en base arrière de formation et d’armement de militants islamiques qui seront connus plus tard sous le nom de Taliban (étudiants en théologie islamique). Il ne sera pas seul dans cette tâche, l’argent saoudien, qatari et d’autres émirats du Golfe coulera à flot. L’invasion de l’Afghanistan par les Soviétiques, qui commence le 24 décembre 1979, renforce la politique de soutien financier et militaire des Talibans.

Est-ce que le général Zia Al Hagh aurait pu réussir son coup d’État sans le soutien des pays occidentaux et en particulier les États-Unis ? Est-ce que les Talibans afghans auraient pu prendre le pouvoir en Afghanistan entre 1996 et 2001 pour saigner encore plus les populations après tant d’années de guerre ? Une réponse claire est donnée en avril 2009 par Hillary Clinton, alors secrétaire d’État, s’exprimant devant le sénat américain : « Nous avons en quelque sorte une histoire d’entrée et de sortie du Pakistan. Laissez nous rappeler que ceux contre qui nous menons une guerre aujourd’hui étaient payés par nous-mêmes. Nous les avons aidés, il y a trente ans, car à cette époque nous nous battions contre l’Union soviétique. Elle avait envahi l’Afghanistan. Nous ne voulions pas qu’elle contrôle toute l’Asie centrale. Nous avons conclu à cette époque-là qu’il fallait faire quelque chose. Le président Reagan et le Congrès à majorité démocrate se sont donné la main pour utiliser l’ISI [NDLR : les services secrets pakistanais], l’armée pakistanaise, les modjahédin [NDLR : ici les Talibans, mais littéralement ceux qui font le djihad] et l’Arabie saoudite et son islam wahhabi pour que nous puissions faire échec à l’Union soviétique. Les Russes ont perdu des milliards de dollars et l’Union soviétique s’est effondrée. Ce n’était donc pas un mauvais investissement… »

L’islam politique apparaît donc au Pakistan et en Afghanistan pour que les Américains puissent vaincre les Soviétiques. Mais il y a un autre événement majeur qui renforce l’islam politique presque au même moment, c’est la révolution iranienne qui commence en 1978 et aboutit un an plus tard par le renversement du régime du chah (roi en iranien) et met fin à plus de deux mille cinq cents ans de royauté en Iran. Ici l’interventionnisme des États occidentaux est beaucoup plus subtile, mais leur but est identique : renforcer l’islam politique contre les Soviétiques. De larges couches de populations descendent dans les rues partout en Iran. Le chah les réprime. Plusieurs dizaines de milliers de manifestants sont morts. Le remplacement de plusieurs premiers ministres par le chah ne change rien. Les manifestations continuent par des millions de gens, surtout à Téhéran, qui compte jusqu’à 4 millions de participants à chaque fois. Les slogans sont restés longtemps pendant la révolution les mêmes : « Mort au Chah et vive la liberté. » Les manifestations ne suffisent pas. D’importants mouvements de grèves ouvrières sont déclenchés et le jour où la grève générale illimitée des ouvriers pétroliers commence, qui met fin à la principale source des revenus du pays, le chah lui-même sent sa fin. Il viendra dire qu’il a entendu la voix de la révolution. Il promettra aux journalistes étrangers que les libertés politiques seront aussi larges en Iran qu’en France. Mais plus personne ne le croit. Les gens dans les quartiers et les ouvriers dans les usines commencent à s’organiser dans les shoras ou les conseils. Ces conseils ont d’abord pris la forme des comités de grève dans les usines et ateliers. Les quartiers et usines apprennent à s’autogérer et subvenir à leurs besoins dans une situation de crise. Cela ne remplit toutefois pas un grand vide, celui d’une alternative politique après le renversement du régime du chah. Car ce dernier avait interdit tous partis et groupes politiques indépendants d’opposition, surtout après le coup d’État de 1953 fomenté par la CIA contre le gouvernement nationaliste de Mossadegh. L’opposition est très hétéroclite. Elle comprend aussi des mollahs et en particulier un ayatollah qui s’appelle Khomeiny, relégué en Irak par le chah en 1965 alors qu’il s’opposait à ses réformes agraires ou l’octroi du droit de vote aux femmes. Les mollahs surfent sur l’inexistence de groupes politiques organisés en proposant aux populations leur vaste réseau de lieux de culte, en particulier les mosquées. Les répressions sauvages de l’armée du chah s’arrêtent soudain avant même que le régime du chah soit renversé par une insurrection armée populaire qui n’a duré que deux jours, les 10 et 11 février 1979. Pourquoi les répressions militaires des manifestants s’arrêtent avant la fin définitive du régime du chah ? Que s’est-il passé ?

Le régime du chah était une véritable marionnette qui exécutait presque à la lettre les politiques occidentaux et surtout américaines en Iran et dans la région. Les tortionnaires de la Savak (la police politique) du chah étaient formés par leurs collègues israéliens. Les Américains utilisaient le chah, nationaliste comme tout bon roi, contre les autres pays de la région pour la plupart Arabes. Le chah était fier d’être le gendarme de la région. Il prenait un plaisir sans fin d’appeler l’Iran, « l’îlot de la stabilité ». Mais ni les Américains ni les autres pays occidentaux qui ont eu et ont toujours des intérêts économiques énormes dans cette région du monde ne soutiendraient sans condition leur pion au détriment de ceux-ci.

Le 8 janvier 1979, un mois avant le renversement du régime du chah, les agences de presse publient une dépêche sur une conférence qui a eu lieu en Guadeloupe. Jimmy Carter, président américain, James Callaghan, Premier ministre anglais, Helmut Schmidt, chancelier allemand, et Valéry Giscard d’Estaing, président français, étaient les convives de cette conférence. Ils devaient discuter des événements d’Iran, du Cambodge, d’Afrique du Sud, d’Afghanistan, de Turquie et de l’influence de l’Union soviétique dans le Golfe persique.

Jimmy Carter dira plus tard : « Je me suis aperçu que les trois autres dirigeants ne soutiennent plus le chah… ils disaient que le chah devrait partir le plus tôt possible. » Giscard d’Estaing dira aussi : « James Callaghan a fait une analyse réaliste de la situation en disant que le chah est fini. »

Deux jours avant la conférence de Guadeloupe, les Américains envoient un général, Robert Huyser. Il restera un mois en Iran mais ne rencontrera qu’une fois le chah. Le reste du temps, ils s’entretiendra avec les généraux de l’armée du chah pour les informer que, désormais, ils ne devaient plus réprimer les manifestants, sinon ils ne recevraient plus aucune pièce ni de munitions, sachant que toute l’armée du chah était formée et équipée par les Américains.

Pour sa part, Valéry Giscard d’Estaing avait envoyé Michel Poniatowski en Iran pour avoir une idée plus précise de la situation. Il a aussi un rapport que Sadegh Ghotbzadeh avait envoyé à l’Élysée. Ghotbzadeh était un proche collaborateur de Khomeiny. Ce dernier était bien d’accord pour que l’élysée reçoive le rapport. Ce rapport est envoyé une semaine avant la conférence de Guadeloupe et répond à une question de l’Élysée : en cas de victoire, quelles politiques choisira l’ayatollah Khomeiny ? Un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères français dira que Giscard d’Estaing était tellement content du rapport de Ghotbzadeh qu’il proposera à Carter de discuter immédiatement avec l’ayatollah Khomeiny.

Et le chah écrit lui-même dans ses mémoires : « Plusieurs semaines avant la conférence de Guadeloupe, l’on m’a mis la pression pour partir d’Iran… Je crois que la France et l’Allemagne ont accepté la proposition des États-Unis et de l’Angleterre pour que je sois expulsé d’Iran. La conférence de Guadeloupe était le “Yalta du Moyen-Orient” sans l’Union soviétique… » Pour une fois, le chah avait raison. Les principales puissances occidentales ont accéléré le processus de son départ en aidant les religieux islamiques prendre le pouvoir, car elles craignaient la radicalisation de la révolution et surtout la période postrévolutionnaire. Personne d’autre ne pouvait mieux étouffer la réalisation des revendications révolutionnaires que le clergé iranien ayant pris de fait le leadership du mouvement.

Ainsi la deuxième république islamique a été créée, et c’est elle qui existe aussi de nos jour : la République islamique d’Iran.

Mais cette seconde république islamique ne sera pas comme la première, qui restera dans les limites que ses pourvoyeurs avaient tracées. Non seulement elle commencera à réprimer toute opposition sérieuse à son instauration, mais en plus elle décidera d’« exporter la révolution islamique » partout, selon les dires explicites de Khomeiny, pour former l’« oumma » islamique que l’on peut vaguement traduire par communauté des musulmans. Les mollahs iraniens iront encore plus loin et diront que l’Iran est « l’oumm al ghora » de tous les pays musulmans, c’est-à-dire la mère de tous les pays musulmans ! Khomeiny décrètera aussi que l’État d’Israël doit disparaître et cela non pas à cause du problème palestinien, mais surtout parce que, pour lui, Israël, un État confessionnel comme le sien, occupe la seconde Mecque des musulmans, qui est Jérusalem et sa fameuse mosquée. Toutes ces prétentions ne plaisent guère aux autre pays islamisés comme l’Arabie saoudite. Car l’Iran des mollahs est à forte majorité chiite, alors que les autres sont sunnites. Et pour le wahhabisme saoudien les chiites sont encore plus mécréants que tous les autres mécréants qui pourraient être les juifs ou les chrétiens.

La République islamique de Khomeiny, qui s’appuyait à ces débuts sur un soutien populaire assez fort, bien que par défaut, trace sa voie et va de l’avant. La guerre que déclenche Saddam Hussein en septembre 1980, pour durer pendant huit longues années, devient une occasion en or pour les mollahs pour stabiliser leur régime et d’étouffer sans peine toutes les revendications populaires postrévolutionnaires. Les prétentions des mollahs iraniens à former la « communauté des musulmans » en exportant la révolution islamique sont un véritable fer de lance pour réveiller toutes les forces réactionnaires de la région qui commencent à considérer l’islam comme un moyen qui pourrait changer les choses en leur faveur. Elles n’auront pas beaucoup de mal à recruter des masses considérables de militants qui ont été privées justement pendant des dizaines d’années d’instructions et d’éducation à cause des régimes politiques pourris jusqu’à la moelle. Des gens à qui les moyens d’acquérir une conscience politique moderne ont été refusés par des dictateurs comme les généraux pakistanais, les rois saoudiens, les émirs du Golfe et même des présidents de républiques comme Saddam Hussein en Irak, Assad en Syrie, Moubarak en Egypte, Ben Ali en Tunisie et Kadhafi en Libye. La raison politique pour laquelle les populations restent assez inertes quand les puissances « modernes » renversent leurs gouvernements pour certains de ces pays comme l’Afghanistan, l’Irak et la Libye à coup de bombes les plus sophistiqués ou remplacent leurs dictateurs pour d’autres comme en égypte est aussi à rechercher dans cette vérité de non-formation de conscience politique et de se fier aux forces les plus obscurantistes. L’on parle beaucoup de ces soi-disant jeunes musulmans qui rejoignent les groupes sanguinaires depuis les pays européens, mais l’armée de l’État islamique compte plusieurs dizaines de milliers d’autres qui y ont adhéré sur place.

Lorsque les États-Unis ont attaqué l’Irak en 2003, le seul État qui a profité le plus de la situation ne fut que la République islamique d’Iran. Elle a réussi à placer ses pions chiites au sein du « nouveau » gouvernement irakien qui, à son tour, a commencé à réprimer les populations sunnites. Car, pour ce gouvernement, comme en Iran, les chiites sont majoritaires et doivent décider de tout. L’Iran des mollahs a pu ainsi renforcer ses ambitions expansionnistes en Irak grâce à l’attaque et l’envahissement de ce pays par les États-Unis. Cela paraît paradoxal, mais c’est la réalité.

Nader Teyf
Groupe Henry-Poulaille de la Fédération anarchiste


À suivre…
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede vroum le Jeu 12 Mar 2015 10:57

De la nécessité de combattre l’islam politique (2e partie)

http://www.monde-libertaire.fr/atheisme/17624-de-la-necessite-de-combattre-lislam-politique-2e-partie

L’islam politique de ces derniers temps a pris des allures confessionnelles très inquiétantes. Les mollahs iraniens financent les groupes islamiques chiites comme le Hezbollah libanais, qui est un véritable État dans l’État au Liban, les Houthis au Yémen, des groupes chiites au Bahreïn, une pléthore de milices chiites en Irak, etc. Ils soutiennent le maintien du régime d’Assad en Syrie, qui est leur allié stratégique pour sa proximité à Israël. Ce n’est donc pas étonnant d’entendre un haut gradé des Pasdaran de la Révolution islamique iranien dire : la profondeur de notre défense stratégique est la Méditerranée.

Face aux mollahs chiites qui veulent toujours constituer l’« oumma » à condition qu’elle soit sous leur direction, il y a aujourd’hui une multitude de groupes islamiques salafistes qui veulent faire la même chose mais à leurs bottes avec à leur tête l’État islamique (l’ex-Daech) ou Al Qaïda qui ont été financés non seulement avec l’argent saoudien, qatari ou plus récemment turc, mais aussi les complicités occidentales qui continuent encore. Personne n’a oublié que Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères français soutenait encore ouvertement en décembre 2012 un groupe islamique qui s’appelle le Front Al Nosra et qui se bat contre le régime d’Assad. Par contre ce front est ni plus ni moins que la branche d’Al Quaïda en Syrie.

Il faut aussi préciser que les différences entre les chiites et sunnites concernent surtout les problèmes de succession de Mahomet, par contre, s’agissant de la charriah, leurs clivages sont négligeables. En Iran chiite, les condamnations à la mort s’appliquent par pendaison, alors qu’en Arabie saoudite sunnite, on coupe les têtes au sabre. En Iran chiite, les mollahs ont inventé des machines pour couper les doigts ou les pieds de condamnés, alors que, peut-être, en Arabie saoudite sunnite on le fait avec des couteaux mal aiguisés ! Sinon, en Iran chiite comme en Arabie saoudite, les femmes sont obligées de porter le hijab, elles n’ont pas le droit de se marier sans accord de leur père ou frère, la polygynie est autorisée, l’alcool est prohibé, des arts comme le chant des femmes ou la danse sont interdits, etc.

Il sera trop simple de dire que l’essor des groupes islamiques, qu’ils soient à la tête des États comme en Iran et même en Turquie ou qu’ils soient dans les champs de bataille comme en Irak, en Syrie ou en Libye, est dû seulement aux politiques occidentales ou bien à la non-conscientisation des masses populaires de ces pays à cause des dictatures. Des groupes politiques qui ont existé ou existent encore dans ces pays portent aussi une lourde responsabilité. Dans les pays à majorité musulmane comme l’Iran, l’Irak, l’Égypte et même la Syrie, il y avait des partis communistes assez importants en forces militantes. L’histoire montre qu’ils n’ont jamais voulu mener une politique indépendante car, d’une part, ils ont été trop inféodés au grand frère « soviétique », qui ne pensait qu’à ces propres intérêts économiques et géopolitiques, et, pour une autre part par leurs blocages idéologiques. Quelques exemples historiques sur l’Iran pourraient peut-être aider à éclaircir ce propos. Le clergé chiite en Iran a eu un rôle assez néfaste et déjà rétrograde dans les événements de 1905 à 1911 qui sont connus sous le nom de la révolution constitutionnaliste. Au cours de cette révolution les gens ont pris part aux luttes contre la cherté de la vie, mais ils demandaient aussi plus d’équité en exigeant un parlement ou bien un ministère de la Justice. Une figure importante du clergé est un mollah qui s’appelle Cheikh Fazlollah Nouri. Il s’oppose ouvertement aux libertés que les gens veulent conquérir en disant que « la liberté en islam est une forme d’apostasie ». D’autres religieux chiites feront tout leur possible pour que, s’il y a ministère de la Justice, les lois soient fondées sur la charia islamique.

Le parti communiste d’Iran fut fondé en juin 1920 par des acteurs politiques comme Heydar Amou Oghli qui faisait partie des dirigeants de la révolution constitutionnaliste. C’est un parti qui est dans la lignée des partis communistes pro-bolcheviks. Cela n’empêche pas un autre dirigeant de ce parti, Avtis Soltanzadeh, d’écrire ceci en 1922 : « Les théories du califat ou de la hiérarchie cléricale mais aussi du panislamisme sont certes profondément réactionnaires. Mais ces théories mobilisent les couches inférieures musulmanes contre le capitalisme occidental et au premier degré contre la domination britannique, c’est pourquoi elles jouent relativement un rôle révolutionnaire. Car elles accélèrent la désagrégation du capitalisme mondial et affaiblissent les bases de la domination londonienne. » Soltanzadeh écrit ces lignes alors qu’il est considéré comme un dirigeant « gauchiste » du PCI ! Il participera au deuxième congrès du Komintern et se fera élire dans sa commission exécutive. Il fera aussi partie des douze membres sur quinze, du comité central du PCI qui seront exclus pour leurs désaccords avec les autorités soviétiques et du parti communiste d’Azerbaïdjan. Il critiquera les politiques soviétiques sur l’Iran en janvier 1922 mais restera à l’Institut bancaire soviétique jusqu’en 1927. L’Union soviétique de Staline dissoudra le parti communiste d’Iran en 1932. Staline accusera Soltanzadeh de positions antiléninistes et le fera exécuter le 16 juillet 1938 pour « espionnage au profit de l’Allemagne » !

Un second parti communiste, qui prendra le nom du parti Toudeh d’Iran, sera créé en 1941. C’est un parti encore plus prosoviétique que le premier. Lorsque le gouvernement nationaliste de Mossadegh nationalise le pétrole, le parti Toudeh (parti des masses) a des désaccords avec lui car peu de part de la manne pétrolière est prévue pour l’Union soviétique. Le parti Toudeh, seul parti de gauche de l’époque, dispose d’un réseau de militants considérables. Il a une organisation militaire secrète constituée de soldats et de nombreux officiers au sein des armées, mais il ne sera pas assez réactif contre le coup d’État de la CIA contre Mossadegh qui fera tomber son gouvernement et revenir le schah qui avait fui le pays. Le parti Toudeh sera de fait, à l’époque, sur la même ligne que le clergé chiite contre le gouvernement nationaliste de Mossadegh, un clergé dirigé par un ayatollah s’appelant Kachani.

Le parti Toudeh, qui a fêté ses soixante-quatorze ans en octobre 2015, défendra le régime des mollahs jusqu’en 1983 alors qu’ils ont commencé la répression de toutes les oppositions quelques mois après la chute du schah en février 1979. L’opposition du parti Toudeh contre la République islamique commence au moment où elle en finit avec les autres et vient le taper lui aussi. Mais pour quelle raison le parti Toudeh a-t-il soutenu pendant plusieurs années le régime des mollahs ? Parce que, selon ce parti, la République islamique d’Iran est « anti-impérialiste » et l’on pourra l’aider à cheminer vers le socialisme par la voie de croissance non capitaliste ! Étrange similitude idéologique entre cette position et celle de Soltanzadeh cinquante-sept ans plus tôt, n’est-ce pas ?

L’on a essayé de voir que le problème concernant l’islam n’est pas seulement un problème de savoir si cette religion est réformable ou actualisable. Il s’agit d’un problème politique qu’il faut tâcher de résoudre. L’islam comme toutes les autres religions, surtout monothéistes, n’est pas réformable. Il est complètement impensable d’attendre un islam des Lumières. Car les dogmes religieux ne se discutent pas. Le Coran pour l’islam est la parole de Dieu (Allah) figée à jamais. Le christianisme n’a pas plus évolué que l’islam ou le judaïsme. Les changements sociaux et sociétaux se sont imposés au christianisme par de longues années de luttes séculaires. Sans séparer la sphère publique et les États de la religion, quelle qu’elle soit, aussi bien en France qu’en Irak, qu’en Iran, qu’en Arabie Saoudite, etc. Aucune amélioration n’est envisageable. Ce ne sont pas que des États islamiques comme ceux d’Iran ou d’Arabie Saoudite qui soutiennent l’islam politique, ce sont aussi des États prétendument laïcs comme ceux de l’Occident qui ont soutenu l’islam politique dans le cadre de la « realpolitik » et de l’« ennemi de mon ennemi est mon ami ». C’est donc contre l’islam politique, sous toutes ces formes confessionnelles, qu’il faut concentrer les efforts. Mais comment ?

Nous avons vu que les partis, souvent nationalistes ou marxistes, dans les pays à majorité musulmane ont été mis en faillite par leurs propres politiques et idéologies, sans parler de répression dont ils étaient l’objet par les gouvernements ou les interventions des puissances mondiales. Toutefois les populations de ces pays n’ont aucune confiance en ces partis, non seulement à cause de leur faillite nationale mais aussi à cause de tout ce qui s’est passé dans les pays de l’ex-bloc de l’Est. C’est une des raisons pour lesquelles elles se tournent encore vers les groupes islamiques dans l’espoir que leur quotidien changerait. Et ce n’est pas fini. Arazbeyk Maldaïev, directeur de la commission d’État aux Affaires religieuses du Kirghizstan, a dit ceci récemment : « Les dangers de l’essor des groupes extrémistes se multiplient en Kirghizstan. » Il a essayé d’assurer les journalistes que les Taliban ou Al-Qaïda ne peuvent pas intervenir en Kirghizstan. Ces propos recoupent ceux dans une autre ex-république soviétique : le Tadjikistan. Le journal tadjik Emrooz News a relaté le fait que plus de 300 Tadjiks sont allés en Irak et en Syrie combattre dans les rangs de l’État islamique (ex-Daech). Ce journal a dévoilé aussi que l’État islamique (ex-Daech) a envoyé 70 millions de dollars pour le djihad dans une vallée du Tadjikistan, la Forghaneh. Cet argent aurait été envoyé avec un groupe de paramilitaires composés de 100 personnes qui dépendent de l’État islamique (ex-Daech), un groupe installé à la frontière afghano-tadjik.

Malgré ce tableau obscur qui est la réalité des pays dits musulmans, de l’Afrique du Nord jusqu’à la Chine et ses Ouïgours, l’espoir existe que les choses changent dans le sens de l’Histoire pour la liberté et l’égalité véritables. « Le printemps arabe » a annoncé à la face du monde l’existence des groupes libertaires aussi bien en Égypte qu’en Tunisie. Ce sont des groupes qui ont de longs chemins à parcourir certes, mais ce sont aussi des groupes qui n’ont pas existé auparavant. Les Kurdes du Rojava, qui viennent de libérer la ville de Kobané après plusieurs mois de combats acharnés, sont un autre exemple de l’espoir que l’on peut avoir dans une partie de cette région du monde, bien que beaucoup d’anarchistes critiquent à juste titre le « confédéralisme démocratique » développé par Ocalan ou le passé de celui-ci. En Iran, après presque quatre décennies de règne néfaste islamique, des individus libertaires et de tout petits groupes d’anarchistes commencent à militer dans des conditions extrêmement difficiles et dans la clandestinité.

Alors que, jusqu’à la chute du régime du schah, les livres critiquant l’islam se comptaient sur les doigts d’une main et étaient interdits par le schah lui-même, une bibliothèque assez fournie de ce genre de textes en persan est aujourd’hui sur Internet ou se vend sous le manteau, souvent sous forme de polycopiés. La traduction de quelques titres de livres pourrait être assez révélatrice… Et l’Homme créa Dieu, séparation de la politique de la religion, critique du Coran, critique des lois juridiques, politiques et économiques de l’islam, la liberté est de critiquer l’islam, Les chansons anti-religieuses, Voltaire, philosophe antireligieux, analyse rationnelle du droit, de la loi et de la justice en islam, testament de Dieu, le Coran, paroles de Mahomet, le Coran, sans aucun message pour nous, etc.

Il est donc évident que combattre l’islam politique, au pouvoir ou dans les champs de bataille, est une nécessité de notre époque. Nous avons donc affaire à une question politique qui doit être prise en considération. Soutenir les luttes qui sont menées indépendamment des politiques des États, petits ou grands, puissants ou faibles, a toute son importance. Sinon il y a eu des caricatures avant Charlie Hebdo et il y en aura d’autres, même si ce journal cesse d’exister. Le pape, les ayatollahs chiites, les muftis sunnites ou les rabbins doivent un jour ou l’autre apprendre, si possible, à respecter la liberté d’expression des caricaturistes, des auteurs ou de simples gens qui désirent voir, lire ou s’instruire car les athées n’ont jamais restreint ou pire encore tué des personnes qui déversent encore et encore leurs idioties religieuses dans les églises, mosquées, synagogues ou temples.

La lutte contre l’islam politique est donc une lutte qui doit être menée parallèlement, à celle contre la religion elle-même, sans tomber dans le piège des termes un peu fourre-tout comme islamophobie. Les médias de la République islamique d’Iran ne cessent de qualifier d’islamophobe la nouvelle caricature de Mahomet dans Charlie Hebdo tout en accolant ce mot à musulmanophobe. Combattre l’islam politique nécessite une alternative politique. Il ne suffira pas de proposer l’autogestion à cor et à cris. Il ne suffira pas non plus de se rassembler autour de slogans qui paraissent, au premier regard, assez mobilisateurs comme « Je suis Charlie ». L’émotion passée, nous avons bien constaté que beaucoup de forces qui ont brandi ces trois mots n’étaient absolument pas fréquentables politiquement, alors que beaucoup d’autres qui ont refusé de les porter étaient de véritables défenseurs des libertés et de la liberté d’expression en particulier, et vice versa. Les athées et les anarchistes ne sont pas contre les musulmans, elles et ils ne sont pas par conséquent musulmanophobes. Elles et ils sont contre les religions islamiques, chrétiennes, juives et toute autre religion qui sont les formes de soumission et d’aliénation les plus flagrantes et inacceptables. C’est pourquoi des termes comme islamophobie prêtent souvent à confusion devraient être évités. Le chemin sera long dans la lutte contre l’islam politique, mais il est tout ouvert devant nous !

Nader Teyf
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede Emma le Mer 22 Avr 2015 21:21

Bonjour,

je voulais savoir quels :gun: adeptes pratiquent une "sexualité de groupe en mangeant des fœtus pilés" et, pour continuer dans le gore, si tu as entendu parler de religion qui déculpabilise les :gun: pédocriminels ?

Toutes les infos que tu as la-dessus m'intéressent vu les textes que tu post. Mais quand même pas trop de détails s'il te plaît. Juste l'essentiel. :^^:

Un autre point de vue qui m'intéresse est celui que tu as sur les guérisseurs qui utilisent ce qui est communément appelé et pour ne pas trop heurter 'le magnétisme" (prière et envoi d'amour. On en connaît tous un et "ça" marche) ? Et aussi que penses-tu de la médecine qui utilise ce qui est communément appelé et pour ne pas trop heurter "l'énergie vitale", le chi ?

(Youtube : le chi, l'homme qui parle avec les plantes, laila de monte etc.)

En troisième lieu, quelle est la position anarchiste concernant les personnalités multiples comme :slt: Byllie Milligan :slt: , Margot, Helen (de Helen and Ruth) ? Quelle est la position anarchiste concernant l'intuition et la constance de la bienveillance de certains et cette fameuse électricité (qui traverse par exemple les solidaires) dont parle apparemment certains anarchistes ?

Voilà. En vrac et avec appétit. Je suis curieuse de savoir tout ça (sauf la 1ère question qui permet, disons, une sorte de "solidarité de classe").

Merci d'avance et merci déjà pour tes textes qui font du bien à l'esprit. :clap:
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede vroum le Mer 22 Avr 2015 21:46

Bonjour Emma

En lisant tes références, je sens que tu est très versé dans la spiritualité

Pour faire court, je pense que le magnétisme, les prières, la communication avec les morts, avec les plantes ou les animaux décédés, le chi et compagnie sont des abstractions issues de l'imagination humaine et sont pratiquées et promues par des dangereux charlatans.

L'anarchisme combat les religions mais aussi toutes les formes d'obscurantisme dont font partie les théories fantaisistes surnaturelles et mystiques.

Sur les personnalités multiples, je pense que cela relève de la psychiatrie et ce n'est pas un domaine où je suis très savant. Je t'invite à lire les topics consacrés à la psychatrie et l'anarchisme en utilisant le moteur de recherche du forum.
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede vroum le Mer 22 Avr 2015 22:51

L’athéisme… et puis après ?

http://www.monde-libertaire.fr/atheisme/17698-latheisme-et-puis-apres#comment-1253

Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Et qui possède la bonne réponse à cette question ? Les athées, en France en particulier, fondent leur non-croyance, ou croyance en l'inexistence de Dieu, sur la base d'une définition de Dieu qui, grosso modo, est celle enseignée par le Vatican. Les croyants ne suivent pas tous cette « bonne parole ». Tous les dieux sont-ils nuisibles ?

La non-croyance est ni plus ni moins légitime que la croyance en un dieu. La foi relève de l'irrationnel par définition, mais sommes-nous tous rationnels vingt-quatre heures par jour ? Dieu est une hypothèse, si elle est indémontrable, son contraire non plus... Excepté si l'on se réfère à des théologies selon lesquelles Dieu est à peu près synonyme de « vie » : sa contestation n'a plus d'intérêt dans ce cas. Il reste que, si on aime la vie (l'existence si vous préférez), on n'aime pas forcément l'idée de devoir la quitter un jour. C'est alors que la proposition d'un paradis post mortem est une trouvaille vraiment idéale... et elle a toujours beaucoup de succès. On a d'ailleurs vu nombre d'athées céder à l'attrait à la fin de leur vie.

En quoi le fait de croire en Dieu pose-t-il un problème ? Si cela n'engage que le croyant : suivre tel ou tel régime alimentaire, porter tel ou tel vêtement, telle ou telle coiffure, etc., pour aller au paradis ? Je dirais : « Faites-le vous-même ! Mais n'y obligez pas les autres... » Tout cela est encore assez anodin, et relève, en fait, de la superstition. Le problème est qu'il n'y a pas de dieu sans religion... Tolstoï, chrétien et anarchiste, le regrettait. Pour lui, on ne pouvait croire en Dieu que malgré l'église. Tous les croyants n'ont pas tant de recul par rapport à leur engagement. Maltraiter les femmes par exemple, les considérer comme une espèce inférieure, est une valeur commune a beaucoup de religions. En cela, elles sont sans aucun doute à l'origine des inégalités économiques et sociales qui survivent encore aujourd'hui un peu partout. Nombre de religions sont prêtes à décréter des « guerres saintes »... A-t-on encore besoin d'être athée pour contester les inégalités hommes-femmes ou les guerres dans lesquelles les religions ne sont le plus souvent que des prétextes pour encourager les troupes, les vraies motivations étant liées à des richesses naturelles privatisées ? Ne serait-ce pas en rester à de vieilles idées, géniales en leur temps, mais un peu simplistes aujourd'hui ?

Du côté des catholiques, les papes se suivent et ne sont plus guère écoutés de la plupart des croyants pour ce qui concerne les incursions archaïques dans la vie privée de tous. Le souci persistant est bien leur pouvoir de nuisance par l'intermédiaire de leur représentation nombreuse et pas toujours affichée d'emblée parmi le personnel politique à tous les postes de pouvoir possibles... Les crèches de Noël dans les lieux publics, les rapports des commissions de « bioéthique », les difficultés à « mourir dans la dignité », etc., montrent l'importance du pouvoir clérical en France.

Pour revenir à la question de l'existence ou non de Dieu, un anarchiste est aujourd'hui en droit de trouver bien faibles Les Douze Preuves de l'inexistence de Dieu de Sébastien Faure et y préférer par exemple les ouvrages de Bertrand Russell et de Michel Onfray 1. « Dieu existe », « Dieu n'existe pas »... Des affirmations qui peuvent engendrer de longues discussions, éventuellement même plaisantes, si l'on veut... Et après ? Tout cela est bien éloigné de la réalité concrète, des inégalités, du chômage, des dégradations environnementales, etc. Et puis, enfin, pour dire les choses rapidement, ce que nous apprennent des siècles d'histoire est qu'il ne faut surtout pas faire confiance aux religions pour avoir la paix civile. Et nous voyons bien, aujourd'hui, que ce n'est pas fini.

De fait, le message athée est inaudible pour un croyant. Comment admettre qu'on s'est toujours trompé ? C'est trop douloureux, il est plus confortable et surtout plus rassurant de rester dans ses certitudes et de croire que c'est l'autre qui est dans l'erreur. En outre, il est évident qu'aucun dictateur n'est capable de réduire des milliards de dissonances cognitives en claquant des doigts. A fortiori, les anarchistes, qui refusent les moyens autoritaires, n'y parviendront jamais. Et puis, encore une fois, l'être humain a le droit d'avoir des faiblesses et, ne serait-ce que de temps à autres, un besoin de « consolation ». Le réalisme est donc de constater une situation : la multiplicité des croyances, et de se demander comment faire avec.
En effet, pas un anarchiste ne peut projeter d'exterminer tous les croyants au lendemain du « grand soir ». Vivre en société, c'est faire des compromis, et pour ce qui est des croyances, la laïcité semble le moyen non seulement incontournable, mais dont la défense est de plus en plus nécessaire compte tenu du caractère belliqueux des religions, même quand elles se présentent comme chantres de la fraternité.

Nous vivons aujourd'hui dans un contexte de montée en puissance des radicalismes. En France, les catholiques pratiquants sont soumis à ce qui reste de prêtres en état d'exercer, et ce sont de plus en plus souvent des traditionalistes, des intégristes... Les musulmans, qui officiellement n'ont pas de clergé organisé, ont leurs extrémistes qui, eux, sont organisés, et de ce fait attirent vers eux nombre de personnes. Il est bien évident – qui ne l'a pas compris depuis le 7 janvier ? – que les temps sont de plus en plus durs pour la tolérance. L'humour lui-même n'est plus toléré.

Depuis des années les religieux et leurs « spécialistes de la laïcité » font un travail de communication pour redéfinir la laïcité comme un espace de tolérance pour toutes les religions, traitant ceux qui veulent maintenir la laïcité comme absence des religions dans le domaine public de passéistes, voire d'ignares. Cet espace de tolérance pour toutes les religions, c'est un espace de liberté pour les ennemis de la liberté et, en l'occurrence, nous le savons bien pour les plus radicaux d'entre eux, pour des politiciens post-fascistes dont ils sont le soutien.

Ce travail va aujourd'hui dans le sens d'une intervention de l'État pour promouvoir l'islam avec pour objectif explicite de le canaliser. C'est dans ce sens que certains veulent actuellement réformer la loi de 1905, afin d'autoriser le financement des cultes. De fait, le catholicisme est une secte qui est devenue une religion à partir du moment où l'empereur Constantin a estimé qu'elle pourrait lui être utile pour asseoir son pouvoir, et il lui a alors donné des moyens...

Cela nous promet un avenir pénible. Il faudra autre chose que « l'esprit du 11 janvier » pour ne pas en arriver là : une mobilisation ferme, laïque et antifasciste.

Le Furet

1. Sébastien Faure, Les Douze Preuves de l'inexistence de Dieu, éditions libertaires, 2008 ; Bertrand Russell, Pourquoi je ne suis pas chrétien, Lux éditeur, 2011 ; Michel Onfray, Traité d'athéologie, Grasset, 2005.
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Re: L’obscénité religieuse

Messagede Emma le Lun 27 Avr 2015 23:54

Bonjour Vroum,

merci pour ta réponse. Elle est chouette, elle me plaît.

Je la garde pour qu'elle me transforme bien que je sois un cas désespéré. :roll:

Mais j'aime bien ce que tu as dit.

Je te souhaite une belle vie remplie de luttes toutes gagnées ! :drapA:
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