de tagrawla le Lun 4 Juil 2011 17:37
Pour en finir avec la religion…
La crédulité a toujours été un bon filon à exploiter, et en ce moment, le marché est porteur. On peut observer quelques signes de ce retour en force du fait religieux :
– La théocratie américaine où l’on s’apprête à rétablir la théorie créationniste à l’école dans certains états, en remplacement de celle de l’évolution de Darwin ;
– La montée des fondamentalismes religieux musulmans, juifs ou chrétiens ;
– L’orgie médiatique autour de la mort de Jean-Paul II et la désignation de Ratzinger, « le grand inquisiteur », ultra-conservateur et proche de l’Opus Dei, comme nouveau pape ;
– Le marketing forcené des évangélistes (ils étaient 15 à 20 000 à sillonner les rues à la dernière coupe du monde de foot en Allemagne, comme pendant les Jeux olympiques d’Athènes) ;
– La résurgence des superstitions, des sectes et de l’occulte (rien qu’en France, « les arts divinatoires » génèrent un chiffre d'affaires de plus de 3,2 milliards d'euros, soit environ 15 millions de consultations pour environ 100 000 « professionnels »)…
Nous vivons donc dans un monde où l’irrationnel est la norme et où la très grande majorité de la population croit en dieu, en le définissant à la mesure de son ignorance.
Est-ce pour autant inéluctable ? Comment combattre quelque chose d’aussi abstrait ?
La politique et la philosophie supportent les arguments rationnels, la religion y est a priori hermétique puisqu’elle fonctionne avec sa propre logique. On peut d’ailleurs difficilement parler de logique religieuse puisqu’elle est hétérogène suivant les religions et qu’elle s’appuie sur l’auto-référence.
Pour dégager quelques pistes et éléments de réflexion, il convient d’analyser, sous l’aspect historique, social et humain, les conditions et les mécanismes qui ont favorisé le recul de la religiosité ou, au contraire, sa progression.
Il s’agit dans un premier temps d’identifier les mécanismes qui poussent l’individu vers la religion. deux catégories se distinguent :
- L’environnement social
L’évolution dans un environnement non laïc, avec une éducation religieuse et une pression sociale faite de traditions, de dogmes idéologico-politiques et d’ordre moral a toutes les chances d’aboutir à une religiosité forte, sauf en cas de rejet ou de révolte vis-à-vis de cet environnement. L’ignorance, le manque d’éducation, dont la pauvreté peut être la cause, est manifestement un facteur aggravant.
Ce qui a permis à la religion de se développer et de s’ancrer si profondément dans la société, c’est aussi et surtout la recherche d’un contrôle social via la morale religieuse, utilisé de tout temps par les gouvernements ou royautés… et qui est encore souhaité de nos jours, y compris par des non-religieux qui y voient l’opportunité d’un auto-flicage de la masse populaire. L’ordre moral, en somme, c’est un flic dans chaque tête, gratuitement. Nous avons tous une morale sous une forme plus ou moins différente, mais dont les caractéristiques essentielles se basent sur les usages viables de cohabitation en société (la non-violence, l’entraide, etc.) qui ont été souvent repris par les religions sous formes de commandements.
En ce qui concerne la solidarité, il est intéressant de citer l’exemple de sœur Emmanuelle affirmant qu’elle n’aurait jamais eu de démarche altruiste sans sa croyance en Dieu, et reconnaissant que les altruistes athées ont plus de mérite puisque c’est un choix désintéressé, ils n’achètent pas leur place au paradis. On peut faire de bonnes choses pour de mauvaises raisons…
- Les sentiments humains
Ce sont des sentiments que nous partageons tous, mais pas dans les mêmes proportions. En premier lieu, il y a évidemment la peur de la mort (la sienne et celle de ses proches). La conscience de sa finitude entraîne paradoxalement sa négation, puisque le soulagement est recherché et trouvé dans la spiritualité. La vie après la mort (ou la réincarnation) et les retrouvailles avec les proches disparus sont en effet des promesses communes à toutes les religions.
Je placerai ensuite les besoins de sens et d’humanisme : Le besoin de croire en quelque chose ou d’espérer et le besoin d’identité, de partager avec l’autre une culture commune… Bref, tout ce qui est de l’ordre du lien social, qui porte également en lui le besoin de reconnaissance.
On peut aussi évoquer la nécessité d’échapper à une réalité plutôt sordide et aux contraintes terrestres : en cela, la religion a beaucoup en commun avec une drogue qui apporterait sinon du plaisir, au moins du soulagement et de l’évasion.
Le sentiment d’impuissance face aux événements peut se traduire sous la forme d’un désir de contrôler ce qui semble incontrôlable : un trait commun à toute religion est la prière, ou les rituels d’offrandes, qui consistent finalement à essayer d’influencer Dieu (ou les dieux, les esprits etc.) pour obtenir satisfaction.
Tout cela participe de la volonté d’apporter des réponses simples aux problèmes complexes ou insolubles dans l’état actuel de la science, c’est une paresse intellectuelle, un endormissement de la raison permettant tous les raccourcis possibles, et qui est un autre pilier de la religion.
On pourrait également y voir une volonté inconsciente de ne pas être responsable de ses actes, de s’en remettre à Dieu, la hiérarchie absolue, qui serait le véritable maître de son destin. Le croyant nie son libre arbitre, Dieu étant seul juge, il nie donc sa liberté, infantilisé par un système de sanctions arbitraires du type bonus/malus (karma, paradis/enfer…).
Autre exemple de cette déresponsabilisation : l ’envie de nier son animalité a amené l’homme, à travers la plupart des religions, surtout monothéistes, à se considérer comme hiérarchiquement au-dessus des animaux, sous prétexte qu'il possède une âme et le droit divin de dominer la nature (cf. Genèse, 1, 28 : « …et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre. » ).
Le mépris ou la peur de l’autre me semble également une cause cachée, ce qui se manifeste notamment chez l’homme par la peur de la femme… ou de son désir envers la femme, symbole de tentation, d’impureté, de trahison et de bêtise dans la grande majorité les religions. Voici quelques extraits parmi des dizaines au choix dans les « livres sacrés » qui légitiment le patriarcat et le sexisme :
BIBLE (ANCIEN TESTAMENT) : GENÈSE, 3, 16
« Il dit à la femme : j'augmenterai la souffrance de tes grossesses, tu enfanteras avec douleur, et tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi. »
CORAN, SOURATE 4,VERSET 34
« Les hommes ont autorité sur les femmes, du fait qu'Allah a préféré certains d'entre vous à certains autres, et du fait que les hommes font dépense de leurs biens en faveur des femmes. Celles dont vous craignez l'indocilité, admonestez-les. Reléguez-les dans les lieux où elles couchent. Frappez-les. »
TALMUD :
Sois béni, Seigneur notre Dieu, Roi de l'Univers, qui ne m'as pas fait femme », une des prières que tout bon juif doit prononcer chaque matin.
Dans l’hindouisme, le sati est la pratique qui consiste à brûler vivante la veuve d’un mari défunt sur son bûcher. Même si elle n’est plus répandue, elle a encore cours aujourd’hui.
Un des textes fondamentaux du bouddhisme, le canon pali, exprime lui aussi sans ambiguïté cette misogynie : « Aussi le Bouddha ne cesse-t-il de mettre ses disciples en garde contre la séduction insidieuse exercée par la femme : “Il faut se méfier des femmes, leur recommande-t-il. Pour une qui est sage, il en est plus de mille qui sont folles et méchantes. La femme est plus secrète que le chemin où, dans l'eau, passe le poisson. Elle est féroce comme le brigand et rusée comme lui. Il est rare qu'elle dise la vérité : pour elle, la vérité est pareille au mensonge, le mensonge pareil à la vérité. Souvent j'ai conseillé aux disciples d'éviter les femmes.” »
La religion vient donc combler ces vides existentiels et atténuer ces peurs, elle se nourrit d’abord du vide de nos vies et s’attaque parfois à ce qu’il en reste : on connaît l’exemple de ces nonnes ou moines qui se coupent pratiquement de toute vie sociale, affective et sexuelle pour remplacer le tout par la foi en Dieu, on pourrait également citer celui du kamikaze qui se fait sauter pour la promesse d’une place au paradis avec soixante-dix vierges… il s’agirait d’ailleurs d’une « erreur » de traduction du coran puisqu’il faudrait lire « fruits blancs comme le cristal » au lieu de « vierges aux grands yeux », encore un possible exemple d’utilisation de la religion à des fins politiques.
La fanatisation est l’aboutissement logique du processus de révélation divine : Dieu étant au-dessus de tout, l’existence terrestre passe au second plan, tout juste perçue comme un chemin de croix, une épreuve divine ou une période transitoire douloureuse selon les religions. L’humanité est réduite à un troupeau de pécheurs égarés, mauvais par nature, incapable de se gérer sans berger et qui doit vivre dans la crainte de son créateur.
S’il y a de nombreux mécanismes communs aux religions, sectes, superstitions, etc., il est préférable de connaître les différentes catégories de religions et de croyants afin d’adapter son discours et les arguments : Que met-on dans le mot « Dieu » ?
– Animisme et chamanisme : ces conceptions attribuent à tous les éléments de la nature une âme ou une volonté. C’est une religion assez commune aux sociétés tribales, et qui semble être également la représentation du monde qu’auraient les enfants. Il est très probable qu’elle soit la première forme de religion de l’humanité, mais elle est devenue très marginale (Afrique, Océanie). En outre, cette forme de croyance ne semble pas être la plus dangereuse, on peut même y trouver l’avantage du respect de la nature qui lui est inhérent.
- Le polythéisme et le paganisme sont des conceptions finalement assez proches de la personnalité humaine, en ce sens que les dieux sont imaginés comme des personnages au caractère propre, aux champs d’action et aux aptitudes définis. L’anthropomorphisme caractérise les dieux de l’antiquité romaine, grecque, scandinave, égyptienne ou ceux de l’hindouisme qui sont décrits comme on raconterait maintenant les exploits de super-héros dans les comics et les films. L’influence de la nature, vestiges des croyances passées, est encore présente et les dieux sont souvent représentés sous une forme mi-humaine, mi-animale. Peut-on y voir une transition vers un anthropocentrisme plus exacerbé dont l’aboutissement est le monothéisme avec l’homme à l’image de Dieu ?
L’aspect manichéen est moins marqué que dans une religion monothéiste puisque les dogmes changent d’une divinité à une autre, les dieux peuvent rentrer en conflit entres eux et le croyant peut privilégier sa dévotion à un dieu auquel il s’identifie le mieux.
- Les religions orientales (bouddhisme, shintoïsme, taoïsme…) sont plus souvent décrites comme des philosophies sans dieu (ou panthéiste, voir animiste), l’absence de divinité n’empêchant pas les doctrines irrationnelles telles que la réincarnation, les esprits, etc.
- Enfin, la forme de religion que vous aurez toutes les chances de rencontrer, le monothéisme, qui est de loin la plus répandue sur terre, en premier lieu le christianisme et l’islamisme qui concernent la moitié de la population mondiale, comme en témoignent les statistiques suivantes :
Ces données sont tirées du tableau de David B. Barrett, Nations Unies, 1998. Le Britannica Book of the Year 1998 donne des chiffres similaires.
LA SUITE
http://www.subsociety.org/religion.php